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  • 23 mars 2021 – Changement climatique et inégalités de genre

    Ce 15e numéro de la revue de presse « IMPACTS » se concentre sur l’augmentation des inégalités et des discriminations de genre, en lien avec le dérèglement climatique.

    Dès 2007, le GIEC notait que les conséquences du changement climatique variaient selon le sexe et indiquait que les plus pauvres étaient les plus directement touchés par ce phénomène. Or, dans le monde, 70% des personnes subsistant avec moins d’un dollar par jour sont des femmes et les femmes possèdent moins de 1% des ressources du monde. Le GIEC a ainsi établi dans son rapport de 2014 que les inégalités de genre existantes sont accrues par les risques climatiques. La position sociale des femmes les fragilise face au dérèglement climatique et elles comptent parmi les premières affectées alors même que leurs capacités d’adaptation et leur résilience sont limitées par les normes sociales. 

    Pour combattre les inégalités sociales climatiques et environnementales, il nous faut les connaître. C’est le sens de cette revue de presse élaborée par les bénévoles de Notre Affaire à Tous, qui revient chaque mois sur les #IMPACTS différenciés du changement climatique, sur nos vies, nos droits et ceux de la nature.

    Les femmes : premières impactées par le dérèglement climatique

    A l’échelle mondiale, les plus pauvres sont les plus touchés face au changement climatique et la majorité des pauvres sont des femmes. En Asie et en Afrique, les femmes représentent 70% des personnes vivant sous le seuil de pauvreté, les laissant plus vulnérables face aux impacts du dérèglement climatique. La pauvreté est un facteur qui rend difficile l’adaptation au dérèglement climatique, et ce d’autant plus que les charges et tâches ménagères reposent souvent sur les femmes. 

    Les pertes et dégâts subis sont accrus pour les femmes. Ceci s’explique par différents facteurs. Leur position sociale les fragilise face au dérèglement climatique et elles comptent parmi les premières affectées alors même que leurs capacités d’adaptation et leur résilience sont limitées par les normes sociales, par un moindre accès à des financements adéquats et par une participation limitée à la vie publique et politique, particulièrement dans les pays dits du sud

    De par leur condition sociale et les rôles genrés, elles sont majoritairement en charge de l’alimentation de subsistance, de l’approvisionnement en eau, des tâches ménagères, et de tous ces éléments qui sont directement touchés par le dérèglement climatique, alors même qu’elles sont plus pauvres, ont moins de capital culturel et social et donc sont plus vulnérables aux crises. Leurs rôles sociaux les conduisent généralement à s’occuper des enfants, à attendre l’autorisation d’un mari ou d’un parent masculin pour sortir de la maison ou encore à ne pas apprendre à nager. Elles ont un moindre accès à l’information, une moindre capacité de mobilité, un moindre accès à l’éducation et à la formation. En effet, “une fille sur 4 ne va pas à l’école dans les pays en développement”. 

    • L’impact des catastrophes naturelles sur les femmes

     Tous ces éléments font que les femmes sont plus vulnérables lors d’événements climatiques extrêmes. En effet, au niveau mondial, les femmes sont quatorze fois plus susceptibles de mourir lors d’une catastrophe naturelle que les hommes. Pour prendre des exemples concrets, 80% des victimes indonésiennes du tsunami du 26 décembre 2004 étaient des femmes. La catastrophe de l’Ouragan Katrina en 2005 a également mis en lumière l’intersection de plusieurs inégalités, notamment de genre, en plus d’inégalités sociales et raciales. On estime notamment que 80% des adultes laissés-pour-compte suite à l’ouragan étaient des femmes.

    Climat et santé féminine

    La santé des femmes est aussi particulièrement impactée par le réchauffement climatique, concernant notamment la malnutrition et la santé sexuelle et reproductive. 

    Les femmes enceintes sont plus vulnérables aux effets du dérèglement climatique. Les études sont encore récentes et peu nombreuses, mais la chaleur aurait un impact sur les accouchements prématurés dont le taux passerait de 5 à 16% en cas de vague de chaleur. Ces études montrent que les impacts sont d’autant plus importants quand les femmes viennent de milieux socio-économiques défavorisés. Les femmes enceintes et allaitantes sont également plus vulnérables aux maladies comme la dengue et le paludisme. Une étude de 2020 réalisée en Californie montrait que le fait de vivre à proximité de puits de pétrole et de gaz actifs peut exposer les femmes enceintes à un risque plus élevé de donner naissance à des bébés de faible poids, en particulier dans les zones rurales. En effet, les femmes enceintes qui vivent à moins d’un kilomètre des puits de pétrole et de gaz ont 40 % plus de chances d’avoir des bébés de faible poids à la naissance et 20 % plus de chances d’avoir des bébés petits pour leur âge gestationnel. 

    En Europe, plus de femmes que d’hommes sont décédées lors de la canicule de 2003, selon une étude de 2008. Une surmortalité de plus de 85% chez les femmes de 75 ans et plus et de 51% chez les hommes de la même tranche d’âge a ainsi été observée. En plus d’être plus exposées à ces risques sanitaires, les femmes ont également moins accès aux soins lorsqu’elles en ont besoin, à cause des normes genrées ou à cause de salaires plus faibles, qui les empêchent parfois d’aller seule dans une structure de santé.

    Violences de genre et dérèglement climatique

    Le dérèglement climatique a également pour conséquences une augmentation des violences de genre. Ces violences (viols, agressions sexuelles, prostitution forcée…), déjà subies lorsqu’il n’y a pas de crise, augmentent dans les situations post-catastrophes ainsi que lors de déplacements de populations et de migrations. 

    L’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) publiait d’ailleurs en janvier 2020 une étude intitulée : “La violence basée sur le genre et son lien avec l’environnement : la violence de l’inégalité”, basée sur une enquête longue de dix années. Dans une autre étude publiée en juillet 2020, l’ONG CARE rappelait également que “les femmes déplacées par les catastrophes climatiques font aussi face à un plus grand risque de violence basée sur le genre, y compris la violence domestique, le mariage forcé et le trafic d’être humain”. De ce fait, beaucoup de femmes rescapées de catastrophes naturelles évitent de fréquenter les abris mis en place car elles craignent d’être agressées sexuellement. Ce constat est alarmant alors que la majorité des personnes déplacées par le changement climatique sont des femmes et des enfants. Paradoxalement, parce qu’elles sont chargées de s’occuper des enfants et des personnes âgées, le départ du foyer peut être rendu plus difficile. 

    De plus, “les femmes et les filles doivent aller plus loin pour chercher de la nourriture, de l’eau ou du bois de chauffage” dû à la raréfaction des ressources. Ces distances et la difficulté de ces trajets augmentent les dangers physiques que subissent les femmes et ces dangers rendent propices le chantage sexuel : quand les ressources vitales se font rares (nourriture, eau), les hommes usent du chantage pour échanger les ressources contre des faveurs sexuelles.

    Métiers du care et charge mentale environnementale

    Le care est défini comme “des expériences ou d’activités “qui consistent à apporter une réponse concrète aux besoins des autres – travail domestique, de soins, d’éducation, de soutien ou d’assistance”. Ce terme définit donc à la fois des tâches domestiques mais également un milieu professionnel. Si les femmes sont davantage représentées sur le marché du travail en France, la répartition des métiers est encore très genrée avec notamment une surreprésentation des femmes dans le milieu du care, domaines souvent peu rémunérés, bien qu’indispensables. En effet, 90% des services du care sont menés par des femmes. En 2014, elles représentaient notamment 97,7% des aides à domicile, aides ménagères et assistants maternels, 90,4% des aides-soignantes, 87,7% des infirmières et sages-femmes, et 94,3% des employées de maison. 

    Les sociologues Christelle Avril et Irene Ramos Vacca définissent les « métiers de femmes » comme « ceux qui s’inscrivent dans le prolongement des fonctions ménagères et maternelles » et pour la chercheuse Camille Froidevaux-Metterie « on estime que c’est dans la nature des femmes de prendre soin des autres, ce qui explique que ces métiers soient si peu considérés et si mal rémunérés« . En effet, cette situation peut s’expliquer par l’éducation des personnes genrées femmes, auxquelles les valeurs d’empathie sont plus souvent apprises, même inconsciemment. C’est ce qui peut expliquer aussi la part importante de femmes qui s’engagent pour l’écologie, à la fois dans la sphère privée et dans les associations environnementales. 

    Les métiers du care sont encore trop dévalorisés et précaires. Nous l’avons vu pendant la crise sanitaire, ces secteurs essentiels, souvent occupés par des femmes, ont été mis en lumière. L’écoféminisme prend en compte ce sujet car le “soin des personnes, de la société et de la planète au sens le plus large du terme, rajoute une charge mentale supplémentaire aux femmes”, selon Solène Ducretot, co-fondatrice du Collectif Les Engraineuses et du festival Après La Pluie. 

    Il est toutefois important de noter que la surreprésentation des hommes dans certains métiers les expose également aux conséquences sanitaires du dérèglement climatique. C’est le cas par exemple pour les travailleurs du bâtiment, plus exposés en période de canicule. Les agriculteurs subissent aussi de fortes pressions économiques résultant du dérèglement climatique, pouvant mener à des dépressions et des suicides

    • Charge mentale et écologie à la maison

     C’est bien connu, les tâches ménagères et la gestion du foyer sont encore majoritairement gérées par les femmes. Or, à cette charge déjà importante, s’ajoute le poids de la charge mentale et morale liée aux questions écologiques et environnementales et à leur application dans le quotidien du foyer. Ce sont souvent elles qui doivent gérer le changement lié à des pratiques zéro déchet ou plus écologiques comme la fabrication de produits ménagers, l’utilisation des couches lavables pour les enfants, le recyclage des déchets, l’achat de produits plus écologiques, repenser l’alimentation du foyer etc. Cela conduit à une charge de tâches ménagères supplémentaire, pouvant entraîner une fatigue extrême, mais également un fort sentiment de culpabilité en cas d’échec.

    Droits des femmes, transition écologique et écoféminisme

    L’étude des inégalités de genre et la montée des problématiques environnementales ont mené à de nombreuses réflexions sur l’écologie et les droits des femmes. L’écoféminisme est un courant de pensée qui met en avant des similitudes entre l’exploitation et la domination de la nature par les humains et l’oppression et la domination des femmes et des minorités par les hommes.“Ce sont les deux facettes de la même médaille, du même modèle de civilisation qui s’est imposé historiquement”, explique Jeanne Burgart Goutal, spécialiste du sujet. 

    Le terme « écoféminisme » a été utilisé pour la première fois par Françoise d’Eaubonne, féministe française. Aujourd’hui, il existe diverses branches de l’écoféminisme, dont deux courants majoritaires : un courant matérialiste qui s’attache à chercher des solutions concrètes sur le terrain pour faire face à l’impact du changement climatique sur les femmes, et une branche spirituelle. Les divers courants ont tous en commun la volonté de mettre fin à la domination des humains sur la nature et à la société patriarcale, pour un monde plus respectueux. 

    Ces réflexions permettent notamment d’inclure les femmes et les questions de genre dans les problématiques et politiques environnementales qui sont souvent considérées comme “neutres”, c’est-à-dire sans impact sur les questions de genre alors même qu’elles sont pensées du point de vue dominant, celui de l’homme blanc cisgenre. Par exemple, comment penser la mobilité et renforcer les modes de transport collectifs moins polluants sans inclure la sécurité des femmes et leur usage de ces transports ? Les femmes font donc partie de la solution aux problématiques du dérèglement climatique.

    Les femmes : invisibilisées mais porteuses de solutions

    Bien qu’elles aient les connaissances traditionnelles et qu’elles soient engagées pour la préservation de l’environnement, le travail que les femmes accomplissent est souvent invisibilisé et dévalorisé car il reste lié à la sphère privée. Elles sont encore trop souvent sous-représentées dans les sphères de pouvoir et de prises de décisions et leur accès à l’information est moindre. 

    De plus, les impacts du dérèglement climatique sur les femmes restent mal connus car elles sont souvent sous-représentées dans les études écologistes publiées, encore plus lorsqu’elles viennent d’un pays des Suds. Leur point de vue est donc moins bien pris en compte, alors même qu’elles ont une “perception différente du changement climatique”. 

    Dans les pays les plus pauvres, les femmes et les filles assurent la majorité de l’agriculture de subsistance et de l’approvisionnement du foyer en ressources vitales (eau, nourriture, combustible). En effet, elles sont les productrices de plus de la moitié des denrées alimentaires dans le monde et elles représentent entre 50 et 80% des petits agriculteurs. Pourtant, les inégalités dans l’accès à la propriété foncière sont palpables. Dans le rapport “Terres et changement climatique” du GIEC (2019), on apprend que “dans 59% des 161 pays étudiés, les lois, traditions ou pratiques religieuses empêchent les femmes de posséder des terres” et selon la FAO, “moins de 20% des propriétaires terriens de ce monde sont des femmes”. Les femmes sont ainsi productrices et permettent de nourrir les populations mais n’ont pas accès aux rendements de leur travail, alors qu’un accès égal à la propriété foncière entre hommes et femmes permettraient d’améliorer la sécurité alimentaire et de nourrir 150 millions de personnes supplémentaires, selon la FAO. La situation actuelle rend les femmes plus vulnérables de plusieurs manières, notamment parce que les ressources vitales vont devenir plus rares avec le changement climatique, alors qu’une amélioration de leur situation serait bénéfique pour l’égalité des genres, pour l’environnement et pour la sécurité alimentaire. 

    Pourtant, “les femmes sont, partout dans le monde, porteuses de solutions”. D’après l’ONU Femmes, les femmes sont des “agents de lutte majeurs de l’adaptation”. En effet, parce que les femmes sont plus gravement touchées par le dérèglement climatique à l’échelle mondiale, celles-ci sont aussi plus à même d’être porteuses de solutions pour lutter contre ce phénomène. Leurs connaissances environnementales traditionnelles liées à leur expérience les rendent actrices du changement, selon Carlotta Gradin d’ONU Femmes France. En effet, elles sont plus à même d’utiliser leurs connaissances pour entreprendre des changements et mettre en place des solutions innovantes et soutenables face aux défis environnementaux : l’utilisation d’énergies vertes, et de nouvelles techniques d’agriculture, comme l’agro-écologie. 

    De nombreuses études démontrent ainsi que l’inclusion des femmes dans les prises de décisions environnementales est bénéfique à la fois d’un point de vue environnemental et pour l’égalité des genres. Une étude de l’Université de Boulder aux Etats-Unis révèle également qu’une meilleure intégration des femmes aux groupes décisionnaires et dans les instances de pouvoir permettrait des décisions plus vertes et une meilleure préservation de l’environnement (notamment à travers la signature de traités). Enfin, dans une étude de Laura McKinney et Gregory Fulkerson intitulée “Gender Equality and Climate Justice: A Cross-National Analysis”, on apprend que dans les pays dans lesquels les femmes sont à la tête du pouvoir ou sont représentées dans les instances de gouvernance, l’empreinte carbone est plus faible que dans les autres pays.

    Gouvernance climatique et luttes environnementales

    A l’échelle de la gouvernance climatique internationale, les femmes sont encore sous-valorisées, et peu incluses dans les processus de négociations sur l’atténuation et l’adaptation au changement climatique. 

    Dans les négociations climatiques, c’est seulement en 2001 que la thématique du genre est apparue, à l’occasion de la COP7 à Marrakech dans le cadre de la Plate-forme d’Action de Pékin de 1995 et l’objectif de l’égalité des sexes visant “l’amélioration de la participation des femmes dans les organes de la CCNUCC”, “la nécessité d’une représentation plus équitable dans les organes” et la recommandation faite aux Etats-parties de “considérer activement la nomination de femmes aux postes électifs”. 

    Plus récemment, à la COP21 à Paris en 2015, sur les 150 chef-fes d’Etat participant à cet événement majeur, seules 8 étaient des femmes. En 2016, les conseils d’administration du “Fonds vert pour le climat” et du “Fonds pour l’environnement mondial” étaient composés de moins de 15% de femmes. 

    • Les femmes : figures majeures des luttes environnementales dans le monde

    Pourtant, lorsque l’on étudie de plus près les combats environnementaux et climatiques sur le terrain, nous constatons que les femmes sont souvent en première ligne de l’action. Nous l’avons vu à partir de 2019 et des grèves mondiales des jeunes pour le climat : les jeunes femmes ont été aux avants postes de la création de ces mouvements pour la protection de la planète et de leur futur. Greta Thunberg, Anuna de Wever, Natasha Mwansa, Ayakha Melithafa, Luisa Neubauer, Jamie Margolin, Harriet O’Shea Carre et tant d’autres se sont mobilisées, déterminées à bousculer le cours des choses pour la préservation de leurs droits. 

    Et ce phénomène n’est pas récent. Depuis les années 1970, de nombreuses luttes environnementales sont menées par des femmes, comme le rappelait Reporterre à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes : contre la déforestation en Inde, au Kenya ou encore en Indonésie, contre les exactions de grands groupes pétroliers comme Shell au Nigéria, contre la construction d’oléoducs qui ravagent les terres des autochtones aux États-Unis et au Canada, ou encore contre l’exploitation d’hydrocarbures en Bolivie, la mobilisation des femmes est primordiale. 

    La plus grande vulnérabilité des personnes de genre féminin serait une des raisons pour lesquelles les femmes s’intéressent plus aux questions écologiques et se sentent plus concernées. Pour la chercheuse Meg du Bray, les hommes blancs et conservateurs aux Etats-Unis se sentent en effet moins vulnérables aux effets du dérèglement climatique. Elle explique cela par une absence d’injustices systémiques et de préjudices subis par cette tranche de la population, par rapport aux femmes et aux minorités, qui sont plus confrontées aux risques et sont “plus disposés à accepter une certaine proportion de risque environnemental”. Cette partie de la population est beaucoup plus confiante dans sa capacité à s’adapter et à surmonter les risques environnementaux et est donc moins anxieuse face au phénomène.

    Pour aller plus loin

    • C’est quoi l’écoféminisme ?, Arte
    • Après la pluie : horizons écoféministes, Solène Ducretot, Alice Jehan
    • François d’Eaubonne et l’écoféminisme, Caroline Goldblum, Françoise d’Eaubonne

  • Lettre ouverte de la société civile : « Le climat mérite un vrai débat »

    Lettre ouverte à Monsieur le Premier ministre, Jean Castex et à Monsieur Richard Ferrand, Président de l’Assemblée nationale sur le manque de débat démocratique sur le projet de loi climat et résilience


    Paris, 22 mars 2021,

    Monsieur le Premier Ministre,
    Monsieur le Président de l’Assemblée nationale,

    L’examen du projet de loi Climat et Résilience a débuté lundi 8 mars en commission spéciale. 25 % des 5000 amendements déposés par les députés ont été jugés irrecevables au motif qu’ils ne seraient pas en lien avec le projet de loi. La plupart d’entre eux visaient pourtant à permettre l’atteinte de nos objectifs climatiques ou reprenaient des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat.

    La présidente de la commission spéciale de l’Assemblée nationale, Mme Maillart-Méhaignerie, juge que ces mesures sont hors du champ de la loi et les considère comme des « cavaliers législatifs » au titre de l’article 45 de la Constitution. Cet article établit pourtant que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte ».

    La jurisprudence du Conseil constitutionnel tend à en faire une interprétation plus limitative selon laquelle le champ de la loi est déterminé par le contenu du texte initial, donc par le Gouvernement. Alors que les parlementaires devraient défendre leur liberté de faire évoluer le texte et faire évoluer la jurisprudence, la présidente de la commission spéciale applique ici une interprétation particulièrement restrictive avec un taux d’irrecevabilité exceptionnellement important.

    Il s’agit aussi d’un refus de débat démocratique. En somme, le gouvernement en présentant un texte diminué, abandonnant des pans entiers des propositions de la convention citoyenne, n’a pas seulement trahi sa promesse envers les citoyens mais empêche le Parlement de débattre de ces sujets. Les députés de tous bords politiques qui avaient repris le flambeau des citoyens en déposant des amendements reprenant des mesures de la Convention Citoyenne mal, peu ou pas mises en œuvre jusqu’ici ont été déboutés.

    Alors que le Tribunal administratif de Paris vient de reconnaître les “carences fautives” de l’État dans la lutte contre le réchauffement climatique et que le Haut Conseil pour le Climat a jugé que le texte présenté par le gouvernement ne permettra pas de tenir nos engagements, cette restriction du débat parlementaire donne une mauvaise image du sérieux de nos institutions dans la lutte contre le dérèglement climatique.
    En plus de la mise à l’écart des amendements jugés irrecevables s’ajoute la décision d’appliquer un temps législatif programmé (TLP) pour la Séance plénière. Un temps de parole réduit de plus de moitié qui, de facto, empêchera certains amendements d’être défendus une fois le temps du groupe politique écoulé.
    Comment expliquer que dans une loi « climat et résilience », les députés ne puissent pas porter des amendements visant à renforcer la responsabilité environnementale des grandes entreprises et des acteurs financiers, à développer le transport ferroviaire, à mieux préserver les forêts, à limiter l’industrialisation de l’élevage ou à renforcer le dispositif du Forfait Mobilité Durable?

    Ce texte est issu d’un processus démocratique inédit visant à reconnecter les citoyens avec la décision publique et permettre l’adoption de mesures ambitieuses pour le climat acceptables par tous. La représentation nationale se doit d’être à la hauteur de cet enjeu.

    Monsieur le Premier ministre, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, nous vous demandons de restaurer les conditions nécessaires au bon déroulement du débat parlementaire en assurant que les amendements ne soient pas censurés de la même manière lors du débat en séance publique.

    Signatures

    • Alofa Tuvalu
    • Alternatiba – Amis de la Terre France
    • ANV-COP21
    • Association négaWatt
    • Attac France
    • Auxilia Conseil
    • Canopée Forêts Vivantes
    • CCFD-Terre Solidaire – CFDT
    • Citoyens Pour Le Climat – CPLC
    • CJD
    • CLER Réseau pour la transition énergétique
    • CliMates
    • Commerce Equitable France
    • Confédération Paysanne
    • Enercoop
    • FAGE
    • France Nature Environnement
    • Fédération française des Usagers de la Bicyclette (FUB)
    • Fondation Abbé Pierre
    • Fondation Nicolas Hulot
    • France Nature Environnement
    • Geres 
    • Greenlobby 
    • Greenpeace
    • Hespul
    • Institut Veblen
    • Mouvement Impact France
    • Notre Affaire à Tous – NAAT
    • Oxfam France
    • Penser L’après
    • Reclaim Finance
    • REFEDD
    • Réseau Action Climat
    • Résilience France
    • Together For Earth
    • Transition France
    • Union syndicale Solidaires
    • WWF France
    • Zero Waste France
  • CP / Birmanie : Total doit cesser de financer la junte

    Communiqué de presse – Vendredi 19 mars 2021

    Depuis le coup d’état en Birmanie du 1er février dernier, Total est redevenu l’un des plus importants contributeurs financiers de la junte militaire, qui a repris les pleins pouvoirs par la force et réprime le mouvement de protestation de la population dans le sang. Plus de 200 morts, des centaines de blessés et plus de 2 000 personnes interpellées. Meurtres, torture, persécutions, exécutions extra-judiciaires, arrestations arbitraires… : le Rapporteur spécial de l’Onu sur la Birmanie évoque de probables crimes contre l’Humanité.   

    Aujourd’hui, nous – Greenpeace, Les Amis de la Terre, la Ligue des droits de l’Homme, Info Birmanie, Notre Affaire à Tous, Sherpa et 350 – exhortons Total à suspendre tout paiement à la junte en plaçant les millions d’euros en jeu sur un compte bloqué (1)

    Selon Justice for Myanmar, Total a notamment versé plus de 229 millions de dollars à l’Etat birman en 2019 en taxes et en parts du gouvernement dans la production de gaz (2). Le Monde rapporte qu’en août 2020, sa filiale Moattama Gas Transportation Co, enregistrée aux Bermudes, a reçu le « prix du plus gros contribuable » dans la catégorie « entreprises étrangères » pour l’année fiscale 2018-2019. Cet argent transite principalement par l’entreprise publique Myanmar Oil and Gas Enterprise (MOGE), dont les liens avec les milieux d’affaires militaires sont pointés du doigt par la société civile (3). Mise en cause pour son opacité (4), cette entreprise représente la source de revenus la plus importante de l’Etat birman et se trouve désormais placée sous le contrôle direct de la junte. Le Rapporteur spécial de l’Onu sur la Birmanie demande d’ailleurs que des sanctions internationales soient prises à l’encontre de la MOGE

    Pendant que la junte tue, Total “évalue la situation”, se dit “préoccupée” (5), mais maintient le statu quo. Pourtant, d’autres entreprises ont réagi à la situation sur place :  l’entreprise singapourienne Puma Energy a suspendu ses activités et l’australienne Woodside annonce qu’elle va démobiliser ses opérations offshore. 

    Interpellée par des citoyens birmans, Total met en avant la fourniture d’électricité qu’elle apporte à une partie de la population, des arguments repris par l’Ambassade de France. Mais la multinationale n’apporte pas de réponse face à l’enjeu central des paiements versés à la junte, et s’en remet aux sanctions décidées par les Etats (6). Cette posture revient à financer un régime militaire brutal et illégitime. 

    Pourtant, des Birmans ont manifesté à Kanbauk le 12 février 2021 pour demander à Total et aux autres compagnies gazières de ne pas financer la junte (7). Des employés de Total en Birmanie ont également rejoint le mouvement de désobéissance civile (8). Et MATA (Myanmar Alliance for Transparency and Accountability), qui regroupe 445 organisations de la société civile birmane, appelle les compagnies pétrolières et gazières à cesser immédiatement tout paiement à la junte, seule mesure à même de garantir le respect des Principes directeurs de l’Onu sur les entreprises et les droits humains, ainsi que de la loi française sur le devoir de vigilance de mars 2017. Nous rappelons d’ailleurs que le plan de vigilance de Total est largement insuffisant, tant dans son contenu que sa mise en oeuvre, et que l’entreprise fait l’objet de deux actions en justice en France sur le fondement de cette loi (9).

    Le message de la société civile birmane est clair : “Si vous continuez le “business as usual”, nous vous tiendrons pour responsables de la violence infligée par la junte au peuple birman.” A son tour, le Ministre de la planification, des finances et de l’industrie nommé par le CRPH (Committee Representing Pyidaungsu Hluttaw) – le parlement en résistance – demande à Total de ne plus collaborer avec le régime de la junte.

    Le gouvernement français doit quant à lui agir pour que des sanctions soient adoptées contre les dirigeants de la junte et contre les entreprises, notamment la MOGE, dont les revenus financent la répression. Ne pas agir en ce sens revient à renforcer la junte dans sa volonté de se maintenir au pouvoir par la force des armes et au prix d’une répression sanglante.

    Signataires

    • Greenpeace France
    • Les Amis de la Terre France
    • Ligue des droits de l’Homme
    • 350.org
    • Notre Affaire à Tous 
    • Info Birmanie
    • Sherpa

    Notes

    (1) Total doit utiliser ses participations et son rôle d’opérateur dans des coentreprises pour suspendre les paiements effectués à la MOGE

    (2)  PWYP affirme que Total  a versé, dans le cadre du bloc Yadana (M5/M6),  768 millions USD en 10 paiements aux entités gouvernementales depuis 2015 : https://static1.squarespace.com/static/5dfc4510ad88600d53f93358/t/603dadae66cb1e4dc2cea3c4/1614654897372/Final+Brief_PWYP_Offshore+Gas.pdf; voir aussi document d’enregistrement universel 2019, publié en mars 2020, p. 422, dans lequel figure le chiffre de 229 597 000 dollars, dont 51 millions d’impôts et taxes, et 178,597 millions de droits a la production, https://www.total.com/sites/g/files/nytnzq111/files/atoms/files/total_document_enregistrement_universel_2019.pdf. 

    (3) https://www.justiceformyanmar.org/stories/how-oil-and-gas-majors-bankroll-the-myanmar-military-regime et https://static1.squarespace.com/static/5dfc4510ad88600d53f93358/t/603dadae66cb1e4dc2cea3c4/1614654897372/Final+Brief_PWYP_Offshore+Gas.pdf

    (4)  Rapport de la Mission d’établissement des faits de l’Onu, “The economic interest of the Myanmar military”page 27 : https://www.ohchr.org/EN/HRBodies/HRC/MyanmarFFM/Pages/EconomicInterestsMyanmarMilitary.aspx

    (5)  Voir notamment https://www.myanmar-responsiblebusiness.org/news/statement-concerned-businesses.html

    (6)  reportage France Info TV :  https://twitter.com/JulienPain/status/1371447008578396165 et réponse de Total : https://twitter.com/TotalPress/status/1371469500260945933

    (7) https://www.facebook.com/DaweiWatch/posts/3428861180575369

    (8) https://www.facebook.com/Myanmar-Alliance-for-Transparency-and-Accountability-MATA-672103292860036/photos/pcb.5056835061053482/5057177711019217

    (9)  Les Amis de la Terre France, Survie et al. contre Total SE (Total Ouganda), https://www.amisdelaterre.org/campagne/total-rendez-vous-au-tribunal /; Notre Affaire à tous, Sherpa et al. contre Total SE (Total Climat), https://preprod.notreaffaireatous.org/actions/les-territoires-qui-se-defendent-et-si-nous-mettions-enfin-les-entreprises-face-a-leurs-responsabilites  / ; sur le plan de vigilance de Total SE voir aussi le radar du devoir de vigilance, https://plan-vigilance.org/company/total-sa   /

  • CP / Loi climat et écocide : les députés rejettent le crime d’écocide et entérinent de nouveaux délits inapplicables

    Communiqué de presseVendredi 19 mars 2021

    La commission spéciale de l’Assemblée nationale a étudié hier soir le Titre VI du  projet de loi Climat et Résilience, dédié à la protection judiciaire de l’environnement. Notre Affaire à Tous, qui se bat depuis sa création pour la reconnaissance de l’écocide et le renforcement du droit répressif environnemental français, regrette que les députés n’aient pas répondu à l’appel de la société civile. Ils nient ainsi, une fois de plus, l’urgence écologique et l’urgence de la justice.

    Les crimes que l’on ne nomme pas sont oubliés. Certains ne mettent pas seulement en danger les populations, mais aussi les écosystèmes, à un niveau tel qu’ils mettent en danger la sûreté de la planète pour la vie humaine. C’est le cas des écocides, ces graves crimes contre le vivant, qui auraient dû être reconnus au travers du projet de loi “Climat et Résilience” suite à la Convention Citoyenne pour le Climat. La reconnaissance du crime d’écocide y avait en effet été plébiscitée avec plus de 90% des voix.

    Si Garde des Sceaux et Ministre de l’écologie avaient promis de mettre en place un “délit de pollution généralisée”, et un mal-nommé délit d’“écocide”, leur proposition avait été affaiblie par Bercy, le Medef et les lobbies, en amont de sa présentation à l’Assemblée nationale.

    Le projet qui a été présenté au vote des députés ne proposait donc ni crime d’écocide, ni véritables délits de mise en danger de l’environnement et d’atteinte au vivant. Ainsi que nous l’avons déjà souligné, le projet de loi ne présentait ainsi pas d’amélioration du régime répressif français actuel, dont l’inefficacité est dénoncée depuis longtemps par les associations et les experts. C’est pourtant possible, et nécessaire : l’Italie a condamné les atteintes à l’environnement dès 2015, lors de la transposition de la Directive européenne de 2008 sur la protection de l’environnement par le droit pénal ; une directive très insuffisamment transposée par la France.

    Plutôt que de répondre à la demande émanant de la société civile et d’adapter enfin notre droit à l’urgence écologique, en reconnaissant et en condamnant les atteintes au vivant pour ce qu’elles sont, les députés réunis en commission spéciale n’ont pas corrigé cette erreur de trajectoire.

    L’examen du Titre VI s’est opéré de manière expéditive, dans une cacophonie d’arguments d’une qualité juridique variable. Le grand gagnant du débat d’hier est un libéralisme qui nie que les droits humains sont conditionnés par les droits du vivant. La majorité, soutenue par les Républicains, a avec constance défendu les intérêts des entreprises, notamment celle des grands groupes. D’une main, elle s’est enorgueillie d’innovations juridiques en droit de l’environnement ; de l’autre, elle a rejeté nombre d’amendements au prétexte qu’ils seraient trop innovants, comme le crime d’écocide ou le détachement des régimes pénaux et administratifs. De concert, majorité et Républicains ont repoussé les amendements rejoignant les inquiétudes des professionnels et des associations, et la nécessité de créer un véritable droit pénal général de l’environnement, pour se contenter d’un texte moins-disant et bancal.

    La Ministre de l’écologie, quant à elle, après avoir fourché en parlant de “crime d’écocide”, a tenté de défendre l’idée selon laquelle il y aurait de “petits écocides”, tel que la destruction d’une petite mare, et de “grands écocides”, comme la déforestation de l’Amazonie. Des propos qui ne peuvent être que source de confusion, car l’écocide est une notion recouvrant les crimes mettant en danger la sûreté de la planète. Non seulement le terme d’écocide est ainsi galvaudé, mais le gouvernement et la majorité parlementaire l’utilisent comme l’arbre cachant la forêt : en utilisant à mauvais escient le terme d’écocide, le gouvernement brandit l’arbre cachant la forêt de l’indigence du régime répressif environnemental qu’il propose à travers ce projet de loi.

    Notre Affaire à Tous le rappelle : nous avons besoin de condamner la mise en danger et les atteintes à l’environnement et au vivant, de manière autonome. La majorité s’évertue à maintenir des conditions juridiques inefficaces, à l’image de la condition de durée de 10 ans pour caractériser les infractions qu’elle propose. 

    Au-delà, nous devons d’urgence débarrasser le régime répressif environnemental de son carcan administratif. Le cas du chlordécone est à cet égard parlant : bien qu’ayant été autorisé par les autorités françaises, le caractère toxique et cancérigène de ce pesticide était connu de tous. Ni le droit actuel, ni la réforme proposée par le gouvernement, ne permettent encore aux populations de Guadeloupe et de Martinique d’obtenir justice. Et il ne s’agit malheureusement que d’un exemple parmi d’autres.

    Malgré le plaidoyer de certains députés pour faire de l’écocide un crime, le terme d’écocide reste donc réduit à une circonstance aggravante d’un délit restreint et à de nombreux égards ineffectif, tandis que le crime d’écocide n’est toujours pas reconnu.

    Ce faisant, la France affaiblit la discussion internationale en cours sur la reconnaissance du crime d’écocide. En prétendant attendre l’inscription de l’écocide dans le droit international, la France oublie d’ailleurs que le droit international se construit grâce et par les propositions des Etats, à travers des traités ou parce que des lois prennent force de coutume international. Les arguments du gouvernement ne sauraient ici être entendus.

    Nous veillerons à ce que des amendements soient déposés d’ici l’examen du texte en séance plénière. La France n’a en effet plus de temps à perdre pour reconnaître et condamner l’écocide. Malgré les mots du Président Macron dès août 2018 dénonçant la politique menée par Jair Bolsonaro en Amazonie brésilienne comme un écocide, malgré les promesses données à la Convention Citoyenne, la France n’a toujours fait aucun pas vers sa reconnaissance dans son droit interne, ni au niveau international. Après les Républiques des Vanuatu et des Maldives, la Belgique s’est pourtant exprimée officiellement en décembre 2020 auprès de l’Assemblée générale de la Cour Pénale Internationale tandis que nombre d’Etats-membres de l’Union ainsi que le Parlement européen travaillent à sa reconnaissance. La France, au fond, reste aux abonnés absents.

    La Convention Citoyenne a également formulé le souhait d’inscrire dans la loi les limites planétaires, une proposition que nous partageons : les limites planétaires doivent devenir un outil central de gouvernance des secteurs public comme privé.

    Nous resterons mobilisés pour que la France condamne enfin les atteintes au vivant et mette fin à l’impunité de ceux qui détruisent notre planète.

    Contacts presse :

    • Marie Toussaint : 06 42 00 88 68 
    • Théophile Keïta : 06 34 19 06 67
  • CP / Loi climat & résilience : pas d’avancées sur le front de la lutte contre l’artificialisation des sols !

    A l’heure où se clôturent les débats sur le projet de Loi « Climat et résilience » en commission à l’Assemblée Nationale, Terre de Liens, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne et Notre Affaire à Tous dénoncent une coquille vide sur le front de la lutte contre l’artificialisation des sols, responsable de la disparition des terres agricoles et de l’effondrement de la biodiversité. Dérogations laissées ouvertes pour les surfaces commerciales inférieures à 10 000 m2, laisser-aller sur le développement des plateformes logistiques, notamment de e-commerce, absence de fiscalité contraignante : aucun des sujets clés permettant un recul net de l’artificialisation des terres agricoles n’est inscrit dans le projet de Loi.

    Loi Climat & résilience : le règne de la « bonne volonté »

    Une déclaration solennelle pétrie de bonnes intentions, c’est aujourd’hui le chemin que prend le projet de loi Climat & Résilience porté par le Gouvernement.

    « Deux ans après l’inscription de l’objectif « zéro artificialisation nette » dans le Plan Biodiversité, qui n’est concrètement pas appliqué sur le terrain, avec cette nouvelle Loi il faudra encore attendre pour des mesures contraignantes. » s’indigne Astrid Bouchedor, chargée de plaidoyer de Terre de liens. « Pour lutter contre l’artificialisation, le projet de loi se focalise sur le renforcement des documents d’urbanisme, une approche qui s’est montrée inefficace ces 30 dernières années. » poursuit-elle.

    Car si les objectifs de réduction par 2 du rythme de l’artificialisation d’ici 2031, fixés par le projet de loi sont louables, les exceptions réglementaires, qui sont à l’origine d’une grande part de l’artificialisation en France, auront toujours la part belle. Ainsi, le moratoire sur l’urbanisme commercial n’intègre toujours pas les plateformes logistiques responsables d’une partie de l’artificialisation des terres agricoles.

    Il exclut notamment les entrepôts de e-commerce, créant de fait un déséquilibre réglementaire majeur pour ce secteur alors qu’il a déjà détruit plus de 81 000 emplois nets dans le commerce physique” précise Alma Dufour, chargée de campagne aux Amis de la Terre. De même, la possibilité de dérogation ouverte aux surfaces commerciales inférieures à 10 000 m2, qui recouvrent 80 % des projets d’urbanisme commercial, rend la mesure très limitée.

    Au-delà des exceptions, la notion d’artificialisation « nette » inscrite dans loi implique une compensation qui est aujourd’hui dévoyée de son principe en se focalisant sur un dédommagement financier.

    Enfin, certaines thématiques pourtant centrales comme la création d’une fiscalité dissuasive ou la lutte contre la vacance des logements ne sont pas abordées dans le projet de loi.

    Des constats alarmants : tous les 6 ans, l’équivalent des terres agricoles d’un département français artificialisé

    Au rythme où se poursuit l’artificialisation des terres en France et à l’heure où la crise sanitaire a rappelé l’importance de la sécurité de l’approvisionnement alimentaire, il est pourtant capital d’agir.

    En France, 50 à 60 000 ha sont artificialisés chaque année, soit l’équivalent des terres agricoles d’un département tous les 6 ans. L’artificialisation concerne majoritairement de terres agricoles riches, souvent en zones péri-urbaines ou littorales. Un changement de destination au profit de l’habitat, de zones industrielles et commerciales aux conséquences irréversibles. En cause : la logique de spéculation immobilière et le manque de rentrées fiscales de nombreuses collectivités, les rendant promptes à accepter n’importe quel projet sur leur territoire.

    L’artificialisation est aussi responsable d’émissions significatives de gaz à effet de serre et l’une des causes les plus importantes de l’effondrement de la biodiversité en France.

    Terre de Liens, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne et Notre Affaire à Tous appellent aujourd’hui les député.e.s qui travaillent sur le texte de Loi à :

    • Introduire des mesures fiscales dissuasives telles que : l’augmentation de la taxe sur les plus-values des terrains devenus constructibles ; la création d’une taxe d’artificialisation qui renchérirait l’aménagement des terres nues au prix de la réhabilitation des friches urbaines.
    • Modifier le moratoire sur l’urbanisme commercial en : incluant la construction des plateformes logistiques, notamment à destination du commerce en ligne ; réduisant les possibilités de dérogation à 2 000 m2 ; et en ajoutant un volet de lutte contre la vacance de logements.

    Alors que le Gouvernement est aujourd’hui plus que jamais scruté pour son engagement pour le climat, la lutte contre l’artificialisation des sols et pour un meilleur partage des terres est un enjeu capital dont les politiques doivent se saisir d’urgence tant les conséquences sur la biodiversité et la disparition des terres agricoles sont irréversibles.

    Contacts presse :

    Nathalie Blin : n.blin@terredeliens.org, 06 77 96 26 56

    Alma Dufour, alma.dufour@amisdelaterre.org, 06 67 92 36 89

    Chloé Gerbier, gerbierchloe@gmail.com06 46 43 55 09

  • CP / Réforme Constitutionnelle : Les député.e.s confirment la proposition de la Convention Citoyenne pour le Climat mais restent trop timides pour faire émerger une véritable République écologique

    Communiqué de presse

    Ce mardi 16 mars 2021, lors d’un vote solennel, les député.e.s ont adopté, sans amendements, le projet de loi constitutionnelle complétant l’article 1er de la Constitution et relatif à la préservation de l’environnement. Si l’absence d’amendements qui auraient pu réduire la portée de cette réforme est une bonne nouvelle, l’occasion d’instaurer une véritable République écologique est encore manquée, faute d’inscrire le principe de non-régression et les limites planétaires à l’article 1er. Nous resterons mobilisé.e.s pour une réforme constitutionnelle à la hauteur des enjeux lors des débats à venir au Sénat.

    Les député.e.s ont officiellement validé la modification de l’article 1er en retenant la formulation suivante: “la France garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique« . La proposition de la Convention citoyenne a ainsi été heureusement maintenue, malgré les critiques de certains parlementaires conservateurs qui refusent une formulation ayant des implications concrètes.

    Notre Constitution Écologique souligne l’importance du maintien du terme “garantit”, qui implique une quasi-obligation de résultat incombant à la République , et donc à l’Etat, pour préserver l’environnement et lutter contre le dérèglement climatique. Chaque mot a son importance et il aurait été regrettable que les député.e.s suivent les avis du Conseil d’Etat, qui recommandait l’emploi de termes moins contraignants tels que “favorise” (avis du 29 mai 2019) ou “préserve” (avis du 14 janvier 2021), ce qui aboutirait à une formulation creuse et une réforme constitutionnelle purement symbolique.

    Notre Constitution Écologique regrette toutefois que les député.e.s ne soient pas allés plus loin en inscrivant également le principe de non-régression à l’article 1er, comme nous l’avions suggéré lors de nos auditions devant la Commission du développement durable et la Commission des lois en février dernier (voir à cet égard notre contribution déposée auprès de la Commission du développement durable), alors même que plusieurs amendements allant dans ce sens ont été soumis au vote.

    Pour rappel, notre proposition de modification de la Constitution, formulée dès 2018 suite à l’annonce de la réforme constitutionnelle par le Gouvernement en juillet 2017, proposait de modifier l’article 1er en inscrivant non seulement une obligation d’agir pour la préservation de la diversité biologique et la lutte contre les changements climatiques, dans le cadre des limites planétaires, mais également un principe de non-régression en référence aux générations futures. 

    Dans sa décision relative à l’Affaire du Siècle rendue le 3 février dernier, le tribunal administratif de Paris a pourtant ouvert la voie vers une République écologique en reconnaissant la responsabilité de l’Etat français pour carence fautive dans le respect de ses engagements en matière de lutte contre le changement climatique qu’il s’est lui-même fixés. Cependant, la récente décision du Conseil d’Etat rendue lundi 15 mars, qui confirme le retour temporaire des néonicotinoïdes et, au passage, un certain conservatisme dont fait preuve la juridiction suprême, démontre l’urgence et la nécessité d’inscrire explicitement le principe de non-régression dans la Constitution.

    Les débats se poursuivront au Sénat dès avril, où le texte risque d’être dénaturé, à en croire les propos du Président Larcher qui semble privilégier le terme “agit” à “garantit”. A celles et ceux qui souhaitent affaiblir ce texte, nous souhaitons rappeler que l’urgence environnementale exige l’action, et que la République a pour obligation de garantir et préserver les droits fondamentaux des citoyens, y compris leur droit à un environnement sain (et à un climat stable).

    En attendant le vote des sénateurs, Notre Constitution Écologique poursuit la mobilisation et invite tous les citoyen.ne.s et élus locaux à soutenir l’Appel pour une Constitution écologique: https://www.notreconstitutionecologique.org/

    Contacts presse

  • CP / Jour du dérèglement : ce mercredi 17 mars 2021, l’État français entame son découvert climatique

    Le 17 mars 2021, c’est le Jour du dérèglement : la France a émis, en 77 jours, l’intégralité des gaz à effet de serre qu’elle devra émettre en une année en 2050 pour respecter son objectif de neutralité carbone. À partir de maintenant, la France vit donc à crédit du climat. Cette date toujours précoce, malgré le ralentissement des émissions de gaz à effet de serre sous l’effet des mesures sanitaires, montre bien l’ampleur du chemin qu’il reste à parcourir en trente ans pour atteindre la neutralité carbone : en effet,  à ce rythme, la neutralité carbone ne pourra être atteinte qu’en 2084, soit avec 34 ans de retard.

    Pour obtenir cette date, l’Affaire du Siècle, avec l’appui de Carbone 4, s’est fondée sur les chiffres de la Stratégie nationale bas carbone, feuille de route de la France pour mener le pays à la neutralité carbone en 2050. Pour respecter cet objectif, la France devra, selon la SNBC, émettre au plus 80 mégatonnes de CO2 par an en 2050, soit la capacité annuelle d’absorption du carbone, notamment par les forêts et les sols. Or, en 2021, malgré les mesures restrictives liées à la situation sanitaire, la France devrait tout de même émettre 389 mégatonnes de CO2 équivalent (MtCO2e).

    Le Jour du dérèglement arrive cette année douze jours plus tard que l’an dernier car les mesures sanitaires continuent de provoquer un ralentissement voire un arrêt de certains secteurs émetteurs [1]. Il s’agit d’une évolution totalement conjoncturelle, d’une situation subie, et qui ne résulte pas de nouvelles mesures politiques climatiques ambitieuses et durables. En outre, le risque d’effet rebond aussitôt les restrictions levées demeure très important. Ce fut le cas après la crise financière de 2008. 

    « Alors que l’État vient d’être condamné pour inaction climatique, il n’a plus de temps à perdre pour prendre enfin des mesures qui permettront à la France de réduire efficacement, et sur la durée, ses émissions de gaz à effet de serre, tout en respectant la justice sociale. Or le projet de loi Climat et résilience n’est pas du tout à la hauteur de l’urgence climatique [2]. Le travail parlementaire des prochaines semaines doit drastiquement en renforcer l’ambition. Le risque d’une opportunité manquée est immense, si aucune mesure d’ampleur n’est prise dans les secteurs des bâtiments, des transports et de l’agriculture, principaux postes d’émissions en France. »

    Les organisations de l’Affaire du Siècle

    Face à l’insuffisance patente de ce projet de loi, plus de 200 organisations ont appelé à une “marche pour une vraie loi climat” le 28 mars prochain, une preuve de plus que les ONG et les citoyennes et citoyens demandent des actions fortes et concrètes pour le climat.

    Méthodologie

    Le calcul a été effectué par le cabinet de conseil indépendant Carbone 4, sur demande des organisations formant l’Affaire du Siècle (Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France, et Oxfam France). Une estimation des émissions de 2021 a été réalisée sur la base de la tendance historique des émissions françaises corrigées des variations climatiques jusqu’en 2018 (source : Ministère de la transition écologique), et sur la baisse conjoncturelle des émissions observée en 2020 sous l’effet de la Covid-19 (estimation du MTES : -12% par rapport à 2019). La limite d’émissions annuelles choisie pour la neutralité carbone est celle que l’État lui-même s’est fixée dans la loi et la Stratégie nationale bas carbone : maximum 80 MtCO2e, qui correspond aux capacités prévues d’absorption du carbone en France pendant un an en 2050.Conformément aux règles de calcul des émissions territoriales de la France, ce calcul exclut les émissions liées au transport maritime et aérien ainsi que les émissions dites importées.

    Notes

    1. L’année dernière, toute l’épargne carbone de la France avait déjà été utilisée avant le premier confinement. Le jour du dérèglement arrivant le 5 mars 2020, ce dernier n’a pas reculé sous l’effet de la crise sanitaire, malgré un recul estimé des émissions françaises de 52 MtCO2e par rapport à 2019.

    2. Le Conseil national de la transition écologique (26/01), le Conseil économique, social et environnemental (27/01) et le Haut Conseil pour le Climat (23/02) ont tous les trois jugé que le projet de loi était insuffisant au regard des objectifs climatiques de la France.

    Contacts presse

    • Oxfam France : Élise Naccarato – 06 17 34 85 68
    • Greenpeace France : Kim Dallet – 06 33 58 39 46
    • Fondation Nicolas Hulot : Paula Torrente – 07 87 50 74 90
    • Notre Affaire à Tous : Cécilia Rinaudo – 06 86 41 71 81
  • CP / Devoir de vigilance européen : un vote décisif du Parlement contre l’impunité des multinationales

    11 mars 2021 – Le Parlement européen vient de se prononcer à une importante majorité en faveur d’une législation européenne sur le devoir de vigilance. Plusieurs dispositions de ce rapport d’initiative législative sont à saluer, mais certaines doivent être renforcées. C’est désormais à la Commission européenne, qui doit publier son projet de législation avant l’été, qu’il revient de se saisir des recommandations du rapport parlementaire et de la société civile pour élaborer une directive ambitieuse, à laquelle s’opposent déjà les lobbies économiques.

    Ce rapport d’initiative législative sur le devoir de vigilance vise à s’assurer du respect des droits humains et de l’environnement dans les chaînes de valeur des grandes entreprises européennes – c’est-à-dire, dans toutes leurs activités, y compris celles de leurs sous-traitants à l’étranger -, et ce en établissant leur responsabilité juridique en droit européen. 

    Nos organisations, syndicats et ONG, qui ont défendu la loi française sur le devoir de vigilance, se félicitent du message que le Parlement européen envoie ainsi aux institutions européennes et à ses Etats membres. Avec 504 voix favorables contre 79 votes négatifs et 112 abstentions, c’est une large alliance qui a soutenu ce texte d’intérêt général. 

    Parmi les éléments encourageants de ce rapport figure le fait que le texte vise à tenir les entreprises européennes responsables des violations qu’elles causent ou contribuent à causer à travers leurs relations d’affaires. Les entreprises doivent ainsi cartographier l’ensemble de leurs activités ainsi que celles de leurs filiales et sous-traitants et adopter toutes les politiques et mesures proportionnées en vue de faire cesser, de prévenir ou d’atténuer les atteintes qu’elles auraient identifiées. Le texte incite les États membres à garantir qu’ils disposent d’un régime de responsabilité civile en vertu duquel les entreprises peuvent être tenues légalement responsables et appelées à verser des compensations pour réparer les préjudices causés dans leur chaîne de valeur. 

    En dépit de ces avancées, des éléments clés doivent être ajoutés par la Commission européenne lorsqu’elle présentera son projet de directive, pour s’assurer de son efficacité. Nos organisations regrettent en particulier la vision des eurodéputés qui tend à réduire le devoir de vigilance à l’adoption de processus alors qu’il doit avant tout s’agir de mettre en œuvre de façon effective des mesures de prévention efficaces et adaptées. Nous regrettons également l’absence de régime de responsabilité pénale, et insistons sur la nécessité d’améliorer l’accès à la justice et aux voies de recours pour les personnes et les communautés affectées pour garantir le succès de la future législation, avec notamment un renversement de la charge de la preuve et un accès facilité aux informations et aux preuves. Nous demandons ainsi à la Commission d’établir un régime de responsabilité civile clair, précis et qui corresponde à la réalité des chaînes de valeurs complexes des multinationales.

    Ce n’est qu’à ces conditions que des violations suspectées telles que le travail forcé des Ouïghours en Chine, le financement du terrorisme par Lafarge en Syrie ou l’accaparemment des terres par Total en Ouganda ne resteront pas impunies. Les citoyen-ne-s n’acceptent plus que de telles pratiques perdurent et l’expriment de plus en plus largement. 

    Nous qui œuvrons depuis des années pour contraindre les entreprises au respect des droits humains et de l’environnement, appelons donc le gouvernement français à défendre des mesures ambitieuses pour la future directive, en s’inspirant des forces et en palliant les défaillances de la loi française. Cela permettra que les entreprises actives au sein de l’Union européenne soient tenues légalement responsables des violations aux droits humains et des dégradations à l’environnement causées par leurs activités à l’étranger.

    Par ailleurs, alors que des négociations ont lieu sur le même sujet au niveau des Nations unies pour réguler les entreprises de l’ensemble des pays, nos organisations appellent les décideurs européens à s’engager de manière résolue dans ces discussions onusiennes concernant un traité sur les multinationales et les droits humains. L’Union européenne et ses Etats membres ne doivent pas utiliser le débat autour de cette législation européenne pour ralentir les négociations internationales ou en affaiblir le contenu.

    Notes aux rédactions

    Actuellement, plusieurs mises en demeure ont été adressées à des entreprises françaises par des ONG ou syndicats et de premières actions judiciaires ont été initiées sur le fondement de la loi sur le devoir de vigilance en France. Pour citer la dernière action en date, le 3 mars, des ONG et des communautés autochtones du Brésil et de Colombie ont assigné en justice le groupe Casino.

    Contacts presse :

  • CP / Un Entrepôt Amazon dissimulé reçoit son permis de construire proche de Caen : les associations et riverains lancent la contre-attaque juridique

    Communiqué de presse – 11 mars 2021

    Attac 14, Alternatiba Caen, Il est encore temps, Les Amis de la Terre et 18 particuliers soutenus par Notre Affaire à Tous lancent la bataille juridique et déposent un recours gracieux contre un énième entrepôt Amazon sur la commune de Moult à quelques kilomètres de Caen.

    Un projet similaire avait été combattu et finalement abandonné en 2019 à Mondeville, dans la communauté urbaine Caen-la-Mer. La maire de Mondeville et tous les maires de la CU s’étaient alors exprimés à l’unanimité – droite et gauche confondues – contre ce projet. Amazon a alors changé de cible pour Moult, une commune extérieure à Caen-la-Mer.

    C’est par la presse locale, près d’un mois après la signature du permis de construire par la Maire de Moult, que les associations et les habitant·e·s de la commune ont découvert le pot aux roses. Les élus ont alors imposé un black-out. Tout débat a dès lors été refusé tant que les recours seraient encore possibles.

    Une fois encore le géant du e-commerce avance à couvert, et ce, alors même que le nom d’Amazon ne figure nulle part sur le permis.

    Alors que le projet de loi Climat et résilience évince le sujet du e-commerce contrairement à l’ambition marquée des 150 citoyen·ne·s de la Convention pour le Climat, les militant·e·s rappellent une nouvelle fois les conséquences de l’implantation du groupe sur les territoires : destruction des emplois et des commerces de proximité, conditions de travail déplorables, évasion fiscale à grande échelle, réchauffement climatique, sans parler des nuisances environnementales locales.

    Entendu sur le marché d’Argences : “Amazon c’est l’esclavage ! Quand on est passé de 90 à 80 km/h sur les routes, il a fallu qu’on fasse la même quantité de travail, la même quantité de livraisons…”

    Associations et habitant·e·s se sont alors mobilisé·e·s pour informer la population, interpeller les élu·e·s, récolter des soutiens, etc. En une dizaine de jours, une pétition électronique a dépassé les 1200 signatures. Soutien politique de poids, une députée (PS) du Calvados s’est clairement exprimée en défaveur du projet Amazon.

    Pour David d’Attac14, “les élus locaux ne peuvent plus continuer à prendre leurs décisions à huis clos. Il faut qu’ils admettent que les citoyen-ne-s sont conscient-e-s des dangers d’Amazon”.

    Face à la dissimulation et au refus du débat public de la part des élu·e·s, les recours juridiques se révèlent être une étape nécessaire pour freiner l’expansion de la multinationale du e-commerce.

    Pour Chloé Gerbier juriste de l’association Notre Affaire à Tous, “Le régime d’exception que la multinationale s’octroie, cachant son activité future et se dispensant d’autorisation ICPE, ne peut être considéré comme légal”

    Contacts presse :

    • David Frantz (Collectif Stop Amazon 14) : 06.85.73.26.41 stopamazon14@riseup.net
    • Chloé Gerbier (Notre Affaire à Tous) : 06.46.43.55.09
  • Fiches entreprises de 27 multinationales françaises

    Ces fiches entreprises sont issues de notre benchmark 2021 de la vigilance climatique des multinationales. Elles sont classées par ordre de la moins bonne note à la meilleure note de notre classement. Le podium des mauvais élèves est composé de Total, Natixis et Casino.

    Total

    Le groupe Total a un chiffre d’affaires de 200,3 milliards de dollars en 2019, est présent dans plus de 130 pays et compte plus de 107 776 collaborateurs.

    Entre 2018 et 2019, les émissions de Total ont augmenté. Malgré l’impact considérable de ses activités sur le changement climatique, Total ne propose toujours pas de mesures concrètes permettant de prévenir les risques liés au changement climatique.

    Total est le plus mauvais élève de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales.

    Natixis

    Natixis est l’un des principaux acteurs du marché bancaire français. En 2019, l’entreprise compte près de 16 000 collaborateurs dans le monde et a un produit net bancaire de 9,2 milliards d’euros.

    Natixis ne reporte que ses émissions françaises, alors que le groupe est présent dans 38 pays. L’entreprise n’identifie pas correctement ses émissions et n’indique pas de stratégie globale au niveau du groupe. Les mesures annoncées sont imprécises et leur impact ne peut être vérifié.

    Natixis est la deuxième plus mauvaise élève du classement de notre benchmark sur la vigilance climatique des multinationales.

    Casino

    Casino est un acteur majeur de la distribution alimentaire en France et en Amérique latine. Le groupe gère 11 172 magasins. En 2019, Casino enregistrait un chiffre d’affaires de 34,6 milliards d’euros.

    Casino prend en compte du changement climatique dans la stratégie d’entreprise, mais ne reconnaît pas y contribuer pleinement. Une note plus élevée aurait pu être obtenue en s’alignant sur une trajectoire 1,5°C, permettant de respecter l’Accord de Paris.

    Casino complète le podium des plus mauvais élèves de notre rapport sur la vigilance climatique.

    Auchan

    Auchan Holding appartient à un groupe dont le chiffre d’affaires s’élève à 46,4 milliards d’euros et qui réunit 331 099 collaborateurs.

    Auchan ne mesure toujours pas son empreinte carbone. Si Auchan reconnaît sa contribution au changement climatique, le groupe n’a aucune stratégie climatique. Les mesures de réduction des émissions sont parcellaires et ne s’inscrivent pas dans une trajectoire précise et chiffrée.

    Auchan Holding est la quatrième entreprise la moins bien notée dans notre benchmark de la vigilance climatique des multinationales.

    Bouygues

    Bouygues est structuré autour de trois activités :

    • Construction
    • Immobilier
    • Télécoms/médias

    Son chiffre d’affaires s’élève à 34,7 milliards d’euros en 2020. Le groupe emplois plus de 129 000 collaborateurs.

    Bouygues et dans le classement des cinq plus mauvais élèves de notre benchmark de la vigilance climatique des multinationales et obtient une note de 32,5/100.

    Airbus

    Airbus est spécialisé dans l’aéronautique. En 2019, son chiffre d’affaires était de 70,5 milliards d’euros. Elle emploie environ 130 000 salariés.

    L’empreinte carbone indirecte du groupe n’est pas chiffrée alors qu’elle représente 97% de son empreinte totale. Airbus dispose d’une stratégie climatique ambitieuse qui demeure incertaine en raison de l’indisponibilité de technologies aéronautiques électriques permettant de très faibles émissions.

    Airbus se classe à la sixième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Groupe ADP

    ADP est une entreprise française qui gère 24 aéroports dans le monde. L’Etat français détient 50,6% de la capitalisation boursière d’ADP. Son chiffre d’affaires 2019 est de 4,7 milliards d’euros.

    Le groupe n’a pas adopté de stratégie prenant en compte son empreinte carbone indirecte. La croissance envisagée par ADP contribue à faire augmenter le trafic aérien, qui est incompatible avec les objectifs climatiques. ADP semble miser sur une révolution technologique incertaine.

    ADP se classe à la septième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Eiffage

    Eiffage est spécialisé dans le BTP et les concessions. Le chiffre d’affaires du groupe est de 18,1 milliards d’euros en 2019. Eiffage emploie plus de 72 500 collaborateurs.

    Aucun suivi des mesures de lutte contre le changement climatique n’est fait par Eiffage. Si Eiffage retrace correctement son empreinte climatique, la stratégie générale doit être plus ambitieuse et les mesures mises en œuvre doivent se fonder sur des objectifs clairs.

    Eiffage se classe à la huitième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Bolloré

    Le groupe emploie près de 84 000 collaborateurs et a réalisé 25 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2019.

    La stratégie climatique de Bolloré ne prend pas en compte son empreinte carbone indirecte. La croissance des activités pétrolières contribue à faire augmenter ses émissions de GES, malgré des efforts effectués en matière d’émissions directes.

    Bolloré se classe à la neuvième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    ArcelorMittal

    ArcelorMittal emploie environ 191 000 personnes dont 5000 en France. Elle réalise un chiffre d’affaires avoisinant les 68 milliards d’euros

    ArcelorMittal ne reconnait pas explicitement sa contribution au changement climatique. Le rapport de vigilance du groupe retrace correctement ses émissions par scope. Mais, malgré la bonne connaissance du risque climatique, l’entreprise n’admet pas explicitement sa contribution.

    ArcelorMittal se classe à la dixième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Air Liquide

    Air Liquide est présent dans 80 pays et compte environ 67 000 collaborateurs.

    Le groupe n’a pas d’objectif de neutralité carbone pour toutes ses émissions. Les émissions d’Air Liquide ne sont pas entièrement communiquées, la stratégie est peu claire et il est difficile d’évaluer l’adéquation des mesures adoptées avec l’Accord de Paris.

    Air Liquide se classe à la onzième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Veolia

    Veolia emploie environ 178 000 collaborateurs. Elle réalise en 2019 un chiffre d’affaires avoisinant les 27,2 milliards d’euros.

    Son plan de vigilance ne mentionne pas explicitement le changement climatique. Veolia identifie correctement ses différents postes d’émissions de GES et certains objectifs intermédiaires de réduction de GES ont été fixés, mais le groupe ne s’engage pas sur l’ensemble de ses scopes.

    Veolia se classe à la douzième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Société Générale

    La Société Générale est la troisième banque française en termes d’actifs gérés. Elle compte 138 000 collaborateurs dans 62 pays et son produit net bancaire est de 24,7 milliards d’euros.

    Si la Société Générale reconnaît les risques que comportent ses activités sur le climat, son choix de stratégie climatique n’est pas clair et le groupe ne propose que peu de mesures vérifiables et précises.

    La Société Générale se classe à la treizième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Carrefour

    En 2019, Carrefour emploi 321 000 collaborateurs et réalise un chiffres d’affaires de 80,7 milliards d’euros.

    Carrefour ne chiffre toujours pas son empreinte carbone. Si Carrefour a conscience des conséquences du changement climatique, le groupe n’identifie pas correctement ses émissions de gaz à effet de serre, ne dispose pas d’une stratégie ambitieuse et ne prend pas de mesures adéquates.

    Carrefour se classe à la quatorzième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Air France – KLM

    Air France – KLM détient 6 compagnies aériennes filiales. Le groupe dessert 116 pays, génère un chiffre d’affaires de 27,2 milliards d’euros et emploie 83 000 collaborateurs.

    La politique climatique d’Air France – KLM doit être améliorée sur plusieurs points : les risques liés au changement climatique doivent être mieux détaillés, la stratégie doit être davantage ambitieuse et les mesures doivent correspondre aux ambitions affichées par le groupe.

    Air France – KLM se classe à la quinzième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Suez

    Suez a réalisé un chiffre d’affaires de 18,015 milliards d’euros dont 61% en Europe en 2019. Le groupe emploie 89 000 collaborateurs répartis sur cinq continents.

    Le plan de vigilance de Suez n’intègre toujours pas le changement climatique. Si Suez a une stratégie ambitieuse, le groupe ne communique pas un son bilan carbone complet, les mesures ne sont pas chiffrées et leur impact n’est pas démontré.

    Suez se classe à la seizième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Engie

    Engie a un effectif de 171 103 employés et dispose d’un chiffre d’affaires de 60 milliards d’euros. L’Etat français est actionnaire à hauteur de 23,64%.

    Engie identifie correctement ses postes d’émissions carbone et reconnaît sa contribution au changement climatique. Cependant,
    le groupe doit encore analyser correctement les risques liés au changement climatique, préciser ses objectifs de neutralité carbone sur l’ensemble des scopes ainsi que les mesures mises en œuvre.

    Engie se classe à la dix-septième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    BNP Paribas

    BNP Paribas compte près de 199 000 collaborateurs et son produit net bancaire est de 44,6 milliards d’euros.

    BNP Paribas n’indique toujours pas le poids des émissions issues de ses activités d’investissement et de financement. Sa stratégie est peu ambitieuse et ne prévoit toujours aucune mesure dans le secteur des hydrocarbures conventionnels.

    BNP Paribas se classe à la dix-huitième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Vinci

    Vinci emploie plus de 222 000 salariés dans plus de 100 pays. Le chiffre d’affaires de Vinci est de 48,1 milliards d’euros en 2019.

    Vinci a amélioré sa vigilance climatique. L’entreprise reconnaît désormais sa contribution importante au changement climatique et s’est dotée d’une stratégie qui se rapproche de l’Accord de Paris. Elle ne prend cependant pas de mesures chiffrées et son empreinte carbone n’est pas totalement rapportée.

    Vinci se classe à la dix-neuvième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Renault

    Renault compte 179 565 collaborateurs dans 39 pays. L’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 55 milliards d’euros en 2019.

    Renault identifie correctement ses émissions et propose plusieurs mesures chiffrées de réduction des émissions de GES. Cependant, l’entreprise doit encore préciser ses objectifs 2030 et 2050. Les mesures prises doivent s’inscrire dans une perspective à long terme.

    Renault se classe à la vingtième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Axa

    Axa est un groupe d’assurance et de gestion d’actifs qui compte 99 843 collaborateurs dans le monde et dispose d’un chiffre d’affaires de 103,5 milliards de dollars.

    Axa ne communique pas la totalité de son empreinte carbone. Malgré un changement de stratégie globale et un alignement sur une trajectoire 1,5°C, Axa ne propose pas de mesures vérifiables et cohérentes avec la stratégie affichée.

    Axa se classe à la vingt-et-unième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    PSA

    PSA emploie environ 208 000 employés. L’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 74,7 milliards d’euros en 2019.

    PSA chiffre la totalité de ses émissions de GES et analyse correctement les conséquences du changement climatique. Il faut toutefois qu’il reconnaisse explicitement sa responsabilité, adopte une stratégie plus ambitieuse et détaille davantage l’impact des mesures mises en œuvre.

    PSA se classe à la vingt-deuxième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Crédit Agricole

    Le Crédit agricole est la dixième banque mondiale. Le groupe compte environ 142 000 collaborateurs dans le monde et dispose d’un produit net bancaire de 20,1 milliards d’euros.

    Si le Crédit Agricole communique désormais ses émissions brutes de scopes 1 à 3, les objectifs intermédiaires de sa stratégie ne sont pas précisés et les mesures mises en œuvre ne sont pas cohérentes avec l’Accord de Paris.

    Crédit Agricole se classe à la vingt-troisième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Michelin

    Michelin est un constructeur de pneumatiques employant environ 127 000 employés dans 170 pays. L’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 24 milliards d’euros.

    Michelin fait des efforts certains sur l’appareil industriel, les activités logistiques, ainsi que la réduction de la consommation des véhicules. Ces efforts permettent à Michelin de s’inscrire avec crédibilité dans une trajectoire 2°C.

    Michelin se classe à la vingt-quatrième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Danone

    Danone est une multinationale spécialisée dans l’agro-alimentaire dont le chiffre d’affaires s’élève à près de 25,3 milliards d’euros et qui compte 102 449 salariés.

    Danone chiffre correctement ses émissions de GES et a adopté une stratégie climatique ambitieuse. Le groupe doit toutefois être plus transparent sur la mise en œuvre des mesures de lutte contre le changement climatique.

    Danone se classe à la vingt-cinquième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    EDF

    EDF compte 165 000 employés et présente un chiffre d’affaires de 71,3 milliards d’euros en 2019. EDF est détenue à 83,68 % par l’Etat.

    Le modèle d’EDF reste peu carbonée du fait de ses activités dans le nucléaire et le groupe affiche une stratégie climatique ambitieuse. Cependant, la plupart des mesures annoncées restent non chiffrées et ne permettent pas de vérifier leur compatibilité avec la trajectoire 1,5°C annoncée par le groupe.

    EDF se classe à la vingt-sixième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.

    Schneider Electric

    Schneider Electric compte plus de 137 000 collaborateurs dans le monde.

    Le groupe a une stratégie ambitieuse. Il manque toutefois d’inclure tout le plan climat dans le plan de vigilance, de compléter les 10% restants des émissions du scope 3, d’inclure les représentants des salariés dans la préparation du plan de vigilance et de reconnaître explicitement la responsabilité du groupe dans le changement climatique.

    Schneider Electric se classe à la vingt-septième place de notre classement sur la vigilance climatique des multinationales françaises.