Catégorie : Blog

  • CP / France – Afrique du Sud : neuf ONG demandent au gouvernement de condamner le jeu dangereux de TotalEnergies

    Paris, le 11 octobre 2023 – Alors que dimanche 15 octobre, la coupe du monde de rugby verra s’affronter en quarts de finale la France et l’Afrique du Sud, les téléspectateurs du monde entier subiront le matraquage publicitaire du sponsor officiel TotalEnergies sans savoir que cette entreprise irresponsable accélère le déclenchement de bombes climatiques en Afrique, et notamment en Afrique du Sud.

    Aujourd’hui, neuf associations (1) dénoncent la mascarade de « consultation publique » qui vient de démarrer en Afrique du Sud à propos des projets d’exploration et de production de TotalEnergies et demandent au gouvernement français de retirer le soutien qu’il apporte à la Major française à travers les « Partenariats pour une transition énergétique juste » ainsi que de condamner publiquement tous les investissements de TotalEnergies dans de nouveaux projets fossiles.

    En totale contradiction avec les conclusions du GIEC et les recommandations de l’Agence internationale de l’énergie (2), qui appellent à ne développer aucun nouveau projet d’extraction de charbon, de pétrole ou de gaz, TotalEnergies développe une stratégie expansionniste agressive en Afrique, et notamment en Afrique du Sud, où la multinationale souhaite ouvrir de nouveaux champs gaziers en offshore profond. Les côtes occidentales et méridionales sud-africaines sont ainsi menacées par une série de projets offshore qui pourraient voir le jour à des profondeurs allant de 200 à 3200 mètres de profondeur, et qui menacent des hotspots de biodiversité, les corridors de migration des baleines, la pêche artisanale et l’économie du littoral.

    Loin de renoncer à ses investissements mortifères après un an de mobilisation de la société civile en France et en Afrique du Sud et malgré une pétition réunissant près de 100 000 signatures, TotalEnergies vient au contraire d’accélérer les procédures en engageant une « consultation publique » pour développer deux immenses champs gaziers dans les eaux d’Afrique du Sud. Le 22 septembre 2023, les citoyens sud-africains découvraient ainsi une étude d’impact environnemental de plus de 3000 pages, qu’ils sont censés lire et commenter dans un délai de trente jours, le délai de clôture de la consultation étant fixé au 25 octobre 2023. Trente maigres jours concédés aux citoyens, scientifiques, associations et élus locaux pour se prononcer sur un projet déterminant pour la biosphère, alors qu’une première lecture des documents soumis à consultation révèle qu’en plus de la demande déposée officiellement par TotalEnergies pour l’exploitation des champs gaziers de Luiperd et Brulpadda s’ajoute un projet surprise : une nouvelle campagne d’exploration offshore de grande ampleur (3), dénotant la voracité insatiable du géant pétrolier pour les projets climaticides. 

    Nos neuf associations ont écrit à la Première ministre Elisabeth Borne pour demander au gouvernement français de condamner publiquement tous les nouveaux projets fossiles menés par TotalEnergies, de dénoncer les processus antidémocratiques qui accompagnent les projets d’expansion fossiles, et de conditionner l’implication de la France dans des « Partenariats pour une transition énergétique juste » à l’abandon des investissements dans de nouveaux projets fossiles, y compris gaziers en raison de l’entêtement de l’Élysée à présenter le gaz, une énergie strictement fossile, comme une « énergie de transition » dans le cadre du Partenariat établi avec l’Afrique du Sud lors de la COP26 à Glasgow (4).

    Après un été qui a vu les phénomènes climatiques extrêmes se multiplier, alors que la planète enregistre un nouveau record de chaleur pour les mois de septembre et d’octobre, le gouvernement ne peut laisser TotalEnergies instrumentaliser la coupe du monde de rugby et greenwasher ses choix dramatiques pour un monde dont la trajectoire, à l’image du ballon de rugby, ne tourne pourtant déjà plus rond.

    Notes

    1.  BLOOM, The Green Connection, 350.org, Amis de la Terre France, Chilli, Greenpeace France, Mouvement Laudato Si, Notre affaire à Tous et Surfrider Foundation Europe
    2. GIEC (2023), Climate change 2023. Synthesis report, B.5.3 ; AIE (2021) Net Zero by 2050. A roadmap for the global energy sector, chapitre 3.2 ; AIE (2023) Net Zero Roadmap : A Global Pathway to Keep the 1.5°C Goal in Reach, chapitre 2.2.2.
    3. TEEPSA (2023) Environmental and Social Impact Assessment (ESIA) for the offshore production right and environmental autorisation applications for Block 11B/12B. Final Scoping Report. Executive Summary.
    4. Élysée (2022) Partenariats pour une transition énergétique juste en Afrique.
  • CP / Droits de la nature : les Salines en Martinique dotées d’une Déclaration de droits pour protéger cet écosystème unique

    Une coalition d’associations martiniquaises regroupées dans le collectif Sové Lavi Salines, et assistée par Notre Affaire à Tous, lance aujourd’hui la Déclaration des droits des Salines en Martinique, afin de soutenir sa reconnaissance en tant qu’entité naturelle juridique (ENJ).

    Le site des Salines est situé à la pointe Sud de la Martinique.  Il abrite la lagune la plus importante de la Petite Caraïbe, d’une superficie de 97 hectares et alimentée en eau salée par la mer des Caraïbes et l’océan Atlantique. Ce site, composé de la lagune mais aussi d’espaces littoraux, de la Savane des Pétrifications, de mornes calcaires, d’une forêt sèche et de marais salants, est le berceau géologique et archéologique de la Martinique, épicentre de la biodiversité de la Caraïbe orientale. C’est ainsi un écosystème clé pour la biodiversité et les populations locales avec qui il est en relation. 

    L’importance des Salines est reconnue  officiellement par son classement comme zone humide d’importance mondiale (site Ramsar), par le classement de deux sites du périmètre comme Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF), et par son inscription comme site classé au titre de la loi de 1930, avec une opération Grand site en cours en vue d’obtenir le label Grand site de France.

    Le site des Salines est pourtant menacé depuis des siècles, et de façon aggravée et régulière depuis les années 1960, par des usages abusifs et par des projets fonciers, agricoles et touristiques nocifs.

    Le taux de fréquentation (2,5 millions de visiteurs par an) place ce site en tête du classement des destinations préférées des Martiniquais et des touristes, ce qui contribue à dégrader fortement cet écosystème. Par exemple, cette année encore, les lieux de pontes de tortues luth ont été menacés par de nombreuses activités de loisirs illégales sur un site classé  sans qu’aucune collectivité ou organisme public compétent ne prenne les mesures de sécurisation des périmètres concernés jusqu’à l’éclosion des œufs.

    Depuis de nombreuses années, des citoyens et des associations, soutenus historiquement par Garcin Malsa (Maire Honoraire de Sainte-Anne, Ancien Administrateur du Conservatoire du Littoral, Ancien Président du Conseil des Rivages Lacustres français d’Amérique), et aujourd’hui par Marcellin Nadeau (député de Martinique) et David Zobda (maire du Lamentin), dénoncent ces atteintes, expertises à l’appui, et s’organisent afin de protéger ce  site unique mais restent malgré tout démunis face à l’ineffectivité de la protection juridique existante.

    Une nouvelle étape s’acte aujourd’hui avec la proclamation de la Déclaration des droits des Salines par le collectif Sové Lavi Salines. Le collectif a bénéficié de l’expertise et de l’assistance de Notre Affaire à Tous et de celles de Victor David, chercheur en droit de l’environnement à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), qui a accompagné la Province des Îles Loyauté (PIL) en Nouvelle-Calédonie à rédiger son Code de l’environnement  (CEPIL). 

    Le CEPIL fait référence au principe unitaire de vie et prévoit la possibilité de reconnaître une personnalité juridique à des éléments de la nature. Récemment, une nouvelle étape a été franchie par la PIL avec l’adoption d’une réglementation qui crée les entités naturelles juridiques (ENJ), une nouvelle catégorie de personnes juridiques dont s’inspire la présente Déclaration.

    « La Martinique, comme pour toute la surface de la terre, subit les conséquences du réchauffement climatique avec sa ligne de côte qui se réduit » rappelle Line Rose Ursulet, présidente de l’APNE. « À ce phénomène s’ajoute la convoitise humaine. Le site des Salines est le berceau de la Martinique qui doit être respecté et protégé. À ce titre, l’ENJ s’avère être un excellent outil de sauvegarde de ce patrimoine ». 

    Pour Marine Yzquierdo, avocate et administratrice de Notre Affaire à Tous: “ Nous constatons que de plus en plus de collectifs, soutenus par des élus locaux, souhaitent déployer les droits de la nature sur leur territoire afin de reconsidérer le vivant et mieux le protéger. Nous sommes heureux d’accompagner Sové Lavi Salines dans cette initiative pionnière aux Antilles qui vient renforcer le mouvement des droits de la Nature en France. ”

    Le lancement de cette Déclaration en Martinique constitue une première étape. Citoyens, associations et élus locaux sont invités à soutenir cette Déclaration en signant la pétition en ligne à l’adresse suivante : www.sove-lavi-salines.com

    La Collectivité Territoriale de Martinique, la  communauté d’agglomération Espace Sud et les  communes sont en outre invitées à soutenir cette Déclaration par voie de délibérations afin de lui donner plus de portée et pouvoir l’inscrire dans le cadre réglementaire local.

    Pour en savoir plus, téléchargez le dossier de presse sur le site  : www.sove-lavi-salines.com 

    Les associations fondatrices du collectif Sové Lavi Salines : APNE ; ASSAUPAMAR ; Association des Commerçants des Salines ; BIOS-FAIR ; CD2S La Martinique est Vivante ; NOU LA ; Planteuses Maronnes ; Reflet D’Culture ; Renaissance Ecologique ; Vous n’êtes Pas Seuls ; SEPANMAR.

    Contacts presse

    Sové Lavi Salines : Aude Goussard | sovelavisalines972@gmail.com

    Notre Affaire à Tous : Marine Yzquierdo | marine.yzquierdo@notreaffaireatous.org

  • CP / Bercy, pas de profits sur le dos des droits humains !

    Une statue gonflable de plus de 10 mètres de haut, représentant la justice poignardée dans le dos, est érigée devant Bercy, pour demander au gouvernement français de cesser de faire primer les profits économiques sur les droits humains et l’environnement : ces derniers mois, le ministère de l’économie a en effet fait pression pour affaiblir le projet de directive européenne sur le devoir de vigilance, notamment en ce qui concerne le secteur financier et les obligations climatiques des entreprises.

    Via cette action, nos associations et syndicats se mobilisent pour sauver l’ambition de cette directive qui pourrait enfin réguler les multinationales et apporter plus de justice aux personnes affectées dans le monde, en leur donnant accès aux tribunaux européens. 

    Paris est la première étape d’un tour d’Europe qu’effectuera la statue dans le cadre de la campagne européenne “Justice is everybody’s business”, dont la majorité de nos organisations sont membres. 

    Le choix du lieu est bien sûr hautement symbolique : les voix des personnes demandant aux décideur.ses politiques de ne pas vider de son sens la directive sur le devoir de vigilance des entreprises s’élèvent devant Bercy, représentation du pouvoir et des décisions économiques. 

    En février 2022 s’ouvrait un moment historique pour lutter contre l’impunité des multinationales, lorsque la Commission Européenne publiait enfin une proposition de directive pour imposer des obligations contraignantes aux entreprises européennes pour prévenir et faire cesser les violations des droits humains et les dommages environnementaux qui se produisent dans leurs chaînes de valeur mondiales.

    Alors que les négociations en trilogue – entre la Commission, le Conseil et le Parlement – ont commencé cet été, ce temps fort de justice est en danger du fait de la position de certains Etats membres dont la France.

    Bien que pionnière avec la loi sur le devoir de vigilance adoptée en 2017, la France fait pression pour affaiblir différents aspects du texte : elle a notamment poussé le Conseil à adopter une exclusion de facto du secteur financier (1), ce qui empêcherait d’autres pays de tenir légalement responsables des banques comme BNP Paribas, qui financent impunément l’expansion des énergies fossiles. La France est également parmi les Etats demandant de rejeter les améliorations apportées au texte par le Parlement européen en termes de renforcement des obligations climatiques et de la responsabilité juridique à y associer.

    La présidence espagnole du Conseil de l’UE sera chargée dans les prochaines semaines de demander aux Etats membres ce qu’ils sont prêts à concéder au Parlement mais aussi leurs lignes rouges. Alors que dans quelques jours les ministres européens de l’économie et des finances se réunissent à Santiago de Compostela, nous nous mobilisons à Paris pour appeler les Etats membres dont la France, à réhausser l’ambition qu’ils portent dans les négociations. 

    A cette occasion, nos organisations publient aujourd’hui un document d’analyse (2) détaillant les failles du projet de directive européenne à la lumière des premières actions en justice fondées sur la loi française sur le devoir de vigilance, et faisant des recommandations aux décideurs pour arbitrer au mieux entre les différentes versions du texte.

    Contacts

    Notes

    1. Voir l’enquête de l’Observatoire des multinationales : “La France a-t-elle torpillé le « devoir de vigilance » européen pour complaire au CAC40 et à BlackRock ?”, 4 juillet 2023
    2. Directive européenne sur le devoir de vigilance et contentieux français – Enseignements et recommandations, septembre 2023
  • Numéro 17 de la newsletter des affaires climatiques – L’avis consultatif devant les juridictions internationales : un outil pour faire avancer le droit du climat ?

    Chères lectrices, chers lecteurs,

    Le contentieux climatique et environnemental est plus dynamique que jamais. Tous les jours ou presque, un tribunal à travers le monde est appelé à se prononcer sur le sujet, une requête est introduite ou, à tout le moins, un article est rédigé sur le sujet.

    Les bénévoles du groupe vous proposent, encore une fois, un travail de qualité.

    Vous pourrez, ainsi, lire en focus un article sur les demandes d’avis consultatif devant les juridictions internationales en matière climatique étayé d’entretiens de trois experts sur le sujet.

    Dans la partie consacrée aux contentieux climatiques, vous retrouverez un article sur le jugement de la Cour de District d’Amsterdam contre KLM et la décision sur le recours climat Tchèque, une première!

    En matière de contentieux environnementaux, vous aurez l’occasion de lire, les deux premiers chapitres d’une trilogie sur l’encadrement juridique des mines de lithium en Argentine, Chili et Bolivie. La décision du TGI de Paris sur l’affaire du Chlordécone sera analysée. Enfin, vous pourrez accéder au commentaire de la décision du tribunal judiciaire de Paris sur le plan de vigilance de Total en Ouganda.

    Nous vous souhaitons une très bonne lecture,

    Et si vous souhaitez rejoindre notre groupe de travail, c’est par ici !

    Sandy Cassan-Barnel
    Référente du groupe veille-international.

    Sommaire

    Focus : L’avis consultatif devant les juridictions internationales : un outil pour faire avancer le droit du climat ?

    Affaires Climatiques

    • Décision de la Cour de district d’Amsterdam contre KLM pour violation droit de la consommation
    • Tribunal municipal de Prague (République Tchèque) ONG Klimaticka zaloba vs. L’Etat de la République Tchèque, le 15 juin 2022

    Affaires Environnementales

    • Décision TGI Paris 6 janvier 2023 Chlordécone 
    • La Cour de cassation reconnaît la compétence du tribunal judiciaire pour juger la plainte des associations au nom du non-respect de la loi sur le devoir de vigilance contre le plan de vigilance de Total en Ouganda (28/02: il y aura un premier jugement sur le fond, je le couvrirai pour la newsletter)
    • Le triangle du lithium

    Focus : L’avis consultatif devant les juridictions internationales : un outil pour faire avancer le droit du climat ?

    Depuis cinq ans, le monde a vu les contentieux climatiques se multiplier de façon exponentielle. Des affaires sont portées en justice contre des États et des entités privées devant des tribunaux internationaux et nationaux sur tous les continents. Depuis quelques mois, le changement climatique a également fait l’objet de demandes d’avis consultatifs auprès de juridictions internationales. Or l’avis consultatif, une opinion juridique émise par un tribunal sur une ou plusieurs questions portées devant lui, n’a en principe pas de force contraignante. Pourquoi, alors, ce moyen est-il employé ? À quoi sert-il ? Qui peut le demander et qui peut participer à la procédure ? Les lecteurs du Focus de Notre Affaire À Tous pourraient-ils y contribuer ? Dans ce Focus, nous nous penchons, à titre d’exemple, sur la procédure des avis consultatifs dans certaines juridictions internationales susceptibles de recevoir de telles demandes relatives au climat. Nous analyserons leur intérêt juridique, avant d’examiner une initiative récente devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme cherchant à clarifier, par le biais d’un avis consultatif, les obligations juridiques internationales des États relatives au changement climatique au regard des droits humains. 

    Affaires climatiques

    Décision de la Cour de district d’Amsterdam contre KLM pour violation droit de la consommation.

    L‘ONG néerlandaise Fossilvrij, soutenue par Reclame Fossilvrij et ClientEarth, a porté plainte en juillet 2022 contre KLM-Airfrance pour communication trompeuse, considérée comme du greenwashing.

    Cette plainte est l’une des premières remettant en cause les déclarations de compensation carbone d’une entreprise du secteur de l’aviation.

    Fossil Vrij demande à KLM de cesser ses allégations commerciales sur l’aviation durable afin de ne pas induire en erreur le consommateur sur l’impact des produits dépendants des énergies fossiles. Pour cela, la plainte repose sur deux bases juridiques distinctes: le droit de la consommation en matière d’allégations commerciales trompeuses (article 193 de la section 6 du code de la publicité néerlandais) et l’article 6:162 du Code Civil néerlandais instaurant l’obligation d’agir selon un standard de soin non écrit.

    Dans sa plainte, le demandeur s’attaque à KLM en raison de sa campagne « Fly Responsibly ». Cette campagne enfreindrait droit néerlandais du fait qu’elle donne l’impression au consommateur que voler en avion est compatible avec un mode de vie durable. Il souligne, dans un premier temps, l’impossibilité de la conciliation entre la croissance économique du secteur de l’aviation et la lutte contre le changement climatique. Puis, dans un deuxième temps, le plaignant accuse KLM de renforcer l’impression chez le consommateur que voler peut être durable grâce à son service de compensation carbone et le développement d’un carburant d’aviation alternatif.

    Dans une décision du 7 juin 2023, le tribunal de district d’Amsterdam a confirmé l’intérêt à agir des demandeurs. Une décision sur le fond n’est pas attendue avant 2024.

    Tribunal municipal de Prague (République Tchèque)ONG Klimaticka zaloba vs. L’Etat de la République Tchèque, le 15 juin 2022

    L’ONG Klimaticka zaloba avec d’autres plaignants ont intenté une action en justice contre l’Etat de la République Tchèque en raison de son inaction en matière de lutte contre la crise climatique et des violations des droits de l’homme qui en résultent. Ils sollicitent une protection contre l’ingérence illégale (au sens de l’art. 82 et 87 de la loi 2002 du code de justice administrative tchèque, cf partie Moyens) alléguée de l’Etat  en demandant au tribunal  d’enjoindre à l’Etat de prendre des mesures adéquates et nécessaires pour protéger contre les effets néfastes du changement climatique et conduisant notamment à une réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990. 

    Le tribunal municipal de Prague a rendu son jugement en statuant que l’ingérence de l’Etat caractérisée par l’inaction en matière climatique était illégale et a enjoint ce dernier de prendre des mesures nécessaires dans les meilleurs délais. Néanmoins, le jugement a été très récemment annulé en cassation par la Cour administrative suprême et l’affaire est renvoyée de nouveau devant le tribunal municipal de Prague. 

    Affaires environnementales

    Décision TGI Paris 6 janvier 2023 Chlordécone

    Deuxième volet de l’affaire chlordécone, l’ordonnance de non-lieu en date du 2 janvier 2023 met fin à plus de quinze ans d’investigations. À l’issu des 321 pages de la décision, les parties civiles sont déboutées dans leurs multiples prétentions et aucune responsabilité pénale n’est retenue à l’encontre des personnes mises en cause. Néanmoins, les juges pointent les carences du système pénal pour faire face à ce « scandale sanitaire » et des comportements jugés asociaux des personnes impliquées dans cette affaire, ayant entraîné une contamination « durable, généralisée et délétère »1 pour les milieux et les habitants de Guadeloupe et de Martinique. Entre lucidité et manque d’audace de la part des juges d’instruction, les explications apportées à l’appui de cette ordonnance de non-lieu doivent être autant de leçons plaidant en faveur d’une évolution du droit de l’environnement. Cela concerne également la collecte des preuves en vue de futurs contentieux liés aux produits phytosanitaires et à la pollution des milieux.

    La Cour de cassation reconnaît la compétence du tribunal judiciaire pour juger la plainte des associations au nom du non-respect de la loi sur le devoir de vigilance contre le plan de vigilance de Total en Ouganda

    Association Les Amis de la Terre France et al. c/ S.A. Total est la première affaire portée sur la base de la loi sur le devoir de vigilance. Plusieurs ONG ont saisi le juge des référés afin d’obliger Total à respecter ses obligations de vigilance dans le cadre d’un super projet pétrolier en Ouganda. L’affaire, qui dure depuis 2019, a rencontré de nombreux obstacles
    procéduraux et s’est soldée par une ordonnance d’irrecevabilité en février 2023. L’absence de précisions juridiques quant aux mesures de vigilance que les entreprises doivent prendre risque de poser des problèmes importants dans la mise en œuvre effective de la loi sur le devoir de vigilance.

    Le Triangle du Lithium et les enjeux socio-environnementaux de la transition énergétique

    Au Nord du Chili et de l’Argentine, au Sud de la Bolivie se trouve le triangle du lithium. Cette région connue comme la Puna est située à plus de 3000 mètres au-dessus du niveau de la mer dans la cordillère des Andes. C’est une zone aride avec des salars et des saumures où on trouve une matière première très importante pour la transition énergétique : le lithium. Cette matière première est utilisée, entre autres, pour la fabrication des batteries pour les voitures électriques, ou des panneaux solaires.

    Le lithium, n’est pas une source d’énergie, mais une matière première qui permet la fabrication des matériaux où l’on peut facilement stocker de l’énergie. Le lithium est une matière première « critique » pour développer les énergies renouvelables et une économie à bas charbon. De ce fait, plusieurs projets miniers menés par des entreprises chinoises, japonaises, canadiennes, américaines et quelques entreprises européennes ont lieu dans le triangle du lithium. Certains parlent même du lithium comme le nouvel or blanc. De fait, il y a une ruée vers le lithium, car le contrôle des mines et de toute la chaine de valeur de cette matière première est un enjeu pour les pays qui souhaitent aligner leur matrice énergétique avec l’accord de Paris.

    En revanche, les projets miniers de lithium ne sont pas soumis à un régime harmonisé. Les 3 pays du Triangle du lithium ont leur propre cadre réglementaire résultant de certains choix politiques. Or, les 3 pays sont confrontés à des enjeux socio-environnementaux similaires. D’une part, les méthodes d’extraction du lithium peuvent porter atteinte à certains objectifs environnementaux tels que la protection des ressources aquatiques et la protection de la biodiversité. Les projets de lithium peuvent avoir un impact sur des zones protégés par la communauté internationale tel que des zones humides qui sont sur la liste des sites Ramsar ou des réserves de la biosphère de l’Unesco. D’autre part, le lithium est situé dans des zones où des communautés autochtones sont présentes. Il y a donc des risques de conflits sociaux entre les entreprises minières avec les peuples autochtones des 3 pays.

    Ceci pose la question de comment concilier l’objectif d’atténuer et adapter notre modèle économique au changement climatique avec d’autres objectifs socio-environnementaux de notre temps.

    Ce décryptage vise donc à donner une vision globale du sujet en traitant certains des principaux enjeux socio-environnementaux des projets miniers. Il est divisé en plusieurs chapitres qui seront publiés entre cette newsletter et la newsletter qui sera publiée fin 2023.

    -Le Chapitre 1 : un bref résumé du cadre réglementaire qui s’applique aux projets de lithium dans les 3 pays du triangle du Lithium;

    -Le Chapitre 2 : Les projets de lithium et les zones protégées par la communauté internationale;

    -Le Chapitre 3 : (à paraître en fin d’année) : les projets de lithium et le respect des droits des communautés autochtones;

    -Le Chapitre 4 : (à paraître en fin d’année). Nous discuterons les différents standards ESG contraignants ou de droit souple qui pourraient s’appliquer aux projets miniers de lithium.

  • Numéro 15 de la newsletter des affaires climatiques – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur Exemplaire

    Chères lectrices, chers lecteurs,

    Après cette pause estivale, nous espérons toutes et tous vous retrouver en bonne forme. L’équipe du groupe de travail veille-international n’a, quant à elle, pas chômé afin de vous informer sur l’évolution du droit climatique et environnemental. Elle a travaillé en collaboration avec le groupe “droits de la nature”, suite à la sortie de l’ouvrage “Les droits de la nature, vers un nouveau paradigme de protection du vivant” afin de vous offrir une vue d’ensemble des outils juridiques existant, en droit comparé, permettant un début de protection de ces droits, que vous retrouverez dans le focus de notre lettre.


    Vous pourrez lire, par ailleurs, nos articles sur la jurisprudence récente en matière de contentieux climatique: une nouvelle décision Grande-Synthe et le people’s climate case. Ainsi qu’en matière de contentieux environnemental : une décision de la Haute Cour de Madras; le Président indonésien condamné pour négligence dans la protection de l’air; une décision de la Cour constitutionnelle d’Equateur sur les droits de la nature. Enfin, vous pourrez, également, accéder à l’analyse de la circulaire visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale. Pour participer à la rédaction de cette lettre, n’hésitez pas à rejoindre le groupe veille-international en adhérent à l’association.

    Nous vous souhaitons une très bonne lecture,
     

    Sandy Cassan-Barnel
    Référente du groupe veille-international

    Sommaire

    Focus – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur

    Podcast

    Affaires Climatiques 

    Affaires Environnementales 

    Focus

    Droits de la nature et accès à la Justice : les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Equateur

    Les droits de la Nature, parce qu’ils tendent à permettre de vivre dans un environnement sain, contribuent à garantir la jouissance des droits humains et à renforcer la démocratie environnementale. Au-delà de la reconnaissance – par la jurisprudence, ou par les textes – de la personnalité juridique des éléments de la Nature devenant sujets et non plus objets de droit, la question de leur représentation est cruciale. Il est traditionnellement distingué, en l’état de l’avancée du mouvement des droits de la Nature à travers le monde, deux voies – non-exhaustives- de représentation : la première reprend le modèle de la tutelle avec la nomination de représentants; la seconde se construit autour d’une procédure permettant à toute personne physique ou morale d’ester en justice en cas d’atteinte portée à un élément naturel et au nom de celui-ci. Ceci soulève nombre de questions relatives à la qualité et à l’intérêt à agir de ces “gardiens de la Nature”, et donc plus largement, la problématique de l’accès à la justice.

    Podcast

    Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, revient sur une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 18 février dernier. 
     

    Par quatre décrets du 7 juin 2021 le 1er Ministre Jean Castex a accordé à la Compagnie Minière de Boulanger la prolongation, sur une superficie réduite, des concessions de mines de métaux précieux situées sur une partie du territoire de la commune de Roura (Guyane).

    L’association FNE a saisi le juge administratif d’un recours en excès de pouvoir contre ces décrets. L’association demanderesse fait valoir le défaut de mise en œuvre d’une procédure de participation du public. Mais, également, la contradiction des articles L. 142-7 à L. 142-9, L. 144-4 du code minier et L. 123-19-2 .1 du code de l’environnement avec les articles 1er, 2, 3 et 7 de la Charte de l’environnement, les articles 1er, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 et l’article 34 de la Constitution.

    Affaires Climatiques

    Conseil d’Etat français, Affaire commune de Grande-Synthe c. le ministre de la transition écologique et solidaire, 12 février 2021, 428177

    Cet arrêt traite de la demande conjointe d’annulation du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique à l’initiative de la commune de Grande-Synthe et de son ancien Maire, agissant à titre personnel. Cette affaire, bien qu’indépendante du recours plus médiatisé visant à enjoindre l’État à respecter les Accords de Paris, s’inscrit dans un intérêt certain que porte cette ville des Hauts-de-France pour les questions environnementales et climatiques. Elle illustre également la limite juridique des recommandations qui, contrairement aux Accords de Paris, n’ont pas fait l’objet d’un engagement exprès de la part de l’État français. Celles-ci ont, de fait, une portée juridique très limitée voire nulle.

    Cour de justice de l’Union européenne, 25 mars 2021, C-565/19Armando Ferrão Carvalho e.a./ Parlement et Conseil “The People’s Climate Case”

    People’s Climate Case est une procédure initiée par 10 familles venant du Portugal, d’Allemagne, de France, d’Italie, de Roumanie, du Kenya, du Fiji et Sáminuorra, une association de jeunes Saami, contre les institutions de l’Union européenne. Ils souhaitent que la Cour ordonne au Parlement et au Conseil de fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus ambitieux.

    Affaires Environnementales

    Circulaire du ministre de la justice CRIM 2021-02/G3-11/05/2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale du 11 mai 2021

    La circulaire vise à améliorer le contentieux de l’environnement, qui est aujourd’hui peu efficace, notamment en matière pénale : sur les 20 000 affaires traitées chaque année par les parquets, 75 % se terminent par une mesure alternative aux poursuites et les condamnations prononcées ne représentent qu’un pourcent du nombre total de condamnations.

    Décision n°253-20-JH/22 de la Cour constitutionnelle d’Equateur, 27 janvier 2022, singe Estrellita

    La Cour constitutionnelle reconnaît, pour la première fois, que les animaux peuvent, même individuellement, bénéficier des droits de la Nature et se prévaloir de droits tels que le droit à la vie ou à l’intégrité physique, en tant que partie intégrante de la Nature.

    Le Président Indonésien jugé coupable pour négligence dans la protection du droit à un air sain

    Le Président indonésien Joko Widodo, d’autres membres du gouvernement, ainsi que des élus locaux, ont été déclarés coupables de négligence dans le respect du droit des citoyens à respirer un air sain, par une décision tribunal de Jakarta-Centre rendue le 16 septembre 2021. Alors que Jakarta demeure l’une des villes les plus polluées du monde, l’inaction de ces personnalités a été reconnue comme une négligence dans l’enrayement de la pollution de l’air de la capitale indonésienne. Après deux longues années d’instance et huit reports de l’affaire, les juges de Jakarta ont confirmé le droit de tout citoyen à vivre dans un air sain, tout en condamnant les pouvoirs publics à prendre des mesures rigoureuses en la matière. Cette décision de principe en faveur de la protection de l’environnement sur le territoire indonésien, s’inscrit dans la lignée d’autres décisions nationales où les juges mettent en œuvre leurs pouvoirs de coercition afin de réprimer l’inertie des pouvoirs publics.

    MADRAS HIGH COURT, MADURAI BRANCH
    A.Periyakaruppan vs. The Principal Secretary to Government, Revenue Department, The Additional Chief Secretary and Commissioner of Revenue Administration, Chennai.
     

    Dans une décision sur un litige administratif concernant une sanction envers un fonctionnaire, la cour s’est emparée de la question de la personnalité juridique de la nature pour déclarer les droits fondamentaux de la « Mère Nature ».

  • Numéro 15 de la newsletter des affaires climatiques – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur Exemplaire

    Chères lectrices, chers lecteurs,

    Après cette pause estivale, nous espérons toutes et tous vous retrouver en bonne forme. L’équipe du groupe de travail veille-international n’a, quant à elle, pas chômé afin de vous informer sur l’évolution du droit climatique et environnemental. Elle a travaillé en collaboration avec le groupe “droits de la nature”, suite à la sortie de l’ouvrage “Les droits de la nature, vers un nouveau paradigme de protection du vivant” afin de vous offrir une vue d’ensemble des outils juridiques existant, en droit comparé, permettant un début de protection de ces droits, que vous retrouverez dans le focus de notre lettre.


    Vous pourrez lire, par ailleurs, nos articles sur la jurisprudence récente en matière de contentieux climatique: une nouvelle décision Grande-Synthe et le people’s climate case. Ainsi qu’en matière de contentieux environnemental : une décision de la Haute Cour de Madras; le Président indonésien condamné pour négligence dans la protection de l’air; une décision de la Cour constitutionnelle d’Equateur sur les droits de la nature. Enfin, vous pourrez, également, accéder à l’analyse de la circulaire visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale. Pour participer à la rédaction de cette lettre, n’hésitez pas à rejoindre le groupe veille-international en adhérent à l’association.

    Nous vous souhaitons une très bonne lecture,
     

    Sandy Cassan-Barnel
    Référente du groupe veille-international

    Sommaire

    Focus – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur

    Podcast

    Affaires Climatiques 

    Affaires Environnementales 

    Focus

    Droits de la nature et accès à la Justice : les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Equateur

    Les droits de la Nature, parce qu’ils tendent à permettre de vivre dans un environnement sain, contribuent à garantir la jouissance des droits humains et à renforcer la démocratie environnementale. Au-delà de la reconnaissance – par la jurisprudence, ou par les textes – de la personnalité juridique des éléments de la Nature devenant sujets et non plus objets de droit, la question de leur représentation est cruciale. Il est traditionnellement distingué, en l’état de l’avancée du mouvement des droits de la Nature à travers le monde, deux voies – non-exhaustives- de représentation : la première reprend le modèle de la tutelle avec la nomination de représentants; la seconde se construit autour d’une procédure permettant à toute personne physique ou morale d’ester en justice en cas d’atteinte portée à un élément naturel et au nom de celui-ci. Ceci soulève nombre de questions relatives à la qualité et à l’intérêt à agir de ces “gardiens de la Nature”, et donc plus largement, la problématique de l’accès à la justice.

    Podcast

    Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, revient sur une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 18 février dernier. 
     

    Par quatre décrets du 7 juin 2021 le 1er Ministre Jean Castex a accordé à la Compagnie Minière de Boulanger la prolongation, sur une superficie réduite, des concessions de mines de métaux précieux situées sur une partie du territoire de la commune de Roura (Guyane).

    L’association FNE a saisi le juge administratif d’un recours en excès de pouvoir contre ces décrets. L’association demanderesse fait valoir le défaut de mise en œuvre d’une procédure de participation du public. Mais, également, la contradiction des articles L. 142-7 à L. 142-9, L. 144-4 du code minier et L. 123-19-2 .1 du code de l’environnement avec les articles 1er, 2, 3 et 7 de la Charte de l’environnement, les articles 1er, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 et l’article 34 de la Constitution.

    Affaires Climatiques

    Conseil d’Etat français, Affaire commune de Grande-Synthe c. le ministre de la transition écologique et solidaire, 12 février 2021, 428177

    Cet arrêt traite de la demande conjointe d’annulation du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique à l’initiative de la commune de Grande-Synthe et de son ancien Maire, agissant à titre personnel. Cette affaire, bien qu’indépendante du recours plus médiatisé visant à enjoindre l’État à respecter les Accords de Paris, s’inscrit dans un intérêt certain que porte cette ville des Hauts-de-France pour les questions environnementales et climatiques. Elle illustre également la limite juridique des recommandations qui, contrairement aux Accords de Paris, n’ont pas fait l’objet d’un engagement exprès de la part de l’État français. Celles-ci ont, de fait, une portée juridique très limitée voire nulle.

    Cour de justice de l’Union européenne, 25 mars 2021, C-565/19Armando Ferrão Carvalho e.a./ Parlement et Conseil “The People’s Climate Case”

    People’s Climate Case est une procédure initiée par 10 familles venant du Portugal, d’Allemagne, de France, d’Italie, de Roumanie, du Kenya, du Fiji et Sáminuorra, une association de jeunes Saami, contre les institutions de l’Union européenne. Ils souhaitent que la Cour ordonne au Parlement et au Conseil de fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus ambitieux.

    Affaires Environnementales

    Circulaire du ministre de la justice CRIM 2021-02/G3-11/05/2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale du 11 mai 2021

    La circulaire vise à améliorer le contentieux de l’environnement, qui est aujourd’hui peu efficace, notamment en matière pénale : sur les 20 000 affaires traitées chaque année par les parquets, 75 % se terminent par une mesure alternative aux poursuites et les condamnations prononcées ne représentent qu’un pourcent du nombre total de condamnations.

    Décision n°253-20-JH/22 de la Cour constitutionnelle d’Equateur, 27 janvier 2022, singe Estrellita

    La Cour constitutionnelle reconnaît, pour la première fois, que les animaux peuvent, même individuellement, bénéficier des droits de la Nature et se prévaloir de droits tels que le droit à la vie ou à l’intégrité physique, en tant que partie intégrante de la Nature.

    Le Président Indonésien jugé coupable pour négligence dans la protection du droit à un air sain

    Le Président indonésien Joko Widodo, d’autres membres du gouvernement, ainsi que des élus locaux, ont été déclarés coupables de négligence dans le respect du droit des citoyens à respirer un air sain, par une décision tribunal de Jakarta-Centre rendue le 16 septembre 2021. Alors que Jakarta demeure l’une des villes les plus polluées du monde, l’inaction de ces personnalités a été reconnue comme une négligence dans l’enrayement de la pollution de l’air de la capitale indonésienne. Après deux longues années d’instance et huit reports de l’affaire, les juges de Jakarta ont confirmé le droit de tout citoyen à vivre dans un air sain, tout en condamnant les pouvoirs publics à prendre des mesures rigoureuses en la matière. Cette décision de principe en faveur de la protection de l’environnement sur le territoire indonésien, s’inscrit dans la lignée d’autres décisions nationales où les juges mettent en œuvre leurs pouvoirs de coercition afin de réprimer l’inertie des pouvoirs publics.

    MADRAS HIGH COURT, MADURAI BRANCH
    A.Periyakaruppan vs. The Principal Secretary to Government, Revenue Department, The Additional Chief Secretary and Commissioner of Revenue Administration, Chennai.
     

    Dans une décision sur un litige administratif concernant une sanction envers un fonctionnaire, la cour s’est emparée de la question de la personnalité juridique de la nature pour déclarer les droits fondamentaux de la « Mère Nature ».

  • Numéro 15 de la newsletter des affaires climatiques – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur Exemplaire

    Chères lectrices, chers lecteurs,

    Après cette pause estivale, nous espérons toutes et tous vous retrouver en bonne forme. L’équipe du groupe de travail veille-international n’a, quant à elle, pas chômé afin de vous informer sur l’évolution du droit climatique et environnemental. Elle a travaillé en collaboration avec le groupe “droits de la nature”, suite à la sortie de l’ouvrage “Les droits de la nature, vers un nouveau paradigme de protection du vivant” afin de vous offrir une vue d’ensemble des outils juridiques existant, en droit comparé, permettant un début de protection de ces droits, que vous retrouverez dans le focus de notre lettre.


    Vous pourrez lire, par ailleurs, nos articles sur la jurisprudence récente en matière de contentieux climatique: une nouvelle décision Grande-Synthe et le people’s climate case. Ainsi qu’en matière de contentieux environnemental : une décision de la Haute Cour de Madras; le Président indonésien condamné pour négligence dans la protection de l’air; une décision de la Cour constitutionnelle d’Equateur sur les droits de la nature. Enfin, vous pourrez, également, accéder à l’analyse de la circulaire visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale. Pour participer à la rédaction de cette lettre, n’hésitez pas à rejoindre le groupe veille-international en adhérent à l’association.

    Nous vous souhaitons une très bonne lecture,
     

    Sandy Cassan-Barnel
    Référente du groupe veille-international

    Sommaire

    Focus – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur

    Podcast

    Affaires Climatiques 

    Affaires Environnementales 

    Focus

    Droits de la nature et accès à la Justice : les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Equateur

    Les droits de la Nature, parce qu’ils tendent à permettre de vivre dans un environnement sain, contribuent à garantir la jouissance des droits humains et à renforcer la démocratie environnementale. Au-delà de la reconnaissance – par la jurisprudence, ou par les textes – de la personnalité juridique des éléments de la Nature devenant sujets et non plus objets de droit, la question de leur représentation est cruciale. Il est traditionnellement distingué, en l’état de l’avancée du mouvement des droits de la Nature à travers le monde, deux voies – non-exhaustives- de représentation : la première reprend le modèle de la tutelle avec la nomination de représentants; la seconde se construit autour d’une procédure permettant à toute personne physique ou morale d’ester en justice en cas d’atteinte portée à un élément naturel et au nom de celui-ci. Ceci soulève nombre de questions relatives à la qualité et à l’intérêt à agir de ces “gardiens de la Nature”, et donc plus largement, la problématique de l’accès à la justice.

    Podcast

    Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, revient sur une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 18 février dernier. 
     

    Par quatre décrets du 7 juin 2021 le 1er Ministre Jean Castex a accordé à la Compagnie Minière de Boulanger la prolongation, sur une superficie réduite, des concessions de mines de métaux précieux situées sur une partie du territoire de la commune de Roura (Guyane).

    L’association FNE a saisi le juge administratif d’un recours en excès de pouvoir contre ces décrets. L’association demanderesse fait valoir le défaut de mise en œuvre d’une procédure de participation du public. Mais, également, la contradiction des articles L. 142-7 à L. 142-9, L. 144-4 du code minier et L. 123-19-2 .1 du code de l’environnement avec les articles 1er, 2, 3 et 7 de la Charte de l’environnement, les articles 1er, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 et l’article 34 de la Constitution.

    Affaires Climatiques

    Conseil d’Etat français, Affaire commune de Grande-Synthe c. le ministre de la transition écologique et solidaire, 12 février 2021, 428177

    Cet arrêt traite de la demande conjointe d’annulation du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique à l’initiative de la commune de Grande-Synthe et de son ancien Maire, agissant à titre personnel. Cette affaire, bien qu’indépendante du recours plus médiatisé visant à enjoindre l’État à respecter les Accords de Paris, s’inscrit dans un intérêt certain que porte cette ville des Hauts-de-France pour les questions environnementales et climatiques. Elle illustre également la limite juridique des recommandations qui, contrairement aux Accords de Paris, n’ont pas fait l’objet d’un engagement exprès de la part de l’État français. Celles-ci ont, de fait, une portée juridique très limitée voire nulle.

    Cour de justice de l’Union européenne, 25 mars 2021, C-565/19Armando Ferrão Carvalho e.a./ Parlement et Conseil “The People’s Climate Case”

    People’s Climate Case est une procédure initiée par 10 familles venant du Portugal, d’Allemagne, de France, d’Italie, de Roumanie, du Kenya, du Fiji et Sáminuorra, une association de jeunes Saami, contre les institutions de l’Union européenne. Ils souhaitent que la Cour ordonne au Parlement et au Conseil de fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus ambitieux.

    Affaires Environnementales

    Circulaire du ministre de la justice CRIM 2021-02/G3-11/05/2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale du 11 mai 2021

    La circulaire vise à améliorer le contentieux de l’environnement, qui est aujourd’hui peu efficace, notamment en matière pénale : sur les 20 000 affaires traitées chaque année par les parquets, 75 % se terminent par une mesure alternative aux poursuites et les condamnations prononcées ne représentent qu’un pourcent du nombre total de condamnations.

    Décision n°253-20-JH/22 de la Cour constitutionnelle d’Equateur, 27 janvier 2022, singe Estrellita

    La Cour constitutionnelle reconnaît, pour la première fois, que les animaux peuvent, même individuellement, bénéficier des droits de la Nature et se prévaloir de droits tels que le droit à la vie ou à l’intégrité physique, en tant que partie intégrante de la Nature.

    Le Président Indonésien jugé coupable pour négligence dans la protection du droit à un air sain

    Le Président indonésien Joko Widodo, d’autres membres du gouvernement, ainsi que des élus locaux, ont été déclarés coupables de négligence dans le respect du droit des citoyens à respirer un air sain, par une décision tribunal de Jakarta-Centre rendue le 16 septembre 2021. Alors que Jakarta demeure l’une des villes les plus polluées du monde, l’inaction de ces personnalités a été reconnue comme une négligence dans l’enrayement de la pollution de l’air de la capitale indonésienne. Après deux longues années d’instance et huit reports de l’affaire, les juges de Jakarta ont confirmé le droit de tout citoyen à vivre dans un air sain, tout en condamnant les pouvoirs publics à prendre des mesures rigoureuses en la matière. Cette décision de principe en faveur de la protection de l’environnement sur le territoire indonésien, s’inscrit dans la lignée d’autres décisions nationales où les juges mettent en œuvre leurs pouvoirs de coercition afin de réprimer l’inertie des pouvoirs publics.

    MADRAS HIGH COURT, MADURAI BRANCH
    A.Periyakaruppan vs. The Principal Secretary to Government, Revenue Department, The Additional Chief Secretary and Commissioner of Revenue Administration, Chennai.
     

    Dans une décision sur un litige administratif concernant une sanction envers un fonctionnaire, la cour s’est emparée de la question de la personnalité juridique de la nature pour déclarer les droits fondamentaux de la « Mère Nature ».

  • Comment le juge prend-il en compte la santé environnementale ?

    Par Clara Garnier, rédigé dans le cadre d’un stage avec le Réseau environnement Santé, sous la coordination de Me Louise Tschanz (Kaizen Avocat) et de Me Hilème Kombila (BLC Avocats et présidente de NAAT Lyon)

    L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que dans le monde 23 % des décès et 25% des pathologies chroniques sont liés à des facteurs environnementaux. Ces facteurs environnementaux, notamment la qualité de l’air, la qualité de l’eau, l’alimentation ou encore l’exposition à des substances chimiques ont un impact sur la santé. 

    Depuis le début des années 2000, le concept « Une Seule Santé » ou « One Health » se développe. Cette approche se veut transversale et repose sur l’idée que la santé humaine et la santé animale sont interdépendantes et liées à la santé des écosystèmes dans lesquels elles coexistent. 

    Un exemple qui illustre parfaitement le lien entre la santé humaine et la santé des écosystèmes est la pandémie de Covid 19 qui est une zoonose, c’est-à-dire une maladie qui se transmet des animaux à l’homme, l’activité humaine ayant favorisé la transmission de cette maladie. 

    Les pollutions ont des conséquences sur la santé humaine et peuvent ainsi entrainer des préjudices. En matière de responsabilité et de réparation des préjudices subis par les victimes de pollution, il convient de s’interroger sur la manière d’appréhender la santé environnementale par les juridictions.   

    Qu’est-ce que la santé environnementale ?

    Selon la Déclaration sur l’action pour l’environnement et la santé, Conférence de l’OMS sur l’environnement et la santé en 1994, la santé environnementale comprend « les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de la vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux, psychosociaux et esthétiques de notre environnement. Elle concerne également la politique et les pratiques de gestion, de résorption, de contrôle et de prévention des facteurs environnementaux susceptibles d’affecter la santé des générations actuelles et futures » (1).

    Quels sont les enjeux de la santé environnementale ?

    • En France, 5 à 10 % des cancers seraient liés à des facteurs environnementaux ;
    • La France est le 3ème pays le plus touché par la pollution atmosphérique liée aux particules en suspension en Europe ;
    • L’ozone a provoqué la mort prématurée de 21.000 personnes en France en 2000. Ce chiffre devrait être multiplié par 4 d’ici 2030 selon l’OCDE ;
    • 2,4 millions de salariés français sont exposés à des produits cancérogènes en France.
    • La France est le 3ème pays le plus touché par la pollution atmosphérique liée aux particules en suspension en Europe ;
    • En France, on estime le nombre de décès lié à l’amiante à 100.000 d’ici 2025 (2). 

    Le contexte de la santé environnementale : une pollution diffuse et multifactorielle

    La pollution est souvent diffuse, dans le temps et dans l’espace, les facteurs de pollutions ayant une origine difficilement localisable, avec des effets qui se déclarent parfois bien après l’émission de la pollution, voire chez les générations futures. 

    De surcroît, la pollution a de multiples origines, ce qui peut impliquer un effet cocktail. A petite dose, cela peut entrainer un danger plus important qu’une seule substance à grande dose. 

    Au regard de la complexité de cette pollution, un nouveau concept est de plus en plus utilisé : celui d’exposome, qui vise à intégrer de l’ensemble des expositions qui peuvent influencer la santé humaine.

    Qu’est-ce que le contentieux de la santé environnementale ?

    L’article 1240 du code civil oblige celui qui cause un dommage à autrui à le réparer. Les différents facteurs de pollutions engendrés par l’activité humaine peuvent générer des dommages, qu’il faudra alors réparer. 

    La réparation, synonyme d’indemnisation, se réalise via le dédommagement d’un préjudice par la personne qui en est responsable civilement. L’indemnisation vise spécifiquement l’opération consistant à rétablir la victime dans la situation où elle serait si le dommage ne s’était pas produit, en réparant celui-ci de la manière la plus adéquate, soit en nature, soit en argent.

    Quelles sont les difficultés rencontrées par le contentieux de la santé environnementale ?

    Le lien de causalité les pollutions et les maladies est difficile à établir car les pollutions sont souvent diffuses et multifactorielles. 

    Les données scientifiques ont une place essentielle dans le contentieux, afin de prouver le lien entre la pollution et les dommages. Or, les études scientifiques en toxicologie et épidémiologie sont réalisées à l’échelle d’une population, et non à l’échelle individuelle. De plus, le coût des expertises judiciaires, qui prouverait le préjudice à l’échelle individuelle, est très élevé et souvent aux frais des victimes, ce qui n’encourage pas le recours au contentieux.  
    Par conséquent, le lien de causalité en santé environnementale entre le fait générateur (la pollution) et le dommage (les atteintes à la santé humaine) est souvent difficile à établir. In fine, les victimes des pollutions sont faiblement indemnisées.

    Qu’est-ce que le lien de causalité ? 

    Le lien de causalité est l’imputabilité d’un fait générateur à un dommage causant un préjudice qui permet d’engager la responsabilité d’une personne physique ou morale pour demander la réparation du préjudice subi sur le fondement de l’article 1240 du code civil (3). 

    L’article 1353 du code civil prévoit que la preuve du lien de causalité incombe à la victime (4) qui doit alors prouver par tous moyens le lien causal entre le dommage qu’elle a subi et le fait générateur de responsabilité. 

    Ce lien doit être direct et certain : la responsabilité du fait personnel « suppose un rapport de causalité certain entre la faute et le dommage » (5). 

    Lorsque la preuve est difficile à établir directement, l’article 1382 du code civil (6) prévoit que le recours à des présomptions est possible en présence de preuves graves, précises et concordantes.

    En 2020, la Cour de cassation a approuvé pour la première fois, dans l’affaire Paul François, que l’exposition à un pesticide puisse constituer un dommage corporel (7). Le juge a apprécié des présomptions graves précises et concordantes pour admettre :

    • Le lien de causalité entre l’inhalation du produit et le dommage ;
    • Le lien de causalité entre le défaut du produit et le dommage est établi. 

    Comment utiliser les données scientifiques dans le contentieux de la santé environnementale ?

    L’utilisation de données scientifiques a permis de faire évoluer la prévention des atteintes à la santé et a permis d’établir un lien de causalité entre les pollutions et les pathologies développées. 

    Le juriste doit travailler avec des experts dans le cadre du contentieux, notamment avec des toxicologues et des épidémiologues, car ce sont les experts en santé environnementale : 

    • La toxicologie est une « science qui étudie la nature, les effets et la détection des toxiques dans les organismes vivants ainsi que des substances par ailleurs inoffensives qui s’avèrent toxiques dans des conditions particulières. L’hypothèse de base de la toxicologie est qu’il existe une relation entre la dose (quantité), la concentration à l’endroit touché et les effets qui en résultent » (8).
    • L’épidémiologie est une « branche de la médecine qui étudie les divers facteurs conditionnant l’apparition, la fréquence, le mode de diffusion et l’évolution des maladies affectant des groupes d’individus » (9).

    Le juriste va devoir avoir recours à une logique probabiliste, traduisant le risque de l’exposition aux polluants et le seuil à partir duquel le risque peut devenir un danger. Ce point est complexe, dans la mesure où certaines substances sont dangereuses, quelle que soit la dose (par exemple les perturbateurs endocriniens).

    Aménagements du lien de causalité par la loi : le cas du préjudice d’anxiété

    Initialement, la jurisprudence a admis la condamnation des employeurs sur le fondement du préjudice d’anxiété, lorsque les salariés étaient exposés à l’amiante. Les salariés bénéficiaient alors d’une présomption de causalité lié à leur exposition à l’amiante et l’indemnisation de leur préjudice d’anxiété était automatique. 

    En 2019, la Cour de cassation a étendu le préjudice d’anxiété au-delà des bénéficiaires du régime légal originel en admettant la possibilité pour un salarié qui n’avait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de se prévaloir du préjudice d’anxiété (10), en cas de contamination par l’amiante, sur le fondement des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur.

    En 2019, le préjudice d’anxiété a été élargi par la Cour de cassation en dehors de l’amiante. 

    En application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité (11). 

    Le salarié doit alors apporter les preuves suivantes :

    • Exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave ;
    • Préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition. 

    En dehors du droit du travail et de l’indemnisation des atteintes potentielles à la santé causées par l’amiante, le juge peut aussi indemniser le préjudice résultant d’une exposition à une pollution dont les effets sur la santé sont incertains. Le juge a retenu ce préjudice d’angoisse pour les cas d’exposition à des antennes relais. La proximité d’antennes relais dont les effets sur la santé sont débattus par la science peut représenter une crainte légitime concernant les risques sanitaires constitutive d’un trouble anomal. 

    Le juge se base sur plusieurs données scientifiques afin de prendre en compte ce préjudice moral résultant de l’angoisse afin d’en ordonner la cessation et la réparation. 

    Le juge estime que même si les normes d’exposition sont respectées et que les risques restent hypothétiques, les controverses scientifiques concernant l’impact des antennes relais sur la santé participent à l’angoisse ressentie par les riverains voisins de ces antennes (12).

    Cependant, la reconnaissance d’un préjudice d’angoisse ou d’un préjudice d’anxiété en matière de santé environnementale reste rare dans la jurisprudence. 

    Le juge administratif pour sa part reconnait également le préjudice d’anxiété dans le cas de salariés exposés à l’inhalation de poussière d’amiante (13) et en a récemment rappelé le régime probatoire (14). Le Conseil d’État s’est éloigné de la jurisprudence de la Cour de cassation. Toujours en ce qui concerne l’exposition par un salarié, il estime que toute situation permettant d’établir une exposition effective à un risque fréquent et grave entraîne la reconnaisse d’un préjudice d’anxiété, sans avoir à en rapporter la preuve. Cette solution pourrait être transposable à toute affaire sanitaire. 

    Le juge administratif reconnait également le préjudice d’anxiété en matière médicale, dans l’affaire du Médiator, le Conseil d’État a admis l’existence d’une angoisse subjective chez la requérante, exposée au risque, mais n’ayant développé aucune pathologie liée à la prise du médicament, et a reconnu la possibilité de se prévaloir d’un préjudice d’anxiété (15). 

    La reconnaissance du préjudice d’anxiété en dehors des relations salariés-employés sera sans doute faite dans la jurisprudence civile et administrative future.

    Comment une victime de pollution peut-elle constituer des preuves pour ensuite obtenir réparation du préjudice ?

    La certitude juridique est différente de la certitude scientifique. Les victimes doivent apporter les preuves démontrant le lien de causalité entre la pollution et les dommages subis, afin d’emporter la conviction du juge et pouvoir obtenir réparation de leurs préjudices.

    Le dossier des victimes de pollutions réclamant une réparation de leurs préjudices doit être solide et être constitué de nombreuses preuves, par exemple : 

    • Un dossier médical complet établi au moment de l’apparition ou de l’aggravation de la maladie ou au moment de l’exposition à des pollutions afin de mettre en avant un lien de causalité ;
    • Le recours à un huissier qui va établir un constat afin de certifier les faits (par exemple l’apparition ou l’aggravation de la pathologie ; la découverte d’une pollution ; des mesures réalisées par un bureau d’études) ;
    • Les données scientifiques reconnues et crédibles ;
    • L’utilisation de données toxicologiques ou épidémiologiques, afin d’établir une probabilité de lien de causalité entre la pollution et l’apparition ou l’aggravation de la pathologie. 

    En toute hypothèse, il est important de souligner que toute victime doit avoir une démarche proactive pour constituer des preuves : plus le dossier sera solide, plus la probabilité d’obtenir réparation des préjudices subis sera élevée.

    Que retenir ?

    En science, le doute subsiste toujours, c’est la base de la recherche.

    Par conséquence, en contentieux de la santé environnementale, le lien de causalité direct et certain entre une pollution et un dommage à la santé humaine est difficile à prouver.

    Il y a une évolution du contentieux vers une indemnisation du préjudice résultant d’une pollution plus diffuse et multifactorielle. On le voit aujourd’hui à travers l’élargissement du préjudice d’anxiété, étendu à tous les salariés exposés à des substances nocives ou toxiques générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi.

    L’utilisation de données scientifiques dans le contentieux peut permettre de réparer les dommages causés par des pollutions diffuses et multifactorielles, notamment en apportant des preuves établissant une probabilité de lien de causalité. Corinne Lepage rappelle dans un Colloque devant la Cour de cassation en mars 2022, qu’il est important de passer d’un modèle déterministe à un modèle probabiliste. Dans ce cas le lien causal va pouvoir se traduire en termes d’augmentation des probabilités et le fait générateur sera considéré comme une circonstance favorisant la réalisation du dommage climatique (16).

    Sources :

    (1) Déclaration sur l’action pour l’environnement et la santé, Conférence de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur l’environnement et la santé, Helsinki, 1994.

    (2) « Zoonoses : quels liens entre atteintes à la biodiversité et pandémies ? », Commissariat général au développement durable, 3 mars 2022. URL.

    (3) Article 1240 du code civil, ancien article 1382 du même code « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

    (4) Article 1353 du code civil « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ».

    (5) Cass. 2e civ., 27 octobre 1976, n°73-14.891 et n°74-10.318 : Lien de causalité doit être direct et certain.

    (6) Article 1382 du code civil « Les présomptions qui ne sont pas établies par la loi, sont laissées à l’appréciation du juge, qui ne doit les admettre que si elles sont graves, précises et concordantes, et dans les cas seulement où la loi admet la preuve par tout moyen ».

    (7) Cass. 1re civ., 21 oct 2020, n°19-18.689 : Affaire Paul François, admission que l’exposition à un pesticide soit un dommage corporel.

    (8) « Toxicologie« , Dictionnaire Environnement, Actu-environnement.com.

    (9) « Epidémiologie« , Dictionnaire Environnement, Actu-environnement.com.

    (10) Cass., ass. plén., 5 avr. 2019, n° 18-17.442 : Préjudice d’anxiété admis pour tous les salariés exposés à l’amiante.

    (11) Cass. soc., 11 sept. 2019, n° 17-24.879 : Préjudice d’anxiété reconnu pour toute exposition aux substances nocives ou toxiques.

    (12) CA Versailles, 14ème chambre, 4 février 2009 n° 08/08775 : Préjudice d’angoisse reconnu pour les voisins d’une antennes relais malgré les controverses scientifiques sur les dangers.

    (13) CE, 18 mai 2011, n° 326416 : reconnaissance du préjudice d’anxiété par le juge administratif.

    (14) CE, 28 mars 2022, n° 453378 : le juge administratif reconnait le préjudice d’anxiété pour les salariés ayant été exposés de façon effective à un risque fréquent et grave entraîne la reconnaisse d’un préjudice d’anxiété, sans avoir à en rapporter la preuve.

    (15) CE, 9 nov. 2016, n° 393108, 393902, 393926, 393904 : Affaire du Médiator, reconnaissance du préjudice d’angoisse en matière médicale. 

    (16) Colloque « Environnement : faut-il modifier l’appréhension du lien de causalité ? », Cour de cassation, 31 mars 2022.

  • CP/ Devoir de vigilance des multinationales : la France ne doit pas bloquer l’adoption d’une directive européenne ambitieuse !

    Paris, le 23 novembre 2022 – Alors qu’un texte de compromis doit être soumis au Conseil le 1er décembre prochain, la France tente de constituer une minorité de blocage sur plusieurs points essentiels de la future Directive sur le devoir de vigilance des multinationales (définition restrictive de la chaîne de valeur, exclusion du secteur financier, etc). Cette position est incompréhensible : pionnière en la matière, la France doit soutenir un texte ambitieux au niveau européen.

    La proposition de Directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises, dévoilée par la Commission européenne en février dernier, était attendue de longue date. Dès sa publication, nos organisations avaient alerté le Conseil et le Parlement des failles de cette proposition, qui en l’état donne la priorité à des mesures cosmétiques qui ont déjà démontré leur inefficacité (insertion de clauses types dans les contrats avec les fournisseurs, recours à des sociétés d’audits, etc.), au lieu de renforcer la responsabilité juridique des entreprises et de faciliter l’accès à la justice pour les personnes affectées. Il est crucial de replacer la protection des droits humains et de l’environnement au centre de la future législation.

    Si Emmanuel Macron avait déclaré vouloir faire de cette Directive l’une des priorités de la Présidence française de l’Union européenne, c’est sous la Présidence tchèque (depuis juillet dernier) que les discussions se sont accélérées au sein du Conseil. Un texte de compromis doit être soumis aux ministres le 1er décembre prochain. Il constituera la position du Conseil en vue des négociations avec la Commission et le Parlement européen, qui devraient débuter à l’été 2023.

    Mais le texte de compromis actuellement discuté au Conseil est insuffisant, voire plus faible que la loi française, sur de nombreux points (1) : seuils d’application , définition restrictive des atteintes à l’environnement et aux droits humains, exclusion des exportations d’armes ou encore la possibilité pour les entreprises de remettre à plus tard la prévention de certaines atteintes.

    Selon les informations récemment divulguées par la presse européenne, au lieu de s’assurer de l’ambition de la future législation sur ces points, la France semble avoir décidé de constituer une minorité de blocage aux côtés de l’Espagne et de l’Italie pour réduire d’autant plus l’étendue du devoir de vigilance. 

    La France chercherait ainsi à exclure toute une partie (dite “aval”) des chaînes de valeur du champ de la Directive. Autrement dit, les entreprises pourraient continuer à confier la distribution de leurs produits à des sous-traitants violant les droits fondamentaux des travailleur·se·s, à fournir leurs biens ou services à des partenaires commerciaux impliqués dans des crimes internationaux, ou encore à fabriquer des produits en connaissance des effets néfastes de leur utilisation sur l’environnement. 

    Le cas de Voltalia, entreprise française interpellée récemment en raison de sa fourniture d’électricité profitant à la junte birmane, ou le cas Amesys, mise en examen pour complicité de torture en Libye, entre 2007 et 2011, pour avoir fourni une technologie de surveillance au régime autoritaire libyen de Mouammar Kadhafi, nous montrent pourtant que ces cas de figure ne sont pas théoriques.

    La France chercherait également à exclure le secteur financier du champ de ces obligations, alors même que BNP Paribas est récemment accusée de financer des entreprises brésiliennes impliquées dans la déforestation de l’Amazonie et a été mise en demeure concernant sa contribution au changement climatique.

    Ce vendredi, une dernière réunion de négociation doit avoir lieu pour valider le texte qui sera soumis au vote du Conseil. Alors que la France était pionnière en matière de responsabilité des entreprises depuis l’adoption de la loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des multinationales, la stratégie qu’elle développe actuellement est non seulement incompréhensible, mais risquerait surtout de porter gravement atteinte à l’effectivité de la future directive. 

    Signataires :

    CONTACTS PRESSE

    NOTES

    (1) Les principales faiblesses du texte actuel sont les suivantes :

    • Les seuils d’application sont calculés au niveau de chaque société, ce qui signifie que de nombreuses sociétés-mères ne seront pas soumises au devoir de vigilance, et que les grands groupes pourront facilement se restructurer pour y échapper.
    • La définition des atteintes à l’environnement y est extrêmement restrictive, excluant de fait la plupart des dommages environnementaux causés par les entreprises. De même pour les droits humains.
    • L’utilisation d’armes, de matériels de guerre, de munitions et de biens à double usage dont l’exportation est autorisée serait exclue du champ du devoir de vigilance.
    • Le texte propose d’autoriser les entreprises à remettre à plus tard la mise en place de mesures de prévention lorsqu’elles entendent prioriser des atteintes plus graves ou plus probables résultant d’autres activités. Résultat : plus une entreprise opère dans un secteur à risque pour les droits humains et l’environnement, plus elle pourra se dédouaner de toute responsabilité concernant des violations qu’elle considère comme moins sévères.
  • Numéro 15 de la newsletter des affaires climatiques – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur

    Chères lectrices, chers lecteurs,

    Après cette pause estivale, nous espérons toutes et tous vous retrouver en bonne forme. L’équipe du groupe de travail veille-international n’a, quant à elle, pas chômé afin de vous informer sur l’évolution du droit climatique et environnemental. Elle a travaillé en collaboration avec le groupe “droits de la nature”, suite à la sortie de l’ouvrage “Les droits de la nature, vers un nouveau paradigme de protection du vivant” afin de vous offrir une vue d’ensemble des outils juridiques existant, en droit comparé, permettant un début de protection de ces droits, que vous retrouverez dans le focus de notre lettre.


    Vous pourrez lire, par ailleurs, nos articles sur la jurisprudence récente en matière de contentieux climatique: une nouvelle décision Grande-Synthe et le people’s climate case. Ainsi qu’en matière de contentieux environnemental : une décision de la Haute Cour de Madras; le Président indonésien condamné pour négligence dans la protection de l’air; une décision de la Cour constitutionnelle d’Equateur sur les droits de la nature. Enfin, vous pourrez, également, accéder à l’analyse de la circulaire visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale. Pour participer à la rédaction de cette lettre, n’hésitez pas à rejoindre le groupe veille-international en adhérent à l’association.

    Nous vous souhaitons une très bonne lecture,
     

    Sandy Cassan-Barnel
    Référente du groupe veille-international

    Sommaire

    Focus – Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur

    Podcast

    Affaires Climatiques 

    Affaires Environnementales 

    Focus

    Droits de la nature et accès à la Justice : les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Equateur

    Les droits de la Nature, parce qu’ils tendent à permettre de vivre dans un environnement sain, contribuent à garantir la jouissance des droits humains et à renforcer la démocratie environnementale. Au-delà de la reconnaissance – par la jurisprudence, ou par les textes – de la personnalité juridique des éléments de la Nature devenant sujets et non plus objets de droit, la question de leur représentation est cruciale. Il est traditionnellement distingué, en l’état de l’avancée du mouvement des droits de la Nature à travers le monde, deux voies – non-exhaustives- de représentation : la première reprend le modèle de la tutelle avec la nomination de représentants; la seconde se construit autour d’une procédure permettant à toute personne physique ou morale d’ester en justice en cas d’atteinte portée à un élément naturel et au nom de celui-ci. Ceci soulève nombre de questions relatives à la qualité et à l’intérêt à agir de ces “gardiens de la Nature”, et donc plus largement, la problématique de l’accès à la justice.

    Podcast

    Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, revient sur une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 18 février dernier. 
     

    Par quatre décrets du 7 juin 2021 le 1er Ministre Jean Castex a accordé à la Compagnie Minière de Boulanger la prolongation, sur une superficie réduite, des concessions de mines de métaux précieux situées sur une partie du territoire de la commune de Roura (Guyane).

    L’association FNE a saisi le juge administratif d’un recours en excès de pouvoir contre ces décrets. L’association demanderesse fait valoir le défaut de mise en œuvre d’une procédure de participation du public. Mais, également, la contradiction des articles L. 142-7 à L. 142-9, L. 144-4 du code minier et L. 123-19-2 .1 du code de l’environnement avec les articles 1er, 2, 3 et 7 de la Charte de l’environnement, les articles 1er, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 et l’article 34 de la Constitution.

    Affaires Climatiques

    Conseil d’Etat français, Affaire commune de Grande-Synthe c. le ministre de la transition écologique et solidaire, 12 février 2021, 428177

    Cet arrêt traite de la demande conjointe d’annulation du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique à l’initiative de la commune de Grande-Synthe et de son ancien Maire, agissant à titre personnel. Cette affaire, bien qu’indépendante du recours plus médiatisé visant à enjoindre l’État à respecter les Accords de Paris, s’inscrit dans un intérêt certain que porte cette ville des Hauts-de-France pour les questions environnementales et climatiques. Elle illustre également la limite juridique des recommandations qui, contrairement aux Accords de Paris, n’ont pas fait l’objet d’un engagement exprès de la part de l’État français. Celles-ci ont, de fait, une portée juridique très limitée voire nulle.

    Cour de justice de l’Union européenne, 25 mars 2021, C-565/19Armando Ferrão Carvalho e.a./ Parlement et Conseil “The People’s Climate Case”

    People’s Climate Case est une procédure initiée par 10 familles venant du Portugal, d’Allemagne, de France, d’Italie, de Roumanie, du Kenya, du Fiji et Sáminuorra, une association de jeunes Saami, contre les institutions de l’Union européenne. Ils souhaitent que la Cour ordonne au Parlement et au Conseil de fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus ambitieux.

    Affaires Environnementales

    Circulaire du ministre de la justice CRIM 2021-02/G3-11/05/2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale du 11 mai 2021

    La circulaire vise à améliorer le contentieux de l’environnement, qui est aujourd’hui peu efficace, notamment en matière pénale : sur les 20 000 affaires traitées chaque année par les parquets, 75 % se terminent par une mesure alternative aux poursuites et les condamnations prononcées ne représentent qu’un pourcent du nombre total de condamnations.

    Décision n°253-20-JH/22 de la Cour constitutionnelle d’Equateur, 27 janvier 2022, singe Estrellita

    La Cour constitutionnelle reconnaît, pour la première fois, que les animaux peuvent, même individuellement, bénéficier des droits de la Nature et se prévaloir de droits tels que le droit à la vie ou à l’intégrité physique, en tant que partie intégrante de la Nature.

    Le Président Indonésien jugé coupable pour négligence dans la protection du droit à un air sain

    Le Président indonésien Joko Widodo, d’autres membres du gouvernement, ainsi que des élus locaux, ont été déclarés coupables de négligence dans le respect du droit des citoyens à respirer un air sain, par une décision tribunal de Jakarta-Centre rendue le 16 septembre 2021. Alors que Jakarta demeure l’une des villes les plus polluées du monde, l’inaction de ces personnalités a été reconnue comme une négligence dans l’enrayement de la pollution de l’air de la capitale indonésienne. Après deux longues années d’instance et huit reports de l’affaire, les juges de Jakarta ont confirmé le droit de tout citoyen à vivre dans un air sain, tout en condamnant les pouvoirs publics à prendre des mesures rigoureuses en la matière. Cette décision de principe en faveur de la protection de l’environnement sur le territoire indonésien, s’inscrit dans la lignée d’autres décisions nationales où les juges mettent en œuvre leurs pouvoirs de coercition afin de réprimer l’inertie des pouvoirs publics.

    MADRAS HIGH COURT, MADURAI BRANCH
    A.Periyakaruppan vs. The Principal Secretary to Government, Revenue Department, The Additional Chief Secretary and Commissioner of Revenue Administration, Chennai.
     

    Dans une décision sur un litige administratif concernant une sanction envers un fonctionnaire, la cour s’est emparée de la question de la personnalité juridique de la nature pour déclarer les droits fondamentaux de la « Mère Nature ».