Catégorie : Responsabilité des multinationales

  • Procès climatique contre TotalEnergies : audience décisive devant la cour d’appel 

    Procès climatique contre TotalEnergies : audience décisive devant la cour d’appel 

    Communiqué de presse, Paris, le 4 mars Dans le contentieux climatique porté par 6 associations et 15 collectivités territoriales contre TotalEnergies, une audience cruciale se tiendra demain devant la cour d’appel de Paris. Alors que le tribunal judiciaire de Paris a jugé l’action irrecevable, l’affaire sera examinée conjointement aux dossiers EDF/Mexique et Suez/Chili, par une nouvelle chambre de la cour d’appel spécialement créée pour les contentieux relatifs au devoir de vigilance des multinationales. 

    En janvier 2020, une coalition d’associations et de collectivités (1) a assigné TotalEnergies en justice. Rejointe en septembre 2022 par trois villes supplémentaires et Amnesty International France, la coalition demande que la pétrolière soit contrainte de prendre les mesures nécessaires pour s’aligner avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de Paris, conformément à la loi sur le devoir de vigilance (2).

    Une audience à forts enjeux pour le devoir de vigilance

    Le 6 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a déclaré l’action judiciaire irrecevable selon une interprétation contestée et inquiétante de la loi sur le devoir de vigilance. Déterminées à contraindre la major pétro-gazière française à respecter ses obligations en matière climatique, les associations et collectivités de la coalition ont interjeté appel de cette décision.

    L’affaire est appelée à l’audience du 5 mars devant la cour d’appel de Paris. Signe de l’importance des enjeux pour la juridiction, l’affaire sera examinée par une nouvelle chambre créée spécialement pour juger en appel des affaires relatives au devoir de vigilance et à la responsabilité environnementale des entreprises. L’audience portera également sur les affaires Suez/Chili et EDF/Mexique, elles aussi déclarées irrecevables pour des motifs procéduraux controversés. 

    Une coalition déterminée face à l’urgence climatique

    La cour d’appel doit se prononcer sur la recevabilité de l’action, préalable indispensable avant une décision sur le fond. Cette décision, très attendue compte tenu de l’urgence climatique, intervient après la condamnation de Shell aux Pays-Bas, une affaire historique qui avait déjà souligné l’importance des mécanismes judiciaires pour contraindre les multinationales à réduire leurs émissions de GES.

    Le tribunal judiciaire de Paris a considéré que TotalEnergies n’aurait pas été régulièrement mis en demeure, prétextant un manque de dialogue avec l’entreprise. La loi sur le devoir de vigilance n’impose pourtant aucune phase de « discussion » ou de « conciliation » obligatoire entre les entreprises et les associations, ou personnes affectées, avant la saisine de la justice. En outre, le premier juge n’a pas pris en compte les différents échanges préalables intervenus entre la coalition et les dirigeants de l’entreprise avant la mise en demeure. 

    L’appel concerne également l’intérêt à agir des collectivités territoriales, dont l’action a été jugée irrecevable par le tribunal judiciaire, alors qu’elles sont aujourd’hui en première ligne face aux nombreux enjeux d’adaptation et d’atténuation des impacts du changement climatique.

    L’appel soulève également la question de l’impartialité de cette décision d’irrecevabilité, à la suite de la publication d’informations concernant de possibles liens familiaux entre le juge de la mise en état et un haut cadre de TotalEnergies.

    La coalition reste pleinement mobilisée afin que l’impact des activités de TotalEnergies sur le dérèglement climatique puisse enfin être jugé. La date de rendu de la décision devrait être annoncée à l’issue de de l’audience. 

    Notes

    (1) Sherpa, Amnesty International France, France Nature Environnement, Notre Affaire à Tous, ZEA, les Eco Maires et les villes de Paris, New York, Arcueil, Bayonne, Bègles, Bize-Minervois, Centre Val de Loire, Champneuville, Correns, Est-Ensemble Grand Paris, Grenoble, La Possession, Mouans-Sartoux, Nanterre, Sevran et Vitry-le-François.

    (2) Loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordres. L’action judiciaire se fonde également sur la prévention des dommages à l’environnement (art. 1252 Code civil).

    Signataires

    Sherpa, Notre Affaire à tous, Ville d’Arcueil, Vitry-le-François, Nanterre, Sevran, La Possession, Grenoble, Poitiers, Eco Maires, Amnesty International France, France Nature Environnement

    Contacts presse

    Sherpa – Théa Bounfour, chargée de contentieux et de plaidoyer, thea.bounfour@asso-sherpa.org
    Notre Affaire à Tous – Justine Ripoll, responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.org

  • Directive sur le devoir de vigilance des entreprises : les États européens ne doivent pas faire volte-face !

    Paris, le 27 février 2024, Membres du Forum citoyen pour la RSE – En décembre dernier, les États membres et le Parlement européen sont parvenus à un accord essentiel sur la future Directive sur le devoir de vigilance des entreprises. Mais ce compromis est aujourd’hui en danger : sous la pression des lobbies, plusieurs États membres, dont l’Allemagne, menacent de bloquer le texte lors du vote du Conseil de l’Union européenne qui doit avoir lieu demain.

    Presque 4 ans après l’annonce de cette proposition de directive par la Commission européenne, et après l’aboutissement des trilogues en décembre, le vote prévu au Conseil pour valider le texte avant son adoption au Parlement ne devait être qu’une formalité.

    Cette formalité est néanmoins devenue une véritable épée de Damoclès, rendant incertaine l’adoption définitive de la directive en raison de divergences au sein du gouvernement allemand, qui pourraient conduire le pays à s’abstenir lors de ce vote. La position des autres États-membres serait, dans une telle hypothèse, décisive.

    S’il a été largement affaibli sous la pression des lobbies, ce texte constitue cependant une avancée majeure pour la régulation des entreprises multinationales dans de nombreux Etats membres. Il est donc crucial que la France le soutienne pleinement et que le gouvernement se mobilise maintenant au plus haut niveau pour intervenir auprès de l’ensemble de ses partenaires européens pour parvenir à son adoption.

    Pour rappel, cette directive avait été appelée de ses vœux en 2022 par Emmanuel Macron, après une résolution adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale. L’accord trouvé en décembre 2023 a été célébré par la majorité présidentielle et le Ministre des affaires étrangères, Stéphane Séjourné, s’est récemment engagé auprès des députés français à le faire aboutir en l’état.

    Alors qu’un compromis a été trouvé, échouer à ce stade, à la veille des élections européennes, rendrait l’avenir de ce texte très incertain. Ce serait un désastre pour la démocratie européenne, pour les personnes et communautés affectées par les activités des multinationales, et pour la planète.

    Contacts

    Sherpa : Lucie Chatelain, Responsable contentieux et plaidoyer, lucie.chatelain@asso-sherpa.org

    ActionAid France : Maelys Orellana, Chargée de campagne, maelys.orellana@actionaid.org

    CCFD-Terre Solidaire : Clara Alibert, Chargée de plaidoyer, c.alibert@ccfd-terresolidaire.org

    Reclaim Finance : Olivier Guérin, EU Advocacy Officer, olivier@reclaimfinance.org

    Oxfam France : Léa Guerin, Chargée de plaidoyer, lguerin@oxfamfrance.org

    Amis de la Terre France : Juliette Renaud, Coordinatrice, juliette.renaud@amisdelaterre.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll, Responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.com

    Notes

    • Annoncée par le Commissaire européen à la justice Didier Reynders dès avril 2020, la proposition de Directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité a été publiée par la Commission en février 2022.
    • Le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen ont adopté leur position respective sur le texte en décembre 2022 et juin 2023, après quoi les négociations entre les trois institutions européennes (appelées “trilogues”) se sont engagées. Un accord politique a été trouvé le 14 décembre 2023.
    • La France étant dotée depuis 2017 d’une loi sur le devoir de vigilance, le gouvernement français s’est dit favorable à l’adoption d’une directive dès le début du processus. Il s’est cependant employé à affaiblir le texte proposé par la Commission sur plusieurs points, y compris l’inclusion des services financiers et de l’aval de la chaîne de valeur.
    • Ces dernières semaines, en dépit du soutien massif des citoyen·nes en faveur du texte et de l’accord politique trouvé en décembre, plusieurs lobbies (y compris le MEDEF et la CPME) ont à nouveau cherché à faire dérailler le processus.
  • Bombes climatiques : ClientEarth et Notre Affaire à Tous mettent en garde les banques françaises finançant les projets pétro-gaziers de Saudi Aramco

    Communiqué de presse, mardi 5 décembre 2023 – ClientEarth et Notre Affaire à Tous mettent en garde les banques françaises finançant et bénéficiant des nouveaux projets pétro-gaziers de Saudi Aramco. Ces interpellations font suite aux préoccupations des Nations Unies (1) concernant la contribution de BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale aux impacts, liés au changement climatique, sur les droits humains, causés par Saudi Aramco. Leurs soutiens aux entreprises ayant des projets d’expansion dans le domaine des combustibles fossiles les exposent à d’importants risques juridiques et réputationnels.

    En continuant de soutenir de tels clients, les banques françaises risquent de manquer à leur responsabilité de respecter les droits humains et s’exposent à d’importants risques juridiques et réputationnels. En effet, les clients du secteur de l’énergie qui continuent de développer de nouveaux projets fossiles ne peuvent être considérés comme alignés sur l’Accord de Paris ou comme effectuant une transition crédible vers des émissions nettes zéro d’ici à 2050, et sont par conséquent à l’origine d’impacts liés au changement climatique sur les droits humains.

    Les courriers officiels de mise en garde reçus par les 3 banques françaises font écho aux préoccupations des Nations Unies concernant leur contribution aux impacts liés au changement climatique sur les droits humains, causés par Saudi Aramco.

    Saudi Aramco est le plus grand émetteur de gaz à effet de serre : la société est responsable de 4,33 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone et de méthane, provenant des combustibles fossiles et du ciment, entre 1965 et 2018. Au lieu d’aligner sa stratégie commerciale sur les objectifs de l’Accord de Paris en réduisant rapidement sa production d’énergies fossiles, Saudi Aramco reste le plus grand producteur de pétrole brut au monde en termes de volume de production et prévoit même d’augmenter considérablement ses réserves de pétrole et de gaz. L’annonce par la société d’un objectif « net zéro » exclut la plus grande partie de son impact sur le climat sous la forme d’émissions indirectes scope 3, ce qui le rend incompatible avec l’objectif de l’Accord de Paris visant à réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’au moins 45 % d’ici à 2030 afin d’atteindre l’objectif net zéro d’ici à 2050.

    Les courriers rappellent également à BNP Paribas, Crédit Agricole et la Société Générale que les Nations Unies les ont d’ores et déjà alerté des impacts néfastes susceptibles de se matérialiser en Arabie saoudite, à l’aide de leurs soutiens financiers au géant pétro-gazier. De grandes parties du pays pourraient devenir inhabitables dans le cadre d’un scénario à fortes émissions, avec une chaleur et une humidité dépassant les seuils de tolérance humaine. La vague de chaleur cette année en Arabie saoudite a entraîné des températures supérieures à 50 ⁰C, et un stress thermique pour les pèlerins du Hadj. Selon les estimations, le nombre de décès liés à la chaleur dans la région nord-africaine et au Moyen Orient passera de la moyenne actuelle de 2,1 pour 100 000 habitants à plus de 100 pour 100 000 habitants d’ici 2100 dans le cadre de scénarios d’émissions élevées semblables aux trajectoires d’émissions actuelles. 

    Alors que les engagements pris sont encore très loin d’être suffisants pour garantir un impact réel sur l’expansion pétro-gazière mortifère des majors, ClientEarth et Notre Affaire à Tous listent également une série de demandes urgentes : les banques françaises doivent immédiatement mettre en place et appliquer une politique selon laquelle elles ne fourniront plus de services au bilan ou hors-bilan liés à des projets, ou à des entreprises impliquées dans des projets, qui impliquent une nouvelle exploration, une exploitation ou un développement de nouveaux projets fossiles, conformément à la norme NZE de l’AIE.

    (1) https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/300823/climat-l-onu-met-en-garde-le-plus-gros-petrolier-du-monde-et-ses-soutiens-francais

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    Notre Affaire à Tous : Brice Laniyan, brice.laniyan@notreaffaireatous.org

  • La cour d’appel valide l’intérêt à agir de Notre Affaire à Tous face au greenwashing de TotalEnergies

    Communiqué de presse, Paris, le 13 décembre 2023 – La cour d’appel de Paris confirme la recevabilité de l’association Notre Affaire à Tous dans l’action en justice contre TotalEnergies pour pratiques commerciales trompeuses, initiée en mars 2022 aux côtés de Greenpeace France et des Amis de la Terre France. Cette deuxième victoire d’étape confirme le jugement rendu en 1ère instance le 16 mai 2023 qui a ouvert la voie aux débats de fond sur la publicité mensongère et le greenwashing de TotalEnergies.

    Le 2 mars 2022, les associations Greenpeace France, les Amis de la Terre France et Notre Affaire à Tous, avec le soutien de l’association ClientEarth, ont intenté une action en justice contre TotalEnergies pour publicité mensongère et greenwashing. La multinationale est accusée d’avoir mené une campagne de greenwashing, prétendant s’engager dans la lutte contre les changements climatiques tout en continuant ses activités axées sur les énergies fossiles.

    Les associations avaient alors dénoncé cette opération de communication trompeuse au regard de la réalité : TotalEnergies continue de dépendre à 90% des énergies fossiles et de consacrer 80% de ses investissements à ces activités. Le procès met également en lumière les allégations fallacieuses de la multinationale sur son ambition de « neutralité carbone » et le caractère prétendument écologique du gaz fossile et de la biomasse.

    TotalEnergies avait dans un premier temps soulevé plusieurs moyens d’irrecevabilité, qui ont cependant été rejetés par le tribunal judiciaire de Paris le 16 mai 2023, excepté la recevabilité de l’intervention volontaire de l’association Clientearth. TotalEnergies a alors fait appel de l’intérêt à agir de Notre Affaire à Tous.

    La cour d’appel a finalement rejeté les arguments de la multinationale pétro-gazière vendredi 8 décembre et confirme que l’association, aux côtés de Greenpeace France et les Amis de la Terre, a donc bien un intérêt à agir pour poursuivre en justice des acteurs pour pratiques commerciales trompeuses et plus largement en protégeant les consommateurs, dès lors que cela porte sur des enjeux climatiques et environnementaux.

    “TotalEnergies est au courant depuis plus d’un demi siècle de l’impact de ses activités sur le climat, mais continue de produire en toute impunité de la désinformation pour protéger ses activités climaticides. Comme à son habitude, la multinationale a de nouveau tenté toutes les manœuvres dilatoires possibles, mais cette décision confirme l’intérêt à agir de Notre Affaire à Tous en matière de greenwashing ” déclare Jérémie Suissa, délégué général de l’association Notre Affaire à Tous

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    Vincent Bezaguet, Chargé de Campagne : vincent.bezaguet@notreaffaireatous.org

  • CP / Procès climatique contre TotalEnergies : l’action judiciaire continue devant la cour d’appel 

    Paris, 10 novembre 2023 – Dans le contentieux climatique porté par 6 associations et 15 collectivités territoriales contre TotalEnergies, une décision du tribunal judiciaire de Paris du 6 juillet 2023 a jugé l’action irrecevable. Cette décision reposant sur une interprétation contestée et inquiétante de la loi sur le devoir de vigilance et des dispositions relatives au préjudice écologique, la coalition a décidé de poursuivre les débats sur la recevabilité de l’action devant la cour d’appel de Paris.

    En janvier 2020, une coalition d’associations et de collectivité territoriales* a assigné TotalEnergies devant le tribunal judiciaire de Nanterre, rejointe depuis par les collectivités de Paris, New-York, Poitiers et Amnesty International France. L’objectif est de contraindre la compagnie pétrolière à prendre les mesures nécessaires pour s’aligner avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de Paris, conformément à la loi sur le devoir de vigilance.

    Dans une ordonnance du 6 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a déclaré l’action judiciaire irrecevable. Une décision inquiétante alors que plusieurs autres actions judiciaires fondées sur la loi sur le devoir de vigilance ont également été jugées irrecevables pour  des motifs largement contestés par les milieux académiques et les organisations de la société civile.

    Déterminées à contraindre la major pétro-gazière française à respecter ses obligations en matière climatique, les associations et collectivités de la coalition déposent aujourd’hui leurs conclusions auprès de la cour d’appel.

    Dans la décision du 6 juillet 2023, le juge a considéré que TotalEnergies n’aurait pas régulièrement été mise en demeure au motif que les demandes formulées dans l’assignation n’étaient pas strictement identiques à celles du courrier de mise en demeure envoyé à la multinationale en juin 2019.

    Bien que la loi sur le devoir de vigilance n’impose aucune phase de « discussion » ou de « conciliation » obligatoire entre les entreprises et les associations ou personnes affectées, cette ordonnance prétexte un manque de dialogue pour juger irrecevable l’action judiciaire. Alors que la coalition a interpellé, échangé et rencontré les dirigeants de l’entreprise avant la mise en demeure, ce qui n’est aucunement imposé par la loi, le juge n’a pas pris en compte ces échanges préalables.

    Le juge a considéré par ailleurs que les collectivités n’auraient pas intérêt à agir, au motif que les effets du changement climatique seraient mondiaux, et pas limités à leur territoire.

    Le devoir de vigilance oblige pourtant les multinationales à prévenir les risques d’atteintes aux droits humains, à la santé et à l’environnement causés par leurs activités.

    La coalition entend contester la restriction de l’accès à la justice opérée par cette décision. La décision du tribunal dans cette affaire va à l’encontre de l’esprit du législateur, et des nombreux rapports soulignant l’urgence climatique. La coalition se tourne aujourd’hui vers  la cour d’appel pour faire reconnaître la recevabilité  de ses demandes afin que l’impact des activités de TotalEnergies sur le dérèglement climatique puisse enfin être jugé.

    L’appel soulève également la question de l’impartialité de cette décision d’irrecevabilité, à la suite de la publication d’informations concernant de possibles liens familiaux entre le juge de la mise en état et un haut cadre de TotalEnergies.

    La décision de la cour d’appel est attendue en 2024.

    Pour en savoir plus : L’action des associations et collectivités jugée irrecevable, une décision inquiétante (Juillet 2023)

    Les pages dédiées au dossier : Sherpa ; Notre Affaire À Tous

    Notes

    Associations membres de la coalition : Notre Affaire À Tous, Sherpa, Les Eco-Maires, France Nature Environnement, ZEA. 

    Collectivités membres de la coalition :  Arcueil, Bayonne, Bègles, Bize-Minervois, Centre Val de Loire, Correns, Est-Ensemble Grand Paris, Grenoble, La Possession, Mouans-Sartoux, Nanterre, Sevran, Vitry-le-François ; Depuis septembre 2022 : Paris, New-York, Poitiers.

    Intervenante accessoire volontaire : Amnesty International France.

    Contacts presse

    Sherpa : Théa Bounfour, Chargée de plaidoyer et contentieux
    thea.bounfour@asso-sherpa.org

    Notre Affaire À Tous : Vincent Bezaguet, Chargé de campagne
    vincent.bezaguet@notreaffaireatous.org

  • CP/ Notre Affaire À Tous alerte 26 entreprises multinationales françaises sur leurs manquements en matière de vigilance climatique 

    Mercredi 8 novembre 2023 – Alors que les tribunes de dirigeants et responsables RSE de grandes entreprises se multiplient (1) en amont de la COP28, demandant une régulation plus forte et claire de leurs activités au nom de la lutte contre le changement climatique, l’association Notre Affaire à Tous interpelle 26 multinationales françaises sur leurs manquements en matière de vigilance climatique. 

    Le respect des engagements climatiques de la France, et en particulier sa juste part dans les efforts d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre mondiales, doit nécessairement passer par la régulation et la mise en conformité des multinationales françaises, actives partout dans le monde, avec les objectifs de l’Accord de Paris. Selon le Gouvernement, les entreprises ont même la responsabilité d’assurer “la moitié des efforts” nécessaires à la transition écologique. 

    Les 26 entreprises analysées dans le Benchmark 2023 de la vigilance climatique des multinationales françaises, et interpellées aujourd’hui par courrier, peuvent, à elles seules, agir sur au moins 10% des émissions mondiales. Bien loin des discours qui cherchent à démontrer que la France ne pourrait agir que sur 1% des émissions mondiales, les multinationales françaises doivent prendre leurs responsabilités et enclencher une révolution dans leurs activités, stratégies et critères de réussite, afin que les objectifs de l’Accord de Paris soient collectivement atteints. Cette obligation explicite est notamment ancrée depuis 2022 dans la directive européenne sur le reporting extra-financier (Corporate Sustainability Reporting Directive) (2). 

    Le cas des banques est notamment révélateur du poids des acteurs français dans la transition et la planification écologique mondiale. La France est le premier pays européen à soutenir des projets d’extraction de “bombes climatiques” partout sur la planète, via les 154 milliards de dollars de soutiens financiers que les banques françaises ont apportés aux entreprises planifiant ou exploitant ces projets incompatibles avec l’Accord de Paris (3). 

    Il est impératif que l’Etat français, via des réglementations contraignantes et un contrôle de l’application de ces lois, et les entreprises françaises les plus émettrices, via la mise en œuvre de mesures de vigilance adaptées, activent tous les leviers possibles pour garantir une réduction forte des émissions territoriales et extra-territoriales, et ainsi oeuvrer à une atténuation des impacts du dérèglement climatique, notamment en France qui est l’un des pays les plus impactés par la crise climatique en Europe (4). 

    Les courriers d’interpellation à la Société Générale, Crédit Agricole, Carrefour ou encore Stellantis-PSA, visent à apporter un éclairage sur les défaillances de leurs plans de vigilance et les mesures à prendre urgemment afin de se mettre en conformité avec la loi, qu’il s’agisse d’une meilleure identification des risques que leurs activités font peser sur le climat, d’une reconnaissance plus claire de leur responsabilité individuelle à agir ou encore de mesures concrètes de vigilance adaptées à la hauteur et à la temporalité des enjeux humains et environnementaux que soulèvent la crise climatique. 

    Pour retrouver les analyses de chacune des 26 entreprises.
    Pour retrouver les enseignements principaux.
    Pour retrouver l’ensemble du rapport Benchmark de la vigilance climatique 2023.
    Pour retrouver un extrait de courrier envoyé (Crédit Agricole). Et sa pièce jointe.

    Notes

    (1) https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/10/17/developpement-durable-nous-sommes-au-fait-des-limites-du-systeme-sur-lequel-est-ancree-la-creation-de-valeur-de-nos-entreprises_6194950_3232.html ou encore https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/cop28-plus-d-une-centaine-d-entreprises-appellent-les-gouvernements-a-s-attaquer-aux-energies-fossiles_6139953.html?mc_cid=f15b7f4db5&mc_eid=da394c3653 

    (2) La CSRD a été adoptée définitivement (déjà en 2022 – en cours de transposition). Elle demande l’élaboration d’un modèle économique compatible avec 1,5°C (scope 1 -3).

    (3) Les bombes climatiques émettraient quatre fois le budget carbone restants de l’humanité pour contenir le réchauffement climatique à 1.5°C : https://www.theguardian.com/environment/2023/oct/31/france-carbon-bomb-projects-banks-fossil-fuels-climate

    (4) L’ONG Germanwatch classe la France au 27ème rang des pays les plus touchés dans son indice des risques climatiques entre 2000 et 2019, soit l’un des pays les plus impactés d’Europe avec l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne. 

    Courriers d’interpellation par secteur

    Energie

    Financier

    Agroalimentaire

    Transport

    Construction

    Industriel

    Contact presse

    Marine Coynel – chargée de communication :
    marine.coynel@notreaffaireatous.org

  • CP / France – Afrique du Sud : neuf ONG demandent au gouvernement de condamner le jeu dangereux de TotalEnergies

    Paris, le 11 octobre 2023 – Alors que dimanche 15 octobre, la coupe du monde de rugby verra s’affronter en quarts de finale la France et l’Afrique du Sud, les téléspectateurs du monde entier subiront le matraquage publicitaire du sponsor officiel TotalEnergies sans savoir que cette entreprise irresponsable accélère le déclenchement de bombes climatiques en Afrique, et notamment en Afrique du Sud.

    Aujourd’hui, neuf associations (1) dénoncent la mascarade de « consultation publique » qui vient de démarrer en Afrique du Sud à propos des projets d’exploration et de production de TotalEnergies et demandent au gouvernement français de retirer le soutien qu’il apporte à la Major française à travers les « Partenariats pour une transition énergétique juste » ainsi que de condamner publiquement tous les investissements de TotalEnergies dans de nouveaux projets fossiles.

    En totale contradiction avec les conclusions du GIEC et les recommandations de l’Agence internationale de l’énergie (2), qui appellent à ne développer aucun nouveau projet d’extraction de charbon, de pétrole ou de gaz, TotalEnergies développe une stratégie expansionniste agressive en Afrique, et notamment en Afrique du Sud, où la multinationale souhaite ouvrir de nouveaux champs gaziers en offshore profond. Les côtes occidentales et méridionales sud-africaines sont ainsi menacées par une série de projets offshore qui pourraient voir le jour à des profondeurs allant de 200 à 3200 mètres de profondeur, et qui menacent des hotspots de biodiversité, les corridors de migration des baleines, la pêche artisanale et l’économie du littoral.

    Loin de renoncer à ses investissements mortifères après un an de mobilisation de la société civile en France et en Afrique du Sud et malgré une pétition réunissant près de 100 000 signatures, TotalEnergies vient au contraire d’accélérer les procédures en engageant une « consultation publique » pour développer deux immenses champs gaziers dans les eaux d’Afrique du Sud. Le 22 septembre 2023, les citoyens sud-africains découvraient ainsi une étude d’impact environnemental de plus de 3000 pages, qu’ils sont censés lire et commenter dans un délai de trente jours, le délai de clôture de la consultation étant fixé au 25 octobre 2023. Trente maigres jours concédés aux citoyens, scientifiques, associations et élus locaux pour se prononcer sur un projet déterminant pour la biosphère, alors qu’une première lecture des documents soumis à consultation révèle qu’en plus de la demande déposée officiellement par TotalEnergies pour l’exploitation des champs gaziers de Luiperd et Brulpadda s’ajoute un projet surprise : une nouvelle campagne d’exploration offshore de grande ampleur (3), dénotant la voracité insatiable du géant pétrolier pour les projets climaticides. 

    Nos neuf associations ont écrit à la Première ministre Elisabeth Borne pour demander au gouvernement français de condamner publiquement tous les nouveaux projets fossiles menés par TotalEnergies, de dénoncer les processus antidémocratiques qui accompagnent les projets d’expansion fossiles, et de conditionner l’implication de la France dans des « Partenariats pour une transition énergétique juste » à l’abandon des investissements dans de nouveaux projets fossiles, y compris gaziers en raison de l’entêtement de l’Élysée à présenter le gaz, une énergie strictement fossile, comme une « énergie de transition » dans le cadre du Partenariat établi avec l’Afrique du Sud lors de la COP26 à Glasgow (4).

    Après un été qui a vu les phénomènes climatiques extrêmes se multiplier, alors que la planète enregistre un nouveau record de chaleur pour les mois de septembre et d’octobre, le gouvernement ne peut laisser TotalEnergies instrumentaliser la coupe du monde de rugby et greenwasher ses choix dramatiques pour un monde dont la trajectoire, à l’image du ballon de rugby, ne tourne pourtant déjà plus rond.

    Notes

    1.  BLOOM, The Green Connection, 350.org, Amis de la Terre France, Chilli, Greenpeace France, Mouvement Laudato Si, Notre affaire à Tous et Surfrider Foundation Europe
    2. GIEC (2023), Climate change 2023. Synthesis report, B.5.3 ; AIE (2021) Net Zero by 2050. A roadmap for the global energy sector, chapitre 3.2 ; AIE (2023) Net Zero Roadmap : A Global Pathway to Keep the 1.5°C Goal in Reach, chapitre 2.2.2.
    3. TEEPSA (2023) Environmental and Social Impact Assessment (ESIA) for the offshore production right and environmental autorisation applications for Block 11B/12B. Final Scoping Report. Executive Summary.
    4. Élysée (2022) Partenariats pour une transition énergétique juste en Afrique.
  • CP / Bercy, pas de profits sur le dos des droits humains !

    Une statue gonflable de plus de 10 mètres de haut, représentant la justice poignardée dans le dos, est érigée devant Bercy, pour demander au gouvernement français de cesser de faire primer les profits économiques sur les droits humains et l’environnement : ces derniers mois, le ministère de l’économie a en effet fait pression pour affaiblir le projet de directive européenne sur le devoir de vigilance, notamment en ce qui concerne le secteur financier et les obligations climatiques des entreprises.

    Via cette action, nos associations et syndicats se mobilisent pour sauver l’ambition de cette directive qui pourrait enfin réguler les multinationales et apporter plus de justice aux personnes affectées dans le monde, en leur donnant accès aux tribunaux européens. 

    Paris est la première étape d’un tour d’Europe qu’effectuera la statue dans le cadre de la campagne européenne “Justice is everybody’s business”, dont la majorité de nos organisations sont membres. 

    Le choix du lieu est bien sûr hautement symbolique : les voix des personnes demandant aux décideur.ses politiques de ne pas vider de son sens la directive sur le devoir de vigilance des entreprises s’élèvent devant Bercy, représentation du pouvoir et des décisions économiques. 

    En février 2022 s’ouvrait un moment historique pour lutter contre l’impunité des multinationales, lorsque la Commission Européenne publiait enfin une proposition de directive pour imposer des obligations contraignantes aux entreprises européennes pour prévenir et faire cesser les violations des droits humains et les dommages environnementaux qui se produisent dans leurs chaînes de valeur mondiales.

    Alors que les négociations en trilogue – entre la Commission, le Conseil et le Parlement – ont commencé cet été, ce temps fort de justice est en danger du fait de la position de certains Etats membres dont la France.

    Bien que pionnière avec la loi sur le devoir de vigilance adoptée en 2017, la France fait pression pour affaiblir différents aspects du texte : elle a notamment poussé le Conseil à adopter une exclusion de facto du secteur financier (1), ce qui empêcherait d’autres pays de tenir légalement responsables des banques comme BNP Paribas, qui financent impunément l’expansion des énergies fossiles. La France est également parmi les Etats demandant de rejeter les améliorations apportées au texte par le Parlement européen en termes de renforcement des obligations climatiques et de la responsabilité juridique à y associer.

    La présidence espagnole du Conseil de l’UE sera chargée dans les prochaines semaines de demander aux Etats membres ce qu’ils sont prêts à concéder au Parlement mais aussi leurs lignes rouges. Alors que dans quelques jours les ministres européens de l’économie et des finances se réunissent à Santiago de Compostela, nous nous mobilisons à Paris pour appeler les Etats membres dont la France, à réhausser l’ambition qu’ils portent dans les négociations. 

    A cette occasion, nos organisations publient aujourd’hui un document d’analyse (2) détaillant les failles du projet de directive européenne à la lumière des premières actions en justice fondées sur la loi française sur le devoir de vigilance, et faisant des recommandations aux décideurs pour arbitrer au mieux entre les différentes versions du texte.

    Contacts

    Notes

    1. Voir l’enquête de l’Observatoire des multinationales : “La France a-t-elle torpillé le « devoir de vigilance » européen pour complaire au CAC40 et à BlackRock ?”, 4 juillet 2023
    2. Directive européenne sur le devoir de vigilance et contentieux français – Enseignements et recommandations, septembre 2023
  • CP/ Devoir de vigilance des multinationales : la France ne doit pas bloquer l’adoption d’une directive européenne ambitieuse !

    Paris, le 23 novembre 2022 – Alors qu’un texte de compromis doit être soumis au Conseil le 1er décembre prochain, la France tente de constituer une minorité de blocage sur plusieurs points essentiels de la future Directive sur le devoir de vigilance des multinationales (définition restrictive de la chaîne de valeur, exclusion du secteur financier, etc). Cette position est incompréhensible : pionnière en la matière, la France doit soutenir un texte ambitieux au niveau européen.

    La proposition de Directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises, dévoilée par la Commission européenne en février dernier, était attendue de longue date. Dès sa publication, nos organisations avaient alerté le Conseil et le Parlement des failles de cette proposition, qui en l’état donne la priorité à des mesures cosmétiques qui ont déjà démontré leur inefficacité (insertion de clauses types dans les contrats avec les fournisseurs, recours à des sociétés d’audits, etc.), au lieu de renforcer la responsabilité juridique des entreprises et de faciliter l’accès à la justice pour les personnes affectées. Il est crucial de replacer la protection des droits humains et de l’environnement au centre de la future législation.

    Si Emmanuel Macron avait déclaré vouloir faire de cette Directive l’une des priorités de la Présidence française de l’Union européenne, c’est sous la Présidence tchèque (depuis juillet dernier) que les discussions se sont accélérées au sein du Conseil. Un texte de compromis doit être soumis aux ministres le 1er décembre prochain. Il constituera la position du Conseil en vue des négociations avec la Commission et le Parlement européen, qui devraient débuter à l’été 2023.

    Mais le texte de compromis actuellement discuté au Conseil est insuffisant, voire plus faible que la loi française, sur de nombreux points (1) : seuils d’application , définition restrictive des atteintes à l’environnement et aux droits humains, exclusion des exportations d’armes ou encore la possibilité pour les entreprises de remettre à plus tard la prévention de certaines atteintes.

    Selon les informations récemment divulguées par la presse européenne, au lieu de s’assurer de l’ambition de la future législation sur ces points, la France semble avoir décidé de constituer une minorité de blocage aux côtés de l’Espagne et de l’Italie pour réduire d’autant plus l’étendue du devoir de vigilance. 

    La France chercherait ainsi à exclure toute une partie (dite “aval”) des chaînes de valeur du champ de la Directive. Autrement dit, les entreprises pourraient continuer à confier la distribution de leurs produits à des sous-traitants violant les droits fondamentaux des travailleur·se·s, à fournir leurs biens ou services à des partenaires commerciaux impliqués dans des crimes internationaux, ou encore à fabriquer des produits en connaissance des effets néfastes de leur utilisation sur l’environnement. 

    Le cas de Voltalia, entreprise française interpellée récemment en raison de sa fourniture d’électricité profitant à la junte birmane, ou le cas Amesys, mise en examen pour complicité de torture en Libye, entre 2007 et 2011, pour avoir fourni une technologie de surveillance au régime autoritaire libyen de Mouammar Kadhafi, nous montrent pourtant que ces cas de figure ne sont pas théoriques.

    La France chercherait également à exclure le secteur financier du champ de ces obligations, alors même que BNP Paribas est récemment accusée de financer des entreprises brésiliennes impliquées dans la déforestation de l’Amazonie et a été mise en demeure concernant sa contribution au changement climatique.

    Ce vendredi, une dernière réunion de négociation doit avoir lieu pour valider le texte qui sera soumis au vote du Conseil. Alors que la France était pionnière en matière de responsabilité des entreprises depuis l’adoption de la loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des multinationales, la stratégie qu’elle développe actuellement est non seulement incompréhensible, mais risquerait surtout de porter gravement atteinte à l’effectivité de la future directive. 

    Signataires :

    CONTACTS PRESSE

    NOTES

    (1) Les principales faiblesses du texte actuel sont les suivantes :

    • Les seuils d’application sont calculés au niveau de chaque société, ce qui signifie que de nombreuses sociétés-mères ne seront pas soumises au devoir de vigilance, et que les grands groupes pourront facilement se restructurer pour y échapper.
    • La définition des atteintes à l’environnement y est extrêmement restrictive, excluant de fait la plupart des dommages environnementaux causés par les entreprises. De même pour les droits humains.
    • L’utilisation d’armes, de matériels de guerre, de munitions et de biens à double usage dont l’exportation est autorisée serait exclue du champ du devoir de vigilance.
    • Le texte propose d’autoriser les entreprises à remettre à plus tard la mise en place de mesures de prévention lorsqu’elles entendent prioriser des atteintes plus graves ou plus probables résultant d’autres activités. Résultat : plus une entreprise opère dans un secteur à risque pour les droits humains et l’environnement, plus elle pourra se dédouaner de toute responsabilité concernant des violations qu’elle considère comme moins sévères.
  • Rapport « Vigilance climatique des multinationales » 2022

    Analyse des plans de vigilance climatique 2020 de 27 multinationales françaises

    Mercredi 13 juillet, Notre Affaire à Tous publie le Benchmark 2022 de la vigilance climatique des multinationales, qui passe au crible la conformité de 27 multinationales françaises à leurs obligations légales. L’objet de cette étude est d’évaluer la mise en œuvre de la loi sur le devoir de vigilance en matière climatique. Pour ce faire, des critères de notation ont été développés afin d’évaluer l’action des multinationales.

    Ces critères s’appuient sur :

    • Les bases légales instaurant une responsabilité climatique aux multinationales, notamment l’obligation de vigilance environnementale, la prévention du préjudice écologique ou la loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères.
    • Les objectifs internationaux de l’Accord de Paris.
    • Les données scientifiques du GIEC et de l’Agence Internationale de l’Energie.

    Ces critères constituent une tentative de contribution à un modèle d’évaluation de la conformité du devoir de vigilance en matière climatique.

    À travers le prisme de ces critères, les différentes informations réglementées publiées par les entreprises (des “documents de références” – DDR, document rassemblant le rapport de gestion, la déclaration de performance extra-financière, le plan de vigilance, les comptes consolidés, etc.) sont analysées dans le détail afin d’identifier les nombreuses et persistantes défaillances de 27 multinationales françaises en matière de vigilance climatique. 

    Le Benchmark 2022 porte sur les informations réglementées publiées en 2020 par les entreprises analysées. Notre Affaire à Tous publiera fin 2022-début 2023, son Benchmark 2023 actualisé des informations réglementées publiées par les entreprises en 2021. 

    Rapport Benchmark 2022 de la vigilance climatique des multinationales

    POURQUOI UN RAPPORT SUR LA VIGILANCE CLIMATIQUE DES MULTINATIONALES ?

    Si les pouvoirs publics doivent jouer un rôle fondamental dans la lutte contre le réchauffement climatique, les entreprises partagent aussi cette responsabilité. Très fortement contributrices au réchauffement, les multinationales françaises doivent répondre de leurs actes et accélérer leur transition écologique. Ainsi, Notre Affaire à Tous cherche à remédier au vide juridique concernant la non-application de l’Accord de Paris aux entreprises en s’appuyant notamment sur la loi relative au devoir de vigilance.

    L’objectif final de ce benchmark est de renforcer l’application de la loi sur le devoir de vigilance et de montrer son utilité en matière de lutte contre le dérèglement climatique. 

    SYNTHESE DES RESULTATS

    Aucune entreprise analysée n’est en mesure de démontrer sa conformité avec l’ensemble des obligations et des mesures de vigilance raisonnables nécessaires pour faire de la transition écologique une réalité.

    Jérémie Suissa, Délégué général de Notre Affaire à Tous : “Comme l’a rappelé le Haut Conseil pour le Climat dans son dernier rapport, les impacts de la crise du Vivant sont d’ores et déjà visibles en France et les conséquences quotidiennes et imprévisibles. Et nous ne sommes pas prêts. Si l’Etat doit être le pilote de la transition nécessaire à laquelle la France s’est engagée, les entreprises doivent aussi prendre leur part. Or, une majorité des entreprises que nous avons analysées ne montrent pas de signes de changements structurels. Il est urgent de mettre en œuvre des outils de contrainte proportionnés à l’ampleur des manquements de ces acteurs clés pour la transition.” 

    Alors que l’empreinte carbone cumulée des 27 multinationales évaluées s’élève à 1 651,60  millions de tonnes équivalent CO², soit près de 4 fois le total des émissions territoriales de la France en 2020 (396 Mt CO²), on observe majoritairement :

    • de nombreuses défaillances persistantes en termes d’identification des émissions indirectes, en particulier celles dites du “scope 3” (critère 1-A de la méthodologie) ;
    • une absence générale de reconnaissance de responsabilité, alors qu’il est indiscutable que chacun.e doit faire sa part en matière climatique (critère 1-B) ;
    • de nombreux engagements demeurent non-alignés avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de paris et/ou ne portent pas sur l’ensemble des émissions des entreprises (critère 2-A) ; 
    • des carences sérieuses dans la mise en œuvre  de ces engagements (critère 2-B). 
    • certains plans de vigilance n’intègrent toujours pas suffisamment le climat (critère 3).

    L’absence de conformité avec ces critères expose les entreprises au risque contentieux. La justice, dans les contentieux en cours contre Total et Casino, ainsi que dans d’autres potentiels dossiers de vigilance climatique que Notre Affaire à Tous étudie actuellement, aura un rôle déterminant à jouer sur de nombreux dossiers. 

    Au-delà de la France, les institutions européennes et membres du Parlement Européen joueront également un rôle clé, dans le cadre des travaux en cours sur le projet de directive sur le devoir de vigilance uniformisée au sein de l’Union. Ce texte est depuis le début vivement attaqué par les lobbys des grands secteurs polluants, qui multiplient en parallèle les campagnes de greenwashing auprès de leurs salariés et clients. 

    Découvrez nos actions contentieuses contre des multinationales.

    ZOOM SUR LES MULTINATIONALES LES PLUS PREOCCUPANTES

    Société Générale, Auchan, Casino, Eiffage, Bolloré, Total Energies, Bouygues et BNP Paribas se situent tout en bas de notre classement, en raison de politiques climatiques particulièrement insuffisantes.

    Les scores de ces 8 multinationales sont très préoccupants. Une entreprise qui publierait  correctement les scopes 1, 2 et 3 d’émissions et prévoirait une stratégie climat dans le plan de vigilance (des mesures de pur reporting, hors analyse des risques, politiques et mesures d’action),  obtiendrait déjà 25 points. Aucune de ces 8 entreprises ne dépasse 33 points.

    LES ENSEIGNEMENTS CLÉS DU RAPPORT

    1- MANQUE D’INTÉGRATION DU CLIMAT AU PLAN DE VIGILANCE

    3 entreprises sur 27 n’intègrent toujours pas le climat à leur plan de vigilance. Pourtant, l’analyse du risque climat au sein du plan de vigilance devrait être faite de manière systématique, en particulier pour les entreprises fortement contributrices au réchauffement climatique. En effet, la science climatique est extrêmement claire : les différents rapports du GIEC démontrent que l’aggravation du changement climatique comporte des risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement, en particulier au-delà de 1,5°C. Le risque climatique doit donc être intégré dans le plan de vigilance de chaque entreprise. Si 24 entreprises intègrent désormais le climat dans leur plan de vigilance, plus de la moitié (14) d’entre elles ne le font que très partiellement.

    2- EMPREINTE CARBONE ET COMMUNICATION INCOMPLÈTE

    Les entreprises analysées dans le benchmark ont toutes un lourd impact climatique : selon leurs propres communications, l’empreinte carbone cumulée des vingt-sept multinationales analysées s’élève à 1652 Mt CO²e, soit plus de quatre fois les émissions territoriales de la France. Une baisse de l’empreinte carbone cumulée peut être observée pour 2020, mais elle ne pourrait être que conjoncturelle (Covid-19). Par ailleurs, l’impact climatique des entreprises reste encore très insuffisamment retracé. Dix-huit des entreprises sur 27 ne publient pas ou de manière très incomplète leur empreinte carbone.

    3- UNE RECONNAISSANCE LIMITÉE DU RISQUE CLIMATIQUE

    La loi sur le devoir de vigilance exigeant une identification des risques pesant sur les droits humains et sur l’environnement, chaque entreprise doit explicitement reconnaître les conséquences de ses émissions de GES et de sa contribution au changement climatique.

    Pourtant, seules 4 entreprises analysées reconnaissent explicitement leur contribution au changement climatique et analysent correctement les conséquences de ce dérèglement sur les droits humains et l’environnement. Une réelle prise de conscience demeure donc nécessaire afin de saisir l’ampleur de leur responsabilité et de mettre en œuvre les mesures adéquates pour lutter contre le changement climatique.

    4- DES ENGAGEMENTS PEU PRÉCIS ET RAREMENT AMBITIEUX

    Pour prévenir les risques graves d’atteinte aux droits humains et à l’environnement, les entreprises doivent adopter une stratégie efficace et cohérente avec l’Accord de Paris. Pour ce faire, les engagements pris doivent être chiffrés et détaillés en plusieurs étapes avec des objectifs intermédiaires précisés à l’horizon 2030, 2050 et au-delà.

    La trajectoire 1,5°C (visant la neutralité carbone en 2050) est la seule trajectoire permettant de réaliser les objectifs de l’Accord de Paris avec une probabilité raisonnable (voir infra – méthodologie). Seule 1 entreprise sur 27 s’engage sur la trajectoire 1,5°C pour l’ensemble de ses émissions et avec une trajectoire chiffrée dans le temps.

    5- L’ABSENCE MISE EN OEUVRE DE MESURES COHÉRENTES

    La loi sur le devoir de vigilance oblige les entreprises à rendre compte publiquement de la mise en œuvre effective des mesures adaptées de prévention contre les risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement. Autrement dit, les entreprises doivent communiquer les mesures adoptées pour limiter le réchauffement planétaire en-deçà des 2°C, limite au-delà de laquelle le dérèglement climatique est extrêmement dangereux pour nos écosystèmes.

    Les mesures présentées concernent rarement l’ensemble des activités émettrices des groupes et nombre d’entre elles sont basées sur des technologies indisponibles à l’heure actuelle, telles que les technologies de capture et de séquestration du carbone. Par ailleurs, le maintien de certaines activités (par ex. hydrocarbures non conventionnels) ou l’absence de plan de transition pour certains produits (par ex. voitures thermiques) remettent fréquemment en question la cohérence de la stratégie communiquée par l’entreprise. Enfin, aucune entreprise ne publie des informations suffisamment précises pour qu’un observateur extérieur puisse évaluer la mise en œuvre des mesures annoncées.

    En somme, toutes les entreprises font face à un risque de non-conformité avec la loi sur le devoir de vigilance. Si elles ne se conforment pas à ces demandes, les multinationales pourront être attaquées en justice.

    Découvrez les enseignements secteur par secteur.

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