Catégorie : Communiqué de presse

  • Loi PFAS : Victoire importante à l’Assemblée Nationale sur les polluants éternels

    Communiqué de presse de Notre Affaire à Tous, 04 avril 2024 – Depuis bientôt deux ans, le sujet des polluants éternels (PFAS) s’impose dans le débat public et politique comme un sujet de santé publique et environnementale majeur, avec plus de vingt ans de retard sur les États-Unis. Citoyen.ne.s, médias, personnalités politiques et collectivités de tous bords se sont emparés du problème pour tenter d’y apporter des réponses. Une proposition de loi vient d’être votée ce jeudi 4 avril, en dépit des amendements promus par lobbies industriels et repris par la majorité et l’extrême-droite.

    Il était impératif que la production et l’utilisation des PFAS fassent au plus vite l’objet d’un premier encadrement législatif protecteur de la santé et de l’environnement. La proposition de loi adoptée prévoit l’interdiction de fabrication, importation, exportation et mise sur le marché pour certains produits non essentiels dès 2026 (cosmétiques, fart, certains textiles) et tous les produits textiles à partir de 2030. Elle propose un contrôle sanitaire des eaux potables avant 2026 et pour davantage de molécules que celles prévues par les dispositions européennes. Enfin, cette proposition suggère la mise en place d’une redevance financière versée aux agences de l’eau pour que les pollueurs participent au traitement et à la surveillance des eaux, de l’air et des sols. Notre Affaire à Tous déplore que les ustensiles de cuisine aient été sortis du périmètre de la proposition de loi, alors même qu’ils ne font pas partie des usages essentiels et que des alternatives existent. Il s’agit d’une nouvelle victoire des lobbies, Tefal en tête, appuyés par les députés de la majorité, de la droite et de l’extrême-droite.

    Pour rappel, les PFAS, substances chimiques toxiques utilisées pour la fabrication de nombreux produits du quotidien, sont à l’origine d’une contamination sans précédent de l’eau, des sols, de l’air, et se retrouvent dans de nombreux aliments et jusqu’au lait maternel. Au total, ils se retrouvent dans près de 100% du sang des Français.e.s. Les coûts induits par ces substances chimiques, des frais de santé aux coûts potentiels de dépollution, sont estimés à 16 000 000 000 000 d’euros par an au niveau mondial (1). Pour la France on estime ce coût potentiel à 2 274 milliard d’euros par an (2).

    Les PFAS constituent ainsi un enjeu de santé environnementale publique majeur, sur lequel Notre Affaire à Tous agit depuis près de deux ans, à travers l’engagement de son groupe local lyonnais. L’association s’est investie depuis 2022 sur le territoire en organisant plusieurs ateliers écocitoyens afin de remettre les citoyen.ne.s au cœur de la connaissance et de la gouvernance des pollutions industrielles. Parallèlement, Notre Affaire à Tous – Lyon s’est engagée dans une démarche judiciaire en portant un référé collectif porté dans la Vallée de la chimie contre Arkema, une des principales entreprises productrices de PFAS. A travers ce recours, Notre Affaire à Tous et les 56 co-requérants du référé (agriculteurs locaux, syndicats, mères de famille et victimes malades de la pollution, associations de riverains…) souhaitent faire appliquer le principe pollueur-payeur et établir les preuves de la contamination dans le plus grand hotspot français, aux frais de l’entreprise.

    Si les industries émettrices sont les premières responsables de la production et de la pollution aux PFAS, elles continuent à bénéficier d’un “droit à polluer” face à l’absence de volonté de l’Etat d’adopter un encadrement à la hauteur des enjeux. Aussi, Notre Affaire à Tous reste inquiète de la réticence de l’État et des député.e.s de la majorité de soutenir des mesures de protection et de réglementation réellement ambitieuses contre les PFAS, qui s’annoncent comme le nouveau scandale sanitaire et environnemental, après le chlordécone ou l’amiante. 

    Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous : “c’est un premier pas important, mais encore une fois les lobbies industriels ont réussi à convaincre le gouvernement avec des mensonges et du chantage à l’emploi. Les alternatives existent, ce qu’il manque aux industriels français c’est une volonté sincère d’adapter leurs modèles de production aux enjeux sanitaires et environnementaux. L’État a l’obligation de protéger ses citoyen.ne.s : il engage sa responsabilité en refusant de le faire pleinement”. 

    Le vote de ce jeudi 4 avril était une étape essentielle mais reste pour l’instant une victoire en demi-teinte pour le principe de précaution et la protection de la santé et de l’environnement. Sans une volonté politique affirmée de l’État de lutter contre ces polluants éternels, il est à craindre que le texte ne soit encore amoindri voire mis en danger dans la suite du processus législatif puis dans sa mise en œuvre effective par le gouvernement. Notre Affaire à Tous et les acteurs de la société civile resteront mobilisés et particulièrement attentifs à l’attitude de la France lors des négociations européennes à venir sur la régulation des PFAS. 

    Notes

    (1) T. Perkins. « Societal cost of ‘forever chemicals’ about $17.5tn across global economy – report », The Guardian, 12 mai 2023.
    URL : https://www.theguardian.com/environment/2023/may/12/pfas-forever-chemicals-societal-cost-new-report

    (2) G. Goldenman et al. « The cost of inaction. A socioeconomic analysis of environmental and health impacts linked to exposure to PFAS », Conseil Nordique des Ministres, 17 mars 2019. 

    Contact presse

    Emma Feyeux, Présidente de Notre Affaire à Tous – Lyon : emma.feyeux@notreaffaireatous.org

  • Zéro artificialisation nette des sols : L’Etat porte un nouveau coup au ZAN, Notre Affaire à Tous attaque la circulaire du 31 janvier 2024 devant le Conseil d’État

    Communiqué de presse, Paris, le 4 avril 2024 – Mesure plébiscitée par la Convention Citoyenne pour le Climat, la limitation de l’artificialisation des terres est un enjeu environnemental identifié par les pouvoirs publics depuis des décennies. Logements sociaux, terres agricoles, centres commerciaux, étalement urbain, parkings géants, reforestation : les discussions autour du ZAN incarnent les grands choix d’organisation du territoire que nous ferons dans les années à venir, face à des enjeux environnementaux et climatiques historiques.

    Afin d’y répondre, le législateur a inscrit l’objet de zéro artificialisation nette des sols (ZAN) (1) en 2050 dans la loi Climat et résilience (2). Dans le but d’accompagner la réalisation progressive de cet objectif, la loi prévoit également d’atteindre, d’ici 2031, une réduction de moitié du rythme d’artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers à l’échelle nationale par rapport aux dix années précédentes (comparaison des périodes 2011-2021 et 2021-2031).

    Cependant, malgré cet objectif affiché et en réponse aux oppositions, notamment des acteurs locaux, le gouvernement s’est par la suite attelé à diminuer drastiquement l’effectivité juridique de cet objectif, en réduisant notamment la force contraignante des outils juridiques visant à ce qu’il soit atteint.

    C’est dans ce contexte que le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a signé, le 31 janvier 2024, une circulaire relative à la mise en oeuvre du ZAN. Ce texte prévoit notamment que les préfets peuvent permettre aux collectivités territoriales de dépasser de 20 % les objectifs de réduction de l’artificialisation prévus dans le document d’urbanisme directement supérieur.

    Dès lors, cette circulaire marque de nouveau un renoncement des services de l’État à s’assurer de l’effectivité juridique de l’objectif de zéro artificialisation nette des sols.

    C’est la raison pour laquelle Notre Affaire à Tous a décidé de contester la légalité de cette circulaire devant le Conseil d’État.

    Notre action vise à obtenir l’annulation de la marge des 20 % prévue par cette circulaire, afin de contraindre les collectivités territoriales à s’inscrire dans le cadre fixé par la loi et dès lors de rendre effectifs les outils juridiques de lutte contre cette artificialisation.

    Le guide juridique de Notre Affaire à Tous sur la lutte contre l’artificialisation des sols est toujours consultable ici.

    Notes

    (1) L’artificialisation nette désigne le solde entre l’artificialisation et la renaturation.

    (2)  Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

    Contact presse

    Adeline Paradeise, juriste en droit de l’environnement : adeline.paradeise@notreaffaireatous.org 

  • Plainte de la Métrople de Lyon contre Arkema et Daikin : Notre Affaire A Tous salue un nouveau front dans la lutte contre les polluants éternels (PFAS)

    Communiqué de presse, le 20 mars 2024 – Nous saluons la décision de la Métropole de Lyon d’assigner Arkema et Daikin devant le tribunal judiciaire afin d’identifier la responsabilité éventuelle des deux industriels dans la pollution aux PFAS. Dans la vallée lyonnaise, ce sont plus de 250 000 personnes qui seraient concernées par ce scandale sanitaire et environnemental, tandis que les PFAS se retrouvent dans 100% du sang des Français.e.s. La Vallée de la chimie constitue au niveau mondial l’un des sites les plus extrêmes en matière de pollution aux PFAS. Nous espérons que cette procédure civile permettra d’établir la source, la durée et l’ampleur de la contamination aux polluants éternels, engendrée par leur activité industrielle dans la Vallée de la Chimie. Le recours à une procédure d’urgence, le référé, démontre l’importance de prendre des mesures au plus vite, au regard de l’ampleur des enjeux sanitaires et environnementaux que représente la production chimique de PFAS dans le sud de la Métropole de Lyon.

    Ce recours intervient alors que, le 25 mai 2023, après un an de mobilisation des riverains et associations, Notre Affaire à Tous, ainsi que 9 associations et syndicats et 37 victimes avaient déposé un référé pour demander la limitation des rejets de PFAS dans l’eau par ARKEMA FRANCE et une étude des risques sanitaires visant à évaluer l’ampleur de la contamination. Le 15 janvier 2024, la Cour d’appel de Lyon a rejeté la requête sans se pencher sur le fond de l’affaire, en considérant que les victimes n’avaient pas le droit de faire appel, niant leur droit à un recours effectif. Alors que le ministère public avait rendu des conclusions partiellement favorables, cette décision envoyait un signal très négatif à toutes les victimes des PFAS. La Cour de Cassation a donc été saisie. Nous espérons que cette nouvelle requête initiée par la Métropole de Lyon poussera l’institution judiciaire à mieux garantir l’effectivité du droit de l’environnement et la protection de la santé publique.

    Dans la lignée des enquêtes journalistiques, des mobilisations citoyennes et des contentieux déjà en cours, cette démarche juridique initiée par la Métropole de Lyon répond à des objectifs politiques que nous soutenons, tels que l’application du principe pollueur-payeur. A l’issue de nos travaux avec les citoyens mais aussi avec des scientifiques et experts, nous appelons également à compléter ces actions par la création d’un Institut Eco-citoyen dans la région lyonnaise. Pour appréhender ces risques industriels et ces enjeux environnementaux et de santé il est impératif de créer un cadre de dialogue régulier avec l’ensemble des acteurs : collectivités, scientifiques, associations, industriels.  A cet égard, nous saluons très positivement l’essor de nombreux Instituts Eco-Citoyens en France, à l’image de l’institut de Fos sur Mer, et espérons qu’un réseau de vigilance des risques industriels similaire pourra réunir prochainement les acteurs du territoires lyonnais souhaitant mettre un terme à la catastrophe sanitaire et environnementale en cours.

    Contact presse

    Emma Feyeux, emma.feyeux@notreaffaireatous.org

  • Mobilisation devant une enseigne Naturalia à Paris pour dénoncer les pratiques liées à la déforestation du groupe Casino en Amérique du Sud

    Mobilisation devant une enseigne Naturalia à Paris pour dénoncer les pratiques liées à la déforestation du groupe Casino en Amérique du Sud

    Communiqué de presse, Paris, le 18 mars 2024 – Ce samedi 16 mars, une mobilisation citoyenne a eu lieu entre 11h et 12h devant un magasin Naturalia à Paris, une enseigne du groupe Casino. Les représentant·e·s de peuples autochtones brésiliens Dinamam Tuxá, avocat et coordinateur exécutif de l’APIB et Eliane Bakairi, présidente de la FEPOIMT, ont pu dénoncer la déforestation et l’accaparement des terres en Amérique du Sud. Cette action a été organisée par les associations Envol Vert, Mighty Earth et Notre Affaire à Tous.

    Le 3 mars 2021, une coalition d’organisations représentatives des peuples autochtones brésiliennes et colombiennes (COIAB, FEFIPA, FEPOIMT et OPIAC) et d’associations internationales (Canopée, CPT, Envol Vert, FNE, Mighty Earth, Notre Affaire à Tous et Sherpa) ont assigné Casino en justice pour manquement à son devoir de vigilance. Elles reprochent à la chaîne de supermarchés de n’avoir pas pris les mesures nécessaires pour exclure la viande bovine liée à la déforestation et à l’accaparement de territoires autochtones de sa chaîne d’approvisionnement au Brésil et en Colombie.

    Casino, Naturalia et la déforestation

    Le groupe Casino possède en France les magasins Naturalia, enseigne de distribution spécialisée dans les produits issus de l’agriculture biologique et du commerce équitable. Leur objectif est de séduire une clientèle sensible aux enjeux environnementaux et soucieux d’avoir une consommation responsable. Des valeurs pourtant bien éloignées des activités reprochées au groupe Casino en Amérique du Sud dans de nombreux rapports. Le dernier en date, réalisé par InfoAmazonia, estime que la chaîne d’approvisionnement du groupe français a causé des dommages matériels estimés à 54,3 millions d’euros sur le seul territoire autochtone Uru-Eu-Wau-Wau. Un résultat qui ne refléterait qu’une infime partie de l’impact du groupe Casino et de ses chaînes d’approvisionnement dans ses activités passées.

    L’APIB et FEPOIMT à Paris pour défendre leurs droits 

    Les représentant·e·s de peuples autochtones Dinamam Tuxá et Eliane Xunakalo se sont déplacé·e·s à Paris afin d’alerter sur les violations de leurs droits causées par des entreprises françaises. Parmi les nombreuses rencontres organisées avec des associations et responsables politiques au cours de ce voyage, notamment au Sénat et au ministère de l’Écologie, iels ont également souhaité s’exprimer directement aux citoyen·ne·s français·se·s lors de cette mobilisation. Ce samedi 16 mars, Eliane Xunakalo a pu décrire les effets de la déforestation sur les peuples autochtones en déclarant que « nous devons examiner et repenser le mode de production qui détruit nos vies ».

    Les prochaines étapes du procès

    Alors que le groupe Casino a été assigné en justice il y a trois ans, le procès se cantonne pour l’heure aux questions de procédure. Une prochaine audience dématérialisée est prévue le 21 mars 2024 au cours de laquelle la coalition espère obtenir une première date de plaidoirie afin de conclure cette première étape de l’assignation. Suite à cela, les questions de fond, notamment les demandes au groupe Casino et les revendications des peuples autochtones pourront enfin être entendues par la justice française.

    Contacts presse

    Envol Vert : Baptiste Vicard, chargé de plaidoyer – b.vicard@envol-vert.org

    Notre Affaire à Tous : Vincent Bezaguet, chargé de campagne – vincent.bezaguet@notreaffaireatous.org

  • Devoir de vigilance européen : les États membres adoptent un texte ressuscité grâce à la mobilisation, mais affaibli par les lobbies

    Devoir de vigilance européen : les États membres adoptent un texte ressuscité grâce à la mobilisation, mais affaibli par les lobbies

    Communiqué de presse, 15 mars 2024 – Les États membres de l’Union européenne ont finalement trouvé un accord pour établir un devoir de vigilance européen pour les entreprises. En dépit de concessions importantes aux lobbies, cet accord politique ouvre la voie à l’adoption d’une législation européenne protégeant les droits humains, l’environnement et le climat.

    En décembre 2023, les États membres et le Parlement européen avaient trouvé un accord sur le devoir de vigilance des entreprises et la directive était prête à être adoptée. Las, l’Allemagne trahissait ensuite son engagement et annonçait son abstention sur le texte, avant que l’Italie et la France, par diverses manœuvres, ne viennent davantage menacer l’adoption du texte au Conseil de l’Union européenne.

    Alors que la France s’était engagée à soutenir cette Directive, elle avait finalement demandé de remonter significativement les seuils d’application, au dernier instant et en prenant de court tous ses interlocuteurs. Loin d’explorer des « voies de compromis » entre États membres, le décalage entre les déclarations publiques du gouvernement et sa position dans les négociations mettait en danger l’adoption du texte.

    Si l’accord trouvé aujourd’hui doit être salué, plusieurs modifications opérées au dernier instant pour satisfaire les Etats-membres récalcitrants sont néanmoins à déplorer.

    Par exemple, la directive prévoyait initialement d’assujettir les entreprises de plus de 500 salariés et disposant d’un chiffre d’affaires de 150 millions d’euros au devoir de vigilance. Désormais, le champ d’application est plus restreint : seront seules concernées les entreprises de plus de 1 000 salariés et comptant un chiffre d’affaires de 450 millions d’euros, soit une réduction des deux tiers du nombre d’entreprises couvertes. 

    Un tel remaniement du texte pour satisfaire les exigences de quelques États membres (dont la France) après l’aboutissement des trilogues, est un coup dur porté aux institutions européennes, à la veille des élections de juin prochain.

    Ce vote, qui n’est qu’un premier pas dans la bonne direction, démontre que rien n’est jamais acquis en matière de protection des droits humains et de l’environnement.

    Le texte validé aujourd’hui par les États membres au Conseil doit encore être voté au Parlement européen avant son adoption finale.

    Signataires

    Contacts presse

    Sherpa : Lucie Chatelain – Responsable contentieux et plaidoyer, lucie.chatelain@asso-sherpa.org

    Amis de la Terre France : Marcellin Jehl – Chargé de contentieux et plaidoyer, marcellin.jehl@amisdelaterre.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll – Responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    CCFD-Terre Solidaire : Sophie Rebours – Responsable relations médias, s.rebours@ccfd-terresolidaire.org

  • Devoir de vigilance européen : l’heure de vérité pour la France !

    Communiqué de presse, Paris, 11 mars 2024 – En fin d’année dernière, les institutions européennes parvenaient à un accord historique pour établir un devoir de vigilance pour les entreprises en matière de droits humains, d’environnement et de climat. Aujourd’hui, l’adoption de cette directive par le Conseil de l’Union européenne est entravée par la volte-face de plusieurs États membres et l’absence de soutien clair de la France en ce moment pourtant décisif.

    Plusieurs années de négociations, un soutien massif des citoyennes et citoyens et un compromis finalement trouvé en décembre dernier entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen : tout cela pourrait n’avoir servi à rien, et la directive sur le devoir de vigilance des entreprises ne jamais voir le jour.

    Plusieurs États membres, dont l’Allemagne et l’Italie, ont en effet torpillé le processus, en retirant leur soutien après l’accord trouvé en trilogues.

    Ajoutant à la confusion, la France entretient un double discours inacceptable, affirmant approuver le texte ou « chercher des voies de compromis » à qui veut l’entendre, mais s’abstenant de le soutenir au Conseil, alors que chaque vote compte et peut faire basculer la position d’autres États hésitants.

    Alors que plusieurs États membres, dont l’Espagne et les Pays-Bas, prennent régulièrement position en faveur du texte et tentent de rallier leurs partenaires, la France reste obstinément muette et choisit l’ambiguïté, comme le 28 février 2024, quand la majorité qualifiée nécessaire à l’adoption de la directive n’a pas été atteinte.

    Pire, la France a profité de la situation pour imposer la remontée des seuils d’application (réduisant drastiquement le nombre d’entreprises couvertes), forçant la Présidence belge du Conseil à rouvrir des négociations sur un texte déjà considérablement affaibli par l’influence des lobbys. La stratégie française fragilise l’équilibre général du texte, met en péril son adoption, et compromet le processus démocratique et législatif européen.

    Le Président de la République, Emmanuel Macron, avait pourtant appelé cette directive de ses vœux lors de la Présidence française du Conseil, et l’accord trouvé en décembre avait été salué par la majorité présidentielle.

    Alors que les États doivent se prononcer sur ce texte cette semaine lors d’une réunion du Conseil, nos organisations appellent fermement la France à dire publiquement et sans équivoque qu’elle est en faveur de cette directive. Nous exhortons aussi le gouvernement français à engager l’ensemble de ses partenaires européens, dont l’Italie, à faire de même.

    L’heure est venue pour la France de se montrer à la hauteur de ses engagements européens, d’être cohérente avec son propre engagement en faveur du devoir de vigilance, initié par la loi française de 2017, et de ne pas manquer cette occasion historique pour la protection des droits humains, de l’environnement et du climat.

    Signataires

    Contacts presse

    Sherpa : Lucie Chatelain – Responsable contentieux et plaidoyer, lucie.chatelain@asso-sherpa.org

    Amis de la Terre France : Juliette Renaud – Coordinatrice, juliette.renaud@amisdelaterre.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll – Responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    FIDH (Fédération internationale pour les droits humains) : Gaelle Dusepulchre – Deputy Director – Business, Human Rights and Environment, gdusepulchre@fidh.org

    Oxfam France : Stanislas Hannoun – Responsable campagnes Inégalité, shannoun@oxfamfrance.org

    CCFD-Terre Solidaire : Sophie Rebours – Responsable relations médias, s.rebours@ccfd-terresolidaire.org

  • Procès climatique contre TotalEnergies : audience décisive devant la cour d’appel 

    Procès climatique contre TotalEnergies : audience décisive devant la cour d’appel 

    Communiqué de presse, Paris, le 4 mars Dans le contentieux climatique porté par 6 associations et 15 collectivités territoriales contre TotalEnergies, une audience cruciale se tiendra demain devant la cour d’appel de Paris. Alors que le tribunal judiciaire de Paris a jugé l’action irrecevable, l’affaire sera examinée conjointement aux dossiers EDF/Mexique et Suez/Chili, par une nouvelle chambre de la cour d’appel spécialement créée pour les contentieux relatifs au devoir de vigilance des multinationales. 

    En janvier 2020, une coalition d’associations et de collectivités (1) a assigné TotalEnergies en justice. Rejointe en septembre 2022 par trois villes supplémentaires et Amnesty International France, la coalition demande que la pétrolière soit contrainte de prendre les mesures nécessaires pour s’aligner avec l’objectif 1,5°C de l’Accord de Paris, conformément à la loi sur le devoir de vigilance (2).

    Une audience à forts enjeux pour le devoir de vigilance

    Le 6 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a déclaré l’action judiciaire irrecevable selon une interprétation contestée et inquiétante de la loi sur le devoir de vigilance. Déterminées à contraindre la major pétro-gazière française à respecter ses obligations en matière climatique, les associations et collectivités de la coalition ont interjeté appel de cette décision.

    L’affaire est appelée à l’audience du 5 mars devant la cour d’appel de Paris. Signe de l’importance des enjeux pour la juridiction, l’affaire sera examinée par une nouvelle chambre créée spécialement pour juger en appel des affaires relatives au devoir de vigilance et à la responsabilité environnementale des entreprises. L’audience portera également sur les affaires Suez/Chili et EDF/Mexique, elles aussi déclarées irrecevables pour des motifs procéduraux controversés. 

    Une coalition déterminée face à l’urgence climatique

    La cour d’appel doit se prononcer sur la recevabilité de l’action, préalable indispensable avant une décision sur le fond. Cette décision, très attendue compte tenu de l’urgence climatique, intervient après la condamnation de Shell aux Pays-Bas, une affaire historique qui avait déjà souligné l’importance des mécanismes judiciaires pour contraindre les multinationales à réduire leurs émissions de GES.

    Le tribunal judiciaire de Paris a considéré que TotalEnergies n’aurait pas été régulièrement mis en demeure, prétextant un manque de dialogue avec l’entreprise. La loi sur le devoir de vigilance n’impose pourtant aucune phase de « discussion » ou de « conciliation » obligatoire entre les entreprises et les associations, ou personnes affectées, avant la saisine de la justice. En outre, le premier juge n’a pas pris en compte les différents échanges préalables intervenus entre la coalition et les dirigeants de l’entreprise avant la mise en demeure. 

    L’appel concerne également l’intérêt à agir des collectivités territoriales, dont l’action a été jugée irrecevable par le tribunal judiciaire, alors qu’elles sont aujourd’hui en première ligne face aux nombreux enjeux d’adaptation et d’atténuation des impacts du changement climatique.

    L’appel soulève également la question de l’impartialité de cette décision d’irrecevabilité, à la suite de la publication d’informations concernant de possibles liens familiaux entre le juge de la mise en état et un haut cadre de TotalEnergies.

    La coalition reste pleinement mobilisée afin que l’impact des activités de TotalEnergies sur le dérèglement climatique puisse enfin être jugé. La date de rendu de la décision devrait être annoncée à l’issue de de l’audience. 

    Notes

    (1) Sherpa, Amnesty International France, France Nature Environnement, Notre Affaire à Tous, ZEA, les Eco Maires et les villes de Paris, New York, Arcueil, Bayonne, Bègles, Bize-Minervois, Centre Val de Loire, Champneuville, Correns, Est-Ensemble Grand Paris, Grenoble, La Possession, Mouans-Sartoux, Nanterre, Sevran et Vitry-le-François.

    (2) Loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordres. L’action judiciaire se fonde également sur la prévention des dommages à l’environnement (art. 1252 Code civil).

    Signataires

    Sherpa, Notre Affaire à tous, Ville d’Arcueil, Vitry-le-François, Nanterre, Sevran, La Possession, Grenoble, Poitiers, Eco Maires, Amnesty International France, France Nature Environnement

    Contacts presse

    Sherpa – Théa Bounfour, chargée de contentieux et de plaidoyer, thea.bounfour@asso-sherpa.org
    Notre Affaire à Tous – Justine Ripoll, responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.org

  • Directive sur le devoir de vigilance des entreprises : les États européens ne doivent pas faire volte-face !

    Paris, le 27 février 2024, Membres du Forum citoyen pour la RSE – En décembre dernier, les États membres et le Parlement européen sont parvenus à un accord essentiel sur la future Directive sur le devoir de vigilance des entreprises. Mais ce compromis est aujourd’hui en danger : sous la pression des lobbies, plusieurs États membres, dont l’Allemagne, menacent de bloquer le texte lors du vote du Conseil de l’Union européenne qui doit avoir lieu demain.

    Presque 4 ans après l’annonce de cette proposition de directive par la Commission européenne, et après l’aboutissement des trilogues en décembre, le vote prévu au Conseil pour valider le texte avant son adoption au Parlement ne devait être qu’une formalité.

    Cette formalité est néanmoins devenue une véritable épée de Damoclès, rendant incertaine l’adoption définitive de la directive en raison de divergences au sein du gouvernement allemand, qui pourraient conduire le pays à s’abstenir lors de ce vote. La position des autres États-membres serait, dans une telle hypothèse, décisive.

    S’il a été largement affaibli sous la pression des lobbies, ce texte constitue cependant une avancée majeure pour la régulation des entreprises multinationales dans de nombreux Etats membres. Il est donc crucial que la France le soutienne pleinement et que le gouvernement se mobilise maintenant au plus haut niveau pour intervenir auprès de l’ensemble de ses partenaires européens pour parvenir à son adoption.

    Pour rappel, cette directive avait été appelée de ses vœux en 2022 par Emmanuel Macron, après une résolution adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale. L’accord trouvé en décembre 2023 a été célébré par la majorité présidentielle et le Ministre des affaires étrangères, Stéphane Séjourné, s’est récemment engagé auprès des députés français à le faire aboutir en l’état.

    Alors qu’un compromis a été trouvé, échouer à ce stade, à la veille des élections européennes, rendrait l’avenir de ce texte très incertain. Ce serait un désastre pour la démocratie européenne, pour les personnes et communautés affectées par les activités des multinationales, et pour la planète.

    Contacts

    Sherpa : Lucie Chatelain, Responsable contentieux et plaidoyer, lucie.chatelain@asso-sherpa.org

    ActionAid France : Maelys Orellana, Chargée de campagne, maelys.orellana@actionaid.org

    CCFD-Terre Solidaire : Clara Alibert, Chargée de plaidoyer, c.alibert@ccfd-terresolidaire.org

    Reclaim Finance : Olivier Guérin, EU Advocacy Officer, olivier@reclaimfinance.org

    Oxfam France : Léa Guerin, Chargée de plaidoyer, lguerin@oxfamfrance.org

    Amis de la Terre France : Juliette Renaud, Coordinatrice, juliette.renaud@amisdelaterre.org

    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll, Responsable de campagnes, justine.ripoll@notreaffaireatous.com

    Notes

    • Annoncée par le Commissaire européen à la justice Didier Reynders dès avril 2020, la proposition de Directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité a été publiée par la Commission en février 2022.
    • Le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen ont adopté leur position respective sur le texte en décembre 2022 et juin 2023, après quoi les négociations entre les trois institutions européennes (appelées “trilogues”) se sont engagées. Un accord politique a été trouvé le 14 décembre 2023.
    • La France étant dotée depuis 2017 d’une loi sur le devoir de vigilance, le gouvernement français s’est dit favorable à l’adoption d’une directive dès le début du processus. Il s’est cependant employé à affaiblir le texte proposé par la Commission sur plusieurs points, y compris l’inclusion des services financiers et de l’aval de la chaîne de valeur.
    • Ces dernières semaines, en dépit du soutien massif des citoyen·nes en faveur du texte et de l’accord politique trouvé en décembre, plusieurs lobbies (y compris le MEDEF et la CPME) ont à nouveau cherché à faire dérailler le processus.
  • L’Affaire du Siècle saisit le Conseil d’État pour contrer un jugement inquiétant pour l’avenir de la justice climatique 

    Affaire du Siècle, communiqué de presse, 22 février 2024 – Le jugement du tribunal administratif de décembre 2023 donne raison aux associations de l’Affaire du Siècle. Et pourtant, le tribunal se refuse à mobiliser tous les outils à sa disposition pour obliger l’État à agir. Les associations s’inquiètent de cette décision qui donnerait un feu vert à une transition subie et non planifiée. C’est pourquoi elles se pourvoient en cassation ce jeudi 22 février 2024 devant la plus haute juridiction administrative française.

    Le 22 décembre dernier, le tribunal administratif de Paris a reconnu que l’État avait manqué à ses obligations. En effet, le juge reconnaît que l’État n’a pas respecté l’échéance de fin 2022 qui lui était fixée et que les baisses d’émissions constatées sont imputables à des facteurs extérieurs. Les associations rappellent par ailleurs que, depuis la décision de 2021, les puits de carbone se sont effondrés, le retard climatique pris par la France s’est donc au contraire accru et le préjudice écologique aggravé. 

    Les associations continuent à dénoncer haut et fort la carence de l’État dans la mise en place de mesures structurantes, comme l’exigeait pourtant le jugement de 2021. Les quelques mesures prises depuis par les autorités ont été de courte durée, et elles ont surtout pesé sur les Français les plus précaires sans avoir généré d’impacts positifs durables et réels sur la trajectoire climatique de la France. Ce constat a été rappelé par le Conseil d’État en mai 2023. Et pourtant, le tribunal refuse de mobiliser les outils à sa disposition pour forcer l’État à agir : à ce stade de la procédure, il ne demande aucune nouvelle mesure structurante et refuse de prononcer des astreintes (1). Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Oxfam France s’inquiètent de cette décision, qui risque de créer une jurisprudence dommageable pour l’avenir de la justice climatique, et décident donc de se pourvoir en cassation.

    Les dommages restant à réparer bien plus importants que ceux que le tribunal retient  

    D’abord, le juge intègre dans son bilan comptable évaluant la réparation du préjudice écologique les facteurs extérieurs à l’action de l’État. Comme le reconnaît le juge, la crise du Covid, la crise énergétique suite à la guerre en Ukraine et l’hiver 2022 particulièrement doux sont en grande majorité à l’origine de la récente baisse des émissions de la France et non des mesures de l’État. Pourtant le tribunal administratif ne retranche pas les 74% de baisse d’émissions qui sont issues de ces facteurs conjoncturels à son calcul du préjudice écologique à réparer (2).

    Ensuite, le calcul du retard climatique de la France opéré par le tribunal administratif occulte le secteur de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF). Pourtant de 2019 à 2022, entre 83 et 92 mégatonnes équivalent CO2 ont été émises en trop, par rapport à ce que les puits de carbone étaient en capacité de réguler,  en contradiction avec la Stratégie nationale bas-carbone.

    Les associations de l’Affaire du Siècle réaffirment aujourd’hui que la transition doit être planifiée, pour être juste socialement et s’opérer dans un État de droit, et ne saurait se résumer à des mesures de court-terme pour répondre à des crises conjoncturelles et pesant de manière disproportionnée sur les plus modestes. L’Affaire du Siècle se pourvoit en cassation face à une décision jugée inquiétante pour la justice climatique.

    Pour Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France : “Le gouvernement ne peut plus se permettre tant de paresse en matière de politique climatique : il doit respecter les objectifs de la France, sans exception de dernière minute, sans tour de passe-passe pour espérer afficher une bonne conduite de façade.”

    Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous : “L’inaction climatique est aussi un péril social : en refusant d’agir sérieusement sans attendre, le gouvernement condamne la France à agir à la dernière minute, quand il sera déjà beaucoup trop tard. Et ce seront les classes populaires qui en subiront les conséquences les plus violentes.”

    Pour Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France : “Si nous saisissons le Conseil d’État aujourd’hui c’est pour demander une nouvelle fois au tribunal de se donner véritablement les moyens de faire respecter son propre jugement de 2021. Celui-ci a été considéré comme historique au-delà des frontières françaises. Les attentes des 2,3 millions des Français.e.s qui ont signé la pétition de l’Affaire du Siècle sont grandes et ne retombent pas.”

    Contacts presse

    Greenpeace France : Kim Dallet – kdalletm@greenpeace.org
    Oxfam France : Marika Bekier – mbekier@oxfamfrance.org
    Notre Affaire à Tous : Justine Ripoll – justine.ripoll@notreaffaireatous.org

    Notes

    (1) L’Affaire du Siècle a réclamé une astreinte financière d’un milliard d’euros le 14 juin 2023 pour obliger l’Etat à agir.

    (2) L’Affaire du siècle rappelle que deux secteurs sont responsables des baisses d’émissions de la France entre 2021 et 2022 : le secteur du bâtiment et le secteur de l’industrie manufacturière et de la construction. Le rapport d’expertise versé au dossier en 2023 démontre que dans ces deux secteurs, les baisses d’émissions observées sont dues à 74% à des facteurs conjoncturels mentionnés ci-dessus. Par conséquent, 11,9 MtCO2e des baisses d’émissions constatées dans ces secteurs ne sont pas imputables à une quelconque action volontaire structurelle de l’État. Sur la même période, les autres secteurs – transport, agriculture, déchets, production d’énergie – ont vu leurs émissions soit stagner, soit augmenter.

  • Bombes climatiques : ClientEarth et Notre Affaire à Tous mettent en garde les banques françaises finançant les projets pétro-gaziers de Saudi Aramco

    Communiqué de presse, mardi 5 décembre 2023 – ClientEarth et Notre Affaire à Tous mettent en garde les banques françaises finançant et bénéficiant des nouveaux projets pétro-gaziers de Saudi Aramco. Ces interpellations font suite aux préoccupations des Nations Unies (1) concernant la contribution de BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale aux impacts, liés au changement climatique, sur les droits humains, causés par Saudi Aramco. Leurs soutiens aux entreprises ayant des projets d’expansion dans le domaine des combustibles fossiles les exposent à d’importants risques juridiques et réputationnels.

    En continuant de soutenir de tels clients, les banques françaises risquent de manquer à leur responsabilité de respecter les droits humains et s’exposent à d’importants risques juridiques et réputationnels. En effet, les clients du secteur de l’énergie qui continuent de développer de nouveaux projets fossiles ne peuvent être considérés comme alignés sur l’Accord de Paris ou comme effectuant une transition crédible vers des émissions nettes zéro d’ici à 2050, et sont par conséquent à l’origine d’impacts liés au changement climatique sur les droits humains.

    Les courriers officiels de mise en garde reçus par les 3 banques françaises font écho aux préoccupations des Nations Unies concernant leur contribution aux impacts liés au changement climatique sur les droits humains, causés par Saudi Aramco.

    Saudi Aramco est le plus grand émetteur de gaz à effet de serre : la société est responsable de 4,33 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone et de méthane, provenant des combustibles fossiles et du ciment, entre 1965 et 2018. Au lieu d’aligner sa stratégie commerciale sur les objectifs de l’Accord de Paris en réduisant rapidement sa production d’énergies fossiles, Saudi Aramco reste le plus grand producteur de pétrole brut au monde en termes de volume de production et prévoit même d’augmenter considérablement ses réserves de pétrole et de gaz. L’annonce par la société d’un objectif « net zéro » exclut la plus grande partie de son impact sur le climat sous la forme d’émissions indirectes scope 3, ce qui le rend incompatible avec l’objectif de l’Accord de Paris visant à réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’au moins 45 % d’ici à 2030 afin d’atteindre l’objectif net zéro d’ici à 2050.

    Les courriers rappellent également à BNP Paribas, Crédit Agricole et la Société Générale que les Nations Unies les ont d’ores et déjà alerté des impacts néfastes susceptibles de se matérialiser en Arabie saoudite, à l’aide de leurs soutiens financiers au géant pétro-gazier. De grandes parties du pays pourraient devenir inhabitables dans le cadre d’un scénario à fortes émissions, avec une chaleur et une humidité dépassant les seuils de tolérance humaine. La vague de chaleur cette année en Arabie saoudite a entraîné des températures supérieures à 50 ⁰C, et un stress thermique pour les pèlerins du Hadj. Selon les estimations, le nombre de décès liés à la chaleur dans la région nord-africaine et au Moyen Orient passera de la moyenne actuelle de 2,1 pour 100 000 habitants à plus de 100 pour 100 000 habitants d’ici 2100 dans le cadre de scénarios d’émissions élevées semblables aux trajectoires d’émissions actuelles. 

    Alors que les engagements pris sont encore très loin d’être suffisants pour garantir un impact réel sur l’expansion pétro-gazière mortifère des majors, ClientEarth et Notre Affaire à Tous listent également une série de demandes urgentes : les banques françaises doivent immédiatement mettre en place et appliquer une politique selon laquelle elles ne fourniront plus de services au bilan ou hors-bilan liés à des projets, ou à des entreprises impliquées dans des projets, qui impliquent une nouvelle exploration, une exploitation ou un développement de nouveaux projets fossiles, conformément à la norme NZE de l’AIE.

    (1) https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/300823/climat-l-onu-met-en-garde-le-plus-gros-petrolier-du-monde-et-ses-soutiens-francais

    Contact presse

    Notre Affaire à Tous : Brice Laniyan, brice.laniyan@notreaffaireatous.org