Catégorie : Actualités

  • Lettre des plaignant-es du People’s Climate Case aux députés européens avant le vote de la loi européenne sur le climat

    Cher membre du Parlement européen,

    Nous vous écrivons au nom de tous les Européen-nes touché-es par le changement climatique. Nous sommes des agriculteurs, des bergers, des forestiers, des propriétaires d’hôtels et de restaurants et les représentants de la jeunesse autochtone Sami de Suède, du Portugal, de France, d’Italie, d’Allemagne et de Roumanie, unis dans notre vulnérabilité face au changement climatique.

    La peur et l’espoir. Ces sentiments contradictoires sont constamment présents lorsque nous pensons à l’avenir, et nous ont donné la force de faire quelque chose qui n’a jamais été fait auparavant. Pour protéger notre vie et notre avenir, nous avons décidé de nous battre pour nos droits fondamentaux.

    Je m’appelle Sanna Vannar, et je suis une éleveuse de rennes autochtone Sami, du côté suédois. L’élevage de rennes est au centre de notre culture. Ma famille et d’autres communautés samis d’éleveurs de rennes perdent de nombreux rennes à cause des changements climatiques imprévisibles, qui entraînent de plus en plus de feux de forêt, de sécheresses et de pluies sur la neige dans le cercle arctique. Nous, le peuple Sami, comptons sur nos traditions, nos connaissances et nos pratiques autochtones, qui sont aujourd’hui toutes menacées par la crise climatique. Il ne s’agit pas d’un événement isolé, les changements spectaculaires dans la région arctique influenceront les conditions météorologiques dans toute l’Europe et ailleurs.

    En Allemagne, nous, les Recktenwald, vivons depuis quatre générations sur l’île de Langeoog, en mer du Nord. Notre famille a construit une entreprise d’hôtellerie et de restauration à partir de rien. Nos biens et notre entreprise sont menacés par l’élévation du niveau de la mer, les tempêtes, l’érosion des dunes et la pollution de notre eau potable par l’eau de mer, qui se produira bientôt. Au Portugal, en France et en Italie, nous, Alfredo Sendim, Ildebrando Conceição, Armando Carvalho et Joaquim Caixeiro, Maurice Feschet, Giorgio Elter et nos familles sont agriculteurs et apiculteurs. Nous sommes continuellement confrontés à un climat de plus en plus irrégulier et instable. L’augmentation des températures et les sécheresses rendent très difficile la poursuite de nos activités agricoles.

    Dans les Carpates roumaines, nous, la famille Vlad, risquons de perdre notre ferme et notre bétail en raison de l’augmentation des températures, des sécheresses et du manque d’eau dans notre région. Nous avons déplacé les animaux de plus en plus haut dans les montagnes pour obtenir une végétation plus humide, mais nous ne pouvons plus aller plus haut. Nous avons atteint le sommet.

    En mai 2018, avec nos enfants et l’association Saminuorra, nous avons intenté une action en justice contre l’UE pour l’insuffisance de son objectif climatique à l’horizon 2030. Dans le même temps, la Commission européenne a publié son analyse d’impact qui préconise une réduction d’au moins 55 % des émissions de GES d’ici 2030 (même en incluant les absorptions, ce qui se traduirait par une réduction globale plus faible des émissions), un pas dans la bonne direction, mais loin d’être suffisant si nous voulons être en conformité avec l’Accord de Paris et atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. L’UE a un devoir d’attention et de protection envers ses citoyens et doit protéger leurs droits à la vie, à la santé, au travail et à la propriété. Tout en préparant notre dossier juridique, nous avons travaillé avec des scientifiques qui ont prouvé que l’UE peut faire beaucoup plus que son objectif actuel de réduction des émissions de 40 %. Aujourd’hui, sur la base des données scientifiques les plus récentes, l’UE devrait parvenir à une réduction d’au moins 65 % de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.

    Dans notre cas, nous avons uni nos forces à celles de deux courageuses familles plaignantes extra-européennes : la famille Guyo du nord du Kenya et la famille Qaloibau de l’île de Vanua Levu aux Fidji. Elles ont rejoint notre quête de justice climatique pour rappeler aux tribunaux que les politiques de l’UE ont des conséquences non seulement pour l’Europe mais aussi en dehors des frontières européennes.

    Depuis plus de deux ans, nous attendons d’être entendus par les tribunaux de l’UE pour savoir si les citoyen-nes touché-es par la crise climatique peuvent contester l’UE pour son faible objectif climatique. Alors que la procédure juridique est en cours, nous voulons vous rappeler, à vous nos représentants élus, que vous avez le devoir historique de renforcer votre ambition climatique sans avoir besoin d’une décision de justice.

    Le 6 octobre, en tant que membres du Parlement européen, vous avez l’occasion de vous exprimer sur ces deux points lors de votre vote sur la loi européenne sur le climat. Nous vous invitons à vous aligner sur la science et sur l’appel de Jytte Guteland en faveur d’une ambition accrue de réduction des émissions de 65% d’ici 2030, ainsi qu’à soutenir l’accès des citoyens à la justice. Il est temps pour vous de prendre position contre le changement climatique et d’être du bon côté de l’histoire.

    Avec nos salutations distinguées,  

    Signataires de la lettre – Plaignant-es du People’s Climate Case :

    • Sanna Vannar, présidente de l’association Sáminuorra, Suède (représentante des jeunes Samis)
    • Maurice and Renaud Feschet, agriculteurs, France
    • RobanWako Guyo Guyo and Dima, éleveurs, Kenya
    • Maike and Michael Recktenwald, propriétaires d’un hôtel-restaurant, Allemagne
    • Vlad Petru, berger, Roumanie
    • Armando Carvalho, garde forestier, Portugal
    • Alfredo Sendim, agriculteur, Portugal
    • Ildebrando Conceição, apiculteur, Portugal
    • Joaquim Caixeiro, agriculteur, Portugal
    • Giorgio Elter, agriculteur et propriétaire d’un hôtel, Italie
  • CP / Joyeux anniversaire Lubrizol : l’adoption de la loi ASAP

    Communiqué de presse, 23 septembre 2020

    Mercredi 23 septembre, le gouvernement a adopté la loi ASAP (loi d’accélération et de simplication de l’action publique) qui porte un coup supplémentaire au droit de l’environnement concernant notamment les sites industriels. Ignorant le fait que la catastrophe de Lubrizol a fait naître un sentiment d’insécurité vis à vis des installations classés, le gouvernement fête cet anniversaire en diminuant, encore un peu plus, les procédures protectrices au profit de la productivité industrielle.

    Lubrizol : rappel des faits

    Entre le 26 et 27 septembre 2019, 10 000 tonnes de produits chimiques avaient brûlé sur le site de l’usine chimique Lubrizol et sur celui de son voisin, Normandie Logistique. Un nuage de fumée noire de 22 km de long s’était formé. L’incendie n’avait pas fait de blessé, mais les conséquences à long terme sur la santé et l’environnement restent extrêmement incertaines.
     
    Quelques jours auparavant, le 23 septembre 2019, le rapporteur de la commission spéciale sur la loi ASAP, Guillaum Kasbarian, député LREM d’Eure-et-Loir, remettait au gouvernement un Pacte productif proposant des chantiers pour simplifier et accélérer les installations industrielles. Ce rapport prévoyait notamment :

    • De sécuriser les porteurs de projet notamment face aux changements réglementaires en cours de procédure, d’anticiper les procédures en mettant à disposition des entreprises des « sites industriels clés en main ».
    • D’accélérer les délais au cas par cas en tenant compte de la réalité des territoires, et d’accorder plus de pouvoir au préfet en matière industrielle pour qu’il pilote les procédures et assure la coordination des administrations.

    Malgré cette catastrophe qui a eu lieu dans les quelques jours suivant ce rapport, cela n’a aucunement remis en cause cette volonté de moins informer, de moins évaluer afin d’industrialiser plus, et en moins de temps. Le gouvernement a donc choisi de ne pas renoncer au pacte productif au profit des industriels, et au détriment de notre santé.

    La loi ASAP et les sites industriels “clés en main”

    Le procédé de sites industriels “clés en main”, annoncé au sommet Choose France en janvier 2020 et réaffirmé par communiqué de presse le 20 juillet 2020 désigne 78 sites pour lesquelles certaines procédures environnementales pourront être simplifiées, accélérées et purgées de délais. Cette démarche se simplifie avec les dispositions de la loi ASAP, autre volet de ce pacte productif, qui sera votée dans les prochains jours par l’Assemblée Nationale.
     
    La loi ASAP traite notamment des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE). Les dispositions de cette loi portent atteinte au principe de participation du public en offrant une possibilité élargie de procéder à des consultations par voie électronique plutôt qu’à des enquêtes publiques telles que nous les connaissons.
     
    Cette loi ouvre la possibilité d’entamer les travaux sur décision du préfet alors que l’autorisation environnementale n’a pas encore été obtenue. Cette autorisation environnementale pourra maintenant être facilement “transférée” du pétitionnaire vers un autre maître d’ouvrage. Dès lors, les maîtres d’ouvrage pourront se voir dispensés d’obtenir certaines autorisations et donc pour commencer leur activité sans délais, au risque que celle ci ne soit pas adaptée à l’installation exploitée. Enfin, l’avis de la commission consultative en matière de risques technologiques se voit supprimé pour certaines installations.

    Pour Chloé Gerbier, juriste de Notre Affaire à Tous “Un an après la catastrophe de Lubrizol, quelques mois après celle de Beyrouth, et en pleine crise sanitaire due à une zoonose, le gouvernement n’a rien appris et diminue les protections relatives aux installations industrielles d’une part et à la protection de l’environnement d’autre part, et cela au profit, évidemment, du secteur industriel et de la relance économique”

    Contact presse

    • Chloé Gerbier, Notre Affaire à Tous : 06 46 43 55 09
  • CP / Le groupe Casino mis en demeure de ne plus vendre de boeuf issu de la déforestation au Brésil et en Colombie

    Lundi 21 septembre 2020

    Une coalition internationale d’associations (Canopée, CPT, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa) et d’organisations représentatives des peuples autochtones de Colombie et du Brésil (OPIAC, COIAB, FEPIPA et FEPOIMT) met en demeure le groupe Casino de prendre les mesures nécessaires pour exclure le boeuf issu de la déforestation et l’accaparement de territoires autochtones de sa chaîne d’approvisionnement au Brésil et en Colombie. Elle se réserve également le droit de solliciter la réparation des préjudices qui en découlent. 

    L’élevage bovin est la cause principale de la déforestation en Amazonie

    Selon les données de l’INPE (Institut national de recherche spatiale brésilien), sur la période d’août 2019 à juillet 2020, qui est la référence pour observer l’évolution de la déforestation, 9216 km2 ont été déboisés en Amazonie brésilienne, soit 34,5 % de plus que la période précédente.
     
    L’élevage bovin en est la principale cause. Les enquêtes menées depuis près de 10 ans ne cessent de pointer la responsabilité des abattoirs et des distributeurs. Non seulement ils s’approvisionnent régulièrement en viande bovine provenant de zones récemment déforestées mais ils ferment les yeux sur les pratiques de “blanchiment de bétail” visant à contourner la législation brésilienne. Ces pratiques permettent à des exploitations responsables de crimes environnementaux de vendre leurs bœufs en toute impunité.

    De la viande issue de la déforestation dans les supermarchés Casino au Brésil

    Le groupe Casino est le leader de la distribution au Brésil à travers sa filiale “Grupo Pão de Açúcar”. Il y représente 15% des parts du marché, et près de la moitié du chiffre d’affaires mondial du groupe (47%) se fait sur le marché latino-américain.
     
    En juin 2020, l’association Envol Vert publiait une enquête accablante, mettant en évidence des preuves de déforestation récente et de pratiques d’accaparement de terres menée à partir d’échantillons de produits carnés vendus dans plusieurs supermarchés du groupe Casino au Brésil.

    Selon Boris Patentreger, fondateur d’Envol Vert, « Ces enquêtes démontrent l’existence de liens entre plusieurs fermes impliquées dans la déforestation illégale et des produits vendus dans les supermarchés du groupe Casino. A elles seules, ces fermes représentent 4497 hectares de déforestation ».

    Casino, en violation de son devoir de vigilance ?

    Depuis 2017, le Groupe Casino est pourtant soumis à la loi française sur le devoir de vigilance qui lui impose de prendre des mesures adaptées pour prévenir les atteintes graves aux droits humains, à l’environnement et à la santé et sécurité des personnes résultant de ses activités, de celles de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants. Alors que le groupe Casino reconnaît explicitement que la chaîne d’approvisionnement en viande bovine au Brésil est exposée à des risques extrêmement graves, sa politique en la matière est manifestement défaillante.

    Selon Sandra Cossart, de l’association Sherpa, « le seul fait que Casino déclare dans son plan de vigilance que 100% de ses fournisseurs ont adhéré à sa politique sur la déforestation, alors que l’implication de ces mêmes fournisseurs dans la déforestation est régulièrement dénoncée, démontre que cette politique est soit inadaptée, soit non mise en oeuvre, soit les deux ».

    Etelle Higonnet, directrice de campagnes à Mighty Earth, ajoute: « Casino achète du bœuf à des fournisseurs comme JBS, l’une des pires entreprises internationales en ce qui concerne la déforestation – et la plus grande entreprise de viande au monde. JBS est devenu célèbre pour sa corruption grâce au scandale « Lava Jato » (lavage express) ainsi que son implication dans l’esclavage moderne, la déforestation, les incendies en Amazonie, et l’accaparement des terres autochtones. Cependant, grâce à la nouvelle loi française, Casino doit enfin assumer une réelle responsabilité envers JBS et tous ses autres fournisseurs de viande responsables de déforestation et des violations des droits humains. En effet, tous les supermarchés français sont désormais avertis : nous avons l’intention de les tenir responsables du respect de la loi ».

    Pour Célia Jouayed, de l’association Notre Affaire à Tous, « il est nécessaire que les grandes entreprises telle que Casino prennent toute la mesure de la portée de la loi sur le devoir de vigilance qui leur impose de prendre les mesures concrètes visant à prévenir les risques au droits humains, à l’environnement et à la santé, et non pas de se contenter de les identifier de manière formelle dans un document ».

    Pour Me Sébastien Mabile et Me François de Cambiaire du cabinet Seattle, conseils des associations, « il s’agit d’une action historique contre le groupe Casino, fondée sur une loi pionnière qui permettra au juge français de prescrire les mesures qui s’imposent pour enrayer la destruction de l’Amazonie par des compagnies françaises et réparer les préjudices subis. »

    OPIAC, COIAB, FEPIPA, FEPOIMT, CPT, Canopée, Envol Vert, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa demandent formellement au groupe Casino de respecter ses obligations légales en prenant les mesures nécessaires pour exclure tout le bœuf issu de la déforestation de sa chaîne d’approvisionnement. Si l’entreprise ne se met pas en conformité dans un délai de 3 mois prévu par la loi, les organisations entendent saisir la juridiction compétente.

    Contacts presse :

    • Envol Vert :
      • Audrey Benard / communication@envol-vert.org / 06 81 25 48 64
      • Boris Patentreger / bpatentreger@envol-vert.org / 07 76 07 44 19
    • Mighty Earth : 
      • Sébastien Mabile / smabile@seattle-avocats.fr / 06 62 65 35
        Etelle Higonnet / etelle@mightyearth.org / +1 202 848 7792
    • Notre Affaire à Tous 
      • Cécilia Rinaudo / cecilia.rinaudo@notreaffaireatous.org / 06 86 41 71 81
    • Sherpa :
      • Lucie Chatelain / lucie.chatelain@asso-sherpa.org / 06 47 11 65 06
    • Seattle Avocats
      • François de Cambiaire / fdecambiaire@seattle-avocats.fr
      • Sébastien Mabile / smabile@seattle-avocats.fr / 06 62 65 35
  • CP / 66 sites clés en main : Notre Affaire à Tous demande au Conseil d’Etat d’annuler le dispositif

    Communiqué de presse – 17 septembre

    Jeudi 17 septembre, Notre Affaire à Tous dépose un recours contre 66 nouveaux sites “clés en main” annoncés par le gouvernement le 20 juillet 2020. Sur ces sites, censés concrétiser un nébuleux “pack rebond”, le gouvernement annonce par un communiqué de presse que « les procédures et études relatives à l’urbanisme, l’archéologie préventive et l’environnement y ont été au maximum anticipées ». Un tel mécanisme menace les procédures environnementales et affaibli, une fois encore, le droit de l’environnement au profit de la relance économique.

    Un site clé en main est un site où les procédures ont été effectuées avant la désignation du maître d’ouvrage, ainsi qu’annoncé fièrement par le gouvernement. Le procédé permet donc d’accélérer les procédures et d’obtenir le permis en trois mois. Mais cet arrangement avec les procédures relève avant tout de la création d’une dérogation portant une profonde atteinte aux droits à l’information et à la participation du public et qui n’est pas aussi protectrice de l’environnement que le gouvernement semble l’affirmer.

    En effet, dans le cas de ces sites “clés en main”, cela signifie que l’étude d’impact “faune et flore” et l’enquête publique sur le site sont effectuées bien en amont de la désignation du maître d’ouvrage, alors que le projet est à ce moment encore très flou, voir inexistant. Malgré les prescriptions législatives concernant l’étude d’impact, celle-ci est réalisée alors qu’il est bien difficile d’établir quelles seront les conséquences du projet dans son ensemble sur l’environnement, la santé ou le cadre de vie.

    Pourtant, l’article R122-5 du code de l’environnement alinéa 5° prescrit “une description des incidences notables que le projet est susceptible d’avoir sur l’environnement”, cette analyse résultant notamment de la construction du projet, de l’utilisation des ressources en phase de fonctionnement, des émissions de polluants et des risques pour la santé humaine. Les alinéas 8 et 9 du même article imposent aussi la prévision de mesures afin d’éviter, de réduire, et de compenser les impacts du projet sur l’environnement. Dès lors, ces sites clés en main posent plusieurs questions : d’une part comment peut-on juger des impacts sur l’environnement sans connaître les projets qui viendront à s’implanter sur les sites ? Et d’autre part comment s’assurer du suivi et de l’exécution des mesures de compensation alors qu’il s’agit de mesures auxquelles l’Etat s’engage tout en sachant pertinemment qu’il n’en sera pas l’exécutant sur le long terme ?

    De la même façon, l’enquête publique invite les citoyens au plus proche du projet à se prononcer mais (comme le démontre l’enquête autour du projet du Carnet) les participants ne peuvent pas se faire une idée claire du ou des projets qui prendront place sur le site.

    Enfin nous pouvons, de manière plus générale douter de la compatibilité avec la SNBC d’un pack rebond en faveur de l’industrie.

    Pour Chloé Gerbier juriste de Notre Affaire à Tous : “Il n’est pas du ressort du gouvernement de porter atteinte au droit de l’environnement par un simple communiqué de presse. Cette simplification des procédures et délais au profit des industriels se réalise manifestement au détriment des citoyens et de l’environnement”.

    Contact presse

    • Chloé Gerbier : 06 46 43 55 09 – gerbierchloe@gmail.com

    Historique des sites "clés en main"

    En janvier dernier le Président annonçait d’ores-et-déjà la concrétisation de 12 de ces sites clé en main, lors du sommet Choose France L’association Notre Affaire à Tous apporte son soutien juridique à des collectifs en lutte contre les projets imposés et polluants. Deux collectifs en lutte contre des projets “clé en main” ont contacté l’association : Stop Carnet, qui s’oppose au projet menaçant près de 200 he de zones humides et un collectif de particuliers opposés au projet d’usine Clarebout visant une production industrielle de produits surgelés à base de pomme de terre. Le projet Carnet fait déjà l’objet d’une étude d’impact en 2017 alors qu’aucun maître d’ouvrage n‘est encore désigné. Les travaux de compensation permettant l’aménagement (une dalle de béton) ont commencé alors que les projets qui prendront place sur celui-ci sont encore inconnus. Les opposants au projet réunis au sein du collectif Stop Carnet n’ont de cesse de rappeler le flou et l’incohérence d’un site industriel construit d’un bloc sur un tel réservoir de biodiversité et l’autorité environnementale elle-même questionne la localisation dans son avis concernant le projet. Le 20 juillet 2020 ce sont 66 sites de plus qui sont ajoutés à l’annonce du pack rebond. 

  • Numéro 8 de la newsletter des affaires climatiques – Droits de la nature et droits humains

    Pour le huitième numéro de la newsletter des affaires climatiques, Notre Affaire à Tous fait un focus sur ce qu’impliquerait pour les droits humains, de protéger les droits de la nature ! La protection des droits de la nature doit-elle se faire au détriment de la protection des droits humains ? Ou, finalement, est-ce que cette nouvelle protection ne permet pas d’accroître la protection de l’ensemble des droits fondamentaux attachés à la personne humaine ? 

    Nous vous proposons ensuite un tour des affaires climatiques récentesMalgré la pandémie, les recours juridiques climatiques et environnementaux n’ont pas faibli. Aux Etats-Unis, des batailles ont été gagnées contre la construction d’oléoducs visant à transporter du gaz de schiste. En Europe, des citoyens du Royaume-Uni, de l’Irlande et de la Suisse encouragent, par leurs recours, les juges à prendre position sur la question de la carence des Etats en matière de lutte contre la crise climatique ! Enfin, nous brossons un panorama des avancées de la France en matière de contentieux environnementaux : ces dernières semaines, deux tribunaux se sont prononcés sur des atteintes à l’environnement constitutives d’un préjudice écologique. Le Conseil d’Etat a aussi ordonné au gouvernement d’adopter des mesures afin de réduire la pollution de l’air sous astreinte et la société Lubrizol a été mise en examen pour “atteinte grave à l’environnement”. Preuve que l’outil juridique peut être un moyen efficace de lutte pour la protection de l’environnement. 

    Sandy Cassan-Barnel

    Focus – La confrontation des droits de la nature et des droits humains

    Reconnaître des droits à la Nature interroge notre rapport au monde. En effet, l’Homme moderne occidental, « maître et possesseur de la nature » l’apprivoise et la soumet pour l’exploiter. A cet état de fait, le droit de l’environnement oppose une autre vision du rapport de l’Homme à la Nature qui permet de corriger les abus de son exploitation par des garanties et protections. 

    En France, l’intégration de la Charte de l’environnement dans le bloc de constitutionnalité en 2004 et la création du préjudice écologique dans le Code civil reflètent cette « préoccupation environnementale ». Par ailleurs, la qualification juridique des biens environnementaux nourrit les réflexions doctrinales. Objet extérieur aux personnes, les entités naturelles ne sont pas non plus des choses. Leur qualification semble donc changer selon la façon dont l’Homme souhaite en disposer. S’il peut exercer son droit de propriété sur certaines choses, il en va différemment lorsque ces entités sont « protégées » par le droit de l’environnement. Dans la perspective française, les « biens communs » bénéficient ainsi d’une protection disparate, non unifiée. Ils ne sont qu’une partie d’un tout, jamais envisagés en tant que détenteurs de droits liés à leur valeur intrinsèque. 

    Pourtant, le dérèglement climatique, les catastrophes environnementales répétées, les conséquences manifestes de la surproduction et la surconsommation sont autant de signaux qui incitent à repenser cette construction juridique anthropo-centrée. Aussi, l’émergence de droits de la nature compris comme un « ensemble de règles reconnaissant et protégeant, au titre leur valeur intrinsèque, les entités naturelles et écosystèmes en tant que membres interdépendants de la communauté indivisible de la vie » révèle-t-elle ce changement de paradigme. Ainsi, il ne s’agit plus de considérer la Nature comme objet mais bien comme sujet de droit autonome, au-delà de ce que permet aujourd’hui le droit de l’environnement. Cette modification radicale de notre relation au monde sape la conception jusnaturaliste du droit qui sacralise l’universalité et l’inaliénabilité des droits humains. En effet, les droits humains sont des droits naturels qui font de l’Homme le fondement et le sujet primordial de notre système de droits et de garanties des droits. Cet édifice juridique ne peut être détaché d’une certaine dimension politique et économique des rapports de l’Homme en société et dans son environnement.

    Affaires climatiques internationales

    Friends of the Irish Environment v. Ireland – 31 juillet 2020

    En 2017, l’association Friends of the Irish Environment (FIE) a déposé un recours contre le plan national d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre (GES) du gouvernement irlandais au motif qu’il entrerait en violation de la loi sur l’action climatique de 2015 mais aussi de la Constitution irlandaise et de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), en particulier des droits à la vie, à l’intégrité physique et au respect de la vie privée et familiale. FIE demande à la Haute Cour (tribunal de première instance) d’invalider le plan d’action du gouvernement et d’enjoindre celui-ci à en adopter un nouveau. Leur requête est rejetée par un jugement du 19 septembre 2019.

    FIE a alors demandé à ce que l’affaire soit entendue directement par la Cour Suprême. Le 31 juillet 2020, la Cour Suprême rend sa décision en faveur des requérants. Le plan d’atténuation du gouvernement est définitivement invalidé. Cela signifie que le gouvernement devra adopter un nouveau plan, plus précis et en accord avec la loi de 2015. En revanche la question d’une potentielle violation des droits de l’Homme n’a pas été abordée.

    US District Court for DC, "Standing Rock Sioux Tribe v. Usace"

    Les tribus amérindiennes Standing Rock et Cheyenne contestent l’octroi par l’US Army Corp of Engineers (USACE) de la servitude permettant à l’oléoduc Dakota Access de traverser le lac Oahe. Il est reproché à l’USACE d’avoir octroyé cette servitude sans établir un “environmental impact statement” ou EIS (étude d’impact environnementale), pourtant requis lorsqu’une construction affecte significativement l’environnement. La US District Court for DC (cour fédérale du premier degré) a annulé la décision d’accorder à l’oléoduc Dakota Access une servitude sur le lac Oahe et a ordonné sa fermeture sous 30 jours. En juin 2016, Dakota Access LLC lança la construction d’un oléoduc, transportant de l’huile de schiste entre le Dakota du Nord et l’Illinois et traversant les Etats du Dakota du Nord et du Sud ; de l’Iowa et de l’Illinois. La construction de l’oléoduc fut achevée en avril 2017. Elle suscita des manifestations à travers tout le pays en raison de son impact sur l’environnement et sur les pratiques religieuses des communautés locales, puisque le tracé de l’oléoduc devait traverser différents sites sacrés amérindiens.

    Plan B Earth et autres contre le secrétaire d’Etat au transport

    Le 27 février 2020, la Cour d’appel d’Angleterre et du Pays de Galles a invalidé la déclaration de politique nationale relative aux aéroports (ANPS) rédigée en 2018 et qui permettait notamment de lancer le projet de construction d’une 3ème piste à l’aéroport londonien d’Heathrow. L’illégalité relevée par la Cour était l’absence de prise en compte dans l’ANPS de l’Accord de Paris. L’autorité administrative devra donc revoir sa déclaration et y expliquer comment elle prend en compte l’Accord de Paris et les engagements pris par le Royaume-Uni, même si elle n’est pas tenue de s’y conformer.

    La société opératrice de l’aéroport d’Heathrow a déposé un recours, jugé recevable, auprès de la Cour suprême contre cette décision.

    Ainées pour la protection du climat contre Conseil Fédéral et autres

    L’association suisse « Aînées pour la protection du climat » se constitue à l’été 2016 avec comme objectif de protéger les droits fondamentaux de ses membres, mais aussi celui de l’ensemble des êtres vivants et des générations à venir. Le 5 mai 2020, le Tribunal fédéral rejette le recours de l’association « Aînées pour la protection du climat » contre les omissions du gouvernement suisse en matière de protection du climat. Pour le Tribunal, les Aînées ne subissent pas un préjudice spécifique d’une intensité suffisante et le fondement invoqué étant un outil de protection juridique individuelle, il ne peut servir comme en l’espèce à une action en défense d’un intérêt public. Cette action pourra se déployer par les autres moyens de la vie institutionnelle et politique du pays.

    Affaires et actualités environnementales

    Conseil d’Etat, 10 juillet 2020, Pollution de l’air

    Par un arrêt en date du 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat avait annulé la décision implicite par laquelle le gouvernement avait refusé de prendre les mesures utiles et d’élaborer des plans conformes à la qualité de l’air ambiant et un air pur permettant de ramener sur l’ensemble du territoire les concentrations en particules fines et en dioxyde d’azote en deçà des valeurs limites. Par cette décision de 2017, le juge administratif avait enjoint le Premier ministre et le ministre chargé de l’environnement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre un plan relatif à la qualité de l’air dans quinze zones.Estimant que la décision du 12 juillet 2017 n’avait pas été exécutée, Les Amis de la Terre, 68 associations, huit personnes physiques et une commune, ont saisi le Conseil d’État d’une demande d’astreinte. 

    Les requérants demandent ainsi au Conseil d’Etat de constater que la décision du 12 juillet 2017 n’a pas été exécutée et que soit prononcée à l’encontre de l’Etat, s’il ne justifie pas de l’exécution, une astreinte de 100 000 euros par jour de retard. Par un arrêt du 10 juillet 2020, le Conseil d’Etat enjoint au gouvernement d’adopter des mesures afin de réduire la pollution de l’air concernant les concentrations en dioxyde d’azote et particules fines sous astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard. Il s’agit du montant le plus élevé jamais prononcé par le juge administratif dans le but de contraindre l’Etat à exécuter sa décision.

    Mise en examen de Lubrizol – 27 février 2020

    Le 26 septembre 2019 à Rouen, un incendie démarre sur les sites des entreprises Lubrizol, fabricant d’additifs pour lubrifiants, et Normandie Logistique, société de transport routier. La ville de Rouen se réveille alors sous un important nuage de fumée toxique et odorante. Selon le rapport du gouvernement, cet incendie n’a pas engendré de pollution significative de l’air et de l’eau ou mettant en danger la santé des citoyens. Néanmoins, c’est plusieurs milliers de tonnes de produits dangereux qui ont brûlé. Un mois après le départ de feu, une enquête judiciaire est ouverte contre X pour sept chefs d’accusation dont notamment « destruction involontaire par incendie due à la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence » et « mise en danger de la vie d’autrui ». 

    Suite à l’ouverture de l’enquête, la société Lubrizol a été mise en examen le 27 février 2020 par le parquet de Paris pour deux chefs d’accusation : le déversement de substances nuisibles dans les eaux superficielles, souterraines ou les eaux de la mer et pour manquement dans l’exploitation de son site ayant porté une atteinte grave à la santé et à l’environnement. La société Lubrizol a été placée sous contrôle judiciaire avec l’obligation de s’acquitter d’une caution de 375 000 euros et de constituer une provision à hauteur de 4 millions d’euros afin de pouvoir régler, le cas échéant, la réparation des dommages causés.

    Sobegi contre Sepanso 64 – Tribunal judiciaire de Pau

    La Sobegi, chargée du traitement des gaz résiduaires rejetés par les industries du Bassin de Lacq et filiale à 100% de Total, a été condamnée par le Tribunal judiciaire de Pau le 22 juin 2020. Elle devra réparer un préjudice écologique et un préjudice environnemental collectif à la Sepanso 64 qui avait déposé plainte en raison de dépassement des seuils de poussières rejetées par oxydateur thermique, système permettant l’incinération de déchets industriels liquides et d’effluents gazeux, à plusieurs reprises entre 2016 et 2017. Le juge a considéré que le simple dépassement d’un seuil établi par arrêté préfectoral, qui est « fixé pour protéger l’environnement et la santé humaine » constitue un préjudice écologique.

    L’ambition de cette newsletter ? Donner les moyens à toutes et tous de comprendre les enjeux de telles actions en justice face à l’urgence climatique ! Abonnez-vous pour recevoir, chaque mois, les actualités et informations sur ces affaires qui font avancer, partout dans le monde,nos droits et ceux de la nature face aux dégradations environnementales et climatiques : le combat qui se joue dans les tribunaux est bien celui de la défense des pollués face aux pollueurs, nouvel enjeu du XXIe siècle.

  • CP / Appel mondial pour que le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies reconnaisse d’urgence le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable

    Communiqué de presse 


    Le 11 septembre 2020
     
    Ce vendredi 11 septembre, près de 840 organisations de la société civile, des mouvements sociaux, des communautés locales et des populations autochtones du monde entier appellent le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies à reconnaître d’urgence le droit à un environnement sûr, propre, sain et durable. Cet appel intervient quelques jours avant la session du Conseil des droits de l’homme, qui débutera le 14 septembre 2020.
     
    Le droit à un environnement sain, déjà incorporé dans les lois et constitutions d’une majorité de pays, est pourtant encore souvent considéré comme un corollaire des droits fondamentaux. Le Conseil des droits de l’homme a par exemple déjà reconnu le droit à un environnement sain dans l’article 18 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et dans l’article 29 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. En France, ce droit a valeur constitutionnelle à travers son intégration dans la charte de l’environnement adossée à la Constitution en 2005. Néanmoins à l’échelle européenne ce droit ne peut encore être invoqué qu’au travers du droit à la vie privée et familiale (article 2 et 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme).
     
    Le droit à un environnement sain se caractérise comme le socle permettant la réalisation des droits fondamentaux. Pourtant, sa reconnaissance est encore balbutiante et ne prime pas suffisamment souvent dans sa confrontation avec d’autres droits fondamentaux tels que la liberté d’entreprendre.
     
    En effet, “un environnement sain est essentiel à la vie et à la dignité humaines. L’air que nous respirons, l’eau que nous buvons, la nourriture que nous mangeons et le climat propre au maintien de la vie dont nous jouissons dépendent tous d’écosystèmes sains, diversifiés, entiers et fonctionnels. Au vu de la crise environnementale mondiale qui actuellement met en péril et viole les droits de l’homme de milliards de personnes sur notre planète, la reconnaissance au niveau universel de ce droit est une question de la plus haute urgence. Comme nous le savons tous, il n’y a pas de droits de l’homme sur une planète morte”.
     
    Aujourd’hui, les organisations de la société civile, peuples autochtones, mouvements sociaux et communautés locales affirment qu’il est temps d’étendre cette reconnaissance pour la protection de toutes les personnes affectées par les impacts inégaux du changement climatique et prévenir les conséquences dévastatrices des dégradations environnementales sur les droits humains. De fait, la pandémie de la covid-19 nous a rappelé que le risque de propagation des maladies augmentera à mesure que les écosystèmes naturels continueront de se dégrader. Les signataires de l’appel affirment notamment que “les droits de l’homme doivent également être garantis quand nous sommes confrontés à de nouveaux défis environnementaux, comme des risques systémiques, des dégradations irréversibles, des pertes irremplaçables et des dommages irréparables, même lorsque de l’incertitude persiste. Ces défis doivent désormais être pris en compte lors de la mise en œuvre des droits de l’homme. Le droit à un environnement sain garantit l’interdépendance et l’indivisibilité des droits de l’homme et leur pertinence par rapport aux réalités environnementales.” 
     
    Pour l’association Notre Affaire à Tous : “L’intégration du droit à un environnement sain par le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies reviendrait à le placer au sommet des normes juridiques, et donc à lui accorder la place qui lui revient. Cette reconnaissance à l’échelle internationale pourrait également pousser chaque Etat membre à intégrer ce droit dans leur propre constitution et permettrait ainsi à chacun et chacune de se voir garantir ce droit. Ces batailles normatives sont nécessaires à plusieurs échelles, tant au niveau international que national, pour faire en sorte que le droit réponde à la crise climatique que nous traversons actuellement. C’est dans cette optique qu’en France, Notre Affaire à Tous défend le projet de réforme de l’article 1er de la Constitution, visant à y inscrire la protection de l’environnement et de la biodiversité, le respect des limites planétaires ainsi que le principe de non-régression.”
     
    Contact presse :
    Cécilia Rinaudo : cecilia.rinaudo@notreaffaireatous.org – 06 86 41 71 81 

    Lire le communiqué en PDF

  • CP / Stop aux structures commerciales en périphérie Recours contre l’extension du centre commercial de Rosny 2

    Communiqué de presse – Lundi 7 septembre

    Ce lundi 7 septembre, les associations Alternatiba Rosny, et le MNLE 93 Nord-Est Parisien soutenues par les juristes de l’association Notre Affaire à Tous déposent un recours en contentieux au tribunal de Montreuil contre le projet d’extension du centre commercial Rosny 2. Alors que la Convention Citoyenne pour le Climat demande un moratoire sur les structures commerciales en périphérie et que le gouvernement a admis soutenir une telle mesure, le projet d’extension du centre Rosny 2 apparaît désuet.


    Le centre commercial de Westfield Rosny 2, refait à neuf en 2015 dispose d’ores et déjà d’une surface de 120 000 m², pour un total d’environ 169 enseignes. Il s’agit ici de porter la surface commerciale à plus de 150 000m² et de créer un immeuble de sept étages pour des bureaux. Sur plusieurs centaines de pages, l’étude d’impact tente de démontrer l’absence d’impacts environnementaux du projet mais présente de nombreuses incohérences. Par exemple, en s’appuyant sur une supposée amélioration du parc automobile, l’étude d’impact affirme que le projet, engendrant une hausse de 13% de véhicules aux abords, aboutira en fait à une amélioration de la qualité de l’air.

    De la même façon, les menaces en termes d’infiltration des eaux pluviales semblent réglées par l’installation d’une dalle de béton qui ouvre, en fait, la porte à d’autre menaces : celles des ruissellements et inondations. 

    En passant d’une structure goudron à une structure béton, le projet entraînera l’imperméabilisation irréversible de près de 50 000m² supplémentaires. Malgré la circulaire du Ministre Jean Castex rappelant aux préfets leurs obligations vis-à-vis de l’objectif de 0 artificialisation nette des sols, les projets tels que Rosny 2 continuent à voir le jour. 

    Face au groupe Westfield, porteur du projet, les arguments environnementaux ne semblent pas faire mouche. En effet, le groupe possède à ce jour 92 centre commerciaux à travers 12 pays, dont 6 en région parisienne : Westfield Les 4 Temps, Westfield Forum des Halles, Westfield Vélizy 2, Westfield Parly 2, Westfield Carré Sénart, et Westfield Rosny 2. 

    Poursuivre la bataille juridique semble essentiel : en effet, le projet se base sur une étude d’impact insuffisante, le document de référence sur la gestion des eaux n’est pas celui en application sur le lieu du projet. Ainsi, les motifs d’illégalités du permis sont nombreux. Suite au dépôt du recours gracieux en mars dernier, les associations déposent aujourd’hui le recours contentieux visant à obtenir l’annulation des permis de construire

    Pour Chloé Gerbier de Notre Affaire à Tous : “Malgré la publicité gouvernementale autour d’un pseudo moratoire, il apparaît nettement que les promoteurs tels que Westfield n’ont aucunement prévu de stopper leur expansion sur le territoire”. 

    Pour Olivier Patté d’Alternatiba Rosny : Le mythe d’une offre commerciale “plus attractive” ne peut qu’aggraver le déséquilibre avec le commerce de proximité. Ce projet imposé est hérité d’une époque révolue, il est socialement néfaste et environnementalement irresponsable. Nous réclamons un autre projet de réhabilitation de cet espace plus cohérent face à l’enjeu social et climatique”. 

    Pour Laurent Desnoyers du MNLE-93 Nord Est Parisien : “Dans le monde d’après, il est nécessaire d’abandonner les projets inutiles, voir aberrant, consommateurs d’espaces et de ressources, comme l’agrandissement du centre commercial Rosny2 de plus de 30 000 m2 et une imperméabilisation de 50 000 m2 de sol”. Contacts presse : 

    Contacts presse

    • Chloé Gerbier, coordinatrice juridique, association Notre Affaire à Tous : 0646435509
    • Olivier Patté, coordinateur Alternatiba Rosny : 0680156349
    • Laurent Desnoyers, MNLE93 et Nord-Est parisien : 0608314559
  • CP / L’Affaire du Siècle dépose son mémoire en réplique suite aux arguments présentés par l’Etat en juin dernier et ajoute 100 témoignages au dossier


    Nouvelle étape dans l’Affaire du Siècle : les quatre organisations co-requérantes ont déposé aujourd’hui leur mémoire en réplique, pour contrer les arguments que l’État avait déposé en juin dernier [1], près de 16 mois après le début de l’instruction. Notre Affaire à Tous, la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme, Greenpeace France et Oxfam France ont accompagné leur réponse d’une centaine de témoignages de personnes touchées par les impacts des changements climatiques. 

    L’Affaire du Siècle répond aux arguments de l’État

    Le jugement pourrait désormais intervenir très prochainement. En effet, dans les prochaines semaines, l’État devrait de nouveau avoir la possibilité d’ajouter des arguments au dossier, puis le Tribunal Administratif de Paris décidera de la clôture de l’instruction et fixera une date d’audience. La décision, qui sera rendue dans les deux semaines suivant l’audience, devrait intervenir avant la fin de l’année… un moment historique pour la justice climatique en France. 

    L’État tente d’échapper à ses responsabilités, or il a un rôle essentiel

    Dans sa réponse de juin dernier, l’État niait sa responsabilité, prétendant notamment que « le lien de causalité direct et certain entre l’inaction alléguée de l’État et le changement climatique ne [serait] pas établi ». Il ajoutait que :

    « L’État n’est pas en capacité d’empêcher l’intégralité des émissions de gaz à effet de serre sur le territoire français, eu égard notamment à la circonstance qu’une part substantielle de cette pollution procède de la réalisation des activités industrielles et agricoles mais également de choix et de décisions individuels sur lesquels il n’est pas toujours possible d’influer. »

    Dans son mémoire en réplique, l’Affaire du Siècle rappelle au tribunal que la responsabilité de l’État est bel et bien engagée, en démontrant qu’il a « failli à établir un cadre juridique efficace, et à mettre en œuvre les moyens humains et financiers permettant d’assurer son respect », et qu’il ne peut se cacher derrière « la multiplicité des acteurs ».

    L’État a un rôle crucial à jouer, de régulateur, d’investisseur et de « catalyseur » à tous les niveaux. Il est en effet le seul à même d’édicter les règles qui permettent de réorienter les investissements dans les filières décarbonées […], à pouvoir mettre en place les incitations fiscales et réglementaires adéquates[…]. » [2] 

    De plus, les organisations co-requérantes rappellent que la justice a déjà condamné l’État dans des affaires où il n’était pas l’unique responsable. Ça a ainsi été le cas dans les affaires de l’amiante, en 2004, des algues vertes en 2014, du Médiator en 2016… Si la France ne peut pas à elle seule lutter contre les dérèglements climatiques, elle doit cependant faire sa part et tenir ses engagements ! 

    Des manquements auxquels l’État a “oublié” de répondre…

    L’Affaire du Siècle démontre également qu’en ne respectant pas ses objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, d’efficacité énergétique ou encore d’énergies renouvelables, il a lui-même directement contribué à la crise climatique : entre 2015 et 2019, la France a émis environ 89 millions de tonnes de CO2 équivalent en trop par rapport à ses objectifs [3] – soit l’équivalent de deux mois et demi d’émissions du pays tout entier (au rythme d’avant le confinement) [4]. Il est aussi rappelé au Tribunal les nombreux points de notre requête auxquels l’État n’a pas répondu en juin dernier :

    • L’objectif de réduire de 20% les émissions de GES d’ici à 2020, pour les ramener aux niveaux de 1990 n’est pas respecté ;
    • La part du fret ferroviaire s’est effondrée (9% en 2018, contre 30% en 1984), contrairement à ce que prévoyait la loi Grenelle I (avec un objectif de 25% en 2022) ;
    • La rénovation énergétique des bâtiments a pris un retard monumental : alors que l’État aurait dû rénover 670 000 passoires thermiques par an, il est à 33 000 par an en moyenne, soit à peine 5% du rythme nécessaire ! [5]
    • La surface agricole en bio, qui devrait représenter 20% de la surface agricole utile en 2020 se situe aujourd’hui autour de… 8%

    Lois environnementales : quantité ne vaut pas qualité

    Pour se défendre, l’État listait dans sa réponse des lois et mesures prises récemment. L’Affaire du Siècle rappelle au juge que quantité ne vaut pas qualité. Les avocats des quatre organisations affirment : 

    « Le nombre de textes importe peu, dès lors que l’État persiste à ne pas s’assurer de l’efficacité des mesures qu’il adopte pour lutter contre le changement climatique. » 

    L’existence de lois et de grands objectifs ne suffit pas à garantir nos droits face au dérèglement climatique. Ces lois sont insuffisamment appliquées. Nous avons au contraire besoin d’actions concrètes et efficaces, faisant l’objet d’un suivi-évaluation rapproché, comme le recommande le Haut conseil pour le climat. 

    100 témoignages à l’appui

    Lancée en décembre dernier par l’Affaire du Siècle, la cartographie interactive des impacts du changement climatique a récolté près de 20 000 témoignages. Les 4 organisations ont souhaité ajouter au recours une centaine d’entre eux pour démontrer au juge que les français·es sont déjà touché·e·s par les changements climatiques et appuyer le fait que l’État se doit de protéger ses citoyens. En effet, le ministère de la Transition écologique et solidaire affirme lui même que 62% de la population française est exposée de manière forte ou très forte à des risques climatiques. Et les citoyen·ne·s s’en inquiètent : d’après une étude Harris Interactive réalisée en mai 2020 pour le Haut Conseil pour le Climat [6] “59 % des Français·es se disent inquiets des effets des changements climatiques sur leur vie”. Ce chiffre monte à 73% quand ils se projettent dans les 10 prochaines années. Cette même étude montre qu’ils sont 91% à estimer qu’il est urgent d’agir. 

    “Le 6 septembre 2017, ma vie a été complètement bouleversée par l’ouragan Irma, qui a dévasté l’île de Saint-Martin, où j’habite : 95% des bâtiments de l’île détruits. Aujourd’hui, je vis toujours dans une maison en chantier, nous n’avons pas repris une vie normale.”

    Magali, 49 ans, Témoin du Climat pour l’Affaire du Siècle. 

    “Je suis guide de haute montagne, je vois au quotidien l’impact des changements climatiques, qui rendent la pratique de l’alpinisme, et donc mon activité professionnelle de plus en plus risquée. Rien que cet été, plusieurs accidents mortels ont eu lieu, en lien avec les fortes chaleurs.”

    Pol, 41 ans, Témoin du Climat pour l’Affaire du Siècle. 

    Notes

    Le contenu du mémoire en réplique de l’Affaire du Siècle est disponible ici 

    Consulter l’intégralité des témoignages en ligne 

    [1] Communiqué de presse du 25 juin 

    [2] Mémoire en réplique, p. 38

    [3] Calculs effectués par Carbone 4 pour l’Affaire du Siècle

    [4] Les émissions françaises de CO2 hors secteur des terres se sont établies à 445 millions t CO2 en 2018, soit 37 MtCO2e par mois.

    [5] Calculs effectués par Carbone 4 pour l’Affaire du Siècle 

    [6] “Redresser le cap, relancer la transition”, rapport du Haut Conseil pour le Climat, mai 2020

  • La jeunesse portugaise vs. 33 pays : action en justice pour le climat auprès de la CEDH

    Ce jeudi 3 septembre, six jeunes Portugais attaquent en justice 33 pays devant la Cour européenne des droits de l’Homme, dont la France, d’autres Etats membres de l’UE ainsi que la Norvège, la Suisse, la Russie, la Turquie, le Royaume-Uni et l’Ukraine.

    Leur objectif : que la Cour reconnaisse ces pays comme responsables de l’aggravation de la crise climatique et d’avoir mis en danger l’avenir des générations présentes.

    Auparavant, deux actions juridiques ont obligé l’Irlande et les Pays-Bas à revoir leurs plans climatiques peu ambitieux.

    En cas de succès, cette action pourrait pousser les pays à accélérer leurs actions climatiques et à revoir leurs plans climatiques (contributions déterminées au niveau national – NDCs) prévus avant la prochaine COP.

    Cette procédure fait écho à l’Affaire du Siècle en France, recours en justice contre l’Etat pour inaction climatique lancé au printemps 2019 par Greenpeace France, Notre Affaire à Tous, la Fondation pour la Nature et l’Homme et Oxfam France et appuyé par les signatures de plus de 2 millions de citoyennes et citoyens (un record). L’Etat y a répondu le 23 juin dernier, et la décision du Tribunal administratif de Paris devrait intervenir fin 2020 ou début 2021.

    Le Portugal, comme la France, a connu l’un des étés les plus chauds de son histoire, et on s’attend maintenant à ce que 2020 soit l’année la plus chaude jamais enregistrée.

    Cécilia Rinaudo, coordinatrice générale de Notre Affaire à Tous a déclaré : “Partout dans le monde, les actions climatiques se multiplient, et la jeunesse est en première ligne dans ce combat contre l’inaction des États face aux dérèglements climatiques. Notre Affaire à Tous, qui s’inscrit dans ce mouvement mondial pour la justice climatique, salue l’initiative lancée par les jeunes portugais·es auprès de la CEDH : il est temps que les Etats reconnaissent que le droit à un environnement sain est le socle de tous nos droits fondamentaux. Après la victoire d’Urgenda l’année dernière et celle des Amis de l’environnement en Irlande cet été, la justice commence à donner raison à ces actions en justice citoyennes qui réclament aux États d’augmenter leurs efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et tenir leurs engagements climatiques. D’ici la fin de l’année, ce sera au tour de l’Affaire du Siècle de passer devant le Tribunal Administratif de Paris. Espérons que le/la juge rendra une décision à la hauteur de l’urgence climatique que nous traversons.

    Contacts presse :

    Cécilia Rinaudo : cecilia.rinaudo@notreaffaireatous.org | +33 (0) 6 86 41 71 81)

    Gerry Liston (juriste) : gliston@glanlaw.org, +353863415175

    Dr Gearóid Ó Cuinn (Directeur), gocuinn@glanlaw.org, +447521203427


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  • 28 juillet 2020 – Changement climatique et ressource en eau

    Ce 28 juillet 2020 marque les 10 ans de la reconnaissance du droit à l’eau par les Nations Unies. Ce droit “consiste en un approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût abordable, d’une eau salubre et de qualité acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun”. Mais face au changement climatique et aux multiples dégradations de l’environnement, à quels défis fait face ce droit fondamental et qui sont les premiers touchés ?

    Augmentation ou diminution des précipitations, hausse du niveau de la mer, modification de la qualité de l’eau… En France, les impacts du changement climatique sur les ressources en eau ont déjà des conséquences : changement des milieux aquatiques et de leur biodiversité, baisse de disponibilité d’une eau de qualité, plus forte concurrence entre secteurs. En France métropolitaine, 2,1% de la population ne bénéficie pas d’un accès à une eau potable gérée en toute sécurité. Et les inégalités sont frappantes entre le territoire métropolitain et les outre-mer.

    A Mayotte par exemple, environ 41 000 personnes n’ont pas accès à des services d’eau potable gérés en toute sécurité. Cette revue de presse revient sur les problématiques liées à la ressource en eau face au changement climatique. Pour combattre les inégalités sociales climatiques et environnementales, il nous faut les connaître. C’est le sens de cette revue de presse élaborée par les bénévoles de Notre Affaire à Tous, qui revient chaque mois sur les #IMPACTS différenciés du changement climatique, sur nos vies, nos droits et ceux de la nature. Pour en savoir plus sur les 10 ans de la reconnaissance du droit à l’eau, nous vous invitons à visiter le site de la campagne “L’eau est un droit” portée par plus de 30 associations.

    Le droit à l’eau c’est quoi ?

    Selon le rapport des Nations Unies sur l’eau et les changements climatiques, au cours des 100 dernières années, l’utilisation de l’eau dans le monde a été multipliée par six et continue d’augmenter de 1% par an. Le droit à l’eau potable et à l’assainissement est un droit de essentiel à la jouissance de la vie et à l’exercice des droits humains. Dans un rapport publié le 22 mars 2020, l’ONU signale que “les changements climatiques affecteront la disponibilité, la qualité et la quantité d’eau nécessaires aux besoins humains élémentaires, portant ainsi atteinte à la jouissance des droits fondamentaux à l’eau potable et à l’assainissement de milliards de personnes” et les auteurs du rapport appellent à un engagement plus concret des États pour relever ce défi. De nombreuses régions du monde connaissent déjà des situations de stress hydrique qui sont aggravées par les dérèglements climatiques. Les évènements climatiques extrêmes, les pollutions et la dégradation de écosystèmes ont des conséquences graves sur la disponibilité, la qualité et la quantité d’eau nécessaire pour répondre aux besoins de base des humains.

    Le changement climatique a un impact direct sur le cycle de l’eau et les conséquences du dérèglement climatique sur l’accès à l’eau, les services d’eau et d’assainissement seront importants y compris en France→ DECRYPTAGE : Les chiffres de l’accès à l’eau et à l’assainissement en FranceA l’été 2003, la vague de chaleur prolongée a forcé l’entreprise EDF à réduire sa production d’énergie nucléaire, équivalant à la perte de 4 à 5 réacteurs et coûtant près de 300 millions d’euros en importation d’électricité.

    Quantité d’eau disponible, sécheresse et difficultés d’approvisionnement

    La pénurie d’eau menace 1/4 des êtres humains dans le monde et la population française ne fait pas exception. 37 milliards de mètres cube d’eau sont prélevés chaque année en France, alors que cette année encore la sécheresse menace plus de la moitié de la France métropolitaine. En effet, les sécheresses, de plus en plus fréquentes, ont un impact direct sur la quantité d’eau disponible et donc sur l’accès à l’eau potable des habitant-es. Contrairement aux idées reçues, le fait d’être un pays riche ou d’avoir une pluviométrie relativement importante en hiver n’est pas suffisant pour assurer un accès à l’eau potable à toutes et tous. 

    En 2019, la France se classait ainsi 59ème parmi les Etats les plus touchés par les risques de pénurie hydraulique, ce qui ne prend pas en compte les diversités situationnelles locales. En 2016 déjà, un rapport sénatorial alertait sur les risques du manque d’eau en France. Les régions du Sud du pays risquent de voir leurs ressources en eaux, tant de surface que souterraines, diminuer, notamment avec la baisse de la recharge par les précipitations. Ces risques se sont concrétisés à plusieurs reprises au cours des dernières années et les problèmes d’accès à l’eau ont été particulièrement importants aux étés 2018 et 2019, marqués par de très fortes chaleurs. Des communes ont alors connu des pénuries d’eau potable, atteignant leur « Jour 0 », jour où l’eau ne sort plus des robinets, comme en Corrèze. Un reportage de France 3 s’intéressait d’ailleurs au ravitaillement par camion-citerne de certaines villes de Franche-Comté, comme Besançon. A l’image des deux derniers étés, ce 24 juillet 2020, la Meuse et les Vosges ont aussi instauré des restrictions d’eau “en raison d’un déficit pluviométrique”. 

    Les problèmes d’accès à des quantités d’eau deviennent plus fréquents dans de nombreux territoires français en métropole, comme dans les Deux-Sèvres, dans la Vienne ou encore à Valenciennes l’année dernière, mais aussi en Outre-Mer comme à Mayotte où les habitants manquent déjà d’eau, tandis qu’en Nouvelle-Calédonie, l’île d’Ouvéa a vu ses puits d’eau douce s’assécher ou être contaminés par l’eau salée, obligeant à redéfinir les modalités d’approvisionnement de l’île. 

    En Guadeloupe, la situation est particulièrement inquiétante. En 2018, un rapport de l’observatoire régional de l’énergie et du climat faisait état de la vulnérabilité de la Guadeloupe au changement climatique et s’attachait à étudier les particularités de la région en termes d’accès et de qualité de l’eau. La teneur en sodium et chlorure et la salinisation des nappes souterraines à cause de la hausse du niveau des mers sont deux phénomènes qui accentuent la vulnérabilité de ce territoire qui est déjà soumis à une forte irrégularité spatiale des précipitations. Un autre rapport de l’Office de l’eau de Guadeloupe, publié en septembre 2019 conclut que la Guadeloupe fait face à “une dégradation généralisée des masses d’eau”. En cause principalement, l’activité anthropique et notamment l’agriculture, l’assainissement et l’industrie.

    Qualité de l’eau et pollutions

    Le changement climatique a un impact important sur l’eau qui perd en qualité et est de plus en plus sujette à porter des maladies. Celles-ci vont d’ailleurs augmenter dans un futur proche alors même que l’eau insalubre est une des causes de mortalité infantile les plus importantes au monde, loin devant les conflits armés. Les événements “exceptionnels” rendus plus fréquents jouent négativement sur la qualité de l’eau. Les crues et les inondations charrient de nombreux déchets qui se retrouvent ensuite dans le réseau, rendant l’eau impropre à la consommation. Les fortes pluies entraînent des dysfonctionnements des stations d’épuration qui ne sont pas dimensionnées pour ces quantités. Elles peuvent alors déborder dans les égouts, comme à Biarritz en juillet 2019. A l’inverse, la sécheresse et son augmentation entraînent un épuisement des ressources en eaux profondes, ce qui amène les populations à consommer des eaux de surfaces souvent insalubres.

    La chaleur pourrait aussi provoquer, prédit le GIEC, la prolifération de bactéries dans les canalisations avant la distribution de l’eau au robinet. D’autres bactéries envahissent la mer, comme E.Coli, qui provoque des gastro-entérites et autres infections, en raison de l’augmentation de la température de l’eau. Par ailleurs, notre eau du robinet est-elle consommable sans risque ? Le Ministère des Solidarités et de la Santé affirmait en octobre 2019, que “l’eau du robinet est l’un des aliments les plus contrôlés. Elle fait l’objet d’un suivi sanitaire permanent, destiné à en garantir la sécurité sanitaire”. Les agences régionales de santé assurent les contrôles sanitaires commune par commune. Mais cela n’empêche pas les consommateurs de s’inquiéter pour leur santé, comme le montre la plateforme #AlertePollution de FranceInfo. Peur des micro-organismes, des pesticides, du plomb… les citoyen-nes français veulent être informé-es de l’eau qu’ils consomment. UFC Que Choisir a réalisé une carte interactive de la qualité de l’eau en France pour permettre à toute personne de vérifier la qualité de l’eau près de chez eux.

    Les pollutions liées aux activités humaines sont principalement dues à l’agriculture intensive et aux pesticides déversées dans les eaux de surface. Les rivières et les nappes phréatiques sont durement touchées par les pesticides issues de l’agriculture. Les pollutions par les activités humaines sont aussi issues de l’extractivisme. L’extractivisme désigne l’exploitation intensive des minéraux (minerais, hydrocarbures et gaz). Les mines à ciel ouvert où les forages de gaz de schiste sont des exemples d’industries extractives. L’extractivisme a des conséquences néfastes sur l’environnement, et plus particulièrement sur l’eau : pollutions de l’eau au cyanure, déversement de boues toxiques, acidification des eaux de surface et souterraines. La France a une longue histoire minière et son territoire en est marqué. Les anciens sites miniers sont durablement pollués, même plusieurs siècles après la fin de leur exploitation. Aujourd’hui, alors que le cours de l’or et des métaux rares augmente, de nouveaux projets miniers voient le jour. La Guyane en fait particulièrement les frais : les mines d’or comme le projet “Montagne d’or” et l’orpaillage illégal contribuent à la déforestation en Amazonie. “Comme toutes les industries minières, les mines d’or utilisent beaucoup d’eau. Dans le monde, une grande partie des mines d’or sont situées dans des zones de stress hydrique”. Les peuples autochtones sont les premiers touchés : le mercure, qui permet d’extraire l’or, pollue les eaux fluviales, qui contamine les écosystèmes et les poissons dans les fleuves. Le régime alimentaire des populations autochtones du Haut Maroni, basé sur la pêche, a pour conséquence un “taux d’imprégnation au mercure les plus élevés” chez cette population. Les enfants peuvent en souffrir car le mercure agit sur le système nerveux central, ce qui peut altérer le développement des plus jeunes et produire des malformations congénitales. Comme le décrit France Nature Environnement, “l’ouverture et la profondeur de la mine entraînent des risques de pollution, comme le perçage de nappes phréatiques et le drainage minier acide”. Malgré “l’abandon” de Montagne d’or en mai 2019, d’autres projets miniers voient le jour comme le projet “Espérance”, sur les rives du fleuve Maroni. Une aberration écologique mettant en danger la vie des populations.

    En France métropolitaine aussi, l’extractivisme ravage. Dans l’Aude, après 90 ans d’extractions sur la “Montagne noire”, la vallée de l’Orbiel est polluée par l’arsenic, le soufre et le plomb. Comme pour les mines d’or, les polluants issus de la mine se déversent avec l’eau de pluie dans les rivières. En 2004, “l’Ademe estimait qu’environ 2,5 tonnes d’arsenic se déversaient chaque année dans l’Orbiel. Aujourd’hui, ces eaux présentent à certains endroits une concentration moyenne en arsenic de 600 microgrammes, soit 60 fois plus que le seuil de potabilité”. En Bretagne, en Ariège, dans le Nord ou dans le Limousin, les mêmes problématiques se posent et le silence des autorités sur les conséquences néfastes de l’arsenic met en danger la population souvent ignorante de ces dangers.

    Ressource en eau et populations vulnérables

    Les migrants et déplacés climatiques : de nombreux migrants et déplacés climatiques quittent ou quitteront leur lieux de vie en raison des difficultés d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. C’est déjà le cas dans certains pays, comme en Inde où des milliers de villages ont été abandonnés par leurs habitants en raison du manque d’eau. Ailleurs, comme au Darfour et en Syrie, l’accès aux réserves d’eau potable a alimenté pendant des années le conflit armé. Si les trois régions les plus touchées selon les prévisions seront l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique latine, l’Europe et la France ne seront pas épargnées par ce phénomène de migrations, conséquence du changement climatique sur les ressources en eau. Or, les personnes déplacées ou en migration voient déjà aujourd’hui leur droit à l’eau et à l’assainissement fortement impacté par l’évolution du climat. Le changement climatique a un impact sur l’approvisionnement en eau des déplacés et réfugiés partout dans le monde, en réduisant les ressources d’eau potable mais aussi en contaminant les sources et nappes phréatiques, comme le souligne l’UNHCR. C’est le cas par exemple ces dernières années en Centrafrique et au Nigéria. L’augmentation du nombre de réfugiés dans les années à venir, certains fuyant des zones asséchées à la recherche d’eau potable, créera une pression supplémentaire sur les ressources existantes allouées à ces personnes. 

    Les sans-abris : alors que l’attention médiatique sur les personnes sans-abris se concentre sur la période hivernale, la chaleur est également dangereuse. Déjà touchés par les difficultés d’accès à l’eau lors des canicules, les personnes vivant dans la rue font partie de celles les plus à risque face à l’impact du changement climatique sur les ressources en eau puisque, sans domicile alors que les accès publics à l’eau diminuent, ils sont vulnérables à la déshydratation et à l’hyperthermie. De plus, en été, les services fournis aux personnes sans-abris le reste de l’année ont tendance à ralentir. Chantal Coquillon du Secours Catholique à Marseille explique d’ailleurs que dans la 2ème plus grande ville de France, “la plupart des petites associations stoppent leurs actions en juillet et août, faute de volontaires”. Ce qui renforce les situations de fragilité puisque peu de points d’eau et de sanitaires gratuits sont mis à disposition. Dans la capitale au contraire, les points d’eau gratuits sont beaucoup plus nombreux, 1200 au total. Pour Jean-Baptiste Butlen, directeur général adjoint d’Eau de Paris, “la ville est pionnière en la matière”. 

    Les plus pauvres : l’eau est déjà une ressource à l’accès difficile pour de nombreuses personnes dans le monde, que ce soit pour boire, aller aux toilettes ou se laver. Dans le monde, plus d’un milliard de personnes en zone rurale doivent déféquer en plein air, ce qui a d’importantes conséquences sur leur santé, leur intimité et même leur sécurité physique. L’impact du changement climatique sur les ressources en eau rendront cet accès encore plus difficile. Or, en économie marchande, la rareté va souvent de paire avec un prix élevé. Le gouvernement lui-même envisageait une tarification de l’eau plus élevée en été qu’en hiver, afin de mieux gérer cette ressource et éviter les gaspillages estivaux. Mais au-delà des gaspillages, c’est l’accès à cette ressource des personnes les plus pauvres qui pourraient être compromis.

    En France, “avoir un toit au-dessus de sa tête ne garantit pas un accès à l’eau suffisant”. En moyenne, les Français-es dépensent 1,1% de leur budget pour l’eau, “mais deux millions de ménages y consacrent plus de 3 % de leurs revenus”. La précarité hydrique est une réalité pour de nombreux ménages de Seine-Saint-Denis. Le département reste marqué par une fragilité sociale forte : un tiers des moins de 30 ans y vivent sous le seuil de pauvreté. Le département de Seine-Saint-Denis lutte contre la précarité hydrique avec un dispositif baptisé « EcEAUnome », qui vise à distribuer 80.000 kits d’économiseurs d’eau aux particuliers en cinq ans. Il s’agit d’une sorte de « grille » apposée sur le robinet, qui, en mélangeant l’air à l’eau, en réduit le débit. A la clef, une facture réduite d’environ 250 euros par an et par ménage, promet le département, qui engage 2 millions d’euros sur ce projet. Le dispositif, qui touchera 13 % de la population, s’adresse essentiellement aux logements du parc privé (pavillon, copropriété). Face à la précarité hydrique, la loi Brottes a été adoptée le 15 avril 2013 pour “préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et sur les éoliennes”. Elle instaure des avancées pour la fourniture en eau grâce au droit au logement, comme l’interdiction des coupures d’eau des ménages en cas d’impayés. Elle instaure aussi une tarification sociale de l’eau permettant aux collectivités de faire bénéficier d’un tarif d’eau plus faible pour les ménages précaires. En 2019, 50 collectivités étaient volontaires pour faire l’expérimentation, comme la métropole de Rennes, représentant 11 millions d’habitant-es. Avant cette loi, dès 2012, un système d’aide avait déjà été testé par la ville de Dunkerque.

    Accès effectif à l’eau et "guerres" de l’eau

    Une ressource en eau moins disponible, c’est une probabilité de conflit plus élevée. Des “batailles de l’eau” commencent déjà à voir le jour en métropole : Libération mentionne par exemple le barrage de Sivens (dont la lutte a causé la mort de Rémi Fraisse), les nappes souterraines de Vittel, les retenues de “substitution” en Sèvres niortaise, la digue du lac de Caussade etc. 

    La diminution des quantités d’eau disponibles crée des conflits autour de l’eau, les différents besoins entrant en confrontation. Ces conflits sont déjà des réalités dans certains départements comme les Deux-Sèvres en raison de la surexploitation des ressources en eau par les agriculteurs. Le collectif “Bassines non merci” se bat contre la construction de 16 réserves d’eau le long de la Sèvre niortaise qui serviront aux exploitations agricoles. Ces “bassines” seront alimentées par l’eau sera prélevée du sol en hiver pour une gestion plus durable de la ressource en hiver selon les agriculteurs. Le collectif “Bassines non merci”, présent sur la carte des luttes de Reporterre, dénonce le coût de ces installations, financées à 70% par l’argent public. Pour les militant-es, un tel projet risquerait d’encourager un agriculture intensive très gourmande en eau, dans une région, le Marais poitevin, qui fait déjà face à d’importants manques d’eau chaque été. En effet, pour Sami Bouarfa, directeur adjoint Aqua de l’Inrae, les projets de retenues d’eau, comme les bassines maintiennent “une agriculture orientée vers une dépendance à cette eau artificielle”. Pour lui, il faut miser sur les solutions qui reposent sur la nature et se baser sur le schéma “préserver, restaurer et multiplier”. 

    Dans les Vosges également, l’entreprise Nestlé pompe dans les eaux de Vittel malgré les niveaux bas de la nappe phréatique. L’installation de la multinationale dans la région dès les années 1980 a toujours été source de conflit. Entre contrôle du foncier et possibilité d’emplois pour les habitant-es de la région, l’entreprise noyaute le territoire. Pourtant, les ressources en eau diminuent à la fois en qualité et en quantité avec un déficit annuel d’un million de m3. Pour Jean-François Fleck, président de Vosges Nature Environnement, “la mainmise abusive de l’industriel sur cette richesse naturelle est en contradiction avec la loi sur l’eau de 1992”. L’association demande que chaque prélèvement dans la nappe phréatique, qui est mise en danger à l’horizon 2050, soit soumis à des autorisations et études d’impact.

    L’agriculture et la ressource en eau

    En France, dans l’agriculture, secteur qui occupe 45% du territoire, c’est essentiellement pour l’irrigation que l’eau douce est utilisée, ainsi que l’alimentation du bétail (en moins grande proportion). L’eau pour l’irrigation est principalement utilisée pour la culture de maïs (41% des surfaces irriguées) et de blé (17%). La surface agricole irriguée représente environ 6% de la surface agricole utile en 2010, les 94% restants étant essentiellement une agriculture pluviale, sans nécessité d’irrigation. Certaines pratiques agricoles ont des impacts sur la qualité de l’eau, comme l’utilisation d’engrais et produits phytosanitaires. 

    Dans un rapport, l’Agence européenne de l’environnement indique qu’un “tiers de l’eau utilisée en Europe est destiné au secteur agricole”. Dans les pays du sud de l’Europe (Grèce, Espagne, sud de la France, Italie), où l’utilisation de l’eau pour l’irrigation est d’environ 80%, il est nécessaire d’avoir une meilleure gestion de l’eau : au niveau politique, dans le passé, les subventions agricoles obtenues par la Politique agricole commune (PAC) de l’UE ont indirectement encouragé les fermiers à produire des cultures consommant beaucoup d’eau. Plus de formations et de partage de connaissances sont primordiales pour une meilleure gestion de l’eau. Enfin, le changement de pratiques agricoles pour utiliser moins d’engrais et de pesticides et ainsi avoir une eau moins polluée doit être soutenu. A l’image de la lutte des bassines dans les Deux-Sèvres, l’agriculture est à la fois coupable et victime de la diminution et de la quantité et qualité de la ressource en eau.

    En effet, selon le GIEC, “la productivité des systèmes agricoles et forestiers et des pêcheries dépend en grande partie de la distribution temporelle et spatiale des précipitations et de l’évaporation, ainsi que de la disponibilité des ressources en eau douce pour l’irrigation, en particulier pour les cultures”. Un agriculteur en conversion biologique en Basse-Normandie témoigne des pratiques plus respectueuses de la ressource en eau à travers le bio. “Les pratiques comme la couverture hivernale, les cultures associées, la plantation de haies favorables aux auxiliaires de culture améliorent la structure et la qualité des sols, préviennent les ruissellements, retiennent l’humidité dans les sols et servent d’habitats à la biodiversité. Elles sont donc toutes indiquées pour rendre les cultures plus résilientes face aux dérèglements climatiques”.

    Catastrophes naturelles et accès à l’eau

    1/6ème de la population mondiale dépend de l’eau douce apportée par les glaciers à la saison sèche”. Le dérèglement climatique provoque la fonte des glaces et une dilatation thermique des océans, entraînant la montée du niveau de la mer. Des scientifiques évaluent cette montée entre un à 3 mètres d’ici 2100. Le phénomène tend également à accentuer la fréquence et la puissance des catastrophes naturelles, avec une incidence directe sur la ressource en eau. Sécheresses et inondations accrues, diminution ou augmentation des précipitations, cyclones, causent pollution ou salinisation des cours d’eau et des eaux souterraines, ou encore une raréfaction de la ressource, avec des effets directs sur les écosystèmes et la vie humaine.

    D’ailleurs, dans le rapport de GREC Sud, le groupe régional d’experts sur climat de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, les scientifiques s’interrogent sur les conséquences de l’accès à l’eau potable dans la région dans les décennies à venir et particulièrement sur les risques d’intrusion saline dans les nappes phréatiques côtières “pouvant altérer la qualité des eaux douces”. Les variantes des précipitations ont des conséquences directes sur la ressource en eau : en effet, dans certaines régions, les précipitations tendent à diminuer. A titre d’exemple, la recharge des eaux souterraines dans l’ouest de la région Occitanie serait affectée à plus de 50% à horizon 2050, d’après le rapport “Impacts du changement climatique dans le domaine de l’eau” de l’Agence de l’eau de Rhône Méditerranée Corse (2016). Si le niveau d’eau venait à baisser de manière drastique dans les eaux souterraines mais aussi les rivières, la quantité d’eau disponible pour les prélèvements, pour l’usage domestique, pourrait s’avérer insuffisante pour couvrir les besoins de la population. Dans d’autres régions, au contraire, l’augmentation des précipitations accroît l’érosion et la mobilité des polluants. Le ruissellement provoqué par les précipitations accrues, notamment dans les hautes latitudes, charrie les polluants (agents pathogènes et autres polluants dissous, comme les pesticides) jusqu’aux aquifères souterrains et eaux de surface. L’érosion accrue conduit aussi à la mobilisation des polluants absorbés tels que le phosphore et les métaux lourds. En outre, l’intensité des précipitations rend la gestion de l’eau plus complexe en saturant les systèmes de récupération et de traitement des eaux usées. Ajoutons que le volume d’eau dépollué rejeté dans les rivières correspond à leurs capacités de dilution actuelles. Ainsi, des variations importantes de débit pourraient rompre cet équilibre et rendre les cours d’eau plus vulnérables aux pollutions. 

    Effets des fortes inondations sur la ressource en eau : Là encore, l’impact principal des inondations sur la ressource en eau est lié à la pollution qui en découle et se répand. Les contaminations sont nombreuses dans les zones industrielles, agricoles ou urbaines, à cause des carburants de voitures, des hydrocarbures des cuves enterrées, des produits ménagers entreposés dans des zones inondées, etc. La santé des personnes est directement menacée. Le cas des submersions marines doit aussi être étudié car l’apport excédentaire d’eau de mer entraîne la salinisation d’écosystèmes qui ne sont pas adaptés au sel. Les conséquences sont nombreuses : destruction de la faune et de la flore, pollution des milieux qui peut perdurer longtemps après le retrait des eaux. Pour la production d’eau potable par exemple, la pollution implique des traitements supplémentaires, et génère des surcoûts. Les activités qui ont lieu directement dans le milieu – comme la pisciculture – sont les premières impactées. Le dérèglement climatique augmente la contamination de l’eau douce par la mer : sur le littoral, les réserves souterraines d’eau douce ne sont pas isolées de l’eau de mer du fait de la porosité des roches. L’élévation du niveau des mers renforce ce phénomène de contamination de l’eau douce.

    Selon le Réseau Action Climat, les personnes pauvres sont plus exposées aux inondations et ce déséquilibre s’agrandit dans les zones urbaines. Entre 1970 et 2010, alors que la population globale a cru de 87%, la population dans les zones inondables a augmenté de 114% et celle des zones exposées aux cyclones de 192%. Ces constats sont liés à des problématiques complexes. Bien que certaines régions soient plus exposées, elles restent attractives car elles offrent plus de services, de transports et aussi de travail, comme Bombay.

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