Auteur/autrice : Notre Affaire à Tous

  • L’Affaire du Siècle saisit le Conseil d’État pour contrer un jugement inquiétant pour l’avenir de la justice climatique 

    Affaire du Siècle, communiqué de presse, 22 février 2024 – Le jugement du tribunal administratif de décembre 2023 donne raison aux associations de l’Affaire du Siècle. Et pourtant, le tribunal se refuse à mobiliser tous les outils à sa disposition pour obliger l’État à agir. Les associations s’inquiètent de cette décision qui donnerait un feu vert à une transition subie et non planifiée. C’est pourquoi elles se pourvoient en cassation ce jeudi 22 février 2024 devant la plus haute juridiction administrative française.

    Le 22 décembre dernier, le tribunal administratif de Paris a reconnu que l’État avait manqué à ses obligations. En effet, le juge reconnaît que l’État n’a pas respecté l’échéance de fin 2022 qui lui était fixée et que les baisses d’émissions constatées sont imputables à des facteurs extérieurs. Les associations rappellent par ailleurs que, depuis la décision de 2021, les puits de carbone se sont effondrés, le retard climatique pris par la France s’est donc au contraire accru et le préjudice écologique aggravé. 

    Les associations continuent à dénoncer haut et fort la carence de l’État dans la mise en place de mesures structurantes, comme l’exigeait pourtant le jugement de 2021. Les quelques mesures prises depuis par les autorités ont été de courte durée, et elles ont surtout pesé sur les Français les plus précaires sans avoir généré d’impacts positifs durables et réels sur la trajectoire climatique de la France. Ce constat a été rappelé par le Conseil d’État en mai 2023. Et pourtant, le tribunal refuse de mobiliser les outils à sa disposition pour forcer l’État à agir : à ce stade de la procédure, il ne demande aucune nouvelle mesure structurante et refuse de prononcer des astreintes (1). Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Oxfam France s’inquiètent de cette décision, qui risque de créer une jurisprudence dommageable pour l’avenir de la justice climatique, et décident donc de se pourvoir en cassation.

    Les dommages restant à réparer bien plus importants que ceux que le tribunal retient  

    D’abord, le juge intègre dans son bilan comptable évaluant la réparation du préjudice écologique les facteurs extérieurs à l’action de l’État. Comme le reconnaît le juge, la crise du Covid, la crise énergétique suite à la guerre en Ukraine et l’hiver 2022 particulièrement doux sont en grande majorité à l’origine de la récente baisse des émissions de la France et non des mesures de l’État. Pourtant le tribunal administratif ne retranche pas les 74% de baisse d’émissions qui sont issues de ces facteurs conjoncturels à son calcul du préjudice écologique à réparer (2).

    Ensuite, le calcul du retard climatique de la France opéré par le tribunal administratif occulte le secteur de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF). Pourtant de 2019 à 2022, entre 83 et 92 mégatonnes équivalent CO2 ont été émises en trop, par rapport à ce que les puits de carbone étaient en capacité de réguler,  en contradiction avec la Stratégie nationale bas-carbone.

    Les associations de l’Affaire du Siècle réaffirment aujourd’hui que la transition doit être planifiée, pour être juste socialement et s’opérer dans un État de droit, et ne saurait se résumer à des mesures de court-terme pour répondre à des crises conjoncturelles et pesant de manière disproportionnée sur les plus modestes. L’Affaire du Siècle se pourvoit en cassation face à une décision jugée inquiétante pour la justice climatique.

    Pour Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France : “Le gouvernement ne peut plus se permettre tant de paresse en matière de politique climatique : il doit respecter les objectifs de la France, sans exception de dernière minute, sans tour de passe-passe pour espérer afficher une bonne conduite de façade.”

    Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous : “L’inaction climatique est aussi un péril social : en refusant d’agir sérieusement sans attendre, le gouvernement condamne la France à agir à la dernière minute, quand il sera déjà beaucoup trop tard. Et ce seront les classes populaires qui en subiront les conséquences les plus violentes.”

    Pour Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France : “Si nous saisissons le Conseil d’État aujourd’hui c’est pour demander une nouvelle fois au tribunal de se donner véritablement les moyens de faire respecter son propre jugement de 2021. Celui-ci a été considéré comme historique au-delà des frontières françaises. Les attentes des 2,3 millions des Français.e.s qui ont signé la pétition de l’Affaire du Siècle sont grandes et ne retombent pas.”

    Contacts presse

    Greenpeace France : Kim Dallet – kdalletm@greenpeace.org
    Oxfam France : Marika Bekier – mbekier@oxfamfrance.org
    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll – justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Notes

    (1) L’Affaire du Siècle a réclamé une astreinte financière d’un milliard d’euros le 14 juin 2023 pour obliger l’Etat à agir.

    (2) L’Affaire du siècle rappelle que deux secteurs sont responsables des baisses d’émissions de la France entre 2021 et 2022 : le secteur du bâtiment et le secteur de l’industrie manufacturière et de la construction. Le rapport d’expertise versé au dossier en 2023 démontre que dans ces deux secteurs, les baisses d’émissions observées sont dues à 74% à des facteurs conjoncturels mentionnés ci-dessus. Par conséquent, 11,9 MtCO2e des baisses d’émissions constatées dans ces secteurs ne sont pas imputables à une quelconque action volontaire structurelle de l’État. Sur la même période, les autres secteurs – transport, agriculture, déchets, production d’énergie – ont vu leurs émissions soit stagner, soit augmenter.

  • Illégalité du projet de centre d’enfouissement de déchets : le Parlement européen juge recevable la pétition déposée par Tavignanu Vivu et déclenche la procédure d’urgence

    Illégalité du projet de centre d’enfouissement de déchets : le Parlement européen juge recevable la pétition déposée par Tavignanu Vivu et déclenche la procédure d’urgence

    Communiqué de presse, 20 février 2024 – A la suite de la validation du projet par le Conseil d’Etat en 2021, le collectif Tavignanu Vivu avait décidé de saisir le Parlement européen par pétition afin d’alerter sur l’illégalité du projet au regard de la législation européenne sur les déchets, l’eau, les habitats et la santé publique. En octobre 2023, la pétition a été examinée par le Parlement européen qui a alors décidé de déclencher la procédure d’urgence.

    Pour rappel, le collectif Tavignanu Vivu se bat depuis 2016 pour empêcher l’exploitation d’un centre d’enfouissement de déchets dans un méandre du fleuve Tavignanu, sur un terrain géologiquement instable. Le 21 avril 2021, le Conseil d’Etat a confirmé l’autorisation d’exploiter accordée à la société Oriente Environnement. 

    Le collectif Tavignanu Vivu a alors décidé d’agir sur le terrain des droits de la nature avec l’aide de Notre Affaire à Tous. Le 29 juillet 2021, le collectif Tavignanu Vivu, la fondation Umani et l’association Terres de lien Corsica – Terra di u cumunu ont proclamé la Déclaration des droits du fleuve Tavignanu. Cette Déclaration a depuis été soutenue par l’Assemblée de Corse, la ville de Bastia ainsi qu’ une trentaine de communes par la voie de motions et délibérations.

    Le collectif Tavignanu Vivu a ensuite entrepris d’agir à l’échelle européenne en saisissant le Parlement européen par pétition, afin d’alerter sur les illégalités et incohérences de l’autorisation du projet, en méconnaissance des normes européennes qui gouvernent le droit des déchets, le droit de l’eau, la protection de la biodiversité et la santé des populations.

    Après avoir examiné la pétition, la commission des pétitions a déclaré celle-ci recevable le 29 novembre 2023, ce qui confirme le caractère flagrant des manquements et incohérences de la procédure française, notamment eu égard aux obligations de respect de l’environnement incombant aux États.

    Un projet incompatible avec plusieurs directives européennes

    L’autorisation d’exploitation du centre d’enfouissement de déchets se heurte à de nombreux objectifs promus par l’Union européenne en matière de protection de l’environnement et de santé publique qui découlent du droit primaire. Il s’agit en particulier de la violation du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (« TFUE ») et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

    L’autorisation d’exploiter viole également le droit secondaire de l’Union européenne. Il s’agit en particulier (i) de la directive du 26 avril 1999 concernant la mise en décharge de déchets, (ii) de la directive-cadre du 19 novembre 2008 relative aux déchets, (iii) de la directive-cadre sur l’eau du 23 octobre 2000, (iv) de la directive “Habitats” du 21 mai 1992, (v) de la directive “Oiseaux” du 30 novembre 2009, (vi) de la directive du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets sur l’environnement et (vii) des objectifs de la Politique Agricole Commune et des recommandations de la Commission européenne en la matière.

    Un soutien politique unanime

    Plusieurs eurodéputés ont assisté à l’audition de Madame Marie-Dominique Loÿe, représentante du collectif Tavignanu Vivu, le 29 novembre 2023. Différents groupes politiques (Parti Populaire Européen, Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates au Parlement Européen, Renew/Renaissance, Verts/Alliance Libre Européenne, Conservateurs et réformistes) et des non-inscrits étaient représentés, et ont tous unanimement voté en faveur de la pétition.

    François Alfonsi, du groupe Les Verts, s’est ainsi exprimé : “On ne voit pas comment un tel projet peut être en ligne et compatible avec les directives que nous avons votées au sein de ce Parlement Européen. Il est manifestement dans un méandre du fleuve, à proximité immédiate des eaux. Il est dans un terrain géologiquement fragile et cela a été bien démontré par la pétitionnaire, en directive oiseaux, etc… Nous sommes dans une zone Natura 2000 […]”.

    La commission PETI qui reçoit les pétitions a même approuvé le déclenchement de la procédure d’urgence, les travaux pour construire le centre d’enfouissement pouvant  commencer dans des délais assez courts. Ce traitement en urgence permettra de recevoir une réponse de la Commission européenne  dans un délai de  trois mois. 

    Les suites attendues

    Le Parlement européen a demandé à la Commission européenne de mener une enquête préliminaire et de contacter les autorités nationales et régionales françaises. La Commission européenne a en principe trois mois, soit jusqu’au 29 février 2024, pour donner une réponse écrite. 

    Trois options sont alors envisagées :

    • Soit la Commission européenne considère qu’il y a eu une violation du droit de l’Union européenne et dans ce cas, un dialogue se mettra en place avec les autorités nationales et régionales pour réviser le projet.
    • Soit la Commission européenne considère qu’il n’y a pas eu violation du droit de l’Union européenne et dans ce cas, elle arrête la procédure, ce qui n’empêche pas le Parlement européen de poursuivre les investigations de son côté.
    • Soit la Commission européenne estime qu’il convient d’attendre l’issue de la procédure judiciaire en cours relative aux prescriptions du préfet. En effet, comme le demandait le juge, le préfet a pris un arrêté fixant les conditions d’exploitation de l’installation d’enfouissement. Cet arrêté a été contesté par la société Oriente Environnement qui porte le projet, estimant qu’il était trop strict et, dans son jugement du 18 novembre 2022, le tribunal administratif a annulé une partie de l’arrêté préfectoral. Le ministère de la transition écologique et l’association requérante ont fait appel de cette décision; l’affaire est actuellement pendante devant la cour administrative d’appel de Marseille.

    Pour Marie-Dominique Löye, membre du collectif Tavignanu Vivu : “Le collectif Tavignanu Vivu salue la décision de la Commission des pétitions du Parlement européen qui reconnaît le bien fondé de notre action. Le projet de centre d’enfouissement de déchets à cet endroit viole le droit européen, il menace gravement le fleuve Tavignanu faisant peser un risque insensé à l’environnement et à la santé des populations”.

    Pour Marine Yzquierdo, représentante de Notre Affaire à Tous qui accompagne le collectif depuis le lancement de la Déclaration des droits du Tavignanu en 2021 : “Le  Parlement européen envoie un signal fort en répondant  aux préoccupations légitimes du collectif Tavignanu Vivu face à ce projet incohérent avec le droit de l’Union européenne. Le combat pour la protection du fleuve Tavignanu prend désormais une autre dimension”.

    Le collectif Tavignanu Vivu appelle les citoyens et citoyennes à signer la pétition en ligne afin de faire davantage pression sur la Commission européenne. Celle-ci doit prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme au projet de centre d’enfouissement de déchets qui n’aurait pas dû être autorisé dans ces conditions par la justice française.

    La pétition est accessible sous ce lien. A noter que pour la signer, il est nécessaire de créer un compte (en bas à droite de la page), ce qui peut prendre quelques minutes.

    Contacts presse

    Tavignanu Vivu: Marie Dominique Löye – tavignanu.vivu@gmail.com

    Notre Affaire à Tous: Marine Yzquierdo – marine.yzquierdo@notreaffaireatous.org

  • Webinaires de 2020

    Webinaire sur le Préjudice Écologique – 15 avril 2020. Webinaire animé par Me Sébastien Mabile, associé fondateur du cabinet Seattle, a présenté le préjudice écologique au regard des derniers développement en la matière : la décision du Tribunal de grande instance de Marseille condamnant quatre braconniers pour leurs activités dans le Parc national des Calanques. Vous pouvez retrouver l’enregistrement du webinaire sur notre page YouTube.

    Webinaire sur les Droits de la Nature – 22 avril 2020. Samy Hamel, Valérie Cabanes et Nina Salaün de Notre Affaire à Tous vous proposent une formation juridique autour des droits de la nature. L’octroi de la personnalité juridique à des entités vivantes est une voie particulièrement prometteuse pour garantir une protection accrue de la Nature et affirmer l’inextricable lien entre la société humaine et la Nature. Retrouvez l’enregistrement du webinaire sur YouTube.

    Webinaire sur les Inégalités climatiques et environnementales – 6 mai 2020. Clothilde Baudouin de Notre Affaire à Tous, Rémi Saintagne de ATD Quart Monde France et Valentin Prelat du CRID vous proposent un webinaire sur les impacts différenciés du dérèglement climatique, qui touche d’abord et avant tout les personnes les plus vulnérables. Retrouvez l’enregistrement du webinaire sur YouTube.

    Webinaire sur la Justice climatique locale contre les Grands Projets Inutiles – 13 mai 2020. Le droit est aussi un outil militant, il peut permettre de s’opposer frontalement à certains projets imposés et polluants. Lors de ce webinaire, Chloé Gerbier de Notre Affaire à Tous, Audrey du Collectif non au T4 et Marine Calmet de WildLegal tâchent de survoler les gardes fou et les outils que sont les protections en matière de droit de l’environnement et de l’urbanisme. Retrouvez l’enregistrement du webinaire sur YouTube.

    Webinaire sur Le Droit contre l’impunité des entreprises : les cas Total et Perenco – 20 mai 2020. Ce webinaire, destiné à tout public, a pour objectif de présenter ce qu’est le devoir de vigilance, comment il est mis en œuvre (ou pas) par les multinationales, quelles sont ses limites et les stratégies qui peuvent être conçues pour les dépasser. Notre Affaire à Tous, Survie et Les Amis de la Terre France présentent les différentes actions en justice contre TOTAL. Sherpa présente l’affaire contre PERENCO. Retrouvez l’enregistrement du webinaire sur YouTube.

    Webinaire sur Les Migrations environnementales et climatiques – 3 juin 2020. Avec Marine Denis, juriste et porte-parole de Notre Affaire à Tous et Lucie Pelissier, co-présidente de CliMates, ce webinaire revient sur les enjeux juridiques des migrations environnementales et climatiques et les enjeux socio-politiques sur le terrain. Les intervenantes reviennent notamment sur le projet Youth on the Move. Retrouvez l’enregistrement du webinaire sur YouTube.

    Webinaire sur Droits de la santé, droits fondamentaux et changement climatique – 10 juin 2020. Dans ce webinaire, Gwenaël Vourc’h, directrice de recherche INRAE et directrice adjointe de l’UMR Epidémiologie des maladies animales et zoonotiques à Clermont-Ferrand, Roxane Chaplain et Marine Denis de Notre Affaire à Tous traitent des interactions entre santé et changement climatique, notamment sous le prisme du droit. Retrouvez l’enregistrement du webinaire sur YouTube.

    Webinaire Vers une Constitution Ecologique avec la Convention Citoyenne ? – 17 juin 2020. Ce webinaire racontera le projet de Notre Constitution Ecologique et expliquera les enjeux autour de la Convention Citoyenne pour le Climat, ainsi que les implications concrètes qu’aurait la modification de l’article 1er de la Constitution, telle que nous l’envisageons. Avec Marine Yzquierdo et Valérie Cabanes de Notre Affaire à Tous et Anais Darenes du REFEDD.

    Webinaire sur les Centres Commerciaux et Amazon – 25 novembre 2020. Organisé avec le CRID, association de défense des droits humains et de la mobilisation citoyenne, ce webinaire revient sur la lutte contre l’artificialisation des sols et notamment sur l’interdiction de construire de nouveaux centres commerciaux et entrepôts de e-commerce; Les intervenants étaient Alma Dufour des Amis de la Terre et des citoyen.nes de la Convention Citoyenne pour le Climat.

    Webinaire sur le rapport Un Climat d’Inégalités – 9 décembre 2020. Ce webinaire a été organisé à l’occasion du lancement du rapport Un Climat d’Inégalités. Les impacts inégaux du dérèglement climatique en France”, pour mettre en lumière un phénomène encore trop peu documenté : les inégalités climatiques sur le territoire français. Au cœur du rapport, quatorze citoyen·ne·s témoignent des impacts directs du dérèglement climatique sur leurs conditions de vie quotidienne. 

  • Un an après sa condamnation, l’État n’en fait (toujours pas) assez !

    Un an après sa condamnation, l’État n’en fait (toujours pas) assez !

    Press conference for the Affair of the Century organized by GreenPeace in a forest damaged by fire in Gironde near Landiras. In presence of Jacques HAZERA (Forestry expert) Yann ROBIOU DU PONT (Climatologist), Jean-Francois JULLIARD (Director of Greenpeace FRANCE), Amandine LEBRETON (Director of advocacy and prospective at the Fondation pour la Nature et pour l’Homme (FNH)), Jeremie SUISSA (General Delegate of Notre Affaire a Tous), Cecile DUFLOT (Director General of Oxfam FRANCE). Conference de presse pour L’Affaire du siecle organiser par GreenPeace dans une forets sinistree par les incendie en Gironde pres de Landiras. En presence de Jacques HAZERA (Expert forestier) Yann ROBIOU DU PONT (Climatologue), Jean-Francois JULLIARD (directeur de Greenpeace FRANCE), Amandine LEBRETON (directrice du pole plaidoyer et prospective a la Fondation pour la Nature et pour l’Homme (FNH)), Jeremie SUISSA (delegue general de Notre Affaire a Tous), Cecile DUFLOT (directrice general d’Oxfam FRANCE)

    Le 14 octobre 2021, l’Etat français était condamné par le tribunal administratif de Paris pour inaction climatique, grâce à l’Affaire du Siècle. A moins de trois mois de la date butoir fixée par le tribunal administratif (le 31 décembre 2022), l’Affaire du Siècle s’est rendue dans une forêt ravagée par le feu près de Landiras (Gironde), pour interpeller le gouvernement : un an après sa condamnation, l’Etat n’en fait pas toujours pas assez. Les organisations ont listé des mesures à prendre de toute urgence pour surmonter l’hiver, tout en préparant l’avenir. Yann Robiou du Pont, docteur en climatologie, et Jacques Hazera, propriétaire forestier, sont venus à nos côtés attester des impacts dramatiques déjà causés par le dérèglement climatique.

    Que s’est-il passé depuis un an ?

    Depuis sa condamnation le 14 octobre 2021, et le jugement du Conseil d’Etat en novembre 2020, l’Etat est sous le coup d’une double obligation. Il a non seulement l’obligation de respecter sa trajectoire de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, mais il doit également réparer tout dépassement de cette trajectoire.

    En un an, quelques efforts allant dans le bon sens sont à saluer, à condition qu’ils soient confirmées prochainement :

    • Dans le domaine de l’énergie, par exemple, la fin des garanties à l’export pour les projets d’exploitation d’énergies fossiles est une bonne nouvelle. Cette annonce doit toutefois être confirmée dans le projet de loi de finances, actuellement en discussion.
    • Dans les transports, l’annonce d’un plan vélo est encourageante pour le développement d’infrastructures cyclables de qualité, continues et sécurisées.
    • En termes de sobriété, le plan présenté marque un tournant dans le discours du gouvernement.Mais ces douze mois ont été aussi marqués par des régressions préoccupantes. Quelques exemples :

    Mais ces douze mois ont été aussi marqués par des régressions préoccupantes. Quelques exemples :

    • Côté énergie, la réouverture de la centrale à charbon de Saint Avold ou encore la création d’un nouveau terminal méthanier au Havre vont à contre-sens de la lutte contre le changement climatique.
    • Dans le secteur de l’agriculture, 3e secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre dans l’Hexagone, la Politique Agricole Commune appliquée en France ne propose que de maigres avancées qui font déjà l’objet de dérogations en 2023.

    Si à court terme, la pandémie de Covid-19 et la crise énergétique ont entraîné une baisse conjoncturelle des émissions de gaz à effet de serre en France, cette diminution ponctuelle reste encore insuffisante pour compenser le retard pris et réparer le préjudice subi en raison du non-respect des engagements climatiques. A long terme, la France n’est toujours pas sur la bonne trajectoire : les politiques publiques prévues jusque-là ne permettront pas d’atteindre les objectifs à 2030.

    Comment l’Etat peut-il encore agir ?

    Les solutions sont connues et de nombreuses propositions de mesures ont déjà été mises sur la table. Le gouvernement a donc trois mois pour réellement changer la donne et montrer son intention de respecter ses engagements climatiques et réparer les préjudices. Trois mois, c’est court. Et beaucoup de temps a déjà été perdu.

    En pleine crise énergétique, la priorité est de privilégier des mesures renforçant la justice sociale, en ciblant celles et ceux qui en ont le plus besoin et favorisant les économies d’énergie dans des secteurs fortement émetteurs de gaz à effet de serre.

    • Dans les transports, 1er secteur émetteur de gaz à effet de serre, des mesures immédiates doivent être prises : extension aux transports et jets privés de l’interdiction des vols si une alternative en train existe en moins de 2h30 ; mise en place d’un forfait à prix réduit pour les transports en commun ; investissements massifs dans les alternatives à la voiture individuelle.
    • Dans les logements et bâtiments, 2e secteur émetteur de gaz à effet de serre, il y a urgence à mettre en place un vaste plan de rénovation énergétique beaucoup plus ambitieux que les mesures jusque-là adoptées et annoncées, en commençant par les « passoires thermiques », ces logements les plus mal isolés.
    • Sur le plan énergétique, le gouvernement tarde aussi beaucoup trop sur deux piliers essentiels de la transition énergétique : la sobriété (son plan manquant d’ambition et se limitant à des mesures conjoncturels pour passer l’hiver) et le développement des énergies renouvelables (la France est le seul pays européen à ne pas avoir respecté ses objectifs sur ce point). Une mesure immédiate de sobriété pourrait être d’interdire les panneaux publicitaires lumineux (qui consomment chacun en moyenne par an l’équivalent de la consommation électrique, hors chauffage et électricité, d’une famille, selon l’Ademe).
    • Sur le volet agricole, le gouvernement doit initier le projet de loi d’orientation agricole annoncé pour fin 2022 et assurer une consultation large des acteurs impliqués. Dans le cadre de cette loi, une attention particulière devra être portée sur la formation qui doit appuyer la transition agroécologique ainsi que sur le renouvellement des générations agricoles. Par ailleurs le gouvernement doit revenir sur les reculs environnementaux concédés en conséquence de la guerre en Ukraine (notamment sur les jachères) sous pression des lobbys agro-industriels.

    Même s’il ne reste plus que trois mois au gouvernement pour redresser la barre, nombre de ces mesures peuvent être prises très rapidement pour passer l’hiver tout en préparant l’avenir, alors même que le budget de l’Etat est actuellement débattu à l’Assemblée nationale. Plus tôt ces décisions seront prises, plus vite elles produiront des effets concrets sur la baisse de nos émissions de CO2 !

  • TotalMent

    En octobre 2021, trois historiens révélaient que les dirigeants et salariés du groupe TotalEnergies (à l’époque Total et Elf) avaient connaissance de la probabilité d’un dérèglement climatique sans précédent dû à la production de combustibles fossiles dès 1971

    Notre Affaire à Tous et 350.org ont alors lancé la campagne TotalMent pour interpeller les décideurs politiques français et exiger une commission d’enquête parlementaire sur le sujet.

    L’occasion de revenir sur 50 ans de fabrique du doute, de lobbying et de greenwashing de la part de Total, devenue depuis TotalEnergies : à partir de recherches basées sur des sources primaires inédites d’archives de l’entreprise et d’entretiens avec d’anciens dirigeants et salariés, il a ainsi été démontré que malgré la connaissance des risques sur le climat, les dirigeants de l’entreprise ont tout fait pour maintenir les activités climaticides de Total.

    C’est ainsi qu’à partir de 1972, Total commence à nier l’existence d’un quelconque dérèglement climatique. Pourtant, un an plus tôt, le magazine de l’entreprise “Total Information” exposait le lien entre les activités pétrolières du groupe et les “conséquences catastrophiques” du dérèglement climatique que cela induirait. 

    Cette stratégie va se transformer en fabrique du doute, dès la fin des années 80, face aux consensus scientifiques qui commencent à émerger. Cette stratégie consiste d’une part à remettre en question la qualité de ces recherches et d’autre part à saboter les politiques environnementales qui nuiraient à leurs intérêt : c’est ainsi qu’en 1992, Elf [qui fusionnera avec Total en 1999] se félicite d’avoir mis en en échec par les industries fossiles de l’initiative d’écotaxe européenne. 

    Au début des années 2000, alors qu’il devenait difficile de remettre publiquement en doute l’existence d’un dérèglement climatique, Total a pris le virage du greenwashing.

    Pourtant, Total est aujourd’hui l’une des 20 entreprises fossiles ayant le plus contribué au dérèglement climatique depuis 1965. Et malgré sa volonté de se renommer Total Energies, la multinationale pétrolière et gazière continue aujourd’hui à produire 447 unités d’énergies fossiles pour une seule d’énergies renouvelables.

    Pour en savoir plus sur la stratégie de Total et découvrir les preuves, rendez-vous sur le site de la campagne :

    En 2024 : La commission d’enquête

    Le 17 janvier 2024, le Sénat lance officiellement une commission d’enquête dédiée à TotalEnergies, portant sur les obligations climatiques de la multinationale pétro-gazière.

    Cette commission a pour objectif, jusqu’à juin 2024, d’enquêter sur la responsabilité du groupe français, ses activités et investissements financiers sur le (non-)respect des engagements climatiques de la France et l’alimentation de situations de corruption, de conflits armés, de violations des droits humains et des libertés fondamentales. 

    Dans la continuité des auditions de membres du GIEC, du Haut Conseil pour le Climat ou encore de l’ADEME, Notre Affaire à Tous a également été auditionnée par les sénateur.ices sur la question des “différentes pistes juridiques disponibles pour établir la responsabilité des multinationales en matière climatique”.

    Paul Mougeolle, doctorant en droit climatique, juriste, et Brice Laniyan, docteur en droit public, juriste en charge de la réglementation des multinationales, ont ainsi pu exposer l’approche de Notre Affaire à Tous en terme de contentieux contre les multinationales, mais aussi développer les différentes  propositions de réglementations visant à responsabiliser ces dernières.

    Paul Mougeolle (à gauche) et Brice Lanyian (à droite)
    lors de l’audition au Sénat de Notre Affaire à Tous le 26 février 2024.

    Pour suivre les autres auditions de la commission d’enquête, retrouvez nos récapitulatifs sur le site totalment.fr :

    A la suite de cette audition, des questions écrites ont été envoyées, destinées à aider à la rédaction d’un rapport final censé être publié à l’issue de la commission en juin 2024. Retrouvez ce document, qui correspond aux réponses envoyées au Sénat, dans lesquelles figurent les propositions portées par Notre Affaire à Tous en matière de responsabilisation des acteurs économiques sont exposées :

    La commission d’enquête a rendu public son rapport final, qui a été voté avec 33 recommandations pour encadrer les activités de TotalEnergies :

    Nos demandes

    Nous demandons à TotalEnergies de : 

    • Reconnaître son rôle ainsi que sa responsabilité passée et présente dans le changement climatique
    • Mettre immédiatement toutes ses ressources à disposition dans la transition énergétique, en réorientant leurs investissements vers les énergies renouvelables.
    • Abandonner tout nouveau projet d’exploration et d’exploitation d’énergies fossiles dans le monde et anticiper la fermeture de certains de ses sites.

    Nous demandons aux acteurs financiers :

    • De s’engager à ne pas financer ni à assurer de nouveaux projets d’exploration et d’exploitation aux combustibles fossiles
    • De rejoindre le mouvement mondial de désinvestissement des combustibles fossiles.
    • A la BCE d’exclure Total et l’industrie fossile et les autres secteurs très polluants de ses programmes d’achat d’actifs.

    Nous demandons aux pouvoirs publics français de :

    • Faire toute la lumière sur la responsabilité climatique passée et présente de TotalEnergies en convoquant une commission d’enquête parlementaire
    • Garantir l’application effective de la loi française sur le devoir de vigilance et la renforcer
    • Soutenir l’internationalisation du devoir de vigilance des multinationales

    Soutenez l’initiative avec le hashtag #TotalMent. Combattez avec nous l’impunité de l’industrie fossile !

    (Re)découvrez en vidéo sur les révélations #TotalMent, avec Laure Barbé de Notre Affaire à Tous et Clémence Dubois de 350.org !