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  • CP / People’s Climate Case : Les tribunaux européens font la sourde oreille face aux citoyens affectés par la crise climatique

    Communiqué de presse – 25 mars 2021

    La Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu son jugement dans l’affaire historique « People’s Climate Case », lancée par 10 familles – dont Maurice Feschet, lavandiculteur dans la Drôme – et l’association de jeunesse autochtone Sáminuorra dont les droits fondamentaux sont affectés par la crise climatique. La Cour a décidé de confirmer la décision du tribunal de première instance – Tribunal européen – de rejeter l’affaire pour des raisons de procédure. Cette décision a, une fois de plus, mis en lumière le manque d’accès à la justice dans l’UE en matière d’environnement.

    En 2018, des familles du Portugal, d’Italie, de France, d’Allemagne, de Roumanie, du Kenya, des Fidji et une association de jeunes représentant la jeunesse autochtone Sami se sont réunies pour poursuivre l’UE en justice face à son manque d’ambition climatique à l’horizon 2030. Les plaignants ont fait valoir que l’objectif de l’UE était insuffisant pour atténuer la crise climatique et ne protégeait pas leurs droits humains, tels que leur droit à la vie, à la santé, à l’occupation et à la propriété, qui sont déjà affectés par l’aggravation des impacts du changement climatique. 

    Malgré toutes les preuves scientifiques fournies par les plaignants dans leur requête, la Cour a refusé d’étudier le fond de l’affaire et l’impact de la crise climatique sur les droits fondamentaux, en décidant de statuer uniquement sur les règles procédurales. La Cour a annoncé que les plaignants n’avaient pas intérêt à agir pour attaquer l’UE pour son inaction en matière de climat, en se basant sur une ancienne jurisprudence datant des années 1960, selon laquelle un individu doit être affecté de manière unique par un acte législatif de l’UE pour être autorisé à le contester. Cela contraste fortement avec le principe fondamental des droits de l’homme, car l’interprétation des tribunaux de l’UE signifie que plus le problème est universel et grave, moins les personnes sont en mesure de demander une protection juridique devant les tribunaux de l’UE. 

    Un nombre croissant de tribunaux nationaux en Europe montrent la responsabilité des États membres dans la crise climatique et, dans certains cas, leur ordonnent d’accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre afin de protéger les citoyens face aux impacts climatiques actuels et futurs. Récemment, la Cour européenne des droits de l’homme a accordé la priorité à l’affaire climatique initiée par 6 jeunes Portugais sur la base de « l’importance et de l’urgence des questions soulevées ». Avec cette décision, les tribunaux de l’UE ne rejoignent pas ce mouvement qui joue un rôle primordial pour tenir les gouvernements responsables de leur inaction en matière de climat. 

    Alors que les tribunaux de l’UE ont refusé de parler de la crise climatique, un nombre considérable de citoyens, de scientifiques et d’ONG ont soutenu les plaignants et ont finalement amené l’UE à relever son objectif climatique pour 2030, à savoir réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 %. Toutefois, l’UE est encore loin d’être en mesure d’assumer sa part de responsabilité dans le cadre de l’Accord de Paris visant à limiter la hausse de la température mondiale à 1,5°C. 

    La décision du Tribunal de fermer ses portes aux personnes touchées par les effets du changement climatique a été critiquée par des plaignants, des experts juridiques et la société civile pour son incapacité à répondre à l’urgence climatique. 

    Roda Verheyen, avocate coordinatrice du People’s Climate Case, a déclaré : « Ces familles ont fait confiance au système juridique de l’UE pour protéger leurs droits. Toutefois, les tribunaux européens n’ont pas su interpréter les règles existantes dans le contexte du changement climatique et obliger les législateurs européens à prendre une position ambitieuse en matière de protection du climat. Malheureusement, cette décision prouve aux citoyens que les législateurs européens peuvent faire ce qu’ils veulent sur les questions environnementales et qu’il n’y a aucun moyen de leur demander des comptes devant les tribunaux, à moins que ces règles ne soient modifiées. »

    Wendel Trio, directeur du Réseau Action Climat (CAN Europe), a déclaré : « Avec l’urgence climatique qui grandit de jour en jour, l’UE doit intensifier son action climatique. Les citoyens européens se tournent vers leurs tribunaux pour les aider à éviter un changement climatique dangereux. C’est dommage que la Cour européenne de justice se distancie des autres tribunaux en refusant de se saisir de l’affaire et en se retranchant derrière des questions de procédure. Si l’UE veut donner du sens à ses citoyens, elle devra reconnaître que la responsabilité est essentielle pour garantir le bon fonctionnement de la démocratie. L’UE doit de toute urgence renforcer la protection de ses citoyens, à la fois en renforçant l’action climatique et en offrant un accès à la justice à tous ses citoyens« .

    Les plaignants du People’s Climate Case ont rappelé à la Cour européenne et aux législateurs de l’UE qu’ils ne peuvent pas faire face à la crise climatique en faisant la sourde oreille aux citoyens touchés par le changement climatique. 

    Maurice Feschet, le plaignant français a déclaré : Les sécheresses consécutives ont eu des conséquences dramatiques sur le mode de vie de ma famille et sur de nombreux citoyens européens. Aujourd’hui, l’espoir que mes co-plaignants et moi-même avions mis dans le système juridique pour nous protéger n’a pas abouti. Mais nous ne lâchons rien. Nous continuerons de nous battre pour nos droits fondamentaux. Cette défaite n’empêchera pas nos voix de devenir de plus en plus fortes pour assurer un futur viable aux générations futures”. 

    Sanna Vannar, représentante l’association des jeunes Samis dans l’affaire, a ajouté : « Nos voix se font de plus en plus entendre et d’autres parties prenantes se joignent aux avocats et à la société civile pour exiger des mesures urgentes en matière de climat. Même si la voix des législateurs européens a commencé à se faire entendre sur la nécessité d’augmenter l’objectif climatique de l’UE pour 2030, sans une action décisive, ces paroles ne suffiront pas pour atteindre l’objectif de 1,5°C de l’accord de Paris et pour assurer un avenir plus sûr aux jeunes”.

    Pour Clothilde Baudouin de Notre Affaire à Tous : “Il est temps que les juridictions européennes reconnaissent l’intérêt à agir des citoyens européens sur des questions aussi primordiales que la protection des droits fondamentaux face à la crise climatique. Malgré cette décision négative, nous continuerons à nous battre pour un renforcement nécessaire des politiques climatiques. En France, l’Affaire du Siècle nous l’a montré : les tribunaux ont leur rôle à jouer face à l’urgence.” 

    Contacts presse :

    Annexe :

    Brief juridique sur la décision de la CJUE

    10 familles et l’association de jeunesse Sami de Suède ont fait appel de l’ordonnance du Tribunal européen sur le rejet du People’s Climate Case. Un appel a été déposé auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 11 juillet 2019.

    Le People’s Climate Case, portée devant le Tribunal européen en mai 2018 contre le Parlement européen et le Conseil européen en tant que législateurs de l’UE, faisait valoir que le précédent objectif climatique de l’UE pour 2030, qui consistait à réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’UE d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990, n’était pas suffisant pour protéger les vies, les moyens de subsistance et les droits fondamentaux des citoyens.

    Dans son ordonnance du 8 mai 2019, le Tribunal européen a rejeté l’affaire pour des raisons de procédure. En faisant une interprétation étroite de l’intérêt “individuel et direct” dans le Traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE, Art 263), le Tribunal a fermé sa porte à tous les plaignants. Selon l’interprétation établie par la jurisprudence depuis les années 1960, un citoyen n’est considéré comme « individuellement concerné » et donc autorisé à saisir la justice que s’il est affecté de manière « unique » par un texte de loi de l’UE. 

    Dans le recours, les plaignants (qui comprenaient des grands-parents, des parents et leurs enfants) avaient exposé en détail leurs préoccupations individuelles, en ce qui concerne leurs biens, leurs exploitations agricoles et autres entreprises, ainsi que leurs droits en matière de santé et d’éducation. Mais le fait que chacun soit affecté par le changement climatique de manière différente selon sa profession, son âge, son état de santé n’a pas été considéré comme suffisamment « unique » par le Tribunal européen. 

    Le 11 juillet 2019, les plaignants ont fait appel devant la Cour de justice de l’Union européenne en faisant valoir que l’exigence d’intérêt individuel et direct devrait être interprétée conformément à la réalité de la crise climatique. En cas de violation des droits de l’homme, l’accès direct aux tribunaux européens doit être garanti – tant qu’aucune autre voie de recours (par exemple, par le biais des tribunaux des États membres) n’est disponible.

    Dans leur appel, les plaignants ont fait valoir que : 

    • Le Tribunal européen a commis une erreur en interprétant l’exigence de l’intérêt individuel d’une manière telle que plus le nombre de personnes affectées par un texte législatif européen est élevé, moins elles peuvent avoir accès à la justice devant les tribunaux européens. Cela contredit la raison d’être des droits fondamentaux, qui est d’accorder une protection à chaque individu. 
    • La Cour a commis une erreur de droit en ignorant que l’accès aux tribunaux doit refléter la gravité de la situation (ici les impacts existentiels du changement climatique sur les plaignants).
    • Le Tribunal européen n’a pas tenu compte de la Convention d’Aarhus. En 2017, le Comité d’examen du respect des dispositions de la Convention d’Aarhus (ACCC) a reconnu que les tribunaux européens enfreignent les dispositions relatives à l’accès à la justice en limitant l’accès à la justice des particuliers et des ONG en matière d’environnement. Le Tribunal européen n’en a pas tenu compte et a statué une fois de plus en bloquant l’accès à la justice pour les familles et l’association de jeunes Sami.  
    • Suite à l’avis de l’ACCC, la Commission a présenté un projet de proposition visant à réviser le règlement d’Aarhus, afin de remédier à son manque de conformité avec la convention d’Aarhus. Cette proposition est actuellement examinée par le Parlement européen. L’accès à la justice étant apparemment impossible à réaliser par le biais de l’article 263, il faut s’assurer que le règlement d’Aarhus permet aux individus et aux ONG d’accéder à la justice.

  • 23 mars 2021 – Changement climatique et inégalités de genre

    Ce 15e numéro de la revue de presse « IMPACTS » se concentre sur l’augmentation des inégalités et des discriminations de genre, en lien avec le dérèglement climatique.

    Dès 2007, le GIEC notait que les conséquences du changement climatique variaient selon le sexe et indiquait que les plus pauvres étaient les plus directement touchés par ce phénomène. Or, dans le monde, 70% des personnes subsistant avec moins d’un dollar par jour sont des femmes et les femmes possèdent moins de 1% des ressources du monde. Le GIEC a ainsi établi dans son rapport de 2014 que les inégalités de genre existantes sont accrues par les risques climatiques. La position sociale des femmes les fragilise face au dérèglement climatique et elles comptent parmi les premières affectées alors même que leurs capacités d’adaptation et leur résilience sont limitées par les normes sociales. 

    Pour combattre les inégalités sociales climatiques et environnementales, il nous faut les connaître. C’est le sens de cette revue de presse élaborée par les bénévoles de Notre Affaire à Tous, qui revient chaque mois sur les #IMPACTS différenciés du changement climatique, sur nos vies, nos droits et ceux de la nature.

    Les femmes : premières impactées par le dérèglement climatique

    A l’échelle mondiale, les plus pauvres sont les plus touchés face au changement climatique et la majorité des pauvres sont des femmes. En Asie et en Afrique, les femmes représentent 70% des personnes vivant sous le seuil de pauvreté, les laissant plus vulnérables face aux impacts du dérèglement climatique. La pauvreté est un facteur qui rend difficile l’adaptation au dérèglement climatique, et ce d’autant plus que les charges et tâches ménagères reposent souvent sur les femmes. 

    Les pertes et dégâts subis sont accrus pour les femmes. Ceci s’explique par différents facteurs. Leur position sociale les fragilise face au dérèglement climatique et elles comptent parmi les premières affectées alors même que leurs capacités d’adaptation et leur résilience sont limitées par les normes sociales, par un moindre accès à des financements adéquats et par une participation limitée à la vie publique et politique, particulièrement dans les pays dits du sud

    De par leur condition sociale et les rôles genrés, elles sont majoritairement en charge de l’alimentation de subsistance, de l’approvisionnement en eau, des tâches ménagères, et de tous ces éléments qui sont directement touchés par le dérèglement climatique, alors même qu’elles sont plus pauvres, ont moins de capital culturel et social et donc sont plus vulnérables aux crises. Leurs rôles sociaux les conduisent généralement à s’occuper des enfants, à attendre l’autorisation d’un mari ou d’un parent masculin pour sortir de la maison ou encore à ne pas apprendre à nager. Elles ont un moindre accès à l’information, une moindre capacité de mobilité, un moindre accès à l’éducation et à la formation. En effet, “une fille sur 4 ne va pas à l’école dans les pays en développement”. 

    • L’impact des catastrophes naturelles sur les femmes

     Tous ces éléments font que les femmes sont plus vulnérables lors d’événements climatiques extrêmes. En effet, au niveau mondial, les femmes sont quatorze fois plus susceptibles de mourir lors d’une catastrophe naturelle que les hommes. Pour prendre des exemples concrets, 80% des victimes indonésiennes du tsunami du 26 décembre 2004 étaient des femmes. La catastrophe de l’Ouragan Katrina en 2005 a également mis en lumière l’intersection de plusieurs inégalités, notamment de genre, en plus d’inégalités sociales et raciales. On estime notamment que 80% des adultes laissés-pour-compte suite à l’ouragan étaient des femmes.

    Climat et santé féminine

    La santé des femmes est aussi particulièrement impactée par le réchauffement climatique, concernant notamment la malnutrition et la santé sexuelle et reproductive. 

    Les femmes enceintes sont plus vulnérables aux effets du dérèglement climatique. Les études sont encore récentes et peu nombreuses, mais la chaleur aurait un impact sur les accouchements prématurés dont le taux passerait de 5 à 16% en cas de vague de chaleur. Ces études montrent que les impacts sont d’autant plus importants quand les femmes viennent de milieux socio-économiques défavorisés. Les femmes enceintes et allaitantes sont également plus vulnérables aux maladies comme la dengue et le paludisme. Une étude de 2020 réalisée en Californie montrait que le fait de vivre à proximité de puits de pétrole et de gaz actifs peut exposer les femmes enceintes à un risque plus élevé de donner naissance à des bébés de faible poids, en particulier dans les zones rurales. En effet, les femmes enceintes qui vivent à moins d’un kilomètre des puits de pétrole et de gaz ont 40 % plus de chances d’avoir des bébés de faible poids à la naissance et 20 % plus de chances d’avoir des bébés petits pour leur âge gestationnel. 

    En Europe, plus de femmes que d’hommes sont décédées lors de la canicule de 2003, selon une étude de 2008. Une surmortalité de plus de 85% chez les femmes de 75 ans et plus et de 51% chez les hommes de la même tranche d’âge a ainsi été observée. En plus d’être plus exposées à ces risques sanitaires, les femmes ont également moins accès aux soins lorsqu’elles en ont besoin, à cause des normes genrées ou à cause de salaires plus faibles, qui les empêchent parfois d’aller seule dans une structure de santé.

    Violences de genre et dérèglement climatique

    Le dérèglement climatique a également pour conséquences une augmentation des violences de genre. Ces violences (viols, agressions sexuelles, prostitution forcée…), déjà subies lorsqu’il n’y a pas de crise, augmentent dans les situations post-catastrophes ainsi que lors de déplacements de populations et de migrations. 

    L’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) publiait d’ailleurs en janvier 2020 une étude intitulée : “La violence basée sur le genre et son lien avec l’environnement : la violence de l’inégalité”, basée sur une enquête longue de dix années. Dans une autre étude publiée en juillet 2020, l’ONG CARE rappelait également que “les femmes déplacées par les catastrophes climatiques font aussi face à un plus grand risque de violence basée sur le genre, y compris la violence domestique, le mariage forcé et le trafic d’être humain”. De ce fait, beaucoup de femmes rescapées de catastrophes naturelles évitent de fréquenter les abris mis en place car elles craignent d’être agressées sexuellement. Ce constat est alarmant alors que la majorité des personnes déplacées par le changement climatique sont des femmes et des enfants. Paradoxalement, parce qu’elles sont chargées de s’occuper des enfants et des personnes âgées, le départ du foyer peut être rendu plus difficile. 

    De plus, “les femmes et les filles doivent aller plus loin pour chercher de la nourriture, de l’eau ou du bois de chauffage” dû à la raréfaction des ressources. Ces distances et la difficulté de ces trajets augmentent les dangers physiques que subissent les femmes et ces dangers rendent propices le chantage sexuel : quand les ressources vitales se font rares (nourriture, eau), les hommes usent du chantage pour échanger les ressources contre des faveurs sexuelles.

    Métiers du care et charge mentale environnementale

    Le care est défini comme “des expériences ou d’activités “qui consistent à apporter une réponse concrète aux besoins des autres – travail domestique, de soins, d’éducation, de soutien ou d’assistance”. Ce terme définit donc à la fois des tâches domestiques mais également un milieu professionnel. Si les femmes sont davantage représentées sur le marché du travail en France, la répartition des métiers est encore très genrée avec notamment une surreprésentation des femmes dans le milieu du care, domaines souvent peu rémunérés, bien qu’indispensables. En effet, 90% des services du care sont menés par des femmes. En 2014, elles représentaient notamment 97,7% des aides à domicile, aides ménagères et assistants maternels, 90,4% des aides-soignantes, 87,7% des infirmières et sages-femmes, et 94,3% des employées de maison. 

    Les sociologues Christelle Avril et Irene Ramos Vacca définissent les « métiers de femmes » comme « ceux qui s’inscrivent dans le prolongement des fonctions ménagères et maternelles » et pour la chercheuse Camille Froidevaux-Metterie « on estime que c’est dans la nature des femmes de prendre soin des autres, ce qui explique que ces métiers soient si peu considérés et si mal rémunérés« . En effet, cette situation peut s’expliquer par l’éducation des personnes genrées femmes, auxquelles les valeurs d’empathie sont plus souvent apprises, même inconsciemment. C’est ce qui peut expliquer aussi la part importante de femmes qui s’engagent pour l’écologie, à la fois dans la sphère privée et dans les associations environnementales. 

    Les métiers du care sont encore trop dévalorisés et précaires. Nous l’avons vu pendant la crise sanitaire, ces secteurs essentiels, souvent occupés par des femmes, ont été mis en lumière. L’écoféminisme prend en compte ce sujet car le “soin des personnes, de la société et de la planète au sens le plus large du terme, rajoute une charge mentale supplémentaire aux femmes”, selon Solène Ducretot, co-fondatrice du Collectif Les Engraineuses et du festival Après La Pluie. 

    Il est toutefois important de noter que la surreprésentation des hommes dans certains métiers les expose également aux conséquences sanitaires du dérèglement climatique. C’est le cas par exemple pour les travailleurs du bâtiment, plus exposés en période de canicule. Les agriculteurs subissent aussi de fortes pressions économiques résultant du dérèglement climatique, pouvant mener à des dépressions et des suicides

    • Charge mentale et écologie à la maison

     C’est bien connu, les tâches ménagères et la gestion du foyer sont encore majoritairement gérées par les femmes. Or, à cette charge déjà importante, s’ajoute le poids de la charge mentale et morale liée aux questions écologiques et environnementales et à leur application dans le quotidien du foyer. Ce sont souvent elles qui doivent gérer le changement lié à des pratiques zéro déchet ou plus écologiques comme la fabrication de produits ménagers, l’utilisation des couches lavables pour les enfants, le recyclage des déchets, l’achat de produits plus écologiques, repenser l’alimentation du foyer etc. Cela conduit à une charge de tâches ménagères supplémentaire, pouvant entraîner une fatigue extrême, mais également un fort sentiment de culpabilité en cas d’échec.

    Droits des femmes, transition écologique et écoféminisme

    L’étude des inégalités de genre et la montée des problématiques environnementales ont mené à de nombreuses réflexions sur l’écologie et les droits des femmes. L’écoféminisme est un courant de pensée qui met en avant des similitudes entre l’exploitation et la domination de la nature par les humains et l’oppression et la domination des femmes et des minorités par les hommes.“Ce sont les deux facettes de la même médaille, du même modèle de civilisation qui s’est imposé historiquement”, explique Jeanne Burgart Goutal, spécialiste du sujet. 

    Le terme « écoféminisme » a été utilisé pour la première fois par Françoise d’Eaubonne, féministe française. Aujourd’hui, il existe diverses branches de l’écoféminisme, dont deux courants majoritaires : un courant matérialiste qui s’attache à chercher des solutions concrètes sur le terrain pour faire face à l’impact du changement climatique sur les femmes, et une branche spirituelle. Les divers courants ont tous en commun la volonté de mettre fin à la domination des humains sur la nature et à la société patriarcale, pour un monde plus respectueux. 

    Ces réflexions permettent notamment d’inclure les femmes et les questions de genre dans les problématiques et politiques environnementales qui sont souvent considérées comme “neutres”, c’est-à-dire sans impact sur les questions de genre alors même qu’elles sont pensées du point de vue dominant, celui de l’homme blanc cisgenre. Par exemple, comment penser la mobilité et renforcer les modes de transport collectifs moins polluants sans inclure la sécurité des femmes et leur usage de ces transports ? Les femmes font donc partie de la solution aux problématiques du dérèglement climatique.

    Les femmes : invisibilisées mais porteuses de solutions

    Bien qu’elles aient les connaissances traditionnelles et qu’elles soient engagées pour la préservation de l’environnement, le travail que les femmes accomplissent est souvent invisibilisé et dévalorisé car il reste lié à la sphère privée. Elles sont encore trop souvent sous-représentées dans les sphères de pouvoir et de prises de décisions et leur accès à l’information est moindre. 

    De plus, les impacts du dérèglement climatique sur les femmes restent mal connus car elles sont souvent sous-représentées dans les études écologistes publiées, encore plus lorsqu’elles viennent d’un pays des Suds. Leur point de vue est donc moins bien pris en compte, alors même qu’elles ont une “perception différente du changement climatique”. 

    Dans les pays les plus pauvres, les femmes et les filles assurent la majorité de l’agriculture de subsistance et de l’approvisionnement du foyer en ressources vitales (eau, nourriture, combustible). En effet, elles sont les productrices de plus de la moitié des denrées alimentaires dans le monde et elles représentent entre 50 et 80% des petits agriculteurs. Pourtant, les inégalités dans l’accès à la propriété foncière sont palpables. Dans le rapport “Terres et changement climatique” du GIEC (2019), on apprend que “dans 59% des 161 pays étudiés, les lois, traditions ou pratiques religieuses empêchent les femmes de posséder des terres” et selon la FAO, “moins de 20% des propriétaires terriens de ce monde sont des femmes”. Les femmes sont ainsi productrices et permettent de nourrir les populations mais n’ont pas accès aux rendements de leur travail, alors qu’un accès égal à la propriété foncière entre hommes et femmes permettraient d’améliorer la sécurité alimentaire et de nourrir 150 millions de personnes supplémentaires, selon la FAO. La situation actuelle rend les femmes plus vulnérables de plusieurs manières, notamment parce que les ressources vitales vont devenir plus rares avec le changement climatique, alors qu’une amélioration de leur situation serait bénéfique pour l’égalité des genres, pour l’environnement et pour la sécurité alimentaire. 

    Pourtant, “les femmes sont, partout dans le monde, porteuses de solutions”. D’après l’ONU Femmes, les femmes sont des “agents de lutte majeurs de l’adaptation”. En effet, parce que les femmes sont plus gravement touchées par le dérèglement climatique à l’échelle mondiale, celles-ci sont aussi plus à même d’être porteuses de solutions pour lutter contre ce phénomène. Leurs connaissances environnementales traditionnelles liées à leur expérience les rendent actrices du changement, selon Carlotta Gradin d’ONU Femmes France. En effet, elles sont plus à même d’utiliser leurs connaissances pour entreprendre des changements et mettre en place des solutions innovantes et soutenables face aux défis environnementaux : l’utilisation d’énergies vertes, et de nouvelles techniques d’agriculture, comme l’agro-écologie. 

    De nombreuses études démontrent ainsi que l’inclusion des femmes dans les prises de décisions environnementales est bénéfique à la fois d’un point de vue environnemental et pour l’égalité des genres. Une étude de l’Université de Boulder aux Etats-Unis révèle également qu’une meilleure intégration des femmes aux groupes décisionnaires et dans les instances de pouvoir permettrait des décisions plus vertes et une meilleure préservation de l’environnement (notamment à travers la signature de traités). Enfin, dans une étude de Laura McKinney et Gregory Fulkerson intitulée “Gender Equality and Climate Justice: A Cross-National Analysis”, on apprend que dans les pays dans lesquels les femmes sont à la tête du pouvoir ou sont représentées dans les instances de gouvernance, l’empreinte carbone est plus faible que dans les autres pays.

    Gouvernance climatique et luttes environnementales

    A l’échelle de la gouvernance climatique internationale, les femmes sont encore sous-valorisées, et peu incluses dans les processus de négociations sur l’atténuation et l’adaptation au changement climatique. 

    Dans les négociations climatiques, c’est seulement en 2001 que la thématique du genre est apparue, à l’occasion de la COP7 à Marrakech dans le cadre de la Plate-forme d’Action de Pékin de 1995 et l’objectif de l’égalité des sexes visant “l’amélioration de la participation des femmes dans les organes de la CCNUCC”, “la nécessité d’une représentation plus équitable dans les organes” et la recommandation faite aux Etats-parties de “considérer activement la nomination de femmes aux postes électifs”. 

    Plus récemment, à la COP21 à Paris en 2015, sur les 150 chef-fes d’Etat participant à cet événement majeur, seules 8 étaient des femmes. En 2016, les conseils d’administration du “Fonds vert pour le climat” et du “Fonds pour l’environnement mondial” étaient composés de moins de 15% de femmes. 

    • Les femmes : figures majeures des luttes environnementales dans le monde

    Pourtant, lorsque l’on étudie de plus près les combats environnementaux et climatiques sur le terrain, nous constatons que les femmes sont souvent en première ligne de l’action. Nous l’avons vu à partir de 2019 et des grèves mondiales des jeunes pour le climat : les jeunes femmes ont été aux avants postes de la création de ces mouvements pour la protection de la planète et de leur futur. Greta Thunberg, Anuna de Wever, Natasha Mwansa, Ayakha Melithafa, Luisa Neubauer, Jamie Margolin, Harriet O’Shea Carre et tant d’autres se sont mobilisées, déterminées à bousculer le cours des choses pour la préservation de leurs droits. 

    Et ce phénomène n’est pas récent. Depuis les années 1970, de nombreuses luttes environnementales sont menées par des femmes, comme le rappelait Reporterre à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes : contre la déforestation en Inde, au Kenya ou encore en Indonésie, contre les exactions de grands groupes pétroliers comme Shell au Nigéria, contre la construction d’oléoducs qui ravagent les terres des autochtones aux États-Unis et au Canada, ou encore contre l’exploitation d’hydrocarbures en Bolivie, la mobilisation des femmes est primordiale. 

    La plus grande vulnérabilité des personnes de genre féminin serait une des raisons pour lesquelles les femmes s’intéressent plus aux questions écologiques et se sentent plus concernées. Pour la chercheuse Meg du Bray, les hommes blancs et conservateurs aux Etats-Unis se sentent en effet moins vulnérables aux effets du dérèglement climatique. Elle explique cela par une absence d’injustices systémiques et de préjudices subis par cette tranche de la population, par rapport aux femmes et aux minorités, qui sont plus confrontées aux risques et sont “plus disposés à accepter une certaine proportion de risque environnemental”. Cette partie de la population est beaucoup plus confiante dans sa capacité à s’adapter et à surmonter les risques environnementaux et est donc moins anxieuse face au phénomène.

    Pour aller plus loin

    • C’est quoi l’écoféminisme ?, Arte
    • Après la pluie : horizons écoféministes, Solène Ducretot, Alice Jehan
    • François d’Eaubonne et l’écoféminisme, Caroline Goldblum, Françoise d’Eaubonne

  • Lettre ouverte de la société civile : « Le climat mérite un vrai débat »

    Lettre ouverte à Monsieur le Premier ministre, Jean Castex et à Monsieur Richard Ferrand, Président de l’Assemblée nationale sur le manque de débat démocratique sur le projet de loi climat et résilience


    Paris, 22 mars 2021,

    Monsieur le Premier Ministre,
    Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

    L’examen du projet de loi Climat et Résilience a débuté lundi 8 mars en commission spéciale. 25 % des 5000 amendements déposés par les députés ont été jugés irrecevables au motif qu’ils ne seraient pas en lien avec le projet de loi. La plupart d’entre eux visaient pourtant à permettre l’atteinte de nos objectifs climatiques ou reprenaient des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat.

    La présidente de la commission spéciale de l’Assemblée nationale, Mme Maillart-Méhaignerie, juge que ces mesures sont hors du champ de la loi et les considère comme des « cavaliers législatifs » au titre de l’article 45 de la Constitution. Cet article établit pourtant que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte ».

    La jurisprudence du Conseil constitutionnel tend à en faire une interprétation plus limitative selon laquelle le champ de la loi est déterminé par le contenu du texte initial, donc par le Gouvernement. Alors que les parlementaires devraient défendre leur liberté de faire évoluer le texte et faire évoluer la jurisprudence, la présidente de la commission spéciale applique ici une interprétation particulièrement restrictive avec un taux d’irrecevabilité exceptionnellement important.

    Il s’agit aussi d’un refus de débat démocratique. En somme, le gouvernement en présentant un texte diminué, abandonnant des pans entiers des propositions de la convention citoyenne, n’a pas seulement trahi sa promesse envers les citoyens mais empêche le Parlement de débattre de ces sujets. Les députés de tous bords politiques qui avaient repris le flambeau des citoyens en déposant des amendements reprenant des mesures de la Convention Citoyenne mal, peu ou pas mises en œuvre jusqu’ici ont été déboutés.

    Alors que le Tribunal administratif de Paris vient de reconnaître les “carences fautives” de l’État dans la lutte contre le réchauffement climatique et que le Haut Conseil pour le Climat a jugé que le texte présenté par le gouvernement ne permettra pas de tenir nos engagements, cette restriction du débat parlementaire donne une mauvaise image du sérieux de nos institutions dans la lutte contre le dérèglement climatique.
    En plus de la mise à l’écart des amendements jugés irrecevables s’ajoute la décision d’appliquer un temps législatif programmé (TLP) pour la Séance plénière. Un temps de parole réduit de plus de moitié qui, de facto, empêchera certains amendements d’être défendus une fois le temps du groupe politique écoulé.
    Comment expliquer que dans une loi « climat et résilience », les députés ne puissent pas porter des amendements visant à renforcer la responsabilité environnementale des grandes entreprises et des acteurs financiers, à développer le transport ferroviaire, à mieux préserver les forêts, à limiter l’industrialisation de l’élevage ou à renforcer le dispositif du Forfait Mobilité Durable?

    Ce texte est issu d’un processus démocratique inédit visant à reconnecter les citoyens avec la décision publique et permettre l’adoption de mesures ambitieuses pour le climat acceptables par tous. La représentation nationale se doit d’être à la hauteur de cet enjeu.

    Monsieur le Premier ministre, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, nous vous demandons de restaurer les conditions nécessaires au bon déroulement du débat parlementaire en assurant que les amendements ne soient pas censurés de la même manière lors du débat en séance publique.

    Signatures

    • Alofa Tuvalu
    • Alternatiba – Amis de la Terre France
    • ANV-COP21
    • Association négaWatt
    • Attac France
    • Auxilia Conseil
    • Canopée Forêts Vivantes
    • CCFD-Terre Solidaire – CFDT
    • Citoyens Pour Le Climat – CPLC
    • CJD
    • CLER Réseau pour la transition énergétique
    • CliMates
    • Commerce Equitable France
    • Confédération Paysanne
    • Enercoop
    • FAGE
    • France Nature Environnement
    • Fédération française des Usagers de la Bicyclette (FUB)
    • Fondation Abbé Pierre
    • Fondation Nicolas Hulot
    • France Nature Environnement
    • Geres 
    • Greenlobby 
    • Greenpeace
    • Hespul
    • Institut Veblen
    • Mouvement Impact France
    • Notre Affaire à Tous – NAAT
    • Oxfam France
    • Penser L’après
    • Reclaim Finance
    • REFEDD
    • Réseau Action Climat
    • Résilience France
    • Together For Earth
    • Transition France
    • Union syndicale Solidaires
    • WWF France
    • Zero Waste France
  • CP / Birmanie : Total doit cesser de financer la junte

    Communiqué de presse – Vendredi 19 mars 2021

    Depuis le coup d’état en Birmanie du 1er février dernier, Total est redevenu l’un des plus importants contributeurs financiers de la junte militaire, qui a repris les pleins pouvoirs par la force et réprime le mouvement de protestation de la population dans le sang. Plus de 200 morts, des centaines de blessés et plus de 2 000 personnes interpellées. Meurtres, torture, persécutions, exécutions extra-judiciaires, arrestations arbitraires… : le Rapporteur spécial de l’Onu sur la Birmanie évoque de probables crimes contre l’Humanité.   

    Aujourd’hui, nous – Greenpeace, Les Amis de la Terre, la Ligue des droits de l’Homme, Info Birmanie, Notre Affaire à Tous, Sherpa et 350 – exhortons Total à suspendre tout paiement à la junte en plaçant les millions d’euros en jeu sur un compte bloqué (1)

    Selon Justice for Myanmar, Total a notamment versé plus de 229 millions de dollars à l’Etat birman en 2019 en taxes et en parts du gouvernement dans la production de gaz (2). Le Monde rapporte qu’en août 2020, sa filiale Moattama Gas Transportation Co, enregistrée aux Bermudes, a reçu le « prix du plus gros contribuable » dans la catégorie « entreprises étrangères » pour l’année fiscale 2018-2019. Cet argent transite principalement par l’entreprise publique Myanmar Oil and Gas Enterprise (MOGE), dont les liens avec les milieux d’affaires militaires sont pointés du doigt par la société civile (3). Mise en cause pour son opacité (4), cette entreprise représente la source de revenus la plus importante de l’Etat birman et se trouve désormais placée sous le contrôle direct de la junte. Le Rapporteur spécial de l’Onu sur la Birmanie demande d’ailleurs que des sanctions internationales soient prises à l’encontre de la MOGE

    Pendant que la junte tue, Total “évalue la situation”, se dit “préoccupée” (5), mais maintient le statu quo. Pourtant, d’autres entreprises ont réagi à la situation sur place :  l’entreprise singapourienne Puma Energy a suspendu ses activités et l’australienne Woodside annonce qu’elle va démobiliser ses opérations offshore. 

    Interpellée par des citoyens birmans, Total met en avant la fourniture d’électricité qu’elle apporte à une partie de la population, des arguments repris par l’Ambassade de France. Mais la multinationale n’apporte pas de réponse face à l’enjeu central des paiements versés à la junte, et s’en remet aux sanctions décidées par les Etats (6). Cette posture revient à financer un régime militaire brutal et illégitime. 

    Pourtant, des Birmans ont manifesté à Kanbauk le 12 février 2021 pour demander à Total et aux autres compagnies gazières de ne pas financer la junte (7). Des employés de Total en Birmanie ont également rejoint le mouvement de désobéissance civile (8). Et MATA (Myanmar Alliance for Transparency and Accountability), qui regroupe 445 organisations de la société civile birmane, appelle les compagnies pétrolières et gazières à cesser immédiatement tout paiement à la junte, seule mesure à même de garantir le respect des Principes directeurs de l’Onu sur les entreprises et les droits humains, ainsi que de la loi française sur le devoir de vigilance de mars 2017. Nous rappelons d’ailleurs que le plan de vigilance de Total est largement insuffisant, tant dans son contenu que sa mise en oeuvre, et que l’entreprise fait l’objet de deux actions en justice en France sur le fondement de cette loi (9).

    Le message de la société civile birmane est clair : “Si vous continuez le “business as usual”, nous vous tiendrons pour responsables de la violence infligée par la junte au peuple birman.” A son tour, le Ministre de la planification, des finances et de l’industrie nommé par le CRPH (Committee Representing Pyidaungsu Hluttaw) – le parlement en résistance – demande à Total de ne plus collaborer avec le régime de la junte.

    Le gouvernement français doit quant à lui agir pour que des sanctions soient adoptées contre les dirigeants de la junte et contre les entreprises, notamment la MOGE, dont les revenus financent la répression. Ne pas agir en ce sens revient à renforcer la junte dans sa volonté de se maintenir au pouvoir par la force des armes et au prix d’une répression sanglante.

    Signataires

    • Greenpeace France
    • Les Amis de la Terre France
    • Ligue des droits de l’Homme
    • 350.org
    • Notre Affaire à Tous 
    • Info Birmanie
    • Sherpa

    Notes

    (1) Total doit utiliser ses participations et son rôle d’opérateur dans des coentreprises pour suspendre les paiements effectués à la MOGE

    (2)  PWYP affirme que Total  a versé, dans le cadre du bloc Yadana (M5/M6),  768 millions USD en 10 paiements aux entités gouvernementales depuis 2015 : https://static1.squarespace.com/static/5dfc4510ad88600d53f93358/t/603dadae66cb1e4dc2cea3c4/1614654897372/Final+Brief_PWYP_Offshore+Gas.pdf; voir aussi document d’enregistrement universel 2019, publié en mars 2020, p. 422, dans lequel figure le chiffre de 229 597 000 dollars, dont 51 millions d’impôts et taxes, et 178,597 millions de droits a la production, https://www.total.com/sites/g/files/nytnzq111/files/atoms/files/total_document_enregistrement_universel_2019.pdf. 

    (3) https://www.justiceformyanmar.org/stories/how-oil-and-gas-majors-bankroll-the-myanmar-military-regime et https://static1.squarespace.com/static/5dfc4510ad88600d53f93358/t/603dadae66cb1e4dc2cea3c4/1614654897372/Final+Brief_PWYP_Offshore+Gas.pdf

    (4)  Rapport de la Mission d’établissement des faits de l’Onu, “The economic interest of the Myanmar military”page 27 : https://www.ohchr.org/EN/HRBodies/HRC/MyanmarFFM/Pages/EconomicInterestsMyanmarMilitary.aspx

    (5)  Voir notamment https://www.myanmar-responsiblebusiness.org/news/statement-concerned-businesses.html

    (6)  reportage France Info TV :  https://twitter.com/JulienPain/status/1371447008578396165 et réponse de Total : https://twitter.com/TotalPress/status/1371469500260945933

    (7) https://www.facebook.com/DaweiWatch/posts/3428861180575369

    (8) https://www.facebook.com/Myanmar-Alliance-for-Transparency-and-Accountability-MATA-672103292860036/photos/pcb.5056835061053482/5057177711019217

    (9)  Les Amis de la Terre France, Survie et al. contre Total SE (Total Ouganda), https://www.amisdelaterre.org/campagne/total-rendez-vous-au-tribunal /; Notre Affaire à tous, Sherpa et al. contre Total SE (Total Climat), https://preprod.notreaffaireatous.org/actions/les-territoires-qui-se-defendent-et-si-nous-mettions-enfin-les-entreprises-face-a-leurs-responsabilites  / ; sur le plan de vigilance de Total SE voir aussi le radar du devoir de vigilance, https://plan-vigilance.org/company/total-sa   /

  • CP / Loi climat et écocide : les députés rejettent le crime d’écocide et entérinent de nouveaux délits inapplicables

    Communiqué de presseVendredi 19 mars 2021

    La commission spéciale de l’Assemblée nationale a étudié hier soir le Titre VI du  projet de loi Climat et Résilience, dédié à la protection judiciaire de l’environnement. Notre Affaire à Tous, qui se bat depuis sa création pour la reconnaissance de l’écocide et le renforcement du droit répressif environnemental français, regrette que les députés n’aient pas répondu à l’appel de la société civile. Ils nient ainsi, une fois de plus, l’urgence écologique et l’urgence de la justice.

    Les crimes que l’on ne nomme pas sont oubliés. Certains ne mettent pas seulement en danger les populations, mais aussi les écosystèmes, à un niveau tel qu’ils mettent en danger la sûreté de la planète pour la vie humaine. C’est le cas des écocides, ces graves crimes contre le vivant, qui auraient dû être reconnus au travers du projet de loi “Climat et Résilience” suite à la Convention Citoyenne pour le Climat. La reconnaissance du crime d’écocide y avait en effet été plébiscitée avec plus de 90% des voix.

    Si Garde des Sceaux et Ministre de l’écologie avaient promis de mettre en place un “délit de pollution généralisée”, et un mal-nommé délit d’“écocide”, leur proposition avait été affaiblie par Bercy, le Medef et les lobbies, en amont de sa présentation à l’Assemblée nationale.

    Le projet qui a été présenté au vote des députés ne proposait donc ni crime d’écocide, ni véritables délits de mise en danger de l’environnement et d’atteinte au vivant. Ainsi que nous l’avons déjà souligné, le projet de loi ne présentait ainsi pas d’amélioration du régime répressif français actuel, dont l’inefficacité est dénoncée depuis longtemps par les associations et les experts. C’est pourtant possible, et nécessaire : l’Italie a condamné les atteintes à l’environnement dès 2015, lors de la transposition de la Directive européenne de 2008 sur la protection de l’environnement par le droit pénal ; une directive très insuffisamment transposée par la France.

    Plutôt que de répondre à la demande émanant de la société civile et d’adapter enfin notre droit à l’urgence écologique, en reconnaissant et en condamnant les atteintes au vivant pour ce qu’elles sont, les députés réunis en commission spéciale n’ont pas corrigé cette erreur de trajectoire.

    L’examen du Titre VI s’est opéré de manière expéditive, dans une cacophonie d’arguments d’une qualité juridique variable. Le grand gagnant du débat d’hier est un libéralisme qui nie que les droits humains sont conditionnés par les droits du vivant. La majorité, soutenue par les Républicains, a avec constance défendu les intérêts des entreprises, notamment celle des grands groupes. D’une main, elle s’est enorgueillie d’innovations juridiques en droit de l’environnement ; de l’autre, elle a rejeté nombre d’amendements au prétexte qu’ils seraient trop innovants, comme le crime d’écocide ou le détachement des régimes pénaux et administratifs. De concert, majorité et Républicains ont repoussé les amendements rejoignant les inquiétudes des professionnels et des associations, et la nécessité de créer un véritable droit pénal général de l’environnement, pour se contenter d’un texte moins-disant et bancal.

    La Ministre de l’écologie, quant à elle, après avoir fourché en parlant de “crime d’écocide”, a tenté de défendre l’idée selon laquelle il y aurait de “petits écocides”, tel que la destruction d’une petite mare, et de “grands écocides”, comme la déforestation de l’Amazonie. Des propos qui ne peuvent être que source de confusion, car l’écocide est une notion recouvrant les crimes mettant en danger la sûreté de la planète. Non seulement le terme d’écocide est ainsi galvaudé, mais le gouvernement et la majorité parlementaire l’utilisent comme l’arbre cachant la forêt : en utilisant à mauvais escient le terme d’écocide, le gouvernement brandit l’arbre cachant la forêt de l’indigence du régime répressif environnemental qu’il propose à travers ce projet de loi.

    Notre Affaire à Tous le rappelle : nous avons besoin de condamner la mise en danger et les atteintes à l’environnement et au vivant, de manière autonome. La majorité s’évertue à maintenir des conditions juridiques inefficaces, à l’image de la condition de durée de 10 ans pour caractériser les infractions qu’elle propose. 

    Au-delà, nous devons d’urgence débarrasser le régime répressif environnemental de son carcan administratif. Le cas du chlordécone est à cet égard parlant : bien qu’ayant été autorisé par les autorités françaises, le caractère toxique et cancérigène de ce pesticide était connu de tous. Ni le droit actuel, ni la réforme proposée par le gouvernement, ne permettent encore aux populations de Guadeloupe et de Martinique d’obtenir justice. Et il ne s’agit malheureusement que d’un exemple parmi d’autres.

    Malgré le plaidoyer de certains députés pour faire de l’écocide un crime, le terme d’écocide reste donc réduit à une circonstance aggravante d’un délit restreint et à de nombreux égards ineffectif, tandis que le crime d’écocide n’est toujours pas reconnu.

    Ce faisant, la France affaiblit la discussion internationale en cours sur la reconnaissance du crime d’écocide. En prétendant attendre l’inscription de l’écocide dans le droit international, la France oublie d’ailleurs que le droit international se construit grâce et par les propositions des Etats, à travers des traités ou parce que des lois prennent force de coutume international. Les arguments du gouvernement ne sauraient ici être entendus.

    Nous veillerons à ce que des amendements soient déposés d’ici l’examen du texte en séance plénière. La France n’a en effet plus de temps à perdre pour reconnaître et condamner l’écocide. Malgré les mots du Président Macron dès août 2018 dénonçant la politique menée par Jair Bolsonaro en Amazonie brésilienne comme un écocide, malgré les promesses données à la Convention Citoyenne, la France n’a toujours fait aucun pas vers sa reconnaissance dans son droit interne, ni au niveau international. Après les Républiques des Vanuatu et des Maldives, la Belgique s’est pourtant exprimée officiellement en décembre 2020 auprès de l’Assemblée générale de la Cour Pénale Internationale tandis que nombre d’Etats-membres de l’Union ainsi que le Parlement européen travaillent à sa reconnaissance. La France, au fond, reste aux abonnés absents.

    La Convention Citoyenne a également formulé le souhait d’inscrire dans la loi les limites planétaires, une proposition que nous partageons : les limites planétaires doivent devenir un outil central de gouvernance des secteurs public comme privé.

    Nous resterons mobilisés pour que la France condamne enfin les atteintes au vivant et mette fin à l’impunité de ceux qui détruisent notre planète.

    Contacts presse :

    • Marie Toussaint : 06 42 00 88 68 
    • Théophile Keïta : 06 34 19 06 67
  • CP / Loi climat & résilience : pas d’avancées sur le front de la lutte contre l’artificialisation des sols !

    A l’heure où se clôturent les débats sur le projet de Loi « Climat et résilience » en commission à l’Assemblée Nationale, Terre de Liens, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne et Notre Affaire à Tous dénoncent une coquille vide sur le front de la lutte contre l’artificialisation des sols, responsable de la disparition des terres agricoles et de l’effondrement de la biodiversité. Dérogations laissées ouvertes pour les surfaces commerciales inférieures à 10 000 m2, laisser-aller sur le développement des plateformes logistiques, notamment de e-commerce, absence de fiscalité contraignante : aucun des sujets clés permettant un recul net de l’artificialisation des terres agricoles n’est inscrit dans le projet de Loi.

    Loi Climat & résilience : le règne de la « bonne volonté »

    Une déclaration solennelle pétrie de bonnes intentions, c’est aujourd’hui le chemin que prend le projet de loi Climat & Résilience porté par le Gouvernement.

    « Deux ans après l’inscription de l’objectif « zéro artificialisation nette » dans le Plan Biodiversité, qui n’est concrètement pas appliqué sur le terrain, avec cette nouvelle Loi il faudra encore attendre pour des mesures contraignantes. » s’indigne Astrid Bouchedor, chargée de plaidoyer de Terre de liens. « Pour lutter contre l’artificialisation, le projet de loi se focalise sur le renforcement des documents d’urbanisme, une approche qui s’est montrée inefficace ces 30 dernières années. » poursuit-elle.

    Car si les objectifs de réduction par 2 du rythme de l’artificialisation d’ici 2031, fixés par le projet de loi sont louables, les exceptions réglementaires, qui sont à l’origine d’une grande part de l’artificialisation en France, auront toujours la part belle. Ainsi, le moratoire sur l’urbanisme commercial n’intègre toujours pas les plateformes logistiques responsables d’une partie de l’artificialisation des terres agricoles.

    Il exclut notamment les entrepôts de e-commerce, créant de fait un déséquilibre réglementaire majeur pour ce secteur alors qu’il a déjà détruit plus de 81 000 emplois nets dans le commerce physique” précise Alma Dufour, chargée de campagne aux Amis de la Terre. De même, la possibilité de dérogation ouverte aux surfaces commerciales inférieures à 10 000 m2, qui recouvrent 80 % des projets d’urbanisme commercial, rend la mesure très limitée.

    Au-delà des exceptions, la notion d’artificialisation « nette » inscrite dans loi implique une compensation qui est aujourd’hui dévoyée de son principe en se focalisant sur un dédommagement financier.

    Enfin, certaines thématiques pourtant centrales comme la création d’une fiscalité dissuasive ou la lutte contre la vacance des logements ne sont pas abordées dans le projet de loi.

    Des constats alarmants : tous les 6 ans, l’équivalent des terres agricoles d’un département français artificialisé

    Au rythme où se poursuit l’artificialisation des terres en France et à l’heure où la crise sanitaire a rappelé l’importance de la sécurité de l’approvisionnement alimentaire, il est pourtant capital d’agir.

    En France, 50 à 60 000 ha sont artificialisés chaque année, soit l’équivalent des terres agricoles d’un département tous les 6 ans. L’artificialisation concerne majoritairement de terres agricoles riches, souvent en zones péri-urbaines ou littorales. Un changement de destination au profit de l’habitat, de zones industrielles et commerciales aux conséquences irréversibles. En cause : la logique de spéculation immobilière et le manque de rentrées fiscales de nombreuses collectivités, les rendant promptes à accepter n’importe quel projet sur leur territoire.

    L’artificialisation est aussi responsable d’émissions significatives de gaz à effet de serre et l’une des causes les plus importantes de l’effondrement de la biodiversité en France.

    Terre de Liens, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne et Notre Affaire à Tous appellent aujourd’hui les député.e.s qui travaillent sur le texte de Loi à :

    • Introduire des mesures fiscales dissuasives telles que : l’augmentation de la taxe sur les plus-values des terrains devenus constructibles ; la création d’une taxe d’artificialisation qui renchérirait l’aménagement des terres nues au prix de la réhabilitation des friches urbaines.
    • Modifier le moratoire sur l’urbanisme commercial en : incluant la construction des plateformes logistiques, notamment à destination du commerce en ligne ; réduisant les possibilités de dérogation à 2 000 m2 ; et en ajoutant un volet de lutte contre la vacance de logements.

    Alors que le Gouvernement est aujourd’hui plus que jamais scruté pour son engagement pour le climat, la lutte contre l’artificialisation des sols et pour un meilleur partage des terres est un enjeu capital dont les politiques doivent se saisir d’urgence tant les conséquences sur la biodiversité et la disparition des terres agricoles sont irréversibles.

    Contacts presse :

    Nathalie Blin : n.blin@terredeliens.org, 06 77 96 26 56

    Alma Dufour, alma.dufour@amisdelaterre.org, 06 67 92 36 89

    Chloé Gerbier, gerbierchloe@gmail.com06 46 43 55 09

  • Rapport « Vigilance climatique » 2021

    Analyse du plan de vigilance climatique de 27 multinationales françaises

    Lundi 8 mars 2021, Notre Affaire à Tous publie son nouveau rapport de la vigilance climatique qui passe au crible la conformité de 27 multinationales françaises à leurs obligations légales. L’objet de cette étude est d’évaluer la mise en œuvre de la loi sur le devoir de vigilance en matière climatique. Pour ce faire, des critères de notation ont été développés afin d’évaluer le comportement des multinationales. Ceux-ci s’appuient sur :

    • La loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères
    • Les objectifs internationaux de l’Accord de Paris

    • Les données scientifiques du GIEC et de l’Agence Internationale de l’Energie

    Ces critères constituent une première tentative de contribution à un modèle d’évaluation de la conformité du devoir de vigilance en matière climatique.

    Cette nouvelle étude juridique comparative identifie les nombreuses et persistantes défaillances de 27 multinationales françaises en matière climatique. L’étude passe au peigne fin les stratégies marketing et la communication des entreprises parmi les plus polluantes.

    Résultats

    Le constat est alarmant : quatre ans après l’adoption de la loi, les entreprises n’adaptent toujours pas leur comportement face à la crise climatique et aucune entreprise étudiée ne se conforme pleinement aux exigences de la loi sur le devoir de vigilance.

    • Aucune entreprise n’obtient la totalité des points, alors qu’il s’agit de la seule note permettant de se prémunir de toute responsabilité.
    • 18 entreprises sur 27 n’ont pas obtenu une note supérieure à la moyenne.
    • 7 entreprises sur 27 n’intègrent toujours pas formellement le climat à leurs plans de vigilance
    • Seulement 5 entreprises sur 27 sont alignées sur une trajectoire compatible avec l’Accord de Paris.

    Total, Natixis, Casino, Auchan et Bouygues se situent tout en bas de notre classement en raison de politiques climatiques particulièrement insuffisantes.

    Toutes les entreprises du benchmark s’exposent par conséquent à un risque juridique : la loi permet à toute personne ayant un intérêt à agir de demander au juge d’enjoindre l’entreprise à publier et mettre en œuvre un plan de vigilance conforme aux obligations légales.

    Les raisons de l’action

    Si les pouvoirs publics doivent jouer un rôle fondamental dans la lutte contre le réchauffement climatique, les entreprises partagent aussi cette responsabilité. Très fortement contributrices au réchauffement, les multinationales françaises doivent répondre de leurs actes et accélérer leur transition énergétique. Ainsi, Notre Affaire à Tous cherche à remédier au vide juridique concernant la non-application de l’Accord de Paris aux entreprises en s’appuyant notamment sur la loi relative au devoir de vigilance.

    L’objectif final de ce benchmark est de renforcer l’application de la loi vigilance et de montrer son utilité en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Des courriers d’interpellation ont été envoyés en sus aux entreprises afin de leur demander :

    • d’être parfaitement transparentes, en particulier lorsqu’elles divulguent leur empreinte carbone ;
    • de réduire drastiquement leurs émissions de manière à contenir le réchauffement climatique en deçà de 1,5 degrés. 

    Les enseignements clés du rapport

    1- Manque d’intégration du climat au plan de vigilance

    7 entreprises sur 27 n’intègrent toujours pas le climat à leur plan de vigilance : Engie, Suez, Eiffage, Bouygues, Danone, Veolia et la Société Générale. Pourtant, l’analyse du risque climat au sein du plan de vigilance devrait être faite de manière systématique, en particulier pour les entreprises fortement contributrices au réchauffement climatique. En effet, la science climatique est extrêmement claire : les différents rapports du GIEC démontrent que l’aggravation du changement climatique comporte des risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement, en particulier au-delà de 1,5°C. Le risque climatique doit donc être intégré dans le plan de vigilance de chaque entreprise. Si 20 entreprises intègrent désormais le climat dans leur plan de vigilance, près de la moitié d’entre elles ne le font que très partiellement et surtout aucune ne se conforme entièrement à toutes les exigences de cette  loi.

    2- Empreinte carbone en hausse et communication incomplète

    Les entreprises analysées dès le premier benchmark, ainsi que les deux nouvelles entreprises étudiées dans cette seconde étude (Bolloré et Casino), ont toutes un lourd impact climatique : selon leurs propres communications, l’empreinte carbone cumulée des vingt-sept multinationales analysées s’élève à 1854,82 Mt  CO2e, soit plus de quatre fois les émissions territoriales de la France. Plus inquiétant, l’empreinte carbone est en progression par rapport à l’année dernière. Si cette hausse peut s’expliquer, en partie, par un calcul plus complet effectué par les entreprises, elle indique en tout cas que les émissions ne baissent pas ! 

    L’impact climatique des entreprises reste encore très insuffisamment retracé. Douze entreprises sur 27 ne publient pas ou de manière très incomplète leur empreinte carbone : Axa, Société Générale, Natixis, Air Liquide, Suez, Airbus, Auchan, Casino, Carrefour, Bouygues, ADP, BNP Paribas.

    Mais, des études indiquent que ces estimations sont largement sous-estimées. Dans le secteur bancaire, les entreprises retracent moins de 5% de leurs émissions.  Si l’ensemble des émissions du secteur bancaire étaient divulguées, l’empreinte carbone des entreprises de cette étude dépasserait 4 889 Mt CO2e et représenterait plus d’onze fois les émissions territoriales françaises !

    3- Une reconnaissance limitée du risque climatique

    La loi sur le devoir de vigilance exigeant une identification des risques pesant sur les droits humains et sur l’environnement, chaque entreprise doit explicitement reconnaître les conséquences de ses émissions de GES et de sa contribution au changement climatique.

    Pourtant, seul le Crédit Agricole reconnaît explicitement sa contribution au changement climatique et analyse correctement les conséquences de ce dérèglement sur les droits humains et l’environnement. Une réelle prise de conscience demeure donc nécessaire afin de saisir l’ampleur de leur responsabilité et de mettre en œuvre les mesures adéquates pour lutter contre le changement climatique.

    4- Des engagements peu précis et rarement ambitieux

    Pour prévenir les risques graves d’atteinte aux droits humains et à l’environnement, les entreprises doivent adopter une stratégie efficace et cohérente avec l’Accord de Paris. Pour ce faire, les engagements pris doivent être chiffrés et détaillés en plusieurs étapes avec des objectifs intermédiaires précisés à l’horizon 2030, 2050 et au-delà.

    La trajectoire 1,5°C (visant la neutralité carbone en 2050) est la seule trajectoire permettant de réaliser les objectifs de l’Accord de Paris avec une probabilité raisonnable (voir infra – méthodologie). Seules 5 entreprises sur 27 se sont engagées sur la trajectoire 1,5°C : Danone, Schneider, Suez, Axa et EDF. Et encore, Axa et EDF n’ont pas d’engagement sur tous les scopes, et Axa n’a pas non plus d’objectifs intermédiaires précis.

    Par ailleurs, la grande majorité des entreprises analysées ne communique pas d’engagements précis concernant la totalité de leurs émissions (directes et indirectes) et échelonnés dans le temps.

    5- L’absence mise en oeuvre de mesures cohérentes

    La loi sur le devoir de vigilance oblige les entreprises à rendre compte publiquement de la mise en œuvre effective des mesures adaptées de prévention contre les risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement. Autrement dit, les entreprises doivent communiquer les mesures adoptées pour limiter le réchauffement planétaire en-deçà des 2°C, limite au-delà de laquelle le dérèglement climatique est extrêmement dangereux pour nos écosystèmes.

    Les mesures présentées concernent rarement l’ensemble des activités émettrices des groupes et nombre d’entre elles sont basées sur des technologies indisponibles à l’heure actuelle, telles que les technologies de capture et de séquestration du carbone. Par ailleurs, le maintien de certaines activités (par ex. hydrocarbures non conventionnels) ou l’absence de plan de transition pour certains produits (par ex. voitures thermiques) remettent fréquemment en question la cohérence de la stratégie communiquée par l’entreprise. Enfin, aucune entreprise ne publie des informations suffisamment précises pour qu’un observateur extérieur puisse évaluer la mise en œuvre des mesures annoncées.

    En somme, toutes les entreprises font face à un risque de non-conformité avec la loi sur le devoir de vigilance. Si elles ne se conforment pas à ces demandes, les multinationales pourront être attaquées en justice, tout comme Total.

    6- Des stratégies ne répondant pas aux priorités du plan de relance

    Un plan massif d’aides publiques aux entreprises a été établi en réponse à la crise sanitaire. Ces aides prennent de nombreuses formes : plan de relance sectoriel, baisse des impôts dit de production, opérations de refinancement de la BCE, augmentation des achats d’obligations d’entreprises par la BCE, prêt garanti par l’État, chômage partiel, etc.

    Face à l’ampleur des montants mobilisés, plusieurs associations ont demandé l’application d’un principe d’éco-conditionnalité afin de lier performance climatique et obtention de l’aide publique. Finalement, seules les aides sous forme de prise de participation par l’intermédiaire de l’Agence des participations de l’État sont conditionnées aux engagements de réduction des émissions de GES pris par les entreprises.

    Le benchmark indique pourtant que la quasi-totalité des entreprises ayant bénéficié d’aides publiques dans le cadre de la crise sanitaire ne respectent pas leurs obligations climatiques.

    Nos ressources

  • CP / Devoir de vigilance climatique : Notre Affaire à Tous interpelle plusieurs multinationales françaises potentiellement hors-la-loi

    Communiqué de presse – 8 mars 2021

    Lundi 8 mars 2021

    Notre Affaire à Tous publie son édition 2021 du “benchmark de la vigilance climatique” (1) qui passe au crible le comportement de 27 multinationales (2). Quatre ans après son adoption, aucune entreprise étudiée ne se conforme pleinement aux exigences de la loi sur le devoir de vigilance, malgré l’urgence climatique (3). Alors que le juge a récemment rappelé la nécessité d’un contrôle social du devoir de vigilance, l’association, qui a déjà assigné la pétrolière Total et le groupe Casino en justice, interpelle de nouveau ces entreprises particulièrement polluantes. 

    Malgré sa condamnation récente dans l’Affaire du Siècle (4), l’action climatique de l’ État, notamment en matière de régulation des entreprises, est très insuffisante. Loin de combler ces lacunes, le dernier projet de loi sur le climat n’impose pas de trajectoire précise de décarbonation aux entreprises (5).

    Afin de surmonter cet immobilisme, Notre Affaire à Tous s’appuie sur la loi relative au devoir de vigilance pour contraindre les plus gros pollueurs français à se conformer aux exigences légales et donc lutter contre le dérèglement climatique. Cette loi pionnière oblige les multinationales à publier et à mettre en œuvre un plan de vigilance afin de prévenir les atteintes graves aux droits humains et à l’environnement. Le 11 février dernier, dans l’action en justice contre Total, le tribunal judiciaire de Nanterre a reconnu sa compétence en matière de vigilance climatique démontrant la volonté de la justice française d’agir pour la lutte contre le changement climatique. 

    Si le second volet du benchmark s’inscrit dans un contexte judiciaire favorable, il ne peut que constater à l’inverse l’inertie générale des entreprises. De nouveau, aucune entreprise n’obtient la totalité des points, alors qu’il s’agit de la seule note permettant de se prémunir de toute responsabilité. Les notes décernées sont du reste très faibles : 18 entreprises sur 27 n’ont pas obtenu une note supérieure à la moyenne. 7 entreprises sur 27 n’intègrent toujours pas formellement le climat à leurs plans de vigilance (6). S’agissant plus concrètement des trajectoires de réduction de GES, seules 5 entreprises sur 27 (7) sont alignées sur une trajectoire compatible avec l’Accord de Paris. 

    Les entreprises ne dévoilent également pas correctement leurs émissions directes et indirectes, malgré les différentes règles en vigueur. Selon les informations publiées par les entreprises elles-mêmes, l’empreinte carbone cumulée des 27 multinationales évaluées s’élève à 1 854,82 millions de tonnes (Mt) de CO2e.Mais, des études indiquent que ces estimations sont largement sous-estimées. Dans le secteur bancaire, les entreprises retracent moins de 5% de leurs émissions (8). 

    Si l’ensemble des émissions du secteur bancaire étaient divulguées, l’empreinte carbone des entreprises de cette étude dépasserait 4 889 Mt CO2e et représenterait plus d’onze fois les émissions territoriales françaises ! De manière générale, les entreprises étudiées ne mettent pas toutes les mesures en œuvre afin de faire baisser les émissions directes et indirectes de leurs filiales et de leurs chaînes de sous-traitance. Il s’agit pourtant du cœur de la loi vigilance. 

    Notons enfin que Total, Natixis, Casino, Auchan, Bouygues se situent tout en bas de notre classement en raison de politiques climatiques particulièrement insuffisantes. 

    En somme, si les entreprises ne mettent pas toutes les mesures en œuvre pour se conformer à la loi vigilance, les lettres d’interpellation pourraient se transformer en assignation. 

    Pour Laure Barbé, de Notre Affaire à Tous,“Le contrôle du respect par les entreprises de leurs obligations climatiques est indispensable, qui plus est dans le contexte de crise sanitaire actuel où celles-ci bénéficient d’aides publiques importantes dans le cadre du plan de relance. Afin qu’un modèle économique résilient et respectueux de l’environnement et des droits humains puisse émerger, ces aides doivent être dirigées vers des entreprises disposant d’une réelle stratégie de décarbonation de leurs activités.”

    Pour Avril Julienne, de Notre Affaire à Tous, “l’empreinte carbone de ces entreprises ne baisse toujours pas, pire elle est en nette progression par rapport à l’année dernière. Les mesures annoncées ne sont ni suffisamment précises ni chiffrées, ce qui ne permet pas de constater leur impact concret sur le bilan carbone des entreprises. Les entreprises doivent entièrement revoir leurs stratégies et la mise en œuvre de celles-ci afin d’être à la hauteur de l’enjeu.”

    Lien vers le rapport complet

    CONTACT PRESSE :

    • Cécilia Rinaudo, Coordinatrice Générale : cecilia@notreaffaireatous.org – 06 86 41 71 81
  • CP / Ecocide et projet de loi climat : condamner les atteintes à la nature est urgent

    Communiqué de presse – 1 mars 2021

    La Convention citoyenne pour le climat avait demandé la reconnaissance du crime d’écocide et son inscription dans la loi française, et en avait même fait l’une de ses revendications phares, en réclamant que celle-ci soit mise au vote référendaire. Alors qu’un nombre croissant d’Etats à travers le monde demande sa reconnaissance, tout comme le Parlement européen, le gouvernement a formulé des propositions relatives au droit répressif environnemental, galvaudant le terme d’écocide au risque de se mettre en retrait de la communauté internationale et d’en affaiblir la puissance. Les mesures complémentaires proposées ont par ailleurs une efficacité plus que discutable. Notre Affaire à Tous publie aujourd’hui une analyse des dispositions prévues ainsi que des amendements et appelle le gouvernement et les parlementaires à enfin reconnaître la valeur intrinsèque de la nature en condamnant les atteintes qui lui sont portées pour ce qu’elles sont. 

    Pour faire face au dérèglement climatique en particulier et aux comportements entraînant la destruction de notre planète et le dépassement des limites planétaires en général, la Convention citoyenne avait repris la proposition de criminaliser l’écocide pour laquelle Notre Affaire à Tous se bat depuis longtemps. Le gouvernement a réduit à néant cette ambition, en détournant la définition d’écocide de celle débattue dans le débat national et international qui vise à l’inscrire parmi les crimes les plus graves portant atteinte à des valeurs universelles ; et en proposant de nouvelles incriminations environnementales rendues quasiment inopérantes au regard de leur champ d’application extrêmement restrictif. 

    A l’incrimination de l’écocide, le gouvernement a préféré proposer d’une part l’aggravation des peines applicables aux infractions sectorielles déjà prévues dans le code de l’environnement ; et d’autre part la création de nouveaux délits se caractérisant par des conditions d’application fortement restrictives et par un système incohérent de gradation des peines. On est bien loin de la promesse des Ministres de l’écologie et de la justice de brandir “le glaive de la justice face aux voyous de l’environnement”. 

    “Abus de langage” : le terme d’abus de langage fut utilisé par le CESE afin de dénoncer la faiblesse des mesures proposées par le gouvernement au sein du projet de loi pour ratrapper le retard climatique pris par la France et dénoncé par le Conseil d’Etat ainsi que le tribunal administratif de Paris dans l’Affaire du siècle. Il est tout aussi approprié ici, tant le gouvernement tente de cacher, à travers de nouvelles propositions, son refus de sanctionner les atteintes au vivant et joue avec les mots en prétendant créer des “délits de mise en danger de l’environnement et de pollution généralisée”, qui n’ont rien de général. 

    Le gouvernement fait ainsi le choix de continuer à appréhender les atteintes à la nature par la répression d’activités humaines, plutôt que par les dommages causés sur les écosystèmes. Il persiste à appréhender le vivant de manière segmentée, plutôt que d’appréhender l’interaction et les interdépendances entre les différents éléments des écosystèmes. Il s’acharne enfin à préserver le régime d’autorisation administrative qui a pourtant montré toutes ses limites : de la longueur des procédures à la permissivité des autorités administratives ; résultant en un “permis de polluer” de fait, si tant est qu’industriels et décideurs soient d’accord, et quels que soient les dommages causés. Les conditions posées par le gouvernement pour définir ce qui relève des nouvelles infractions sont par ailleurs tellement drastiques, que les modifications proposées ne couvriront qu’un nombre infime de cas. 

    A ce stade, la proposition gouvernementale réussit à peine à mettre en conformité le droit français avec le droit européen et notamment la Directive portant protection du droit pénal de l’environnement de 2008, qui sera révisée dès la fin 2021 car trop faible et inadaptée aux enjeux actuels. Notre Affaire à Tous tire la sonnette d’alarme : l’urgence environnementale requiert une condamnation forte et urgente de l’ensemble des atteintes à l’environnement, a fortiori du crime d’écocide. Les citoyen.ne.s ont fait de la préservation de l’environnement l’une de leurs priorités, il est temps que le droit s’y accorde et pénalise enfin les atteintes au vivant pour ce qu’elles sont. Face à la criminalité environnementale et à la mise en danger de la vie humaine sur Terre, le gouvernement ne brandit guère plus qu’un doigt levé. 

    Notre Affaire à Tous regrette qu’au-delà du rejet de la proposition de la Convention citoyenne sur l’écocide, ce projet de loi ne propose pas un système lisible, cohérent et proportionné de droit pénal de l’environnement. Notre Affaire à Tous déplore également qu’un véritable débat public n’ait pas émergé autour du droit répressif de l’environnement, quand les atteintes au vivant mettent en danger la sûreté de la planète et la capacité de l’humanité à habiter la Terre ; aussi bien que notre sécurité, y compris définie au sens strict : la criminalité environnementale est la quatrième source de financement des groupes armés et organisations terroristes selon Interpol.

    Pour Marie Toussaint, co-fondatrice de Notre Affaire à Tous, “Les propositions du gouvernement tapent à côté : elles ne répondent ni à l’enjeu de lutte contre le dérèglement climatique, ni à l’urgence de l’incrimination de l’écocide. Et c’est même pire : en refusant de condamner les atteintes à la nature pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire de reconnaître les infractions autonomes d’atteinte à l’environnement, le gouvernement nie que nous dépendons du vivant et qu’il doit être sanctionné que de lui porter atteinte, et donc de nous causer préjudice.”

    Pour Théophile Keïta de Notre Affaire à Tous : “Le défaut du Projet de loi est double : les faits incriminés sont considérablement restreints, loin de la sanction d’atteintes générales à l’environnement, et la définition de l’écocide ne correspond en rien aux propositions des universitaires ou de la Convention citoyenne pour le climat. Le défi, qui n’est pas relevé ici, est de proposer des textes de droit pénal de l’environnement juridiquement efficaces, en plus d’assurer les moyens de leur mise en œuvre par la police de l’environnement et l’institution judiciaire.”

    Contacts presse :

    • Théophile Keita : theophile.keita@notreaffaireatous.org
    • Cécilia Rinaudo : cecilia.rinaudo@notreaffaireatous.org
  • CP / L’Affaire du Siècle dépose de nouvelles pièces dans le dossier Grande-Synthe : l’État n’en fait décidément pas assez

    Les organisations de l’Affaire du Siècle viennent de déposer de nouvelles pièces au recours de la ville de Grande-Synthe devant le Conseil d’État. Sans surprise, elles démontrent que les politiques climatiques actuelles ne permettront pas à la France d’atteindre ses objectifs à l’horizon 2030, pas plus que le projet de loi Climat et résilience présenté la semaine dernière en conseil des ministres.

    Le 19 novembre dernier, le Conseil d’État a donné trois mois au gouvernement pour « justifier que la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre à horizon 2030 pourra être respectée » [1]. Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France et Oxfam France, qui soutiennent l’action en justice de la commune de Grande-Synthe [2], ont mandaté le cabinet d’expertise indépendant Carbone 4 pour répondre à la question posée par les juges.

    La conclusion de l’étude réalisée par Carbone 4 est sans appel : « il est certain que les mesures adoptées ou envisagées par l’État, notamment dans le cadre du projet de loi Climat et résilience, ne permettront pas d’atteindre l’objectif global de réduction de 40% des émissions de GES à 2030 par rapport à 1990. » L’étude intitulée « L’État français se donne-t-il les moyens de son ambition climat ? » [3], couvre l’ensemble des secteurs d’émissions couverts par la SNBC [4], et explore en détail les mesures sur trois secteurs représentant la moitié des émissions de gaz à effet de serre de la France : le transport de personnes, le logement et l’agriculture. 

    Pour Guillaume Hannotin, l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation qui représente les organisations de l’Affaire du Siècle devant le Conseil d’État : « L’étude de Carbone 4 démontre de façon rigoureuse et transparente que des mesures supplémentaires sont nécessaires pour que la France respecte ses objectifs 2030, objectifs que le Conseil d’État a jugé contraignants le 19 novembre dernier. À l’heure où toutes les institutions du pays, en dernier lieu la juridiction administrative, reconnaissent l’urgence qu’il y a à agir contre le dérèglement climatique, l’on ne peut qu’être surpris par la posture du gouvernement consistant à dire que son action est suffisante. Il y a un véritable hiatus entre la perpétuelle affirmation d’objectifs ambitieux et les mesures mises en place. En réalité, la politique climatique de la France repose sur de la pensée magique. »

    Pour les organisations de l’Affaire du Siècle : « Alors que l’insuffisance du projet de loi Climat et résilience a été pointée du doigt de toutes parts [5], ces nouveaux éléments nous donnent bon espoir que, dès cet été, la justice ordonne à l’État de prendre enfin des mesures concrètes pour réduire effectivement les émissions de gaz à effet de serre et remettre la France sur le chemin tracé par l’Accord de Paris. L’été 2021 pourrait donc marquer un véritable tournant pour le climat ! »

    Le Conseil d’État a en effet annoncé qu’il rendrait sa décision à l’été. En cas de non-respect par l’État d’une éventuelle condamnation, le Conseil d’État a déjà annoncé un suivi et la possibilité d’une astreinte. [6]

    En parallèle, dans le recours de l’Affaire du Siècle, le tribunal administratif de Paris a reconnu, le 3 février dernier, la responsabilité de l’État français dans la crise climatique, l’illégalité de son inaction et la nécessité de réparer les dommages ainsi causés. Les juges ont donné à l’Affaire du Siècle et à l’État jusqu’au 6 avril pour produire de nouveaux arguments qui lui permettraient de « déterminer avec précision les mesures qui doivent être ordonnées à l’État » [7]. 

    Notes

    1. communiqué de presse et décision du Conseil d’État du 19 novembre 2020
    2. La commune de Grande-Synthe a déposé un recours au Conseil d’État en décembre 2018. L’Affaire du Siècle est intervenante volontaire dans le dossier et a déposé un premier mémoire en février 2020.
    3. L’étude de Carbone 4 « L’État français se donne-t-il les moyens de son ambition climat ? » démontre que « ces trois secteurs clés accuseront un retard important sur leurs objectifs » de réduction des émissions. Carbone 4 montre par exemple que le nombre de rénovations performantes attendues sur le parc de logements (2,7 millions) ne correspond qu’à un peu plus de la moitié de ce qu’il faudrait réaliser sur la période d’après la SNBC (4,5 millions).
    4. La SNBC est la Stratégie nationale bas carbone, feuille de route de l’État pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre de la France, qui fixe notamment les budgets carbone annuels.
    5. Avis du CESE ; avis du Conseil d’État ; avis du Haut Conseil pour le Climat.
    6. https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/pollution-de-l-air-et-gaz-a-effet-de-serre-suites-donnees-aux-decisions-de-juillet-et-novembre-2020 
    7. Communiqué de presse et décision du tribunal administratif de Paris

    Contacts presse

    Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo, 06 86 41 71 81 – cecilia@notreaffaireatous.org
    Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente, 07 87 50 74 90 – p.torrente@fnh.org
    Greenpeace France : Kim Dallet, 06 33 58 39 46 – kim.dallet@greenpeace.org
    Oxfam France : Marion Cosperec, 07 68 30 06 17 – mcosperec@oxfamfrance.org