Catégorie : Inégalités climatiques

  • Dérèglement climatique : quel impact sur nos droits ?

    A l’occasion de la journée internationale des droits de l’Homme le 10 décembre, Notre Affaire à Tous publie un kit sur les droits humains les plus impactés par le dérèglement climatique ! A travers ce kit pédagogique, nous souhaitons rendre visibles les impacts sur les droits fondamentaux déjà concrets et donner les outils pour permettre une meilleure prise en compte et incorporation de ces droits dans les politiques publiques luttant contre le changement climatique.

    En effet, le changement climatique impacte d’ores et déjà de nombreuses populations à travers le monde, ce qui engendre des conséquences concrètes sur leurs droits fondamentaux. Parce qu’il entraîne dès aujourd’hui des effets dévastateurs sur l’environnement, le dérèglement climatique affecte les conditions de vie de millions de personnes, particulièrement des plus vulnérables. Suite à l’échec de la COP26 dans la protection des communautés les plus vulnérables à la crise climatique, il est plus que jamais essentiel de considérer la crise climatique comme une crise de droits humains. Face à l’ampleur du phénomène et le retard de l’action climatique, des phénomènes climatiques extrêmes climatiques font déjà de nombreuses victimes : feux de forêts, inondations, tempêtes, montée du niveau de la mer… La solidarité climatique et la prise en compte des situations des personnes les plus touchées doit devenir une priorité des Etats.

    Ce sont les droits à la vie, à un environnement sain, à la santé, à l’eau, au logement, à l’alimentation, au travail ou encore à l’éducation qui sont menacés par l’inaction climatique des dirigeants. Repousser l’action condamne les populations les plus affectées et renforce les inégalités tout en aggravant l’isolement social, les discriminations et l’exclusion.

    L’action climatique centrée sur les droits humains peut jouer un rôle fondamental pour engager une transition juste. Se battre pour l’inclusion du respect des droits humains aide les communautés les plus touchées à satisfaire leurs demandes de politiques climatiques acceptables et socialement justes. Ensemble, agissons pour que les dirigeants et les entreprises intègrent les droits humains dans leurs actions climatiques et fassent le lien entre préoccupations environnementales et justice sociale.

  • A découvrir : L’exposition photographique « Paysages d’inégalités

    Notre Affaire à Tous dévoile son exposition « Paysages d’inégalités« . Ce projet a été réalisé en partenariat avec la photographe Dagmara Bojenko, et revient sur l’histoire de six collectifs de citoyen-nes organisés face à des constructions polluantes. Ces citoyens et citoyennes sont tantôt les victimes directes d’installations affectant leur qualité de vie, tantôt des militant-es engagé-es dans la lutte contre l’artificialisation sans limite des terres agricoles et des espaces verts. Les photographies sont exposées au Ground Control (81 rue du Charolais à Paris) du 17 au 21 novembre !   

    L’exposition illustre le combat de six collectifs racontant chacun sa lutte. De l’Aude au Nord, en passant par la Seine-Saint-Denis, les Deux-Sèvres et le Cantal, nous faisons le lien entre les politiques menées sur le territoire, leurs conséquences néfastes sur les conditions de vie de certaines populations, et l’engagement citoyen pour garantir le droit à un environnement sain.  

    En mettant en lumière l’histoire des personnes affectées par ces projets, nous souhaitons montrer le rapport entre les décisions d’aménagement sur les territoires et les conséquences du changement climatique : il s’agit de montrer que les aménagements inadaptés au changement climatique accentuent ses conséquences. L’artificialisation des terres agricoles, la bétonisation des espaces verts permettant aux habitant-es de se rafraîchir en période de canicule ou la privatisation de l’accès à l’eau sont autant d’exemples qui témoignent de l’importance de la lutte de ces collectifs.

    En contant l’histoire de personnes impactées par des dégradations environnementales, Notre Affaire à Tous entend à la fois sensibiliser un large public à la nécessité d’une transition juste et équitable et encourager la mobilisation citoyenne pour un environnement sain, face aux projets polluants qui n’ont plus leur place dans la société d’aujourd’hui et qui dégradent le vivant

    Luttes locales : qui sont les collectifs qui se battent pour le vivant ?

    Le mercredi 17 novembre, en parallèle du vernissage de l’exposition « Paysages d’inégalités » présentant en images le combat quotidien de 6 collectifs pour préserver leur environnement proche et le vivant dans son ensemble, nous avons organisé une soirée dédiée aux luttes locales, leurs récits, leurs victoires, leurs obstacles, au Ground Control. Certains de ces collectifs étaient présents et l’événement a été ponctué de prises de parole et récits autour de leur combat contre les projets imposés et polluants, le tout dans une humeur festive. L’étude sociologique « Les David contre Goliath » menée sur plusieurs mois et auprès de 50 collectifs a également été présentée. Quelles sont leurs motivations ? D’où viennent-ils ? Comment s’organisent-ils ? Pour en savoir plus, découvrez l’étude !

  • CP / “Paysages d’inégalités” : l’exposition photographique qui dévoile les visages des impacts environnementaux en France

    Communiqué de presse – Paris, le 17 novembre 2021

    Ce mercredi 17 novembre, Notre Affaire à Tous et la photographe Dagmara Bojenko dévoilent l’exposition “Paysages d’inégalités”, illustrant le combat de six collectifs partout en France contre les projets imposés et les inégalités environnementales. De l’Aude au Nord, en passant par la Seine-Saint-Denis, les Deux-Sèvres et le Cantal, l’exposition fait le lien entre les politiques menées sur les territoires, leurs conséquences néfastes sur les conditions de vie de certaines populations et l’engagement citoyen pour garantir le droit à un environnement sain. 

    Les infrastructures humaines sont une source continuelle de dégradations environnementales qui prennent diverses formes : pollutions sonores, visuelles, rejets atmosphériques, pollution des eaux et des sols… Les multiples et désastreux impacts sur la santé ne sont aujourd’hui plus à démontrer. Mais ces impacts sont inégaux : les produits issus des atteintes à l’environnement se voient accaparer par les plus aisés au détriment des plus démunis qui n’en subissent que les conséquences néfastes. Il existe donc une double peine : celles et ceux contribuant le moins au problème subissent le plus les conséquences.

    L’inaction climatique et la destruction du vivant affectent déjà les conditions de vie et les droits fondamentaux de nombreux citoyens et citoyennes. Face à cette situation, des collectifs se forment pour contrer les projets polluants et destructeurs, pour se battre contre la pollution de l’air, de l’eau et des sols, et pour contrer le déni de démocratie environnementale. A travers son exposition photographique, Notre Affaire à Tous a voulu rendre visible les visages et paysages touchés par les dégradations environnementales et la force de l’engagement citoyen face à des acteurs puissants qui continuent de menacer le vivant en toute impunité. 

    Pour Clothilde Baudouin, chargée du projet “inégalités climatiques” à Notre Affaire à Tous : “En contant l’histoire réelle de personnes impactées par des dégradations environnementales, Notre Affaire à Tous entend à la fois sensibiliser un large public à la nécessité d’une transition juste et équitable et encourager la mobilisation citoyenne pour un environnement sain, face aux projets polluants qui n’ont plus leur place dans la société actuelle.

    L’exposition sera présentée au Ground Control (81 rue du Charolais à Paris) le 17 décembre à 19h et restera sur place jusqu’au dimanche 21 novembre. Pour que l’exposition puisse circuler largement, le site internet paysages-d’inégalités.fr a été créé. Dans les prochains mois, l’exposition sera itinérante et sera présentée dans différents lieux publics en France.

    Crédits photos : Dagmara Bojenko

    Contact presse : 

  • Changement climatique, inégalités et risques sanitaires

    Rapport d’étude réalisé par Alice Gautreau, Julie Hernu, Clément Martin et Perrine Pastor, étudiant-es du Master D3P1 « Risques, Science, Environnement et Santé » de Sciences Po Toulouse

    L’urgence climatique est là. Les manifestations du changement climatique ont été largement documentées par la communauté scientifique. Les rapports montrant les effets du changement climatique sur l’environnement sont de plus en plus médiatisés et reprennent successivement les données suivantes : parmi les dix années les plus chaudes jamais recensées, huit sont survenues au cours de la dernière décennie[1], l’augmentation du niveau des mers pourrait atteindre 60 cm à 1 mètre d’ici la fin du siècle[2], et il est nécessaire de limiter l’augmentation moyenne des températures à 2 voire 1,5 degrés par rapport à l’ère préindustrielle. Comme l’a identifié le Sénat dans un rapport de 2019[3], ces phénomènes vont continuer de s’amplifier à l’avenir selon les modélisations scientifiques du GIEC[4]. Globalement, la nécessité de lutter contre le changement climatique est inscrite à l’agenda de tous : décideurs politiques, organisations non-gouvernementales, entreprises, société civile, etc. Cette prise de conscience a été cristallisée par l’Accord de Paris qui, à l’issue de la COP21 de 2015, marque une volonté consensuelle de l’ensemble des Etats de diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre. L’Accord de Paris marque également une rupture dans la mesure où il enjoint les entités non-parties de l’Accord, en particulier les entreprises, à lutter contre le risque climatique via leur démarche RSE (responsabilité sociétale de l’entreprise)[5].

    Mais la lutte contre le changement climatique est essentiellement abordée au prisme de la protection de l’environnement. A contrario, et c’est tout l’objet du présent rapport, la question des effets du changement climatique sur la santé humaine est très peu abordée. C’est ce que souligne la revue scientifique The Lancet dans un rapport de 2019 :

    « Le changement climatique est de plus en plus largement représenté dans les médias et par les gouvernements d’une manière qui ne le relie pas à la santé humaine [… tandis que] la santé, qui est un domaine majeur d’intérêt individuel, est rarement liée au changement climatique. »[6].

    Cet extrait est révélateur d’une imperméabilité entre ces deux champs que sont le changement climatique et la santé. Dans le présent rapport, la notion de santé sera considérée au sens large en se basant sur la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) :

    « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. La possession du meilleur état de santé qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale »[7].

    Les premiers liens entre santé et changement climatique ont été établis sous l’impulsion d’organisations internationales spécialisées. En 2000, l’OMS a proposé une approche écosystémique de la santé via le programme « One Health ». Dans le monde universitaire, la santé environnementalea émergé comme un champ à part entière visant à mettre en lumière l’interdépendance entre ces deux notions.

    Pour l’OMS, « La santé environnementale comprend les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de la vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux, psychosociaux et esthétiques de notre environnement. Elle concerne également la politique et les pratiques de gestion, de résorption, de contrôle et de prévention des facteurs environnementaux susceptibles d’affecter la santé des générations actuelles et futures »[8].

    En droit français, l’impact de l’environnement sur la santé humaine se retrouve à travers le concept d’exposome, défini par l’article L. 1411-1 du Code de la santé publique comme « l’intégration sur la vie entière de l’ensemble des expositions [environnementales] qui peuvent influencer la santé humaine ».

    De façon très concrète, plusieurs rapports mettent en lumière les effets néfastes du changement climatique sur la santé. Pour The Lancet,certainespopulations sont particulièrement concernées par l’augmentation du niveau moyen des températures et des fréquences et intensités des vagues de chaleur : « Un enfant né aujourd’hui vivra dans un monde où il fera plus de quatre degrés de plus que la moyenne de l’ère préindustrielle. Le changement climatique aura un impact sur sa santé, de la petite enfance et l’adolescence à l’âge adulte et à la vieillesse. À travers le monde, les enfants sont parmi les plus touchés par le changement climatique. »[9]. Par ailleurs, la pollution de l’air, qui est principalement liée à l’utilisation d’énergies fossiles et aggravée par le changement climatique, affecte les organes vitaux du corps humain tels que le cœur et les poumons. Sur le long terme, la pollution de l’air affecte le taux de mortalité. En 2016, 7 millions de personnes sont décédées prématurément dans le monde en raison de maladies liées à la pollution de l’air[10]. En France, cela représente environ 48 000 personnes par an[11]. Selon une étude de Harvard, ces chiffres seraient grossièrement sous-estimés[12]. Le risque de malnutrition est un autre exemple qui témoigne de l’interdépendance entre changement climatique et santé puisque les dérèglements climatiques (tempêtes, sécheresses, élévation du niveau de la mer etc.) menacent les productions agricoles et ainsi la sécurité alimentaire.

    Enfin, la crise sanitaire de la Covid-19 a révélé l’ampleur des zoonoses, ces maladies transmises à l’homme par l’intermédiaire d’animaux, pouvant être source de nouvelles pandémies. Selon l’OMS, 60% des maladies infectieuses humaines sont zoonotiques[13]. Bref, les relations entre santé et environnement ont été scientifiquement prouvées, ce qui pousse la revue britannique The Lancet à affirmer que le changement climatique est « la plus grande menace mondiale pour la santé publique au 21ème siècle »[14].

    En parallèle, le présent rapport vise à mettre en lumière les inégalités face au risque climatique. La notion de risque est conventionnellement définie comme la conjonction d’un aléa et d’un enjeu.

    L’aléa étant ici la probabilité qu’un événement climatique se produise tandis que l’enjeu est la vulnérabilité d’une population exposée à cet aléa. Les populations n’ont toutefois pas les mêmes vulnérabilités face aux risques climatiques car elles y sont différemment confrontées. En outre, parmi les personnes exposées, certaines sont plus ou moins fortement impactées selon l’âge, la profession, le sexe, l’état de santé, la situation socio-économique, etc. De plus, certains territoires et certaines activités économiques sont et seront plus impactés par le changement climatique, en particulier les territoires montagneux, littoraux et ultramarins. On observe donc des inégalités face au changement climatique. Selon le Haut Conseil pour le Climat, ces dernières aggravent les chocs externes, en l’occurrence le changement climatique le changement climatique, car elles « augmentent les vulnérabilités [transformant ainsi] la menace en catastrophe »[15].

    Malheureusement, la question des risques sanitaires liés au changement climatique, ainsi que celle des inégalités qui en découlent, reste trop peu prise en compte par les politiques publiques en France. Sur le plan juridique, les spécialistes constatent une trop faible judiciarisation de ces enjeux. Dans un article de 2020[16], la professeure des universités en droit public Christel Cournil montre que les enjeux de santé et d’environnement sont pris en compte par les pouvoirs publics bien que de manière très cloisonnée. On constate toutefois quelques avancées avec la mise en place dès 2004 du premier Plan national de santé environnement (PNSE)[17] qui est élaboré tous les cinq ans et qui est un outil clef de la planification de la santé environnementale. En 2006, la stratégie nationale d’adaptation au changement climatique évoque pour la première fois les enjeux sanitaires liés au changement climatique et le Plan national d’adaptation au changement climatique[18] actuellement en vigueur a affirmé la prise en compte du risque sanitaire.  Mais, dans la pratique, ces outils restent peu nombreux, peu mobilisés et sont critiqués.

    De manière générale, aucune tendance de fond n’est observée dans les politiques publiques françaises concernant la santé environnementale. La question des risques sanitaires liés au changement climatique est largement sous-estimée en France, même par certains spécialistes. Sur le plan législatif, la députée Sandrine Josso déplore le fait que la récente Loi Climat n’ait pas pris en compte les recommandations qu’elle avait faites concernant le volet santé[19].

    Toutefois, le lien entre santé et changement climatique s’inscrit progressivement dans le droit, notamment sous l’impulsion de la société civile via les procès contre l’Etat pour inaction climatique[20]. L’argumentaire santé-environnement s’est ainsi retrouvé dans des affaires  célèbres telle que « Urgenda »[21], dans laquelle l’Etat néerlandais a été accusé de ne pas prendre les mesures nécessaires dans la lutte contre le changement climatique et la protection de la santé des populations. Cet argumentaire s’est retrouvé plus récemment au cours de « l’Affaire du Siècle » en France, menée par quatre associations de défense de l’environnement dont Notre Affaire à Tous (NAAT)[22], qui co-produit le présent rapport. De plus, le droit à un environnement équilibré et respectueux de la santé, mentionné à l’article 1 de la Charte de l’environnement, est un Objectif à Valeur Constitutionnelle depuis 2020[23].

    Face aux réponses insuffisantes des décideurs politiques, il apparaît alors nécessaire d’impulser de nouvelles approches en termes de politiques publiques qui seraient plus transversales afin de considérer la santé au prisme des bouleversements climatiques susceptibles de l’affecter. L’enjeu de ce rapport, proposé conjointement par les étudiants de Sciences Po Toulouse[24] et l’association Notre Affaire à Tous, est donc de décloisonner ces deux notions que sont l’environnement et la santé afin de penser les liens entre les deux. Pour cela, il est nécessaire de montrer que changement climatique, santé et inégalités sont étroitement liés. Ce sera l’objet de la première partie de ce rapport (I). Un tel constat nous permettra ensuite d’analyser comment ces enjeux sont pris en compte en France par les politiques publiques et ce à différentes échelles : nationale (II) et locales (III). L’objectif est de voir ce qui est mis en place par les différents acteurs publics afin de lutter contre les risques sanitaires qui résultent du changement climatique et de s’interroger sur la pertinence de la répartition des compétences entre eux. . Cette analyse nous permettra enfin de dresser des recommandations cohérentes à destination des décideurs politiques mais aussi afin d’appuyer les associations dans leurs plaidoyers visant à mettre la santé environnementale à l’agenda politique.


    [1]  Nick WATTS, et al. “The 2019 Report of The Lancet Countdown on Health and Climate Change: Ensuring That the Health of a Child Born Today Is Not Defined by a Changing Climate”. The Lancet, vol. 394, no 10211, Elsevier, novembre 2019, p. 1836‑78. www.thelancet.com, doi:10.1016/S0140-6736(19)32596-6.

    [2] Ronan DANTEC, Jean-Yves ROUX, Rapport d’information n° 511 fait au nom de la délégation sénatoriale à la prospective sur l’adaptation de la France aux dérèglements climatiques à l’horizon 2050, Paris, Sénat, 2019. http://www.senat.fr/rap/r18-511/r18-511.html

    [3] Ibid.

    [4] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

    [5] Responsabilité sociétale des entreprises

    [6] Traduction extraite de :  Nick WATTS, et al. Op. cit., novembre 2019, p. 1836‑78.

    [7] Préambule à la Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, signé le 22 juillet 1946 par les représentants de 61 Etats et entré en vigueur le 7 avril 1948.

    [8] Définition de l’OMS en 1994.

    [9] Nick WATTS, et al. Op. cit., novembre 2019, p. 1836‑78.

    [10] Ibid.

    [11] Santé Publique France

    [12] Leah BURROWS. “Deaths from fossil fuel emissions higher than previously thought”. Harvard University, 9 février 2021, https://www.seas.harvard.edu/news/2021/02/deaths-fossil-fuel-emissions-higher-previously-thought.

    [13] “One Health, Une seule santé”. OIE – World Organisation for Animal Health, https://www.oie.int/fr/pour-les-medias/une-seule-sante/. Consulté le 23 avril 2021.

    [14] The Lancet. “Humanising Health and Climate Change”. The Lancet, vol. 392, no 10162, Elsevier, décembre 2018, p. 2326. www.thelancet.com, doi:10.1016/S0140-6736(18)33016-2.

    [15] Haut Conseil pour le Climat. Climat, santé : mieux prévenir, mieux guérir. Avril 2020, p. 24, https://www.hautconseilclimat.fr/publications/climat-sante-mieux-prevenir-mieux-guerir/

    [16] Christel COURNIL, “L’appréhension juridique des risques sanitaires liés au changement climatique”, Revue juridique de l’environnement, vol. spécial, no. HS20, 2020, pp. 171-188

    [17] Intégré au Code de la Santé (article L. 1311-6) par la loi du 9 août 2004.

    [18] PNACC 2 (2018-2022)

    [19] Sandrine JOSSO (rapporteure), Elisabeth TOUTUT-PICARD (présidente), Rapport fait au nom de la commission d’enquête sur l’évaluation des politiques publiques de santé environnementale, n°3701, Paris, Assemblée nationale, 2020.

    [20] Christel COURNIL, Op. cit., 2020, pp. 171-188.

    [21] Cour du district de La Haye, 24 juin 2015, Urgenda v. Government of the Netherlands

    [22] Site web : https://preprod.notreaffaireatous.org/

    [23] Cecilia RINAUDO. “CP / La décision du Conseil Constitutionnel crée un tournant historique pour la protection de l’environnement et la justice climatique !”,  Notre Affaire à Tous, 31 janvier 2020, https://preprod.notreaffaireatous.org/cp-la-decision-du-conseil-constitutionnel-cree-un-tournant-historique-pour-la-protection-de-lenvironnement-et-la-justice-climatique/

    [24] Étudiant.e.s du Master D3P1 « Risques, Science, Environnement et Santé » de Sciences Po Toulouse.

  • IMPACTS – 5 octobre 2021 – Alimentation, agriculture et changement climatique

    Ce 17e numéro de la revue de presse « IMPACTS«  se concentre sur les conséquences du dérèglement climatique sur l’alimentation et l’agriculture et sur la nécessaire refonte du système alimentaire actuel.  

    À un mois de la COP26 qui se déroulera à Glasgow du 1er au 12 novembre, le changement climatique et les phénomènes climatiques extrêmes se font de plus en plus intenses et mettent en péril la sécurité alimentaire de populations du monde entier. Et la France n’échappe pas à cette situation. Désertification, salinisation des sols, variations de la pluviosité amenant sécheresses ou inondations soudaines, évolutions climatiques auxquelles les cultures ne sont pas adaptées et/ou favorisant la prolifération de parasites et de maladies… autant de défis auxquels doit faire face l’agriculture afin de pouvoir continuer à nourrir la planète. 

    L’agriculture a cette spécificité qu’elle peut être considérée à la fois comme une victime principale du dérèglement climatique, mais aussi une de ses causes majeures, ainsi qu’une éventuelle solution, relève Bruno Parmentier, ingénieur et économiste spécialisé dans les questions agricoles et alimentaires.  

    Pour combattre les inégalités sociales climatiques et environnementales, il nous faut les connaître. C’est le sens de cette revue de presse élaborée par Notre Affaire à Tous, qui revient sur les #IMPACTS différenciés du changement climatique, sur nos vies, nos droits et ceux de la nature.

    Le dérèglement climatique, facteur de graves crises alimentaires

    Se nourrir est un besoin vital et un droit humain fondamental, inscrit dans le droit international depuis 1966 avec le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Selon le rapporteur spécial des Nations Unies, le droit à l’alimentation se définit comme “le droit d’avoir un accès régulier, permanent et libre, soit directement, soit au moyen d’achats monétaires, à une nourriture quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple dont est issu le consommateur, et qui assure une vie psychique et physique, individuelle et collective, libre d’angoisse, satisfaisante et digne”. Pourtant, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en 2020, plus de 2,3 milliards de personnes (soit 30% de la population mondiale) n’avaient pas accès toute l’année à une alimentation adéquate. Par ailleurs, elle estime que 9,9% environ de la population était en situation de sous-alimentation en 2020, contre 8,4% en 2019. Selon Action contre la Faim, aujourd’hui, ce sont jusqu’à 811 millions de personnes qui souffrent de la faim dans le monde, et ce chiffre augmente pour la cinquième année consécutive. Une hausse de 161 millions de personnes a été observée rien que sur l’année 2020. Dans le rapport de 2018 sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, l’ONU avertissait sur “l’impact du climat sur la sécurité alimentaire et la nutrition”. L’organisation soulevait alors que les catastrophes climatiques avaient doublé depuis 1990, ce qui avait nuit à la production agricole et contribué aux pénuries alimentaires. 

    Dans le rapport de 2021, l’avertissement s’est mué en alerte : la faim dans le monde s’aggrave considérablement. Ils relèvent trois facteurs majeurs de l’accroissement de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition : les conflits, les chocs économiques (exacerbés par la pandémie de covid-19), ainsi que la variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes. 

    Un autre rapport publié en mars dernier par la FAO soulève l’augmentation constante de l’intensité et la fréquence des catastrophes météorologiques, mais aussi biologiques dues aux changements climatiques. Ainsi, les inondations, les tempêtes, les sécheresses, les méga-incendies, mais aussi les ravageurs, les maladies et infestations des cultures et du bétail ont des effets dévastateurs sur la sécurité alimentaire et les moyens d’existence. D’autant plus que ce sont les pays les moins avancés (PMA) et les pays à revenu faible et intermédiaire (PRFM) qui supportent la majeure partie de ces fléaux. La FAO relève que de 2008 à 2018, l’Asie, l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes ont été les régions les plus durement touchées, ayant subi à elles seules plus de 108 milliards dollars (USD) en dommages ou en pertes de récoltes et de production animale. L’impact de ces catastrophes, au cours de la même période, se traduit aussi par une perte de 698 calories par habitant et par jour en moyenne dans ces quatre régions. Néanmoins, un avenir résilient aux catastrophes est possible selon la FAO, par un investissement dans la collecte et l’analyse de données, par des collaborations intersectorielles ou encore par des partenariats public-privé.

    Action contre la Faim alerte elle aussi sur les conséquences de la crise climatique sur la faim dans le monde. Désormais, pour l’ONG, “agir pour le climat, c’est lutter contre la faim”. En 2020, selon l’ONU, le nombre de personnes souffrant de la faim à cause de chocs climatiques s’élevait à 15 millions de personnes. Ainsi, les difficultés d’accès physique et économique aux moyens de production, la perte d’accès à l’eau pour les cultures et le bétail, la fragilisation des rendements des exploitations et de la qualité des aliments produits ainsi que la destruction de ressources alimentaires sont quelques unes des conséquences directes des dérèglements climatiques. Toujours selon l’ONU, Madagascar serait le premier pays à subir la famine à cause du réchauffement climatique. Aucun conflit n’est en cause, seulement plusieurs années de sécheresse. Lola Castro, directrice régionale du Programme alimentaire mondial (PAM) pour le sud de l’Afrique évoque une “situation très dramatique” mais prédit aussi que “le pire est à venir” car la famine ne cesse de progresser, et met en danger la vie de plus d’un million de personnes. Selon elle, l’aide de la communauté internationale est urgente et indispensable, les fonds manquent et les agences humanitaires peinent à sensibiliser le reste du monde. Au Kenya, 2,1 millions de personnes risquent également de mourir de faim en raison d’une sécheresse massive qui sévit dans la moitié du pays et qui affecte les récoltes. Les agriculteurs ne sont pas les seuls à être touchés par la sécheresse. En effet, les habitants des zones urbaines sont aussi contraints de payer plus cher le peu de nourriture disponible.

    Les impacts directs du dérèglement climatique sur les productions agricoles

    Les conséquences du dérèglement climatique sur les rendements agricoles sont d’ores et déjà documentées. Elles sont d’autant plus importantes que l’agriculture est intimement liée à la problématique de l’eau, 93% des ressources hydriques disponibles dans le monde étant utilisées à des fins agricoles selon l’hydrologue Emma Haziza. Il faut 1 tonne d’eau pour produire 1kg de céréales, 4 à 11 tonnes pour produire 1kg de viande. Les désertifications, sécheresses et difficultés d’approvisionnement en eau ont et auront un impact important sur les rendements agricoles. Des cultures-phares comme le riz, le maïs et le café sont concernées. 

    De façon globale, selon une étude publiée dans la revue scientifique Nature Climate Change, le dérèglement climatique a entraîné une baisse de 21 % de la croissance agricole mondiale depuis les années 1960. Un chiffre important pour une hausse de la température moyenne du globe de 1°C, alors que les modèles climatiques prévoient des hausses de températures globales bien plus importantes d’ici la fin du siècle, rappelle la chercheuse Delphine Renard. Selon le GIEC, des cultures essentielles car bases de l’alimentation humaine comme le blé et le maïs subissent déjà aujourd’hui les effets du dérèglement climatique, et estime que les baisses de rendement des céréales de 10 à 25 % pourraient être courantes dans les années 2050, amenant de fortes hausses de prix et donc du coût des denrées alimentaires. Par exemple, selon une étude publiée dans Agronomy for Sustainable Development, les rendements de riz pluvial au Sénégal pourraient être divisés par deux d’ici à 2100. 

    Preuve de ces conséquences, 2021 a été une année compliquée, voire catastrophique pour les agricultrices et agriculteurs de France et d’ailleurs, et le changements climatique en est grandement responsable. 

    Parmi les ravages causés par le changement climatique cette année en France, figure le gel tardif d’avril, qui n’a épargné aucune exploitation française. L’évènement a été analysé par le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie comme “probablement la plus grande catastrophe agronomique de ce début de XXIe siècle”. Les pertes pour la viticulture et l’arboriculture ont été estimées à plus de 4 millions d’euros. Le réseau international de scientifiques World Weather Attribution établit que le changement climatique a augmenté d’environ 60% la probabilité qu’une vague de froid survienne en période de bourgeonnement cette année. Ils expliquent que ces vagues de froid sont devenues moins probables et moins intenses qu’au siècle dernier en raison du réchauffement des températures, mais qu’elles font plus de dégâts car elles surviennent au moment où la végétation se réveille. Et le phénomène risque de s’accentuer année après année si les températures continuent d’augmenter. 

    En juin, après le gel tardif, puis des épisodes violents de vent et de grêle, les agriculteurs ont de nouveau été touchés par les aléas climatiques avec des orages qui ont endommagé les exploitations agricoles de nombreuses régions françaises. Les trois quarts de la France ont été touchés et certaines parcelles ont été détruites à 100%, comme en Côte d’Or ou dans le Doubs. Les pertes économiques sont considérables, tout comme l’impact moral pour les agriculteurs qui se sentent impuissants. L’accroissement de l’intensité et de la fréquence de ces évènements ne laissera pas d’autre choix que de réfléchir à un nouveau système agricole, en plus de refonder complètement l’assurance-récolte

    En raison des aléas climatiques qui se sont succédé cette année, la récolte française de vin devrait être en baisse de 24 % à 30 % en 2021, selon le ministère français de l’Agriculture, qui évoque un niveau de rendement d’une faiblesse jamais vue depuis quarante-cinq ans. Les évolutions climatiques ont plus encore de conséquences sur la production de vin, qui représente à elle seule 15% de la valeur de la production agricole française. En effet, l’augmentation des températures favorise et accélère la mutation des vignes, et rend ainsi les vendanges de plus en plus précoces. Les vendanges se font donc lors de températures estivales, ce qui favorise l’oxydation des grappes de raisin et leur fait perdre des qualités organoleptiques, à moins que la cueillette ne se fasse de nuit. De plus, les hautes températures augmentent la concentration en sucre des raisins, donc après transformation, la teneur en alcool du vin. Ce sont aussi la qualité du vin et la singularité des vins qui sont impactés. Enfin, l’apparition d’agents pathogènes, comme les ravageurs, les champignons pathogènes et les insectes, deviendra de plus en plus fréquente. 

    Les abeilles, elles aussi, ont souffert des aléas du climat. La récolte de miel de cette année n’atteindrait ainsi que 30% à 40% de celle de l’année dernière. Les trois conditions nécessaires à une bonne récolte, le soleil, la floraison et la santé de la colonie, n’ont jamais été réunies en même temps cette année, selon Dominique Cena, vice-président de l’UNAF. La période de gel puis de fortes pluies, émanant directement des changements climatiques, a empêché les abeilles de sortir et a retardé les floraisons. La situation est particulièrement difficile pour les petits apiculteurs qui n’ont pu tirer aucun profit de leurs abeilles. Si certaines abeilles sont nourries au sirop de glucose, les apiculteurs peinent à maintenir leurs prix. Privilégier la consommation de miel français est ainsi essentiel pour soutenir les apiculteurs. 

    Au niveau mondial, un autre produit particulièrement touché par les changements climatiques est le blé dur, utilisé pour fabriquer les pâtes et dont la production n’est concentrée que dans quelques régions du monde. Ainsi, l’augmentation des phénomènes climatiques extrêmes pourrait entraîner une pénurie de pâtes. La vague de chaleur qu’a connu le Canada à la fin du mois de juin dernier devrait réduire de 32% la récolte de blé par rapport à la moyenne des cinq dernières années, alerte le Syndicat des industriels fabricants de pâtes alimentaires de France (Sifpaf), alors que le pays représente ⅔ du commerce mondial de blé dur habituellement. À part le Mexique et le Maroc, qui récoltent leur blé plus tôt dans l’année, tous les pays producteurs de blé dur ont été durement touchés par les évènements climatiques extrêmes cet été. Selon une étude de l’Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués, des sécheresses simultanées, graves et prolongées séviront dans le monde, même si le réchauffement climatique venait à se stabiliser. D’autres productions importantes ont également souffert, comme les amandes en Californie

    De plus en plus d’ouvriers agricoles souffrent donc économiquement des changements climatiques, mais ils sont aussi de plus en plus nombreux à en souffrir physiquement. Cela a été particulièrement flagrant cet été dans le nord-ouest des États-Unis, où une vague de chaleur record a causé la mort de plusieurs travailleurs et questionné leurs droits face à leur vulnérabilité climatique. Une étude universitaire américaine publiée en 2015 révèle que les travailleurs agricoles courent 35 fois plus de risques de décès liés à la chaleur que les autres travailleurs, et que ces risques augmentent. Pourtant, aucune loi n’oblige les employeurs à fournir de l’eau, de l’ombre ou des pauses. D’autant plus qu’aux Etats-Unis, la majorité de 2,4 millions de travailleurs agricoles sont sans papiers et vivent avec la crainte d’être pénalisés ou expulsés s’ils s’expriment.

    Afghanistan : les agriculteurs victimes du changement climatique : un exemple des conséquences systémiques du dérèglement climatique sur l’agriculture et l’alimentation

    En Afghanistan, où une large partie de la population tire ses revenus de l’agriculture, la vulnérabilité au changement climatique est forte et a constitué un contexte favorable aux talibans dans la conquête du pays. Producteur de grenades, de pignons, de raisins, l’Afghanistan est déjà très fortement impacté par le changement climatique. Selon le Germanwatch Global Climate Risk, il est le 6ème pays le plus touché par le changement climatique. Ces dernières années, le pays a connu plusieurs disettes. Dans les montagnes du nord du pays, la fonte des neiges a été précoce et provoqué des inondations dans les champs et les systèmes d’irrigation, et le phénomène se double de chutes de neige sur la période hivernale en trop faible abondance. Dans le sud et l’ouest du pays, les épisodes de pluie diluvienne ont augmenté de 10 à 25% sur les trente dernières années. Ces catastrophes détruisent les récoltes, amenuisent les ressources des agriculteurs qui se retrouvent bien souvent dans l’obligation d’emprunter, et contribuent à une situation d’insécurité alimentaire. On estime qu’un tiers des Afghans sont en situation de crise ou d’urgence alimentaire liée à la sécheresse, alors que le pays a déjà traversé une sécheresse historique en 2018 et mis au moins 250 000 personnes sur les routes. Et on estime déjà que les récoltes de 2021 seront 20% inférieures à celles de 2020

    Ce contexte, cumulé à l’absence d’aide du gouvernement déjà très concentré sur l’effort de guerre, a nourri une colère qu’ont pu exploiter les talibans qui ont par ailleurs les moyens d’enrôler des paysans en leur offrant 5 à 10 dollars par jour – a contrario on estime qu’un agriculteur afghan gagne en moyenne 1 dollar par jour. Nadim Farajalla, expert sur le changement climatique à l’université américaine de Beyrouth, explique que les agriculteurs font souvent le choix d’abandonner leurs terres pour essayer de trouver de l’argent en ville et laissent ainsi des familles derrière eux. Les enfants de ces familles deviennent alors des proies plus faciles à recruter. 

    Ce n’est pas la première fois qu’un groupe terroriste tire ainsi partie du changement climatique, notent les experts. Boko Haram a pu tirer profit dans un passé récent du manque d’eau au lac Tchad et, l’État islamique, de l’extrême sécheresse en Syrie et en Irak. 

    Pour obtenir des revenus plus stables, de nombreux agriculteurs, notamment dans le sud du pays où la sécheresse a été la plus forte et les talibans les plus populaires, ont choisi de planter du pavot car il est moins gourmand en eau et plus rémunérateur. Ainsi, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime estime que les surfaces cultivées de pavot ont bondi de près de 40 % en 2020 après quelques années de baisse. Or, les talibans qui contrôlent le marché de l’opium prélèvent des taxes chez les agriculteurs, ce qui constitue pour le groupe islamiste une source d’enrichissement supplémentaire. 

    Un rapport pointe une autre menace liée au changement climatique qui pèse sur la population : la rareté de l’eau. Les infrastructures sont en très mauvais état à cause des conflits répétés, et la capacité de stockage en eau par habitant est l’un des plus faibles de la région. A Hérat, une ville stratégique de l’ouest, les talibans ont ainsi “attaqué à plusieurs reprises un barrage qui est essentiel pour l’eau potable, l’agriculture et l’électricité pour les habitants de la région”, détaille le New York Times. Si ce manque d’eau a permis aux talibans de s’emparer des villes, il ne faut pas oublier que la situation pourrait se retourner contre eux une fois arrivés au pouvoir s’ils n’arrivent pas à assurer les services de base à la population.

    Des solutions envisagées vers la résilience et l’adaptation climatiques

    Le changement climatique affecte les récoltes et le bétail avec un telle rapidité, que des changements progressifs ne suffisent plus. En effet, l’augmentation de la chaleur, de l’aridité et de l’élévation du niveau de la mer menacent la survie de millions de petits agriculteurs et bouleversent la sécurité alimentaire mondiale. Ainsi, dans un rapport publié en juin dernier par le World Resources Institute, les chercheurs plaident pour des changements plus larges et radicaux des systèmes alimentaires, afin de s’adapter aux nouveaux défis climatiques. Déjà près de 800 millions de personnes dans le monde souffrent de la faim, un nombre qui a augmenté de 60 millions au cours des cinq dernières années. Le changement climatique contribue à augmenter ces chiffres et poussera probablement plus de 100 millions de personnes supplémentaires sous le seuil de pauvreté, dont beaucoup d’agriculteurs, éleveurs et autres ruraux. Pour eux, les changements radicaux consistent à déplacer les cultures dans des zones où le climat serait désormais plus adapté. Ils donnent l’exemple de producteurs de café costaricains, qui, dans la partie nord et plus aride du pays, cultivent désormais des agrumes, ou d’agriculteurs éthiopiens qui ont déplacé leurs parcelles dans des zones plus fraîches. Cependant, les chercheurs avertissent que les agriculteurs qui ont de petites exploitations et qui sont les plus vulnérables aux impacts climatiques, auront besoin de ressources pour s’adapter : plus de recherches, de subventions et d’incitations gouvernementales. 

    Selon une étude menée par des scientifiques du CNRS publiée en juin dernier, une cohabitation équilibrée entre agriculture et environnement pourrait être possible en Europe, par un remodelage complet de son système agroalimentaire. Ce scénario reposerait sur trois leviers. Le premier consisterait en un changement de régime alimentaire, notamment vers moins de produits d’origine animale, ce qui permettrait de limiter l’élevage hors-sol et de supprimer les importations d’aliments pour le bétail. Le deuxième levier s’inspirerait des principes de l’agroécologie en généralisant les systèmes de rotation des cultures. Ces cultures seraient diversifiées et intégreraient des légumineuses fixatrices d’azote, ce qui permettrait de se passer des engrais azotés de synthèse comme des pesticides. Et le troisième pilier reposerait sur la reconnexion de l’élevage avec les systèmes de culture en abandonnant leur concentration dans des régions ultra-spécialisées. Ce scénario permettrait ainsi de nourrir l’ensemble de la population européenne prévue pour 2050, tout en continuant d’exporter des céréales vers les pays qui en ont besoin pour l’alimentation humaine. De surcroît, la pollution des eaux et les émissions de gaz à effet de serre causés par l’agriculture seraient largement réduites, et le niveau de perte d’azote dans l’environnement serait divisé.

    Pour adapter l’agriculture au changement climatique, le président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA), Sébastien Windsor, propose de la repenser. Il a ainsi annoncé le 24 août dernier un “plan pour une résilience globale des exploitations, porté par les chambres d’agriculture en 2022”. L’objectif est avant tout d’accompagner les agriculteurs sur le terrain, notamment en leur conseillant des variétés plus résistantes à la hausse des températures, aux gelées tardives, ou encore aux inondations en plus en plus fréquentes. Le plan d’action sera territorialisé, afin d’accompagner au mieux les agriculteurs de tout le pays dans leur transition. Les mesures dépendront par ailleurs des conclusions du Varenne agricole de l’eau et du changement climatique attendues pour début 2022. Le Varenne, lancé le 28 mai 2021 par le ministre de l’agriculture et la secrétaire d’Etat à la biodiversité, vise à concevoir une nouvelle gestion de l’eau en agriculture et à adapter toutes les filières agricoles aux évolutions du climat. Il se décline en trois groupes de travail sur la gestion des risques climatiques, sur la résilience de l’agriculture et sur la gestion partagée et raisonnée des ressources en eau. Une de ses ambitions est de refonder l’assurance récolte pour 2023, afin de prévenir et indemniser plus efficacement les agriculteurs victimes des aléas climatiques.

    Refonder notre système alimentaire agro-industriel : une urgence face au dérèglement climatique et aux crises agricoles et alimentaires

    On le sait, l’agriculture industrielle a sa part de responsabilité dans la crise écologique, agricole et alimentaire que nous sommes en train de vivre. C’est donc l’ensemble de notre modèle agricole actuel qu’il faut remettre en question pour penser l’agriculture de demain, et renoncer aux soucis productivistes pour parvenir à plus de résilience, de durabilité et de justice. 

    L’objectif premier du modèle agricole actuel est d’assurer une productivité et une rentabilité économiques optimales. C’est une agriculture industrielle, intensive et ultra mécanisée, dépendante des énergies fossiles, d’intrants (produits utilisés pour améliorer le rendement des cultures mais qui ne sont pas naturellement présents dans les sols) et d’importantes surfaces. Mais c’est aussi un modèle dans lequel les richesses et pouvoirs sont détenus par un petit nombre d’acteurs, au détriment de millions de petits producteurs. C’est pourquoi il peut être considéré comme responsable d’importants déséquilibres sociaux et dérèglements environnementaux, qui touchent en premier lieu les populations les plus vulnérables. Le système alimentaire agro-industriel émet à lui seul ⅓ des émissions mondiales de gaz à effet de serre. 

    Face à ces enjeux, la transition agroécologique peut être une solution. De plus en plus présente dans les débats scientifiques, agricoles et politiques internationaux, l’agroécologie propose une véritable alternative sociétale grâce à des systèmes agricoles et alimentaires durables, qui s’appuient sur une science des écosystèmes agricoles tirée des lois de la nature et des savoir-faire paysans. C’est un modèle qui vise à répondre aux besoins alimentaires des consommateurs et des marchés locaux, et qui se fonde sur une utilisation responsable et optimale des ressources naturelles, tout en respectant les valeurs sociales et humaines. Ainsi, l’agroécologie est un outil de résilience au changement climatique, puisqu’elle permet de réduire l’impact environnemental et climatique de notre agriculture et notre alimentaire et facilite l’adaptation du système agricole aux perturbations liées aux changements climatiques. 

    Dans ce sens, Xavier Reboud, chercheur en agroécologie à l’Inrae, explique qu’il existe un ensemble de leviers qui peuvent, conjointement, renforcer la régulation naturelle des bioagresseurs, et ainsi rendre nos systèmes agricoles moins vulnérables, sans user de pesticides. Le premier levier consiste à diversifier les plantes, mélanger les espèces et variétés, à l’échelle d’une parcelle. Le deuxième levier repose sur un sol en bonne santé. Les apports organiques présents dans un sol peu travaillé réduit son oxydation et favorise son activité biologique. Enfin, le troisième levier consiste à cultiver chaque parcelle sur une surface réduite tout en y combinant des infrastructures biologiques comme des haies ou des prairies. La combinaison de ces trois leviers formerait des agro-écosystèmes, qui permettraient non seulement de rendre les plantes moins vulnérables face aux bioagresseurs souterrains et aériens, mais aussi de renforcer leur résistance au stress lié aux évènements climatiques extrêmes. 

    Bien qu’à une échelle très réduite et largement subventionnée par l’aide internationale, l’agroécologie est mise à profit au Liban par des agriculteurs et activistes pour répondre à l’explosion de la pauvreté et à l’inflation. Aucun produit chimique n’est utilisé, les semences collectées dans le monde entier sont réutilisées chaque année et cultivées en harmonie avec la nature. Si la prise de conscience environnementale reste limitée selon les activistes, les libanais se tournent de plus en plus vers ces produits locaux, car leurs prix ont très peu augmenté depuis le début de la crise, contrairement aux produits importés. En outre, ils espèrent diffuser le savoir en matière de techniques agroécologiques auprès des agriculteurs pour mener le pays vers l’autosuffisance. 

    En Afrique, l’agroécologie est de plus en plus reconnue. Initialement développée sur le continent pour répondre à la demande croissante des consommateurs du Nord, elle devient un enjeu de taille pour la santé publique, l’autonomie alimentaire et le retour à la terre. L’agroécologie correspond en Afrique à un retour à l’agriculture traditionnelle, cependant il reste nécessaire de convaincre les jeunes agriculteurs de faire leur transition. Pour cela, de plus en plus d’initiatives sont menées, notamment de la part d’associations qui tentent de sensibiliser et former les consommateurs et les agriculteurs. En Guinée, la création d’un label bio est à l’étude, ce qui permettrait de garantir une rémunération juste aux producteurs, tout en encourageant un large public à acheter ces produits. Pour Leonida Odongo, éducatrice communautaire et militante pour la justice alimentaire à Nairobi, “l’avenir sera agroécologique ou ne sera pas”. En raison, selon elle, de la faiblesse des systèmes législatifs en Afrique, de nombreux pesticides interdits dans le monde continuent d’être utilisés par des agriculteurs grandement incités par les entreprises agroalimentaires. C’est pourquoi elle s’engage dans la sensibilisation et l’éducation d’agriculteurs kényans à des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement. Lors de sessions communautaires de formation, elle invite les agriculteurs à la réflexion et au partage de leurs expériences et connaissances transgénérationnelles, pour montrer que les formes de production autochtones et agro écologiques, tout en ne mettant pas en danger la biodiversité et la santé, sont tout aussi efficaces et rentables. 

    En France de plus en plus de fermiers et agriculteurs pratiquent l’agroécologie, comme Jérôme Orvain, fermier limousin. Il a d’abord choisi de privilégier les circuits courts, pour faire profiter ses productions à une économie locale, territoriale, plutôt que mondiale. Puis il a adopté l’agriculture biologique. Il explique aujourd’hui que ses produits sont “à 100% en vente directe, en circuit court et en bio”. C’est aussi le cas de Julien Piron, qui produit des légumes en maraîchage biologique et agroécologique, en Indre et Loire. Ancien chercheur en biologie humaine et animale à l’INSERM, il a choisi, il y a huit ans, d’acheter une prairie délaissée, pour en faire le Jardin d’Édaphon. L’édaphon désigne l’ensemble des organismes vivant dans le sol (vers de terres, bactéries, champignons…) qui s’installent et pérennisent, pendant et entre les cultures, lorsque la terre est très peu travaillée, permettant d’éviter l’utilisation d’intrants. 

    Cependant, la transition agroécologique nécessite une véritable volonté politique. Si les Etats qui saisissent l’importance de changer de modèle agricole et de modifier nos habitudes alimentaires sont de plus en plus nombreux, rares sont ceux qui initient un vrai changement. Ainsi, l’agroécologie reste largement sous-financée et reléguée au second plan, alors que des accords et politiques commerciaux écocides et inéquitables continuent à être signés et menés à tout va. Si même les Etats conscients de l’urgence se montrent aussi peu déterminés à produire de véritables changements, c’est qu’ils savent aussi que l’agroécologie n’est pas compatible avec le mode de production capitaliste. En effet, alors que la première repose sur des exploitations familiales durables et diversifiées qui nécessitent plusieurs années pour porter ses fruits, la seconde cherche, par des moyens techniques, à obtenir des profits immédiats. De plus, la première favorise une grande diversification des milieux, des espèces et des variétés ainsi que des habitats pour la faune et la flore, alors que la seconde mise sur l’ultra spécialisation des exploitations. Enfin, la première privilégie l’observation de la nature, l’adaptation permanente des pratiques aux évolutions de l’environnement, le contact entre l’humain, la terre et l’animal, alors que la seconde est fondée sur la rationalisation, la planification et la division du travail.

    Par ailleurs, la transition agroécologique génère des coûts importants dans l’immédiat, d’autant plus que seule l’agriculture biologique bénéficie d’une aide spécifique au changement de système, relève France Stratégie dans un rapport publié en août 2020 sur les performances économiques et environnementales de l’agroécologie. Cependant, l’agroécologie s’avère rentable à moyen terme. Les bénéfices économiques proviendraient principalement de la réduction des charges liées à l’achat et à l’utilisation d’engrais et produits phytosanitaires de synthèse, ainsi que des prix de commercialisation plus élevés.

    Les solutions proposées par la nouvelle réforme de la PAC pour concilier impératifs environnementaux et priorités socio-économiques divisent

    Le 25 juin 2021, un nouvel accord a été conclu à Bruxelles entre les eurodéputés et les États membres de l’Union européenne sur la Réforme de la Politique agricole commune (PAC). Trois ambitions principales pour 2023-2027 : accroître le soutien des petites et moyennes exploitations agricoles, renforcer la transparence sur les dépenses des fonds européens et “verdir” l’agriculture européenne. Pour ce dernier point, les écorégimes, primes destinées aux agriculteurs adoptant des programmes environnementaux exigeants définis par chaque Etat selon des critères communs, sont notamment concernés. L’accord prévoit de consacrer en moyenne 25% (les eurodéputés réclamaient 30%) par an des paiements directs aux éco- régimes. 

    Du côté des eurodéputés Verts et des ONG environnementales, nombreux estiment cette réforme insuffisante. Pour l’eurodéputé Benoît Biteau, elle serait même “climatiquement nuisible et dangereuse pour la diversité”. Plusieurs points sont dénoncés, et parmi eux le nombre croissant de dérogations, notamment sur le conditionnement des versements au respect des normes sociales protégeant les travailleurs, ou sur le pourcentage de terres à ne pas cultiver et la rotation annuelle des cultures, qui sont des mesures clés pour la préservation de la biodiversité. Les politiques agricoles sont jugées incompatibles avec les objectifs environnementaux et climatiques de l’UE qui avaient été fixés par la Commission à travers le Pacte Vert, ne permettant pas de rendre plus durable le système alimentaire européen. Pour Benoît Biteau, “les écorégimes continuent d’utiliser comme références les hectares ou les têtes de bétail”, et encouragent ainsi les grandes exploitations et l’agriculture productiviste, au détriment des petites et moyennes exploitations agroécologiques. Par ailleurs, les objectifs de la Commission visant notamment une baisse à 50 % de l’usage des pesticides d’ici à 2030 et un quart des terres réservées au bio ne seront, selon lui, pas atteints, puisque ils ne sont pas “juridiquement contraignants”. 

    Alors qu’une personne sur trois se trouve en situation d’insécurité alimentaire à l’échelle mondiale et face au dérèglement climatique, il est essentiel de transformer notre système alimentaire actuel, basé sur l’agro-industrie et de soutenir les solutions permettant la résilience alimentaire.


  • Pour une région à la hauteur de l’urgence climatique

    Pour une région à la hauteur de l’urgence climatique

    Le 6 mai 2021, Notre Affaire à Tous publie ses propositions à destination des candidat·e·s aux élections régionales qui se tiendront les 20 et 27 juin 2021. Par ses compétences propres, la région est un échelon territorial essentiel pour engager une transition écologique et sociale, et lutter contre le dérèglement climatique. Notre Affaire à Tous propose ainsi des outils et des pratiques afin que ces enjeux soient pris en compte par les élu·e·s locaux·ales.

    Alors que le mouvement pour la justice climatique met en avant les préoccupations grandissantes des citoyen·ne·s pour les questions socio-environnementales et que de nombreuses personnes sur le territoire français sont déjà confrontées aux impacts du dérèglement climatique, la région doit intégrer de façon transversale, dans toutes ses politiques et activités, la problématique environnementale et les enjeux sociaux qui y sont liés. 

    L’échelon régional, souvent peu mis en avant, est pourtant au centre des réformes législatives récentes, et du projet de loi 4D, afin de positionner la région comme collectivité cheffe de file de la transition écologique. Il est essentiel que les futur·e·s élu·e·s se saisissent pleinement de ces compétences. 

    Ainsi, forte des constats tirés de son rapport “Un Climat d’inégalités” et de ses actions au niveau local, Notre Affaire à Tous a développé 38 propositions réparties en 8 grandes thématiques :

    • La conservation et sensibilisation autour de la biodiversité ;
    • La résilience du territoire à l’échelle de la région ;
    • La santé à l’échelle régionale ;
    • L’éducation, la formation et la sensibilisation aux enjeux climatiques ;
    • La participation au sein de la région ;
    • La nécessité de la recherche sur la justice environnementale ;
    • La vie quotidienne, économique et sociale ;
    • Le cadre de vie : logement et alimentation.

    Ces propositions s’appuient sur les compétences des régions, les outils déjà disponibles et les bonnes pratiques à développer afin de mettre en œuvre la justice environnementale à l’échelle régionale.

  • IMPACTS – 11 juin 2021 – Travail et changement climatique

    Ce 16e numéro de la revue de presse « IMPACTS«  se concentre sur les conséquences du dérèglement climatique sur le monde du travail et sur les travailleurs les plus touchés par les menaces que pose le phénomène sur leurs activités.  

    Dans un récent rapport intitulé “Travailler sur une planète plus chaude : l’impact du stress thermique sur la productivité du travail et le travail décent”, l’Organisation internationale du travail a alerté qu’à l’échelle mondiale, 80 millions d’emplois seraient menacés d’ici 2030 à cause du dérèglement climatique. En premier lieu, les chaleurs vont conduire à une perte de productivité dans de nombreux secteurs, notamment dans l’industrie et l’agriculture. “2,2% du total des heures travaillées dans le monde pourraient être perdues en raison des températures élevées, selon des projections basées sur une hausse de la température mondiale de 1,5°C d’ici la fin du siècle”. 

    Au niveau mondial, en 2017, ce serait 153 milliards d’heures de travail qui auraient été perdues à cause des canicules, une hausse de 60% par rapport à l’an 2000. Alors que le phénomène est déjà palpable, l’étude des conséquences des vagues de chaleur sur le milieu du travail est récente. Ce n’est que dans le quatrième et le cinquième rapport d’évaluation du GIEC (2007 et 2014) que ces problématiques ont été soulevées. Entre perte des outils de travail du fait de catastrophes naturelles, accidents du travail et risques sanitaires, les menaces sur le monde du travail sont multiples.  

    Pour combattre les inégalités sociales climatiques et environnementales, il nous faut les connaître. C’est le sens de cette revue de presse élaborée par Notre Affaire à Tous, qui revient sur les #IMPACTS différenciés du changement climatique, sur nos vies, nos droits et ceux de la nature

    Selon le “Guide pour les syndicats : Adaptation au changement climatique et monde de travail” les secteurs les plus touchés sont et seront l’agriculture et la sylviculture, très dépendants des ressources naturelles, mais aussi le secteur de la pêche, l’approvisionnement en énergie et en eau, la construction, les transports, le tourisme, ces derniers étant principalement vulnérables à cause du risque de catastrophes naturelles, et par ricochet les services d’urgence, de secours, et le monde de la santé. Enfin, les secteurs bancaires et assurantiels seront aussi de plus en plus affectés par l’augmentation de la fréquence, de l’intensité et des dégâts causés par les événements climatiques extrêmes. Côté assurances, on peut lire dans La Tribune que “le coût des sinistres liés aux catastrophes naturelles pourrait être multiplié par cinq d’ici à trente ans”, d’après l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Côté banques, un nouveau rapport de Reclaim Finance indique que les banques européennes sont « mal préparées à la perte de valeur de leurs actifs fossiles« . 

    Le rapport “Assessing the Implications of Climate Change Adaptation on Employment in the EU” indique que ce sont l’industrie manufacturière et les services collectifs, le commerce de détail et les loisirs qui souffriront le plus des conséquences en termes de pertes d’emplois, comptabilisant environ 100 000 pertes pour les deux secteurs d’ici 2050, puis les services aux entreprises (informatique, services juridiques, gestion des installations, etc.) et les services publics (jusqu’à 90 000 emplois perdus pour les deux), si aucune mesure d’adaptation n’est prise. 

    Ces difficultés et pertes d’emplois seront à la fois dues aux conséquences directes des catastrophes naturelles liées au dérèglement climatiques (tempêtes, inondations, canicules, etc) et génératrices de chocs économiques, mais aussi à une perte de productivité liée aux conditions de travail. 

    Pourquoi une telle réduction de la productivité au travail ? Parce qu’il a été démontré que les températures idéales pour un travail efficace devraient être comprises entre 16 et 24°C, selon le type de travail effectué. La productivité au travail a déjà été réduite depuis le début des années 2020 selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT). En effet, “entre 2000 et 2015, 23 millions d’années de vie active ont été perdues chaque année au niveau mondial en raison de ces risques”. Après la construction, c’est l’agriculture qui fait partie des secteurs d’ores et déjà les plus touchés, avec 60% des heures de travail perdues d’ici 2030. 

    Face à la menace du changement climatique, des chercheurs britanniques ont par ailleurs révélé dans une étude que diminuer le temps de travail permettrait de réduire les émissions de gaz à effet de serre drastiquement, car cela conduirait à une réduction des déplacements, de la production de biens de consommation et d’envois de mails. Les chercheurs préconisent dans cette étude de réduire le temps de travail à 9h par semaine, bien loin des 36h hebdomadaires moyennes travaillées par les Européen-nes. 

    Outre la perte de productivité, l’augmentation des températures entraîne également une perte de vigilance, ce qui augmente les risques d’accidents du travail (chutes, manipulation de produits chimiques).

    Les conséquences du dérèglement climatique, notamment la hausse des températures, l’évolution de l’environnement biologique et chimique et la modification de la fréquence et de l’intensité de certains aléas climatiques, ont un impact sur les travailleurs et les risques professionnels auxquels ils et elles font face. Elles augmentent la pénibilité du travail mais favorisent également les accidents et les risques psycho-sociaux.

    A mesure que le dérèglement climatique s’aggrave, la santé et la sécurité des travailleurs sont de plus en plus mises en danger. Le “Guide pour les syndicats : Adaptation au changement climatique et monde de travail” revient sur les effets du changement climatique sur la santé et la sécurité des travailleurs. Le stress thermique, l’épuisement lié à la chaleur, les boutons de chaleur, les syncopes et les évanouissements sont autant d’impacts sur la santé auxquels les travailleurs devront faire face, notamment dans les secteurs les plus touchés.

    Travailleurs : canicules, stress thermique et événements extrêmes 

    Les vagues de chaleur augmentent fortement la pénibilité de leur travail et les risques pour leur santé. Face à l’augmentation des périodes de canicule, le cas des travailleur·se·s en extérieur, dans les secteurs du BTP, de l’agriculture et de la restauration est révélateur car ils et elles se retrouvent en première ligne des impacts des fortes chaleurs, de plus en plus intenses et fréquentes. C’est le cas par exemple des livreurs à vélo qui livrent les repas lors de fortes chaleurs en fournissant un effort physique important sur des routes bitumées brûlantes. 

    Ce sont donc souvent les travailleurs les moins bien rémunérés et qui exercent les métiers les plus physiques, qui sont les plus exposés aux risques climatiques et aux événements météorologiques extrêmes et donc à des conditions de travail difficiles. Elles et ils sont aussi plus exposé-es au stress thermique qui peut mener à des coups de chaleur, c’est-à-dire à des températures qui s’élèvent au-delà de ce que le corps humain peut supporter sans souffrir de trouble physiologique. Les coups de chaleur peuvent être fatals et aller jusqu’au décès. Les risques de malaises, de blessures à cause de la diminution de la vigilance, de déshydratation, et de fatigue physique et mentale sont aussi exacerbés. Au cours des deux épisodes caniculaires de l’été 2019, dix personnes sont décédées sur leur lieu de travail, dont une majorité d’hommes travaillant en extérieur. Pendant les canicules 2020, 12 accidents du travail mortels liés à la chaleur ont été signalés par l’Inspection Médicale du Travail. 

    L’exposition à la chaleur peut également entraîner des complications de nombreuses maladies chroniques, notamment les maladies respiratoires, les maladies cardiovasculaires, le diabète et les maladies rénales

    Le lien entre changement climatique et exposition à des produits chimiques est aussi inquiétant. En effet, “des températures et une humidité élevées affecteraient les réponses physiologiques du corps aux agents toxiques de l’environnement. Ainsi, par exemple, une peau chaude et humide favorise l’absorption des produits chimiques”. Dans ces conseils aux agriculteur·rice·s en cas de forte chaleur, le Ministère de l’Agriculture rappelle les risques d’intoxication aux produits chimiques du fait d’une transformation plus rapide des produits phytosanitaires en vapeur et de leur plus grande absorption par l’organisme (voies respiratoires et peau).

    En 2012, un rapport de l’organisation internationale du travail “Working towards sustainable development” révélait que l’agriculture était “le plus gros employeur mondial avec plus d’un milliard de travailleurs, y compris un grand nombre d’ouvriers agricoles pauvres et d’agricultures vivriers (essentiellement des femmes)”. Or, le secteur est un des plus vulnérables face au changement climatique, tout en étant à la fois un des plus émetteurs de gaz à effet de serre au monde – en 2018, il était responsable de 19% des émissions de la France selon le Haut Conseil pour le Climat

    Les agriculteurs pâtissent déjà et pâtiront de plus en plus des effets du dérèglement climatique sur leurs cultures. Les sécheresses mais aussi les cycles de développement de plus en plus précoces des végétaux mettent en danger les cultures. Le mois d’avril 2021 a été particulièrement ravageur pour les exploitations françaises, à cause d’un épisode de gel intense, juste après que des records de températures maximales aient été battus au mois de mars. Les arboriculteurs, viticulteurs et maraîchers ont été les plus durement touchés par ce phénomène qui risque des s’accentuer avec le dérèglement climatique. 

    Le modèle agricole doit donc être revu pour s’adapter au défi climatique et pour la souveraineté alimentaire. Dans son rapport de 2014, le GIEC alertait déjà sur la menace d’une baisse des rendements des principales cultures (blé, maïs, riz…) “de 2% par décennie si les émissions mondiales de gaz à effet de serre ne sont pas divisées par deux d’ici à 2050”. Selon les Nations Unies, 1,5 milliard de personnes, soit 600 millions de plus qu’aujourd’hui, souffriront de la faim à la fin du siècle si nous maintenons nos émissions à leur niveau actuel. L’augmentation du niveau des océans, qui pourrait atteindre près d’un mètre à la fin du siècle (et bien davantage au-delà), menace également une part importante de l’activité agricole des Etats côtiers

    En Europe, quelques exemples sont déjà visibles. En Italie, par exemple, en 2019, l’augmentation des températures a créé un fléau de punaises dévoreuses de cultures, causant des centaines de millions d’euros de pertes. Plus au nord, en Finlande, qui est un important pays producteur d’orge et d’avoine de printemps, la fertilité du sol est en baisse, car des périodes humides et sèches plus fréquentes privent la terre de nutriments, selon un récent rapport de l’Agence européenne pour l’environnement.


    Paradoxalementdans certaines régions européennes, les températures plus chaudes ont favorisé les cultures. C’est le cas en Russie par exemple, où la superficie consacrée au blé d’hiver – premier pays expéditeur de cette culture – s’est étendue grâce à l’amélioration de la qualité des semences et à la douceur du climat. Selon un document de la Commission européenne, le changement climatique pourrait également favoriser les rendements du blé et du maïs en Europe de l’Est.

    Le code du travail indique que tout employeur doit prendre en considération les “ambiances thermiques”, mais il reste assez flou sur les règles à suivre lors de vagues de chaleur et aucun seuil de température maximale n’est fixé dans la loi

    Il existe bien une obligation générale du ou de la responsable, qui doit, en période de canicule ou non, veiller à la sécurité et la santé physique et mentale de ses employé·e·s, comme indiqué dans l’article L4131-1 du Code du travail. Cependant, en dehors des quelques normes précises telles que celles obligeant à fournir aux personnes travaillant en extérieur trois litres d’eau par jour ainsi qu’un abri, les autres éléments ne sont que des recommandations. Ainsi, l’Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles propose des aménagements du travail en périodes de canicules : modification des heures de travail (commencer et finir plus tôt), pauses plus régulières, diminution de la cadence du travail, arrêt des appareils électriques non nécessaires ou encore accès à l’eau. De même, dans ses rapports « Recommandations canicule », le Ministère de la Santé rappelle les bonnes pratiques aux employeur·se·s avant l’été (évaluation des risques, mise à disposition de locaux, affichage des recommandations) et pendant les vagues de chaleur (informer des risques, adapter les horaires de travail) permettant d’assurer la santé et la sécurité de leurs employé·e·s. 

    Dans le cas particulier des catastrophes naturelles, légalement, les salariés ont le droit avec l’accord de leur employeur à un congé non rémunéré de 20 jours par an dans la zone où il habite ou travaille.

    Ainsi, il apparaît nécessaire d’adapter les conditions de travail aux nouvelles conditions climatiques. Maintenir les heures de travail habituelles pour les métiers les plus exposés, notamment pendant les heures les plus chaudes (pour les travailleurs en extérieur) ne fera que contribuer à l’augmentation des accidents du travail et à la menace sur les conditions de travail dans ces secteurs. Cette adaptation permettra également de créer des emplois : certains indices laissent à penser qu’en Europe, au moins 500 000 emplois supplémentaires seront directement ou indirectement créés d’ici 2050 grâce à l’augmentation du nombre d’activités liées à l’adaptation. 

    Face à ces risques, la vulnérabilité des travailleur·se·s est de plus en plus prise en compte dans les plans d’adaptation nationaux (PNACC) et par des organismes comme l’ANSES. Pourtant, il y a encore une méconnaissance des dangers liés aux coups de chaleur et à ses conséquences, à la fois pour les employeur·se·s et les employé·e·s. Ces vulnérabilités posent des questions de justice sociale et de travail décent.

    Face à ces pertes déjà importantes de revenus, des citoyen-nes se tournent vers les tribunaux. En Allemagne en 2019, trois familles d’agriculteurs bio avaient lancé une action en justice, après avoir “perdu plus d’un tiers de leur récolte de millet, la moitié de leur récolte de foin« , une catastrophe pour leurs conditions de vie et leur futur. Les familles demandaient à l’Etat allemand de respecter ses propres objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2020 pour protéger les droits fondamentaux. Le recours a été rejeté par la cour administrative de Berlin, mais des enseignements peuvent en être tirés

    Une autre action en justice, le People’s Climate Case, lancée en 2018, regroupait 10 familles plaignantes d’Europe et du monde, dont plusieurs personnes voyaient leurs conditions de travail se détériorer par les effets déjà visibles du dérèglement climatique, à cause des impacts sur le tourisme, l’agriculture, le secteur forestier. Maurice FeschetAlfredo SendimMaike Recktenwald et d’autres demandaient à l’Union européenne de réhausser son ambition de réduction des émissions de gaz à effet de serre, afin de protéger leurs droits fondamentaux. Leur action n’a malheureusement pas abouti, à cause d’un cruel manque d’accès à la justice en Europe.

    La France est cependant plus épargnée que d’autres pays par les conséquences du dérèglement climatique à l’heure actuelle.Les travailleurs de nombreux autres pays sont – et seront – beaucoup plus touchés notamment du fait des conditions climatiques déjà existantes. Par exemple, au-delà de la chaleur, le taux d’humidité est un facteur important car il joue sur la sudation et donc les mécanismes biologiques de refroidissement du corps humains. Selon des modèles climatiques, une hausse de 2,5°C pourrait exposer plus d’un milliard de personnes à des conditions climatiques non compatibles avec le travail pendant au moins un mois de l’année. Dans une étude publiée en 2016 consacrée aux impacts de la chaleur sur le travail, le Climate Vulnerable Forum indique que les régions les plus touchées seront l’Afrique de l’Ouest et l’Asie du Sud pour lesquelles il est estimé qu’environ 5% des heures travaillées seront perdues en 2030. 

    • Des métiers rendus plus difficiles par l’évolution du climat

     Les travailleurs les plus touchés sont d’ores et déjà les travailleurs les plus pauvres et vulnérables. Ces derniers n’ont pas le choix d’aller travailler malgré les conditions climatiques et ne sont pas protégés par le droit du travail. Ainsi, en 2015, la canicule a tué plus de 1 000 personnes au Pakistan, dont un nombre important de travailleurs précaires. Le dérèglement climatique va accentuer la pression sur ces travailleurs et les inégalités sociales.


    Les métiers agricoles notamment sont rendus plus difficiles par le dérèglement climatique. La sécheresse, tout comme la montée des eaux et les fortes pluies, réduit la production agricole et impacte l’élevage. Or, l’agriculture est le premier pourvoyeur d’emplois à l’échelle de la planète. En plus des pertes de revenus liées aux évolutions climatiques, les conditions de travail se dégradent. Ainsi, les paludiers en Inde font face à une perte d’un quart de leur production par an associée à une perte de qualité (et donc une diminution du prix) du fait des fortes pluies et des tempêtes de sable. En parallèle, ils doivent travailler en plein soleil sous des températures pouvant désormais aller jusqu’à 54°C. 

    • Le renforcement de l’esclavage moderne

    Le dérèglement climatique a un impact sur l’esclavage moderne. En rendant plus vulnérables les populations et en renforçant les inégalités, il facilite l’esclavagisme. Pour Michel Veuthey, “la traite se développe parce qu’il y a vulnérabilité. Aujourd’hui, il faudrait ainsi intégrer l’enjeu du combat contre la traite des personnes dans le cadre plus large de la lutte contre le changement climatique, car en créant des vulnérabilités, le changement climatique fait naître de nouveaux réseaux de traite”. 

    Selon l’Organisation Internationale du Travail, les personnes déjà victimes de discriminations et d’inégalités, notamment les femmes et les filles, sont les principales victimes et 40,3 millions de personnes sont victimes de l’esclavage moderne. 

    Au Cambodge, des personnes chassées de leurs terres par la sécheresse ont vu leurs dettes rachetées par des propriétaires d’usines qui les exploitent en vue d’un remboursement. Les déplacés climatiques – et leurs enfants – se retrouvent emprisonnés dans une servitude pour dette car les sommes qu’ils gagnent en travaillant sont insuffisantes pour rembourser ce qu’ils doivent. En Europe, les risques d’esclavage moderne sont aussi en augmentation, notamment pour les personnes migrantes. Ce fléau risque donc de poursuivre sa croissance avec le développement des migrations liées directement ou indirectement au dérèglement climatique. 

    Amnesty International a participé à la mise en œuvre de la Loi britannique de 2015 sur l’esclavage moderne relative à la transparence des chaînes d’approvisionnement, laquelle oblige les organisations qui mènent des activités au Royaume-Uni, et dont le chiffre d’affaires total est supérieur ou égal à 36 millions de livres sterling, à indiquer quelles mesures elles adoptent pour veiller à ce que les acteurs de leurs chaînes d’approvisionnement mondiales ne se livrent pas à des pratiques d’esclavage moderne.

  • CP / Elections régionales : 38 propositions pour une région à la hauteur de l’urgence climatique et sociale

    Communiqué de presse – Jeudi 6 mai 2021

    Ce 6 mai, Notre Affaire à Tous publie ses propositions à destination des candidat·e·s aux élections régionales qui se tiendront les 20 et 27 juin 2021. Par ses compétences propres, la région est un échelon territorial essentiel pour engager une transition écologique et sociale, et lutter contre le dérèglement climatique. Notre Affaire à Tous propose ainsi des outils et des pratiques afin que ces enjeux soient pris en compte par les élu·e·s locaux·ales.

    Alors que le mouvement pour la justice climatique met en avant les préoccupations grandissantes des citoyen·ne·s pour les questions socio-environnementales et que de nombreuses personnes sur le territoire français sont déjà confrontées aux impacts du dérèglement climatique, la région doit intégrer de façon transversale, dans toutes ses politiques et activités, la problématique environnementale et les enjeux sociaux qui y sont liés. 

    L’échelon régional, souvent peu mis en avant, est pourtant au centre des réformes législatives récentes, et du projet de loi 4D, afin de positionner la région comme collectivité cheffe de file de la transition écologique. Il est essentiel que les futur·e·s élu·e·s se saisissent pleinement de ces compétences. 

    Ainsi, forte des constats tirés de son rapport “Un Climat d’inégalités” et de ses actions au niveau local, Notre Affaire à Tous a développé 38 propositions réparties en 8 grandes thématiques :

    • La conservation et sensibilisation autour de la biodiversité ;
    • La résilience du territoire à l’échelle de la région ;
    • La santé à l’échelle régionale ;
    • L’éducation, la formation et la sensibilisation aux enjeux climatiques ;
    • La participation au sein de la région ;
    • La nécessité de la recherche sur la justice environnementale ;
    • La vie quotidienne, économique et sociale ;
    • Le cadre de vie : logement et alimentation.

    Ces propositions s’appuient sur les compétences des régions, les outils déjà disponibles et les bonnes pratiques à développer afin de mettre en œuvre la justice environnementale à l’échelle régionale.

    Pour Notre Affaire à Tous : “La région se doit d’utiliser tous les leviers à sa disposition pour garantir le droit à un environnement sain de toutes et tous et dans le même temps, préserver le vivant : le mandat à venir s’ancre dans l’urgence climatique contre laquelle des mesures socio-environnementales devront être élaborées pour une réelle transition juste”.

    Contacts presse

    • Clothilde Baudouin, chargée de plaidoyer inégalités climatiques : 06 09 73 39 39
    • Chloé Gerbier, juriste de l’association Notre Affaire à Tous : 06 46 43 55 09
  • Le racisme environnemental

    Article rédigé par Chloé Lailler, Julie Zalcman et Clothilde Baudouin, membres de Notre Affaire à Tous

    Introduction

    Quel lien existe-t-il entre la protection de l’environnement et l’antiracisme ? Ces deux enjeux peuvent paraître a priori éloignés. Pourtant, depuis plus de 40 ans, le mouvement pour la justice environnementale a mis en lumière la manière dont les discriminations créent et renforcent les inégalités écologiques. Le racisme, vu comme une discrimination liée à la hiérarchisation entre des “races”, est alors apparu comme un prisme d’étude des inégalités environnementales. Après être revenues sur l’émergence de la notion de racisme environnemental dans l’histoire plus large de la justice environnementale, de ses figures et luttes emblématique, nous étudierons le concept de racisme environnemental, sa pertinence et ses limites. Puis, nous nous intéresserons à plusieurs cas d’injustices environnementales en France et à la manière dont la nouvelle génération de militant·e·s écologistes se saisit aujourd’hui de ces enjeux. 

    Le mouvement pour la justice environnementale aux États-Unis

    Encore marginal en France, le mouvement pour la justice environnementale apparaît aux États-Unis dans les années 1980. Le sociologue Razmig Keucheyan est l’un des premiers en France à s’être intéressé à ce mouvement, dont il relate l’histoire dans son essai d’écologie politique “La nature est un champ de bataille ». Il insiste sur le fait que le mouvement pour la justice environnementale n’est pas né au sein du mouvement environnementaliste ou écologiste, mais est une émanation du mouvement pour les droits civiques des afro-américains.

    En effet, le mouvement pour la justice environnementale fait le constat que les activités industrielles polluantes, et plus particulièrement les usines de stockage et de traitement des déchets toxiques, sont majoritairement situées à proximité des quartiers où vivent des classes populaires et des minorités ethniques (en particulier des amérindien·ne·s et afro-américain·e·s). Le choix de placer les activités polluantes à proximité de quartiers ouvriers et de quartiers où vivent des minorités s’explique par le fait que ces populations ont moins de ressources (économiques, sociales, etc.) pour s’opposer à l’implantation d’industries polluantes. Inversement, dans les quartiers où vivent des populations blanches et aisées, les entreprises polluantes encourent plus de risques juridiques et économiques. La décision de placer dans tel ou tel quartier une usine de traitement des déchets est donc déterminée par la ségrégation résidentielle, les inégalités socio-économiques et raciales. La dimension raciste d’une telle décision n’est pas forcément consciente ou intentionnelle chez les acteurs décisionnaires. Ce sont les habitant·e·s qui en sont victimes qui prennent conscience à la fin des années 1970 de la discrimination raciale qui sous-tend la répartition territoriale des décharges.La prise de conscience de ces inégalités environnementales entraîne plusieurs mobilisations, dans la lignée de celles menées par le mouvement des droits civiques. Une première action juridique a lieu en 1979 avec la décision Bean v. Southwestern Waste Management Corp.(1). Des résident·e·s de Houston, représenté·e·s par l’avocate Linda McKeever Bullard, s’opposent alors à l’installation d’une décharge municipale à côté de leur domicile. La plaidoirie de l’avocate s’appuie sur l’Equal Protection Clause du 14ème amendement de la Constitution américaine, qui dispose qu’“aucun État ne pourra, dans sa juridiction […] dénier à une personne une protection identique à celle inscrite dans les lois”. Par ailleurs, les plaignant·e·s commandent une étude au sociologue Robert D. Bullard (l’époux de Linda McKeever Bullard), afin de documenter la localisation des décharges publiques à Houston. Cette étude, intitulée “Solid Waste Sites and the Black Houston Community” (2), met en évidence le fait que les décharges municipales sont majoritairement situées dans des quartiers habités par des afro-américain·e·s, alors même qu’ils·elles ne représentent que 25% de la population de la ville. Cette affaire permet ainsi de reconnaitre pour la première fois l’existence d’une discrimination raciale en matière d’exposition aux déchets et pollutions. Le professeur Robert Bullard sera l’un des principaux théoriciens du racisme environnemental, processus d’exclusion territorial qu’il définit comme :

    l’ensemble des politiques, des pratiques et des directives environnementales qui ont des conséquences négatives disproportionnées, qu’elles soient intentionnelles ou non, sur certaines personnes, certains groupes ou certaines communautés en raison de leur race ou de leur couleur” (3).

    Au-delà des actions juridiques, le mouvement pour la justice environnementale mobilise le même répertoire d’actions que le mouvement des droits civiques (4) : manifestations, sit-in ou encore boycotts. Une première grande mobilisation de ce type a lieu en 1982 dans le comté de Warren en Caroline du Nord, où les habitant·e·s se sont opposé·e·s à l’implantation d’un site d’enfouissement de déchets dangereux dans un quartier où 75% de la population était noire et 20% vivait sous le seuil fédéral de pauvreté. Si les riverain·e·s ont perdu l’action en justice contre l’enfouissement des déchets, leur mobilisation a pris une ampleur considérable. De nombreuses actions directes non violentes ont été organisées pour bloquer les camions transportant les déchets toxiques et plus de 550 militant·e·s ont été arrêté·e·s. Cette action de désobéissance civile de masse a réellement marqué la naissance du mouvement pour la justice environnementale et a permis une prise de conscience dans l’opinion publique américaine de l’accumulation de deux formes de discriminations : l’une environnementale, l’autre raciale. 

    L’émergence du concept de racisme environnemental dans le sillage du mouvement pour la justice environnementale

    Suite à cette première grande mobilisation, des universitaires et des militant·e·s ont alors mené des enquêtes de terrain pour documenter ce phénomène. Le terme de “racisme environnemental” a été utilisé pour la première fois par le révérend Benjamin Chavis, compagnon de route de Martin Luther King, qui dirigeait la commission pour la justice raciale de la United Church of Christ, et qui a coordonné en 1987 le rapport “Toxic Wastes and Race in the United States” (5). C’est la première étude nationale qui croise les données géographiques et démographiques sur l’implantation des sites de traitement des déchets toxiques aux États-Unis. Le rapport établit ainsi que “although socio-economic status appeared to play an important role in the location of commercial hazardous waste facilities, race still proved to be more significant” (6).

    Le racisme environnemental désigne ainsi un type d’inégalité environnementale qui prend racine dans une organisation sociale raciste. S’il n’existe pas forcément une intention directe de nuire aux populations, le racisme environnemental est un phénomène arbitraire, le résultat d’une histoire sociale, de hiérarchies, de rapports de pouvoir et de dominations. Les inégalités raciales sont ainsi corrélées à des inégalités géographiques, économiques et sociales. La hiérarchisation raciste d’une société, la marginalisation et les discriminations visant certains groupes ethniques renforcent les risques pour ces personnes d’être plus impactées par les pollutions industrielles, les catastrophes environnementales ou encore les événements météorologiques extrêmes. Il convient donc de distinguer le racisme environnemental d’autres formes d’inégalités environnementales.

    L’étude coordonnée par le révérend Chavis aura un impact politique puisqu’en 1994, le président Bill Clinton signe l’Executive Order 12898 (7) qui fait de la justice environnementale un objectif de politique publique au niveau fédéral. Cet Executive Order insiste tout particulièrement sur la nécessité d’agir contre les discriminations environnementales que vivent les minorités ethniques et les populations à faible revenu. 

    En 2005, la catastrophe de l’ouragan Katrina ravive la question du racisme environnemental. En effet, les quartiers afro-américains de la Nouvelle-Orléans sont dévastés par l’ouragan, car mal protégés par les digues et situés dans des zones inondables, tandis que les quartiers blancs et aisés, situés dans les hauteurs de la ville, sont plutôt épargnés. Cette catastrophe met ainsi en lumière l’intersection de plusieurs inégalités que sont l’âge, la classe sociale, la couleur de peau et le genre. En effet, un tiers de la population de la Nouvelle-Orléans vit sous le seuil de la pauvreté (8) et deux tiers des habitant·e·s de la ville sont noir·e·s. Parmi les victimes de la catastrophe, les personnes âgées et les noir·e·s sont surreprésentés. En effet, 67% des personnes décédées avaient plus de 65 ans. Si l’on analyse les décès de personnes de moins de 65 ans, on constate que les personnes noires représentent 82% des victimes (9). On estime de plus que 80% des adultes laissés-pour-compte suite à l’ouragan étaient des femmes (10). Les grandes vulnérabilités et la moindre résilience sont deux conséquences frappantes de ces inégalités. 

    Plus récemment encore, une autre affaire de racisme environnemental a éclaté dans le Michigan : c’est l’affaire de l’eau contaminée au plomb à Flint (11), une ville où 57% des habitant·e·s sont afro-américain·e·s. En 2014, pour faire des économies, le gouverneur a décidé de changer la source d’approvisionnement de l’eau de la ville et de puiser dans la rivière Flint (12), polluée par des déversements de déchets d’usines. La pollution de l’eau (13) a rongé les canalisations en plomb qui n’ont pas été traitées. L’eau a ainsi été contaminée au plomb (14), provoquant de graves impacts sanitaires (15) pour la population et plus particulièrement pour les bébés et jeunes enfants : dommages cérébraux, retards de développement ou encore risques accrus de troubles comportementaux et respiratoires. 

    Ainsi, le mouvement pour la justice environnementale a émergé, s’est construit et a été porté par les personnes noires afro-descendantes et les personnes en situation de précarité en réaction au racisme environnemental et aux inégalités socio-économiques et de genre. Ce mouvement est donc né dans un contexte précis et localisé, celui des États-Unis de la fin du XXème siècle, et le racisme environnemental a été théorisé à partir des expériences de discriminations subies par les minorités ethniques en Amérique du Nord. Pendant plusieurs années, voire décennies, ce mouvement a eu peu d’impacts en dehors des États-Unis, mais depuis quelques années des chercheur·euse·s et militant·e·s se saisissent de l’enjeu du racisme environnemental pour analyser les exemples d’injustices environnementales en France. Ainsi, existe-t-il des exemples similaires de racisme environnemental en France ? Quelles pourraient être les applications mais aussi les limites du concept de racisme environnemental en France ?

    Existe-t-il un “racisme environnemental” en France ?

    Il existe peu de littérature au sujet du racisme environnemental en France hexagonale. Les discriminations et inégalités que subissent les personnes racisées ne sont presque jamais étudiées au prisme des inégalités écologiques. Le racisme environnemental est également difficile à mesurer en France car l’utilisation des statistiques ethniques est plus restreinte qu’aux États-Unis. En effet, il est interdit en France de traiter des données à caractère personnel laissant apparaître directement ou indirectement les origines raciales ou ethniques des personnes. Pour mesurer les discriminations raciales, les statisticien·ne·s s’appuient donc sur d’autres données comme le nom de famille, la nationalité de naissance ou encore le pays de naissance des personnes concernées et de leurs parents. Certaines études se basent aussi sur le “ressenti d’appartenance”, c’est-à-dire les sentiments d’injustice ou de discrimination des personnes interrogées. 

    L’enquête “Trajectoire et origines” menée par l’INED en 2016 avec le soutien de l’INSEE est l’outil de référence sur la mesure des discriminations et des inégalités raciales en France (16). Cette étude démontre la forte ségrégation résidentielle qui touche les immigré·e·s et leurs descendant·e·s, et plus particulièrement la concentration des Africain·e·s subsaharien·ne·s, des Maghrébin·e·s et des Turc·que·s dans les quartiers modestes. Or, ces quartiers défavorisés sont touchés par plusieurs inégalités écologiques : mauvaise qualité de l’air, pollutions diverses, proximité d’usines Seveso, nuisances sonores, etc. 

    En 2014, Lucie Laurian et Richard Funderburg sont les premiers à s’intéresser à ces questions en France. Ils publient alors une étude sur la localisation des incinérateurs en France depuis les années 1960 (17). Les deux chercheurs font le constat que pour chaque pourcentage supplémentaire d’immigré·e·s présent·e·s dans une ville, la probabilité de trouver un incinérateur augmente de 29%. Il existe donc une inégalité d’exposition aux risques de pollutions industrielles. 

    Ces premières études sont complétées par de nouvelles et par le vécu des personnes racisées. Le racisme environnemental apparaît alors dans le paysage français comme une réalité, notamment lorsque l’on s’intéresse aux trois grandes situations où le facteur raciste est prégnant : celle des banlieues et quartiers populaires, celle des aires d’accueil des “Gens du Voyage” et celle des Outre-mers. En effet, dans ces trois cas, on observe que le lieu de résidence, le logement, les transports, le travail sont autant de domaines qui montrent que les conditions de vie des personnes racisées les exposent à des risques environnementaux et climatiques importants.

    Lieu de résidence et environnement dégradé

    L’existence d’une inégalité d’exposition aux risques environnementaux en France, démontrée par l’étude de Laurian et Funderburg en 2014, conduit à la surreprésentation des populations racisées dans des lieux de vie à l’environnement dégradé et pollué.

    Les banlieues et quartiers défavorisés

    Ainsi, d’après une étude dirigée par Séverine Deguen, certains quartiers populaires où se trouvent une majorité de personnes racisées sont aussi plus exposés à la pollution de l’air, principalement causée par la circulation automobile, et la mortalité suite aux pics de pollution y est plus élevée (18). Ce phénomène concerne notamment les habitant·e·s vivant au nord et à l’est de Paris, ou encore les habitant·e·s de Saint-Denis vivant près du périphérique et de l’autoroute A1, où sont enregistrés les pics de pollution les plus importants. À Paris intramuros la situation peut paraître paradoxale : les quartiers riches du centre et de l’ouest sont parmi les plus pollués, du fait des grands axes de circulation automobile, notamment aux abords des quais de Seine ou sur les grands boulevards. Pourtant, c’est dans les quartiers pauvres du nord et de l’est que la mortalité enregistrée suite aux pics de pollution est la plus élevée. 

    Les conditions d’existence et l’état de santé peuvent expliquer la plus grande vulnérabilité des habitant·e·s des quartiers pauvres face à la pollution de l’air, du fait de divers facteurs : une mauvaise qualité de l’air intérieur, un temps plus conséquent passé dans les transports en commun, l’insalubrité des lieux de travail ou encore un moindre accès aux aménités environnementales. Ce phénomène parisien des quartiers riches plus pollués que les quartiers défavorisés ne se reproduit cependant pas dans d’autres grandes villes françaises comme Marseille ou Lille.

    Bien qu’il n’y ait peu d’études françaises sur ces questions, ces éléments font écho à différentes études américaines sur l’impact de la pollution de l’air sur les communautés racisées aux États-Unis, où en moyenne les communautés non-blanches respirent 66% plus d’air pollué par le trafic routier que les communautés blanches en raison de l’emplacement géographique de leurs quartiers proches des sources de pollution (19). Les impacts sur la santé des personnes sont prouvés.

    Les aires d’accueil des Voyageur·euse·s

    L’inégalité environnementale liée à la pollution du lieu de résidence est particulièrement visible dans le cas des populations qui ne peuvent choisir librement leur lieu de vie et dépendent de l’autorisation ou de la tolérance des autorités locales ou nationales, comme les personnes catégorisées comme “Gens du Voyage”. Les Voyageur·euse·s souhaitant vivre selon leur mode de vie traditionnel ne peuvent vivre que sur les terrains autorisant leurs caravanes, principalement des aires d’accueil et terrains aménagés par les communes ou les Établissements Publics de Coopération Intercommunales (EPCI) en conformité avec un Schéma Départemental d’Accueil des Gens du Voyage qui définit le nombre d’aires et d’emplacements à construire (20). Ce sont donc les communes ou les EPCI concernées qui choisissent le site où sera aménagée l’aire d’accueil. Or, selon les recherches de William Acker, juriste et chercheur spécialisé sur ces problématiques, sur 50 départements et 700 aires d’accueil étudiées, plus de 62% des aires d’accueil sont situées dans des zones à fortes nuisances industrielles ou environnementales (21). 

    De même, dans une étude menée sur 122 aires d’accueil de 4 départements (le Nord, le Rhône, la Loire-Atlantique et la Haute-Garonne), Juliette Loiseau, journaliste, recense des pollutions et dégradations environnementales dans neuf cas sur dix (22), des chiffres similaires à ceux rapportés par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) dès 2009 (23). Cette étude souligne la présence des aires d’accueil dans des zones proches de déchetteries, de zones industrielles avec des usines polluantes et dangereuses ou encore d’autoroutes. Ainsi, l’aire d’accueil de Rouen-Petit Quevilly a été construite par la Métropole Rouen Normandie en pleine zone industrielle, à moins de 500 mètres de l’usine Lubrizol classée SEVESO, et celle de Saint-Menet par la Métropole Aix-Marseille-Provence à proximité immédiate de l’usine Arkema, également classée SEVESO seuil haut. Les aires sont régulièrement installées près de carrières et autres activités extractives, comme celle de Gex dans l’Ain (24), ou près d’autoroutes et de voies ferrées.

    L’environnement dégradé des aires d’accueil des “Gens du Voyage” a donc de graves conséquences sur la santé des Voyageur·euse·s, qui ont une espérance de vie 15 ans inférieure à la moyenne nationale (25).

    Les camps de migrant·e·s et de populations Roms

    Les campements des populations Roms et migrantes sont également symptomatiques de ce racisme environnemental. En effet, les zones où ces campements sont tolérés, voire parfois encouragés, par les autorités sont des zones souvent polluées ou à l’environnement dégradé. De nombreux bidonvilles se trouvent en bordure d’autoroutes. Le campement d’exilés dit de la “Jungle” de Calais a ainsi été installé le long de l’autoroute, dans une zone en partie classée SEVESO (26), tout comme celui d’Angres quelques kilomètres plus loin (27). Mais la majorité des campements et bidonvilles se trouvent proches des déchetteries et lieux de dépôt de déchets polluants. C’est le cas par exemple de l’ancien bidonville de la plaine de Triel-Carrières dans les Yvelines, qui a servi d’égout sans aucun retraitement des eaux usées pendant des années, entraînant une forte pollution des sols aux métaux lourds (28).

    Qualité du logement et sensibilité accrue aux événements climatiques extrêmes

    Au-delà de la pollution environnante, c’est également la qualité du logement de certaines populations racisées qui est symptomatique d’un racisme environnemental. En effet, leurs lieux de vie les rendent beaucoup plus vulnérables aux événements climatiques, canicules, vagues de froid, tempêtes ou encore aux inondations, alors même que ces aléas météorologiques vont augmenter, en intensité et en fréquence, en raison du dérèglement climatique.

    Lors de la canicule de 2003, le Val-de-Marne a été le département le plus sévèrement touché (surmortalité de + 171%), suivi du département de la Seine-Saint-Denis (surmortalité de +160%). Cette surmortalité s’explique par le phénomène des îlots de chaleur urbain, mais aussi par les conditions de vie des habitant·e·s : logements surpeuplés et mal isolés, peu d’espaces verts, difficultés d’accès à l’eau pour certaines populations, état de santé général dégradé ou encore mauvaise diffusion des informations sur les bonnes pratiques pour se protéger des fortes chaleurs.

    Les habitant·e·s des quartiers populaires sont aussi plus vulnérables aux vagues de froid. Selon une enquête de l’Observatoire des Zones Urbaines Sensibles, 30,8% des habitant·e·s des ZUS ont connu en 2006 des périodes de froid dans leur logement en raison d’une mauvaise isolation ou de problèmes d’installation et de mise en route du chauffage, contre 13% pour le reste de la population. 

    Au-delà des banlieues et des quartiers populaires, les terrains, bidonvilles et campements où vivent des personnes racisées (exilé·e·s, Voyageur·euse·s ou encore Roms), souvent situés dans des zones en marge des villes, sont pour beaucoup extrêmement vulnérables aux aléas climatiques et météorologiques. Par exemple, les fortes pluies sont souvent à l’origine d’inondations dans ces bidonvilles, comme à la “Jungle” à Calais en 2016 (29) et dans un camp de migrant·e·s près de Toulouse suite à une crue de la Garonne en 2019 (30). À l’inverse, les habitant·e·s des campements sans accès à l’eau sont parmi les premier·ère·s touché·e·s par les sécheresses et les canicules (31) qui seront plus fréquentes, avec des conséquences pouvant être dramatiques : en 2019, une personne est décédée sur un campement rom à Montpellier des suites de la canicule (32).

    La mauvaise qualité des logements de personnes racisées est aussi à l’origine de pollutions intérieures. Le sociologue Razmig Keucheyan présente ainsi le saturnisme comme un cas de racisme environnemental. Le saturnisme est une intoxication causée par la contamination de l’eau au plomb ou par l’inhalation de poussières de peintures au plomb dégradées. En France, cette maladie ancienne a fait son retour dans les années 1980. Le saturnisme concerne majoritairement les enfants de migrant·e·s d’Afrique subsaharienne, à Paris et dans les banlieues. En Angleterre, ce sont les enfants d’immigré·e·s indien·ne·s qui sont le plus touchés par le saturnisme et aux États-Unis la maladie touche majoritairement les enfants afro-américains et les enfants d’immigré·e·s d’Asie du Sud. Les pollutions au plomb présentes dans les logements anciens et insalubres où vivent les immigré·e·s sont à l’origine des cas de saturnisme infantile. Anne-Jaune Maudé parle ainsi d’une “maladie sociale de l’immigration” (33). 

    Travail et exposition aux risques environnementaux

    Les études sur les risques environnementaux liés au travail intègrent rarement des  analyses en termes d’inégalités sociales. Pourtant, la question du racisme est prégnante. Les métiers exposés à des risques environnementaux du fait de l’utilisation de produits cancérigènes sont majoritairement exercés par des personnes racisées : ce sont notamment des femmes d’origine subsaharienne qui font le ménage avec des produits toxiques dans les bureaux des entreprises, des hommes racisés qui ramassent les poubelles, des saisonniers maghrébins qui ramassent les légumes dopés aux pesticides dans les champs du sud de la France, pour ne citer que quelques exemples. 

    De même, les études et documentations sur les situations économiques et sanitaires des personnes qui vivent dans des bidonvilles, comme certaines personnes Roms ou exilées, peuvent être lues sous le prisme du racisme environnemental dont ces personnes sont victimes. Ainsi, des études concernant des populations Roms démontrent qu’elles sont parfois forcées à travailler dans des opérations clandestines de recyclage de déchets informatiques ou polluants, car privées d’autres opportunités d’emploi. Des entreprises ou des particuliers contournent les circuits officiels et réglementés en déposant les déchets près ou dans les bidonvilles pour ne pas payer le coût du recyclage (35), créant des décharges sauvages, comme à Villejuif (94) (36). Ces décharges entraînent de fortes pollutions et dégradations environnementales ainsi que des risques sérieux pour la santé des personnes traitant et vivant près de ces déchets polluants et toxiques. En 2010, l’ONG Médecins du Monde alertait sur les forts taux de saturnisme et d’intoxication au plomb dans les communautés roms vivant dans des bidonvilles de différentes régions de France, en particulier les enfants qui jouent près des déchets et des fumées toxiques issues de l’incinération de divers matériaux (37).

    Inégalités d’accès à la nature et aux ressources naturelles

    En plus des inégalités d’exposition aux risques environnementaux, s’ajoutent les inégalités d’accès à la nature, ce qu’on appelle les aménités environnementales. Ces espaces sont souvent rares à proximité des lieux de vie des personnes racisées, par exemple les aires d’accueil des Voyageur·euse·s bétonnées et les quartiers populaires avec très peu – voire aucun – parcs ou jardins. De même, les opportunités de vacances à la mer, à la montagne ou dans des résidences secondaires à la campagne sont rares, voire inexistantes, pour les habitant·e·s des tours HLM de banlieues. Les communes modestes ont également moins de budget pour développer et entretenir leurs espaces verts.

    Le manque d’accès à la nature signifie également un manque d’accès aux ressources qu’elle fournit. Ainsi, le racisme environnemental se manifeste aussi par des difficultés d’accès aux ressources naturelles et à l’environnement. Par exemple, les campements de personnes migrantes ou Roms sont souvent situés dans des zones où l’accès à la nature et à ses ressources, notamment l’eau, est extrêmement limité. En moyenne, 77% des bidonvilles en France n’ont pas d’accès à l’eau potable sur site (38) et ce chiffre peut s’élever à 91% dans certains départements comme l’Essonne et le Val-de-Marne selon le CNCDH-Romeurope (39). Si aucune étude globale n’a été menée sur les minorités racialisées et l’environnement en France, le Bureau Européen de l’Environnement souligne l’ampleur du phénomène du racisme environnemental en Europe centrale et orientale qui touche 154 000 Roms dont les lieux de vie se situent dans des zones polluées et avec un accès difficile aux ressources naturelles et environnementales (40). 

    Les inégalités d’accès à l’eau sont aussi frappantes entre le territoire métropolitain et les Outre-mers. En Guyane, 4,5% des habitant·e·s n’ont pas accès à des services de base d’eau potable (environ 35 000 personnes) et à Mayotte 16,3% des habitant·e·s n’ont pas accès à des services d’eau potable gérés en toute sécurité (environ 41 000 personnes) (41).

    L’écologie décoloniale et la demande de justice des citoyen·ne·s ultramarins : l’affaire du chlordécone

    Chronologie du chlordécone et de son histoire antillaise

    Les Antilles françaises ont une histoire très similaire à celle des États-Unis. La colonisation de ces territoires par les occidentaux a conduit au génocide des peuples autochtones et à la mise en place de la traite négrière. La déportation d’Africain·e·s noir·e·s et l’esclavage ont conduit au développement de plantations de canne à sucre qui ont fait la richesse des colons. Si l’esclavage a été définitivement aboli en 1948, les inégalités sociales, économiques et raciales issues de l’histoire coloniale des Antilles perdurent encore aujourd’hui. Le scandale du chlordécone est un exemple d’inégalité environnementale causée par la structuration néocoloniale de la société antillaise. 

    Le chlordécone est un insecticide qui a été utilisé pour lutter contre le charançon, un insecte qui ravage les cultures de bananes. Or, la banane est le fruit le plus cultivé aux Antilles et le 2ème fruit le plus consommé en France. Les ravages du charançon représentaient donc une menace réelle pour l’économie antillaise. Le Kepone, premier pesticide à base de chlordécone, est mis sur le marché américain en 1958. En 1963 une première étude démontre la toxicité du chlordécone sur les animaux. En 1972 la France délivre une autorisation de mise sur le marché provisoire pour le chlordécone. À peine deux ans plus tard, une mission d’enquête de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) alerte sur l’éco-toxicité du chlordécone. En 1976, les États-Unis interdisent la vente et l’utilisation du chlordécone après le scandale de Hopewell, du nom de la ville où se trouvait une usine de production de Kepone et où des ouvriers ont été contaminés et où la rivière James a été polluée. 

    Dès les années 1970, plusieurs études ont démontré la toxicité du chlordécone. Le produit a ainsi été interdit aux États-Unis dès 1976. En France, le chlordécone ne sera interdit que quinze plus tard, en 1990. Malgré cette interdiction, l’État a accordé deux dérogations pour continuer d’utiliser le chlordécone aux Antilles. Pour justifier cette exception antillaise alors que la toxicité du chlordécone était établie, l’argument de l’épuisement des stocks a été invoqué. Or, le propriétaire de l’entreprise qui produisait le chlordécone était aussi le président du groupement des producteurs de bananes en Martinique. Cet homme, Yves Hayot, est issu d’une riche et puissante famille de békés, les descendants des premiers colons européens (42). Grâce à la dérogation qu’il a obtenue, le chlordécone a pu être utilisé officiellement jusqu’en 1993 aux Antilles. L’interdiction du chlordécone aux Antilles est alors intervenue 17 ans après son interdiction aux États-Unis. En outre, malgré son interdiction, des stocks de plusieurs tonnes de chlordécone retrouvés en 2002 laissent croire que certains agriculteurs ont continué à utiliser l’insecticide de façon illégale pendant près de dix ans. 

    Le scandale du chlordécone

    Le scandale du chlordécone éclate à la fin des années 1990 lorsque des analyses révèlent une pollution des cours d’eau avec un taux de chlordécone largement au-dessus des normes. 18 000 hectares seraient ainsi contaminés à des degrés différents, soit ¼ de la surface agricole de la Martinique et de la Guadeloupe. Il s’agit d’une pollution généralisée : la pollution des sols a contaminé les nappes phréatiques, les cours d’eau et les littoraux. On estime qu’un aliment sur dix serait aujourd’hui contaminé aux Antilles. C’est donc l’ensemble de la production agricole qui est concernée : les fruits et légumes mais aussi la viande et le poisson. Certaines zones maritimes, proches du rivage, sont désormais interdites à la pêche du fait de cette pollution. 

    L’injustice environnementale que représente l’intoxication au chlordécone a de multiples facettes. Il s’agit d’abord d’une inégalité d’impact : les premières victimes sont les ouvriers agricoles qui travaillaient dans les bananeraies et ont été en contact direct avec l’insecticide. Cette intoxication concerne aujourd’hui l’ensemble de la population antillaise puisque selon une étude de 2013 de Santé Publique France, 95% des Guadeloupéen·ne·s et 92% des Martiniquais·es sont contaminés (43). Bien que la banane soit à l’origine de l’utilisation du chlordécone, celle-ci a été peu contaminée car la molécule reste dans le sol et affecte peu les fruits. La banane, dont 70% de la production est exportée en France hexagonale, a donc été épargnée par la pollution au chlordécone ce qui n’est pas le cas des tubercules, notamment la pomme de terre, qui constitue la base de l’alimentation des antillais·e·s. 

    L’impact sur la santé humaine est également considérable. Le chlordécone est un perturbateur endocrinien. Il a des conséquences sur le développement cognitif et moteur des enfants, pose des risques élevés d’infertilité, de naissances prématurées, d’endommagement du système nerveux et serait à l’origine d’une survenance élevée du cancer de la prostate chez les personnes contaminées. En effet, en Martinique, chaque année, 227 nouveaux cas de ce cancer sont déclarés pour 100 000 habitant·e·s (44). La région détient aussi le “record” de la survenance de ce cancer. 

    L’affaire du chlordécone met aussi en lumière une inégalité de responsabilité. Pour le philosophe Malcom Ferdinand, “c’est une minorité qui a choisi le chlordécone et a imposé de vivre en milieu contaminé au reste de la population” (45). En effet, ce sont les grands propriétaires de bananeraies, majoritairement des békés, qui ont choisi d’utiliser le chlordécone et ont effectué un lobbying important pour légaliser son usage. En découle dès lors un sentiment d’injustice profond. 

    Quelle articulation entre racisme environnemental et écologie décoloniale ? Quels sont les apports et les limites de ces deux concepts ?

    L’écologie décoloniale peut être définie comme une approche de l’écologie qui prend en compte les systèmes de domination existants, notamment ceux liés au colonialisme et au néocolonialisme. Ce concept permet de voir certaines inégalités qui peuvent être incluses dans notre manière même de penser la protection de l’environnement, comme ce que le chercheur historien Guillaume Blanc qualifie de “colonialisme vert” dans son étude de la gestion différenciée des parcs naturels africains et européens, démontrant comment l’écologie et la protection de l’environnement sont mises au service du néocolonialisme (46). Ses recherches montrent que dans un même cadre, celui du parc naturel, le système de pensée appliqué à la protection environnementale ne sera pas le même selon que le parc se situe en Europe ou en Afrique. La conception du parc européen inclura l’humain, agriculteur, berger, qui participe à la préservation des espaces et s’adapte à l’environnement. À l’inverse, le parc africain est conçu en opposition à l’humain, y compris les populations agricoles et pastorales vivant écologiquement dans ces espaces depuis des dizaines ou des centaines d’années, populations perçues comme destructrices de l’environnement et qui sont alors expulsées de leurs lieux de vie (47). 

    Cet exemple montre à la fois les liens entre les concepts de racisme environnemental et d’écologie décoloniale, et leurs différences. Les points communs sont liés à la construction d’un rapport à l’environnement différent en fonction d’un critère ethnique et racisé, qu’il soit conscient ou non. Ils font tous les deux partis de “l’éco-racisme” développé par Martin Melosi dès 1995 (48). Le concept de racisme environnemental permet de penser le biais raciste dans le sens où il met en avant les inégalités environnementales et la concentration des populations racisées dans des environnements pollués, dégradés et éloignés des ressources naturelles et le fait que les personnes racisées sont les premières touchées par les problèmes environnementaux. L’écologie décoloniale, quant à elle, se place d’un point de vue plus étatique et de relations internationales.

    Et maintenant : comment agir contre le racisme environnemental ?

    Le racisme environnemental révèle les inégalités environnementales qui touchent plus particulièrement les personnes racisées. Si elles sont plus souvent impactées par les pollutions, les minorités ethniques sont également sous-représentées au sein des institutions politiques, des associations environnementales et des partis politiques écologistes. Cette homogénéité sociale du milieu écologiste est une autre facette du racisme environnemental qui doit interroger le mouvement climat.

    Ce contexte peut être expliqué de plusieurs façons. Les personnes racisées ont des préoccupations plus urgentes liées à leur situation économique et aux diverses discriminations qu’elles subissent. Le temps disponible est en effet un privilège souvent nécessaire pour s’investir dans les luttes écologistes. Un sentiment d’illégitimité peut également être un frein à l’implication dans les milieux militants, ainsi que le manque de réseau et une invisibilisation des personnes racisées dans ces cercles. 

    En France, contrairement aux États-Unis, le mouvement écologiste ne s’est pas fondé en corrélation avec les questions sociales. Or, les rapprochements récents entre les mouvements sociaux et les mouvements pour la justice climatique nous amènent à nous questionner sur nos luttes et nos valeurs. La justice climatique à laquelle nous aspirons, universelle et inclusive, est-elle réellement accessible à toutes et tous ?

    Les victimes d’inégalités environnementales se situent souvent à l’intersection de différents rapports de domination, dont les rapports de classes sociales, les inégalités de genre, le racisme et l’âge. Si nous voulons agir pour la justice environnementale et climatique, les milieux militants, universitaires et scientifiques doivent prendre en compte la multiplicité et l’enchevêtrement des facteurs de vulnérabilités qui peuvent renforcer les inégalités écologiques. 

    La dénonciation du racisme environnemental s’intègre ainsi dans le combat pour la justice climatique et environnementale et vient l’enrichir de nouvelles perspectives. Parce que nous aspirons à un monde habitable pour tou·te·s et une société respectueuse de la diversité biologique et humaine, nous devons agir contre le racisme environnemental qui accentue les inégalités environnementales et climatiques.

    Notes :

    1. Bean v. Southwestern Waste Management Corp., Significance, Waste Management In Houston, Laches And State Action, Impact, Further Readings, https://law.jrank.org/pages/13187/Bean-v-Southwestern-Waste-Management-Corp.html
    2. Bullard, R.D. (1983), Solid Waste Sites and the Black Houston Community*. Sociological Inquiry, 53: 273-288. https://doi.org/10.1111/j.1475-682X.1983.tb00037.x
    3. https://drrobertbullard.com/
    4.  Razmig Keucheyan, La nature est un champ de bataille, Essai d’écologie politique, 2014
    5.  Toxic Wastes and Race in the United States: a National report on racial and socio-economic characteristics of communities with hazardous waste sites, Commission for Racial Justice, United Church of Christ, 1987.
    6. Traduction : “Bien que le statut socio-économique semble jouer un rôle important, le critère de la race est la variable la plus significative pour expliquer la localisation des stockages de déchets dangereux (décharges, incinérateurs, bassins de retenue).”.
    7. Executive Order 12898 of February 11, 1994, Federal Actions To Address Environmental Justice in Minority Populations and Low-Income Populations, https://www.archives.gov/files/federal-register/executive-orders/pdf/12898.pdf
    8.  Ezekiel, Judith. « Katrina à La Nouvelle-Orléans : réflexions sur le genre de la catastrophe », L’Homme & la Société, vol. 158, no. 4, 2005, pp. 189-200.
    9. Patrick Sharkey, Survival and death in New Orleans: An empirical look at the human impact of Katrina, Journal of Black Studies, 2007, https://doi.org/10.1177%2F0021934706296188
    10. Laura Butterbaugh, Why did Hurricane Katrina Hit Women So Hard?, Off Our Backs, Vol. 35, No. 9/10 (sept-oct 2005), pp. 17-19, https://www.jstor.org/stable/20838463
    11.  États-Unis.Cinq ans après, la crise de l’eau n’en finit pas à Flint, Courrier International, 26 avril 2019, https://www.courrierinternational.com/revue-de-presse/etats-unis-cinq-ans-apres-la-crise-de-leau-nen-finit-pas-flint
    12. Yona Helaoua, Eau contaminée : les habitants de Flint dénoncent un « racisme environnemental », France 24, 10 février 2016, https://www.france24.com/fr/20160210-etats-unis-us-eau-contaminee-flint-pauvres-noirs-empoisonnes-racisme-environnement
    13.  Sylvie Laurent, Flint : les noces empoisonnées de l’austérité et du racisme, Libération, 4 février 2016, https://www.liberation.fr/planete/2016/02/04/flint-les-noces-empoisonnees-de-l-austerite-et-du-racisme_1431082/
    14. Flint, ville symbole du « racisme environnemental » ?, Sciences et Avenir, 6 mars 2016, https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/flint-ville-symbole-du-racisme-environnemental_17843
    15. Frédéric Autran, A Flint, les damnés de plomb, Libération, 28 janvier 2016, https://www.liberation.fr/planete/2016/01/28/a-flint-les-damnes-de-plomb_1429653/
    16.  Trajectoires et origines, Enquête sur la diversité des populations en France, sous la direction de Cris Beauchemin, Christelle Hamel et Patrick Simon, Collection : Grandes Enquêtes,2016, 624 pages
    17. Lucie Laurian & Richard Funderburg, 2014. « Environmental justice in France? A spatio-temporal analysis of incinerator location, » Journal of Environmental Planning and Management, Taylor & Francis Journals, vol. 57(3), pages 424-446, March.
    18.  Deguen S, Petit C, Delbarre A, Kihal W, Padilla C, et al. (2016) Correction: Neighbourhood Characteristics and Long-Term Air Pollution Levels Modify the Association between the Short-Term Nitrogen Dioxide Concentrations and All-Cause Mortality in Paris. PLOS ONE 11(3): e0150875. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0150875
    19. Voir par exemple l’étude de l’Union of Concerned Scientist publiée en 2019 et intitulée “Inequitable exposure to air pollution” : https://www.ucsusa.org/resources/inequitable-exposure-air-pollution-vehicles ou encore les travaux de l’association américaine Lung : https://www.lung.org/clean-air/outdoors/who-is-at-risk/disparities
    20.  Voir Loi n°2000-614 du 5 juillet 2000 dite Loi Besson, https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000583573/2020-09-28/
    21.  William ACKER, “Dans l’enfer des aires d’accueil des Gens du Voyage”, Blog Médiapart, 9 juillet 2020,https://blogs.mediapart.fr/william-acker/blog/090720/dans-lenfer-des-aires-daccueil-des-gens-du-voyage
    22.  Juliette LOISEAU, “Santé : l’empoisonnement à petit feu des gens du Voyage”, Médiacités, 24 août 2020, https://www.mediacites.fr/enquete/national/2020/08/24/sante-lempoisonnement-a-petit-feu-des-gens-du-voyage/?#annexe-1
    23. Réseau Européen d’information sur le racisme et la xénophobie, France RAXEN National Focal Point, Thematic Study on Housing Conditions of Roma and Travellers, mars 2009, Agence de l’Union Européenne pour les Droits Fondamentaux, p.43, https://fra.europa.eu/sites/default/files/fra_uploads/580-raxen-roma_housing-france_en.pdf
    24. William Acker, “Dans l’enfer des aires d’accueil des Gens du Voyage”, Blog Médiapart, 9 juillet 2020,https://blogs.mediapart.fr/william-acker/blog/090720/dans-lenfer-des-aires-daccueil-des-gens-du-voyage
    25.  Selon une étude de Santé publique France, https://www.santepubliquefrance.fr/docs/sante-des-gens-du-voyage-des-associations-se-mobilisent
    26. Voir de nombreux articles de presse de l’époque, comme celui du Monde : https://www.lemonde.fr/societe/article/2015/10/19/la-jungle-de-calais-est-majoritairement-situee-en-zone-seveso_4792559_3224.html
    27. Angres : à 100 km de Calais, « Vietnam City », discret camp de migrants aux mains de passeurs, France 3 Hauts-de-France, 5 avril 2018, https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/angres-100-km-calais-vietnam-city-discret-camp-migrants-aux-mains-passeurs-1453071.html
    28.  https://reporterre.net/Dans-les-Yvelines-la-pollution-des-sols-au-plomb-menace-la-sante-des-enfants
    29.  https://www.bfmtv.com/diaporama/new-jungle-a-calais-un-bidonville-vu-du-ciel-3054/des-inondations-10/
    30. https://www.facebook.com/watch/?v=592510498163722
    31. Nathalie BIRCHEM, “Vivre en bidonville pendant la canicule”, La Croix, 28 juin 2019 : https://www.la-croix.com/France/Vivre-bidonville-canicule-2019-06-28-1201031936
    32. Hélène Amiraux, Un mort pendant la canicule dans un bidonville de Montpellier : « Une situation indigne, et inhumaine », Midi Libre, 4 juillet 2019, https://www.midilibre.fr/2019/07/04/mort-dun-homme-dans-un-bidonville-de-montpellier-une-situation-indigne-et-inhumaine,8294276.php
    33. Le saturnisme, une maladie sociale de l’immigration, Anne-Jeanne Naudé, Hommes & Migrations, Année 2000, pp. 13-22
    34.  Carolyn LEBEL, Steven WASSENAAR, “Revealed: Scandal of the Roma people forced to scavenge toxic e-waste”, The Ecologist, Novembre 2010, pp.6-10, https://s3.amazonaws.com/external_clips/133917/Roma_Ecologist_November2010.pdf?1350724378
    35. Voir par exemple : https://www.ouest-france.fr/ile-de-france/essonne/essonne-il-denonce-la-pollution-d-un-bidonville-grace-son-drone-5985018
    36. https://94.citoyens.com/2020/decharge-industrielle-sauvage-villejuif-en-appelle-a-darmanin,07-09-2020.html et https://www.villejuif-ecologie.fr/courrier-de-natalie-gandais-a-monsieur-darmanin-ministre-de-linterieur-contre-la-decharge-sauvage-des-hautes-bruyeres/
    37. Voir par exemple à Lyon : https://www.lyonmag.com/article/19118/l-etat-de-sante-des-roms-de-la-rue-paul-bert-inquiete
    38.  Novascopia, Programme national de médiation sanitaire, 2015 : données recueillies dans 53 bidonvilles et squats de 8 départements français
    39. CNDH Romeurope, Situation au 2 avril 2020, Situation des personnes vivant en squats et bidonvilles en France métropolitaine, https://www.romeurope.org/wp-content/uploads/2020/04/CNDH-Romeurope-Situation-au-02-04-2020-Squats-et-bidonvilles.pdf
    40.  Patrizia HEIDEGGER, Katy WIESE, “Pushed to the wastelands : Environmental racism against Roma communities in Central and  Eastern Europe”, Rapport,European Environmental Bureau, 8 avril 2020 : https://eeb.org/library/pushed-to-the-wastelands-environmental-racism-against-roma-communities-in-central-and-eastern-europe/
    41. https://leauestundroit.fr
    42. Un béké est un habitant blanc créole de la Martinique ou de la Guadeloupe descendant des premiers colons européens. Le frère d’Yves Hayot est Bernard Hayot, propriétaire du groupe Bernard Hayot et 275ème fortune de France.
    43.  Imprégnation de la population antillaise par le chlordécone et certains composés organochlorés en 2013/2014, Santé Publique France, octobre 2018  
    44.  Estimations régionales et départementales d’incidence et de mortalité par cancers en France 2007-2016, Santé Publique France, Francim, Institut national du cancer, janvier 2019
    45. Chlordécone : “Cette contamination est une atteinte au corps des antillais, https://www.youtube.com/watch?v=HNMemxTqyj4
    46. Guillaume BLANC, L’invention du colonialisme vert : pour en finir avec le mythe de l’Eden africain, Paris : Flammarion, 2020.
    47.  “L’invention du colonialisme vert, Entretien avec Guillaume Blanc”, Esquisses, 14 septembre 2020 : https://elam.hypotheses.org/3142
    48. Martin V. MELOSI, “Equity, Eco-racism and Environmental history”, Environmental History Review, Volume 19, Issue 3, Fall 1995, Pages 1–16, https://doi.org/10.2307/3984909 : En Afrique du Sud, après l’Apartheid, les populations noires sont discriminées écologiquement, car elles doivent vivre dans des quartiers où l’accès à l’eau et à l’assainissement est très limité, voire inexistant, et qui sont proches des sources de pollution. Dans le même temps, elles sont considérées comme ne savant pas gérer les ressources naturelles.
  • CP / People’s Climate Case : Les tribunaux européens font la sourde oreille face aux citoyens affectés par la crise climatique

    Communiqué de presse – 25 mars 2021

    La Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu son jugement dans l’affaire historique « People’s Climate Case », lancée par 10 familles – dont Maurice Feschet, lavandiculteur dans la Drôme – et l’association de jeunesse autochtone Sáminuorra dont les droits fondamentaux sont affectés par la crise climatique. La Cour a décidé de confirmer la décision du tribunal de première instance – Tribunal européen – de rejeter l’affaire pour des raisons de procédure. Cette décision a, une fois de plus, mis en lumière le manque d’accès à la justice dans l’UE en matière d’environnement.

    En 2018, des familles du Portugal, d’Italie, de France, d’Allemagne, de Roumanie, du Kenya, des Fidji et une association de jeunes représentant la jeunesse autochtone Sami se sont réunies pour poursuivre l’UE en justice face à son manque d’ambition climatique à l’horizon 2030. Les plaignants ont fait valoir que l’objectif de l’UE était insuffisant pour atténuer la crise climatique et ne protégeait pas leurs droits humains, tels que leur droit à la vie, à la santé, à l’occupation et à la propriété, qui sont déjà affectés par l’aggravation des impacts du changement climatique. 

    Malgré toutes les preuves scientifiques fournies par les plaignants dans leur requête, la Cour a refusé d’étudier le fond de l’affaire et l’impact de la crise climatique sur les droits fondamentaux, en décidant de statuer uniquement sur les règles procédurales. La Cour a annoncé que les plaignants n’avaient pas intérêt à agir pour attaquer l’UE pour son inaction en matière de climat, en se basant sur une ancienne jurisprudence datant des années 1960, selon laquelle un individu doit être affecté de manière unique par un acte législatif de l’UE pour être autorisé à le contester. Cela contraste fortement avec le principe fondamental des droits de l’homme, car l’interprétation des tribunaux de l’UE signifie que plus le problème est universel et grave, moins les personnes sont en mesure de demander une protection juridique devant les tribunaux de l’UE. 

    Un nombre croissant de tribunaux nationaux en Europe montrent la responsabilité des États membres dans la crise climatique et, dans certains cas, leur ordonnent d’accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre afin de protéger les citoyens face aux impacts climatiques actuels et futurs. Récemment, la Cour européenne des droits de l’homme a accordé la priorité à l’affaire climatique initiée par 6 jeunes Portugais sur la base de « l’importance et de l’urgence des questions soulevées ». Avec cette décision, les tribunaux de l’UE ne rejoignent pas ce mouvement qui joue un rôle primordial pour tenir les gouvernements responsables de leur inaction en matière de climat. 

    Alors que les tribunaux de l’UE ont refusé de parler de la crise climatique, un nombre considérable de citoyens, de scientifiques et d’ONG ont soutenu les plaignants et ont finalement amené l’UE à relever son objectif climatique pour 2030, à savoir réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 %. Toutefois, l’UE est encore loin d’être en mesure d’assumer sa part de responsabilité dans le cadre de l’Accord de Paris visant à limiter la hausse de la température mondiale à 1,5°C. 

    La décision du Tribunal de fermer ses portes aux personnes touchées par les effets du changement climatique a été critiquée par des plaignants, des experts juridiques et la société civile pour son incapacité à répondre à l’urgence climatique. 

    Roda Verheyen, avocate coordinatrice du People’s Climate Case, a déclaré : « Ces familles ont fait confiance au système juridique de l’UE pour protéger leurs droits. Toutefois, les tribunaux européens n’ont pas su interpréter les règles existantes dans le contexte du changement climatique et obliger les législateurs européens à prendre une position ambitieuse en matière de protection du climat. Malheureusement, cette décision prouve aux citoyens que les législateurs européens peuvent faire ce qu’ils veulent sur les questions environnementales et qu’il n’y a aucun moyen de leur demander des comptes devant les tribunaux, à moins que ces règles ne soient modifiées. »

    Wendel Trio, directeur du Réseau Action Climat (CAN Europe), a déclaré : « Avec l’urgence climatique qui grandit de jour en jour, l’UE doit intensifier son action climatique. Les citoyens européens se tournent vers leurs tribunaux pour les aider à éviter un changement climatique dangereux. C’est dommage que la Cour européenne de justice se distancie des autres tribunaux en refusant de se saisir de l’affaire et en se retranchant derrière des questions de procédure. Si l’UE veut donner du sens à ses citoyens, elle devra reconnaître que la responsabilité est essentielle pour garantir le bon fonctionnement de la démocratie. L’UE doit de toute urgence renforcer la protection de ses citoyens, à la fois en renforçant l’action climatique et en offrant un accès à la justice à tous ses citoyens« .

    Les plaignants du People’s Climate Case ont rappelé à la Cour européenne et aux législateurs de l’UE qu’ils ne peuvent pas faire face à la crise climatique en faisant la sourde oreille aux citoyens touchés par le changement climatique. 

    Maurice Feschet, le plaignant français a déclaré : Les sécheresses consécutives ont eu des conséquences dramatiques sur le mode de vie de ma famille et sur de nombreux citoyens européens. Aujourd’hui, l’espoir que mes co-plaignants et moi-même avions mis dans le système juridique pour nous protéger n’a pas abouti. Mais nous ne lâchons rien. Nous continuerons de nous battre pour nos droits fondamentaux. Cette défaite n’empêchera pas nos voix de devenir de plus en plus fortes pour assurer un futur viable aux générations futures”. 

    Sanna Vannar, représentante l’association des jeunes Samis dans l’affaire, a ajouté : « Nos voix se font de plus en plus entendre et d’autres parties prenantes se joignent aux avocats et à la société civile pour exiger des mesures urgentes en matière de climat. Même si la voix des législateurs européens a commencé à se faire entendre sur la nécessité d’augmenter l’objectif climatique de l’UE pour 2030, sans une action décisive, ces paroles ne suffiront pas pour atteindre l’objectif de 1,5°C de l’accord de Paris et pour assurer un avenir plus sûr aux jeunes”.

    Pour Clothilde Baudouin de Notre Affaire à Tous : “Il est temps que les juridictions européennes reconnaissent l’intérêt à agir des citoyens européens sur des questions aussi primordiales que la protection des droits fondamentaux face à la crise climatique. Malgré cette décision négative, nous continuerons à nous battre pour un renforcement nécessaire des politiques climatiques. En France, l’Affaire du Siècle nous l’a montré : les tribunaux ont leur rôle à jouer face à l’urgence.” 

    Contacts presse :

    Annexe :

    Brief juridique sur la décision de la CJUE

    10 familles et l’association de jeunesse Sami de Suède ont fait appel de l’ordonnance du Tribunal européen sur le rejet du People’s Climate Case. Un appel a été déposé auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 11 juillet 2019.

    Le People’s Climate Case, portée devant le Tribunal européen en mai 2018 contre le Parlement européen et le Conseil européen en tant que législateurs de l’UE, faisait valoir que le précédent objectif climatique de l’UE pour 2030, qui consistait à réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’UE d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990, n’était pas suffisant pour protéger les vies, les moyens de subsistance et les droits fondamentaux des citoyens.

    Dans son ordonnance du 8 mai 2019, le Tribunal européen a rejeté l’affaire pour des raisons de procédure. En faisant une interprétation étroite de l’intérêt “individuel et direct” dans le Traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE, Art 263), le Tribunal a fermé sa porte à tous les plaignants. Selon l’interprétation établie par la jurisprudence depuis les années 1960, un citoyen n’est considéré comme « individuellement concerné » et donc autorisé à saisir la justice que s’il est affecté de manière « unique » par un texte de loi de l’UE. 

    Dans le recours, les plaignants (qui comprenaient des grands-parents, des parents et leurs enfants) avaient exposé en détail leurs préoccupations individuelles, en ce qui concerne leurs biens, leurs exploitations agricoles et autres entreprises, ainsi que leurs droits en matière de santé et d’éducation. Mais le fait que chacun soit affecté par le changement climatique de manière différente selon sa profession, son âge, son état de santé n’a pas été considéré comme suffisamment « unique » par le Tribunal européen. 

    Le 11 juillet 2019, les plaignants ont fait appel devant la Cour de justice de l’Union européenne en faisant valoir que l’exigence d’intérêt individuel et direct devrait être interprétée conformément à la réalité de la crise climatique. En cas de violation des droits de l’homme, l’accès direct aux tribunaux européens doit être garanti – tant qu’aucune autre voie de recours (par exemple, par le biais des tribunaux des États membres) n’est disponible.

    Dans leur appel, les plaignants ont fait valoir que : 

    • Le Tribunal européen a commis une erreur en interprétant l’exigence de l’intérêt individuel d’une manière telle que plus le nombre de personnes affectées par un texte législatif européen est élevé, moins elles peuvent avoir accès à la justice devant les tribunaux européens. Cela contredit la raison d’être des droits fondamentaux, qui est d’accorder une protection à chaque individu. 
    • La Cour a commis une erreur de droit en ignorant que l’accès aux tribunaux doit refléter la gravité de la situation (ici les impacts existentiels du changement climatique sur les plaignants).
    • Le Tribunal européen n’a pas tenu compte de la Convention d’Aarhus. En 2017, le Comité d’examen du respect des dispositions de la Convention d’Aarhus (ACCC) a reconnu que les tribunaux européens enfreignent les dispositions relatives à l’accès à la justice en limitant l’accès à la justice des particuliers et des ONG en matière d’environnement. Le Tribunal européen n’en a pas tenu compte et a statué une fois de plus en bloquant l’accès à la justice pour les familles et l’association de jeunes Sami.  
    • Suite à l’avis de l’ACCC, la Commission a présenté un projet de proposition visant à réviser le règlement d’Aarhus, afin de remédier à son manque de conformité avec la convention d’Aarhus. Cette proposition est actuellement examinée par le Parlement européen. L’accès à la justice étant apparemment impossible à réaliser par le biais de l’article 263, il faut s’assurer que le règlement d’Aarhus permet aux individus et aux ONG d’accéder à la justice.