Tribune disponible également sur le blog de Mediapart : https://blogs.mediapart.fr/justice-pour-le-vivant/blog/300925/pesticides-monsieur-le-premier-ministre-vous-n-avez-plus-le-choix-il-est-temps-d-agir
La justice a tranché : les protocoles d’évaluation et d’autorisation des pesticides en France sont invalides, obsolètes et dangereux. Monsieur le Premier ministre, la France ne peut plus ignorer l’urgence de réformer les autorisations de mise sur le marché des pesticides.
Le 3 septembre 2025, la cour administrative d’appel de Paris a rendu une décision historique : pour protéger la biodiversité et la santé publique, elle a ordonné à l’État d’actualiser, dans un délai de 24 mois, les protocoles d’évaluation et d’autorisation des pesticides. Les juges ont également exigé la réévaluation de l’ensemble des autorisations de mise sur le marché (AMM) insuffisamment protectrices du Vivant, et la présentation sous six mois d’un calendrier détaillé pour conduire cette révision.
Cette décision, obtenue dans le cadre de l’action collective Justice pour le Vivant (portée depuis 2022 par Notre Affaire à Tous, POLLINIS, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS), confirme la responsabilité de l’Etat dans la « contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des eaux et des sols par les produits phytopharmaceutiques ».
Pour la première fois, la justice reconnaît ce que la science ainsi que les collectifs associatifs et citoyens dénoncent depuis longtemps : l’obsolescence des protocoles d’évaluation et d’autorisation des pesticides. Leur actualisation n’est désormais plus seulement une exigence scientifique, mais aussi une obligation légale.
Monsieur le Premier ministre, vous n’avez plus le choix : il est temps d’agir. Des solutions existent. Nous vous en proposons quelques unes aujourd’hui, et nous sommes prêts à travailler avec vous pour les mettre en œuvre dans les délais stricts ordonnés par la CAA de Paris, soit le 3 mars 2026 pour le calendrier de révision des AMM, et le 3 septembre 2027 concernant la refonte complète des protocoles :
Aligner les procédures d’évaluation des pesticides sur les standards scientifiques préconisé par les experts notamment les scientifiques de l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) dès 2013.
Garantir l’indépendance de l’Anses en lui allouant les moyens humains et financiers nécessaires pour remplir sa mission d’intérêt général de protection des écosystèmes et de notre santé.
Réévaluer immédiatement les AMM des fongicides SDHI, ainsi que des insecticides et herbicides dont les dangers pour la biodiversité et la santé humaine sont avérés.
La France peut devenir un modèle de protection de la biodiversité et de la santé publique, et le leader de la transition agricole face à un modèle devenu insoutenable à court terme. Nous ne demandons pas l’impossible : nous exigeons que l’État respecte enfin le droit de l’Union européenne, la loi, la science et l’intérêt général. L’Histoire et les générations futures jugeront les choix que vous ferez aujourd’hui. Serez-vous du côté de ceux qui protègent la vie, ou de ceux qui la sacrifient au profit d’intérêts à court terme ?
Signataires
Nicolas Laarman, délégué général de POLLINIS
Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous
Dorian Guinard, porte parole de Biodiversité sous nos pieds
Communiqué de presse, Paris, le 3 septembre 2025 – C’est une véritable révolution dans la lutte contre les pesticides : le 3 septembre 2025, la Cour administrative d’appel (CAA) de Paris a enjoint à l’État de réformer ses protocoles d’évaluation et d’autorisation des pesticides, jugés défaillants, afin de les aligner sur les connaissances scientifiques actuelles. Dans le cadre du dossier Justice pour le Vivant (JPLV), porté depuis 2022 par Notre Affaire à Tous, POLLINIS, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, la CAA confirme la condamnation de l’État français pour sa responsabilité dans l’effondrement de la biodiversité. Dans un contexte marqué par l’adoption de la loi Duplomb, et ce malgré une mobilisation citoyenne massive, cette décision consacre une victoire majeure de la science et de toutes celles et ceux – victimes, associations et collectifs – qui alertent depuis des années sur la dangerosité des pesticides. Inédite à l’échelle européenne, elle pourrait désormais ouvrir la voie à des actions similaires dans d’autres pays membres de l’Union.
Crédit photo : Philippe Besnard
Deux ans après la première condamnation de l’État, le 29 juin 2023, pour sa responsabilité dans la contamination massive des écosystèmes par les pesticides, la cour administrative d’appel de Paris reconnaît à nouveau la « contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des eaux et des sols par les produits phytopharmaceutiques ».
Suivant les conclusions de la rapporteure publique, la cour ordonne à l’État d’actualiser les protocoles d’évaluation et d’autorisation des pesticides insuffisamment protecteurs du vivant, ainsi que de revoir les autorisations de mise sur le marché (AMM) actuellement en vigueur d’ici 24 mois, et pour lesquelles la méthodologie d’évaluation n’aurait pas été conforme aux exigences notamment du principe de précaution. Principe qui « impose aux États membres de procéder à « une évaluation globale fondée sur les données scientifiques disponibles les plus fiables ainsi que les résultats les plus récents de la recherche internationale ». » (§29 p.14) Elle enjoint également à l’Etat d’établir dans les six mois prochains un calendrier de révision des AMM concernées.
Concrètement, la cour reconnaît des failles dans la procédure d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché conduite par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) sous la responsabilité de l’État. Reconnaissant un lien de causalité direct entre les insuffisances de l’évaluation des risques et le déclin de la biodiversité, elle considère qu’il est établi qu’une actualisation des procédures à l’aune des connaissances scientifiques les plus récentes permettrait de réduire les impacts sur l’environnement des pesticides.
Pour les associations requérantes, cette décision est plus qu’historique : “C’est une véritable révolution juridique et scientifique ! Dans un contexte d’attaques constantes contre l’environnement, et alors que le Parlement vient de voter la mortifère loi Duplomb, la justice réaffirme son rôle de contre-pouvoir en mettant un coup d’arrêt à la politique désastreuse de nos décideurs en la matière. C’est une décision qui va tout changer : dans les pratiques agricoles, les politiques publiques, et la façon dont l’État considère enfin la santé et l’environnement. Elle est le fruit d’un combat de longue haleine, porté par des scientifiques, des associations, des citoyens et citoyennes mobilisé·e·s partout en France — une véritable victoire collective qui s’inscrit dans un large mouvement militant. Le gouvernement doit désormais tout mettre en œuvre pour respecter cette décision de justice. Il en va de la sauvegarde de la biodiversité, de la santé publique, mais aussi du principe même d’État de droit.”
Nous appelons l’État, désormais condamné à deux reprises, à ne pas se pourvoir en cassation et à respecter enfin cette décision de justice. S’il décidait malgré tout de poursuivre la procédure, ce serait malheureusement l’ultime preuve que l’État est prêt à tout pour continuer à protéger les intérêts des industriels de l’agrochimie, malgré leurs impacts désastreux sur l’ensemble du vivant. Ce choix irait une fois de plus à l’encontre de l’intérêt général et de la volonté largement exprimée par les citoyen·ne·s, qui attendent une politique réellement ambitieuse de réduction de l’usage des pesticides les plus dangereux.
Nous nous tenons à la disposition du gouvernement afin de l’accompagner dans la mise en œuvre de cette décision de justice. Des premières mesures concrètes peuvent être immédiatement déployées, notamment :
Actualiser les procédures d’évaluation des risques des pesticides en les mettant en conformité avec les protocoles scientifiques de l’EFSA de 2013 ;
Renforcer l’indépendance de l’Anses en lui confiant davantage de moyens humains et financiers ;
Réévaluer les autorisations de mise sur le marché des fongicides SDHI et des insecticides et herbicides dont les dangers pour la biodiversité et l’humain sont documentés.
Communiqué de presse, Paris, le 06/06/2025 – Ce vendredi 6 juin marque un tournant dans le dossier Justice pour le Vivant (JPLV), porté par les associations Notre Affaire à Tous, POLLINIS, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS depuis 2022 : la rapporteure publique a demandé aux juges de condamner l’Etat pour sa responsabilité dans l’effondrement de la biodiversité, et point historique, recommande d’ordonner à l’Etat d’actualiser les protocoles d’évaluation des pesticides jugés défaillants.
Crédit photo : Philippe Besnard
Deux ans après la première condamnation de l’Etat, le 29 juin 2023, pour sa responsabilité dans la contamination massive des écosystèmes par les pesticides, la cour administrative d’appel de Paris pourrait reconnaître à nouveau l’existence du préjudice écologique que l’Etat doit réparer.
La rapporteure publique recommande “qu’il soit enjoint à l’Etat de mettre en œuvre une évaluation des risques sur les espèces non-cibles dans le cadre de la procédure d’autorisation de mise sur le marché (AMM)” des pesticides. Elle demande même qu’il soit procédé à l’examen des AMM problématiques actuellement en vigueur.
Concrètement la rapporteure reconnaît des failles dans la procédure d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché conduite par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) sous la responsabilité de l’Etat. Reconnaissant un lien de causalité direct entre les insuffisances de l’évaluation des risques et le déclin de la biodiversité, elle considère qu’il est établi qu’une actualisation des procédures à l’aune des connaissances scientifiques les plus récentes permettrait de réduire les impacts sur l’environnement des pesticides.
La rapporteure refuse cependant de reconnaître le caractère contraignant des objectifs de réduction des pesticides des plans Ecophyto admettant ainsi ce que dénoncent les associations depuis longtemps : ils relèvent davantage de la communication politique que d’une stratégie environnementale sérieuse.
Plus inquiétant néanmoins, à rebours de la décision du tribunal administratif en 2023, la rapporteure refuse de reconnaître une faute dans l’obligation de l’Etat de protection des eaux. Les avocats des associations ont ainsi rappelé dans leurs plaidoiries que la Commission européenne (1) établit elle-même que la France ne pourra pas tenir ses objectifs de protection des eaux souterraines d’ici 2027 conformément à la Directive cadre sur l’eau.
A noter que contrairement à l’audience de première instance tenue il y a deux ans, le gouvernement, représenté par le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation s’est déplacé, sans toutefois daigner plaider son cas. Laissant une nouvelle fois Phytéis le défendre, au cours d’une plaidoirie fondée sur une stratégie du doute.
Dans un contexte d’attaques constantes contre l’environnement, comme en témoigne notamment la proposition de loi Duplomb actuellement débattue au Parlement – qui vise entre autres à réintroduire les néonicotinoïdes et à affaiblir l’indépendance de l’ANSES – ces conclusions pourraient amener à une nouvelle décision historique et mettre un coup d’arrêt à la politique mortifère du gouvernement en la matière.
“Nous nous dirigeons vers une victoire historique pour la biodiversité et l’ensemble du vivant ! Une décision qui pourrait tout changer : dans les pratiques agricoles, les politiques publiques, et la façon dont l’Etat considère enfin la santé et l’environnement. Elle est le fruit d’un combat de longue haleine, porté par des scientifiques, des associations, des citoyens et citoyennes mobilisé·es partout en France — une véritable victoire collective qui s’inscrit dans un large mouvement militant.”, se félicitent les associations.
La décision de la cour administrative d’appel sera rendue publique avant mi-juillet.
Alors que la perspective d’un retour des néonicotinoïdes en France se précise, les associations de Justice Pour le Vivant qui ont obtenu une condamnation historique de l’État pour son inaction face à l’effondrement de la biodiversité tirent la sonnette d’alarme : il est urgent de réformer les protocoles d’évaluation et d’autorisation des pesticides par l’ANSES.
Le 6 juin 2025, se tiendra l’audience du procès en appel d’un État qui refuse d’appliquer la décision du tribunal administratif malgré un délai terminé depuis juillet 2024. À cette occasion, les associations requérantes souhaitent rappeler l’enjeu historique de cette nouvelle étape : la mise à jour des protocoles d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES). Une décision qui pourrait marquer un tournant face à la contamination généralisée de notre environnement par les pesticides et à l’effondrement massif de la biodiversité en France.
Il y a deux ans, le tribunal administratif de Paris condamnait la France pour inaction face à l’effondrement de la biodiversité et reconnaissait la responsabilité de l’État dans la « contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des eaux et des sols » par les pesticides. Une décision historique sans précédent, qui n’est pas encore à la hauteur de nos enjeux.. Si les juges ont reconnu des insuffisances dans l’évaluation des risques des pesticides au regard du principe de précaution et de l’évolution de la science, ils n’ont pas ordonné à l’ANSES de revoir les méthodologies d’homologation des pesticides, contrairement à ce que préconisait la rapporteur publique.
Or la faille est là. Si l’État français prenait en compte les connaissances scientifiques actuelles concernant l’évaluation des risques des pesticides avant d’autoriser leur mise sur le marché, nombreux sont ceux qui ne seraient plus autorisés tant ils sont dangereux pour les écosystèmes et la santé humaine. Et les industriels de l’agrochimie le savent : c’est pour cela qu’ils ont demandé à participer au procès, via leur représentant Phyteis, pour défendre l’inaction de l’État français face aux ravages des pesticides.
Dans quelques jours, le 6 juin 2025, aura lieu l’audience en appel dans le dossier « Justice Pour le Vivant », où les organisations Notre Affaire à Tous, POLLINIS, ANPER-TOS, l’ASPAS et Biodiversité sous nos pieds plaideront pour que la justice confirme la condamnation de l’État en première instance et l’enjoigne à mettre à jour les tests exigés par l’ANSES.
Une décision qui pourrait tout changer
Les protocoles actuels de l’ANSES, chargée d’autoriser ou non les pesticides sont obsolètes. De nombreux effets toxiques des pesticides ne sont pas pris en compte, comme l’exposition diffuse, répété ou prolongée, ou encore les effets combinés de plusieurs substances présentes dans l’environnement. Les niveaux de contamination réels ne font pas l’objet de suivis adaptés sur le terrain. Les autorisations, difficilement révocables, sont délivrées pour des durées trop longues avant même que l’industrie n’ait fourni toutes les données pertinentes. Résultat : rares sont les produits dont la mise sur le marché est refusée, alors que l’effondrement de la biodiversité se poursuit et que les scandales sanitaires se succèdent.
La défaillance de l’État a été reconnue par le tribunal administratif de Paris en juin 2023, sans toutefois l’enjoindre à réformer le protocole. Mais depuis, deux décisions majeures sont venues renforcer l’exigence de changement. D’abord, en avril 2024, la Cour de justice de l’Union européenne a rappelé, dans un arrêt de principe, la responsabilité des États membres de se doter d’un processus d’évaluation des risques réellement efficace, fondé sur « les données scientifiques disponibles les plus fiables ainsi que les résultats les plus récents de la recherche internationale ». Plus récemment, en février 2025, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé l’autorisation de mise sur le marché des insecticides Transform et Closer, produits par la multinationale Corteva et contenant du sulfoxaflor — une substance au mode d’action proche des néonicotinoïdes « tueurs d’abeilles ». Cette décision repose sur une critique explicite du protocole d’évaluation et d’autorisation des pesticides conduit par l’ANSES, au regard des exigences scientifiques et de protection de l’environnement.
Alors que 80 % des français sont favorables à la réduction de l’utilisation des pesticides dans l’agriculture (1), la cour administrative d’appel de Paris pourrait, dans les semaines à venir, contraindre l’État français à mettre à jour des connaissances scientifiques actuelles les procédures d’homologation des pesticides menées par l’ANSES. Une décision nécessaire à l’heure où le gouvernement et certains groupes parlementaires semblent en effet plus enclins à répondre aux demandes des firmes de l’industrie agrochimique plutôt qu’à protéger nos agriculteurs et notre agriculture, notre santé et le Vivant dont ils dépendent.
Philippe GRANDCOLAS, directeur de recherche au CNRS ; Florence VOLAIRE, chercheuse écologue INRAE ; Laurent PERRIN, directeur de recherches au CNRS ; Christel COURNIL, professeure de droit public à Sciences Po Toulouse ; Vinca DELAMARE DEBOUTTEVILLE, psychologue ; Julien LEFEVRE, enseignant-chercheur ; Stéphanie MARIETTE, chargée de recherche INRAE ; Emmanuelle BALLIAU, co-Présidente Avenir Sante Environnement ; Odin MARC, chargé de Recherche ; Carole HERMON, professeure ; Laurent HUSSON, directeur de recherches CNRS ; Clément CAPDEBOS, avocat ; Marie VINCENT, médecin au CHU Nantes ; Viviane BALADI, directrice de recherche CNRS (retraitée) ; Julian CARREY, enseignant-chercheur à l’INSA Toulouse ; Bruno LOCATELLI, chercheur ; Jean-Jacques MABILAT, président de Coquelicots de Paris ; Dorian GUINARD, porte-parole de Biodiversité Sous Nos Pieds ; Nicolas LAARMAN, délégué général de Pollinis ; Jérémie SUISSA, délégué général de Notre Affaire à Tous ; Kim VO DINH, co-président de Bio Consom’acteurs ; François VEILLERETTE, porte parole de Générations futures ; Sandy OLIVAR CALVO, chargée de campagne agriculture chez Greenpeace France ; Armelle de SAINT SAUVEUR, co présidente de Slow Food Paris Terroirs du Monde ; Frédéric CHASSAGNETTE, secrétaire général du Snetap-FSU ; Sébastien BAROT, chercheur à l’IRD ; Giovanni PRETE, maître de conférence en sociologie à l’Université Paris 13 ; Anne-Françoise TAISNE, déléguée générale du CFSI.
Communiqué, Paris, 2 juillet 2024 – Le 29 juin 2023, dans le cadre de Justice pour le Vivant, le tribunal administratif de Paris condamnait le gouvernement à prendre, avant le 30 juin 2024, toutes les mesures nécessaires pour réduire l’usage des pesticides en France et protéger les eaux souterraines du pays. La juridiction reconnaissait également le préjudice écologique résultant des pesticides et l’existence de failles significatives dans l’évaluation de leurs risques avant autorisation. Depuis sa condamnation, le gouvernement refuse ouvertement d’exécuter la décision de justice et n’a fait que reculer. Quel que soit le résultat du second tour des élections législatives, les ONG continueront leur action en justice pour veiller à ce que le prochain gouvernement agisse pour enrayer l’effondrement de la biodiversité.
Le 29 juin 2023, dans un jugement historique, le Tribunal administratif de Paris reconnaissait, pour la première fois, l’existence d’une contamination généralisée de l’environnement par les pesticides, causant un effondrement de la biodiversité. Constatant également des failles dans les procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, le tribunal condamnait le gouvernement à, d’ici au 30 juin 2024 :
Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ;
Protéger réellement , comme la loi l’oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leurs résidus
Si le gouvernement a fait appel de ce jugement, tout comme les cinq ONG qui cherchent à l’obliger à combler les failles de l’évaluation des risques, la condamnation doit être appliquée et l’État est donc tenu d’agir. Pendant les 12 mois qui ont suivi l’annonce de ce jugement, le gouvernement n’a pourtant rien fait, ni pour se plier au jugement, ni pour agir contre le préjudice écologique qui touche les citoyens français, pourtant reconnus.
« Depuis sa condamnation pour sa mauvaise gestion des pesticides il y a un an, le gouvernement n’a proposé que renoncement sur renoncement. En changeant l’indicateur principal du plan Ecophyto 2030, il abandonne les ambitions de réduction des plans précédents qu’il a pourtant été condamné à respecter. Sur la question de l’eau, il n’a rien fait non plus, alors que la pollution des eaux souterraines aux pesticides a des conséquences tant sur les écosystèmes que sur les collectivités » dénoncent les associations, qui se réservent la possibilité de saisir le tribunal pour demander l’exécution du jugement.
Le changement d’indicateur prévu par le plan Ecophyto 2030 – du NODU à HRI1 – ne pourra pas servir à mesurer de diminution réelle de l’usage des pesticides. Il a pour seul objectif de permettre au gouvernement d’afficher un respect de ses engagements, sans entraîner de baisse effective, et sans enrayer l’effondrement de la biodiversité.
Bien qu’il n’ait pas été expressément condamné à le faire, le gouvernement aurait aussi pu combler les failles de l’évaluation des risques des pesticides, identifiées par les autorités compétentes et reconnues par le Tribunal – qui a également reconnu un lien de causalité directe avec le préjudice écologique. Il est de la responsabilité de l’État d’agir sur ce point comme le souligne un récent arrêt (C-308/22) de la Cour de Justice de l’Union européenne, selon lequel l’État ne peut se contenter d’une évaluation des risques qui ne tient pas compte « des données scientifiques disponibles les plus fiables ainsi que des résultats les plus récents de la recherche internationale ». La coalition Justice pour le vivant estime qu’il est temps que l’Etat remette la science au cœur de l’évaluation des risques des pesticides.
« Le nombre d’insectes volants a chuté de près de 80% en 30 ans, pendant que la quantité d’oiseaux des champs a baissé de 60% en Europe. Alors qu’il est urgent d’agir et qu’il a toutes les clés en main pour le faire, le gouvernement a choisi de reculer, et de privilégier les profits de l’agro-industrie au détriment du plus grand nombre. Une transition vers un modèle agroécologique ne se fera pas sans changements politiques profonds et un abandon de l’usage massif de pesticides. » expliquent les associations. « Quels que soient les résultats du 2nd tour des élections législatives, les ONG de Justice pour le Vivant continueront leur action en justice pour obliger l’État à prendre ses responsabilités et agir contre l’effondrement de la biodiversité. »
Rigal, S et al. (2023). Farmland practices are driving bird populations decline across Europe. PNAS, 120(21), e2216573120.https://doi.org/10.1073/pnas.2216573120
Communiqué de presse, Paris, lundi 06 mai 2024 – Phyteis, le lobby de l’agrochimie en France, a confirmé ce vendredi 3 mai sa volonté d’intervenir, en appel, dans le recours Justice pour le Vivant introduit par un collectif de cinq ONG contre l’inaction de l’Etat face à l’effondrement de la biodiversité en cours. Comme en première instance, l’industrie apporte son soutien au gouvernement pour assurer que rien ne change au modèle d’évaluation, d’autorisation et d’usage des pesticides en France. Le plan Ecophyto 2030, annoncé aujourd’hui, symbolise les renoncements de l’État et son choix de l’inaction face à l’effondrement de la biodiversité.
Phyteis s’invite une fois encore dans le recours Justice pour le Vivant, cette fois-ci en appel, en déposant ce vendredi 3 mai un mémoire en intervention pour défendre les intérêts des géants de l’agrochimie (Bayer-Monsanto, Syngenta-Chemchina, BASF…), et voler au secours du gouvernement.
Après le jugement historique rendu le 29 juin 2023 par le Tribunal administratif de Paris, qui a reconnu la responsabilité de l’État dans l’effondrement du Vivant, et ses insuffisances dans l’évaluation des risques sur les pesticides – POLLINIS, Notre Affaire à Tous, ANPER TOS, ASPAS et Biodiversité sous nos pieds – ont fait appel devant la Cour administrative d’appel de Paris pour obliger l’État à corriger les failles du système d’homologation des pesticides. Le gouvernement, condamné à réduire l’usage des pesticides sur son territoire, a, lui aussi, fait appel de la décision, et vient de proposer un nouveau plan Ecophyto qui ne permettra pas d’enrayer l’effondrement de la biodiversité.
« Cette nouvelle intervention de Phyteis, prouve que le système d’homologation des pesticides mis en œuvre répond aux impératifs économiques des firmes de l’agrochimie – et donne un accès libre sur le marché à des substances toxiques au détriment de la protection de la biodiversité. Tant qu’une « coalition » agrochimie – État perdure et que le gouvernement s’enfonce dans l’inaction, nous continuerons à défendre devant la justice la biodiversité et les intérêts du Vivant » martèlent les associations.
Ecophyto 2030
Dans sa décision du 29 juin 2023, le tribunal a enjoint l’État à prendre avant le 30 juin 2024 « toutes les mesures utiles » afin de respecter les objectifs de réduction de l’usage des pesticides notamment prévus par les plans Ecophyto et pour protéger, comme la loi l’y oblige, les eaux souterraines des pesticides et de leurs résidus. L’appel de l’État refusant ce jugement et le contenu du plan Ecophyto 2030 démontrent son manque de volonté politique.
« Le plan Ecophyto 2030 annoncé aujourd’hui ne limitera pas l’impact des pesticides sur la biodiversité, et ignore complètement le jugement de Justice pour le Vivant, dénoncent les associations. Il n’intègre aucune stratégie d’amélioration de l’évaluation des risques des pesticides en France, dont le Tribunal administratif avait pointé les limites, se fixant des objectifs à un échelon européen qu’il ne maîtrise pas alors qu’il a la possibilité d’agir dès maintenant au niveau national ; et il choisit l’indicateur HRI1 – dont l’adoption a été saluée par Phyteis –, qui ne permettra pas de mesurer de réelle diminution de l’usage des pesticides, alors qu’il a été condamné à renouer avec les précédents objectifs de réduction ».
Une révision de l’évaluation des risques des pesticides est indispensable à toute politique de limitation de l’impact des pesticides sur la biodiversité, et une obligation soulignée par un récent arrêt (C-308/22) de la Cour de Justice de l’Union Européenne. Selon cet arrêt, l’Etat ne peut se contenter d’une évaluation des risques ne tenant pas compte « des données scientifiques disponibles les plus fiables ainsi que des résultats les plus récents de la recherche internationale« .
En première instance, Phyteis avait défendu le gouvernement avec zèle et avait usé de la stratégie du doute afin de brouiller les cartes et nier, malgré les études scientifiques établies, le rôle majeur des pesticides dans le déclin de la biodiversité. Symbole fort : l’avocat de Phyteis était le seul présent pour défendre le gouvernement le 1ᵉʳ juin 2023 lors de l’audience. Joignant à nouveau ses forces à celles du gouvernement, Phyteis a demandé à intervenir et a produit un mémoire dans chacune des deux procédures en appel – l’appel des associations et celui de l’État. Les associations de Justice pour le Vivant ont pour le moment un mois pour répondre à ces nouveaux éléments.
Contact presse
Justine Ripoll – responsable de campagnes : justine.ripoll@notreaffaireatous.org
Le tribunal administratif a reconnu pour la première fois l’existence d’un préjudice écologique résultant, notamment, d’une contamination généralisée, chronique et durable des eaux et des sols par les pesticides et du déclin de la biodiversité, en particulier des insectes. Il reconnaît également des carences importantes de l’Etat dans les procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides. Le tribunal n’a toutefois pas condamné le gouvernement à agir sur ce dernier point.
Injonction prononcée par le tribunal administratif de Paris : « Il est enjoint à la Première ministre et aux ministres compétents :
de prendre toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice écologique et prévenir l’aggravation des dommages en rétablissant la cohérence du rythme de diminution de l’utilisation des produits phytosanitairesavec la trajectoire prévue par les plans Ecophyto
et en prenant toutes mesures utiles en vue de restaurer et protéger les eaux souterraines contre les incidences des produits phytopharmaceutiques et en particulier contre les risques de pollution.
La réparation du préjudice devra être effective au 30 juin 2024, au plus tard. »
Ce jugement est exécutoire, c’est-à-dire qu’il doit être respecté même si les parties ont fait appel, et sans attendre la décision en appel.
Commission d’enquête parlementaire sur l’échec des politiques de réduction des pesticides
Glyphosate
SDHI
Pollution des eaux par les pesticides
Nouveau plan Ecophyto 2030
Rappel du contexte Le gouvernement annonçait fin 2023 les contours de son plan Ecophyto 2030 visant une « réduction de 50% des usages et des risques à l’horizon 2030 », en alignement avec feu le règlement SUR (règlement européen sur l’usage durable des pesticides). Cependant, dans un contexte de forte mobilisation des agriculteurs, le gouvernement a déclaré début février 2024 mettre en pause le plan Ecophyto jusqu’au Salon de l’agriculture avant d’annoncer des modifications, notamment un changement d’indicateur pour mesurer la réduction de l’usage et de la toxicité des pesticides. Le passage de l’indicateur NoDU à l’indicateur européen HRI 1 marque un abandon des ambitions initiales du plan Ecophyto 2030.
Comment le jugement de Justice pour le Vivant en première instance éclaire la situation : un gouvernement qui refuse de respecter sa condamnation.
Le jugement aurait dû servir de catalyseur à une action rapide et à la hauteur des enjeux de la part du gouvernement. D’ores et déjà, le nouveau plan Ecophyto fixant cet objectif à 2030 ne permettra pas de répondre à l’injonction du juge.
Dans le cadre du recours, l’Etat a en effet été condamné à renouer avec les objectifs des précédents plans, c’est à dire l’objectif du plan Ecophyto qui était de réduire de 50% l’usage des pesticides d’ici 2018, puis celui d’Ecophyto II qui était de le réduire de 25% d’ici 2020 et de 50% d’ici 2025, repris par le plan Ecophyto II+. Le gouvernement est donc censé tout mettre en œuvre avant le 30 juin 2024, pour réduire l’usage de 50% d’ici 2025.
Dans un contexte de mobilisation des agriculteurs, l’Etat a choisi de substituer l’indicateur de risques NoDU pour un indicateur moins protecteur : le HRI 1. Cet indicateur de risque a été critiqué par des chercheurs du Comité Scientifique et Technique du plan Ecophyto qui affirment qu’il est problématique pour plusieurs raisons :
Il se fonde sur les masses de pesticides et non les doses d’usage (or la toxicité des produits varie fortement selon les doses) ;
Le classement des substances en différentes catégories de risques est très peu discriminant : l’indicateur classe les substances en seulement 4 catégories (substances à faible risque, substances autorisées, substances dont l’interdiction est envisagée et substances interdites) et à ce jour, 80% des substances vendues sont classées par défaut dans la catégorie 2 ;
enfin, les valeurs de pondération utilisées pour le calcul de ces indicateurs sont arbitraires (x1, x8, x16 et x64) et ne sont étayées par aucun résultat scientifique.
Mis en pratique, le HRI 1 permettrait de faire apparaître rétroactivement une réduction trompeuse de l’utilisation de pesticides lorsqu’un produit devient interdit : les chiffres des années précédentes seraient « gonflés » car le facteur de risque du produit désormais interdit est augmenté (passant de x16 à x64) et appliqué rétroactivement sur les années précédentes. Ainsi, si le NoDU ne présente pas de baisse, en raison de la substitution de l’utilisation de ce produit interdit vers d’autres produits, le HRI 1 ferait quant à lui apparaître une forte réduction.
Ce changement d’indicateur n’a pas d’incidence sur les engagements passés de l’Etat, objet de sa condamnation, et toute baisse induite par cette modification ne saurait prouver/être regardée comme une (quelconque) baisse effective de l’usage des pesticides.
Le plan Ecophyto 2030 n’inclut par ailleurs que partiellement la question des procédures d’évaluation des risques des pesticides, dont les failles ont été reconnues par le jugement du tribunal administratif. Cet aspect pourtant central pour toute réduction de l’usage et des risques, en particulier en cas de catégorisation des substances selon leurs risques, n’est évoqué qu’au niveau européen à travers certaines mesures que la France pousserait à cet échelon. Le jugement reconnaît pourtant la capacité de l’Etat à agir au niveau national en dépassant le cadre européen. Le gouvernement ne devrait pas attendre pour mener au niveau national certaines des mesures qu’il propose au niveau européen, comme l’application du nouveau document guide d’évaluation des risques des pesticides sur les pollinisateurs publié par l’EFSA en 2023 et une meilleure prise en compte des études académiques dans le cadre de la procédure d’évaluation.
Afin d’obtenir une condamnation ferme et d’obliger le gouvernement à renforcer les protocoles d’évaluation des risques, les associations ont décidé de faire appel du jugement en première instance qui n’inclut pas d’injonction sur ce point.
La Stratégie Nationale Biodiversité
Rappel du contexte Fin 2023, Elisabeth Borne, alors première ministre, présentait la Stratégie nationale biodiversité. « Bien loin d’être une question de scientifiques, l’effondrement de la biodiversité menace notre capacité à nous nourrir, notre économie ou encore notre santé. C’est toute notre qualité de vie qui est en jeu »déclarait-elle alors. La stratégie prévoit 4 axes regroupant 40 actions, parmi lesquelles la mise en place du plan Ecophyto 2030 pour réduire de moitié l’utilisation des pesticides à l’horizon 2030.
Comment le jugement de Justice pour le Vivant en première instance éclaire la situation :
La perte de biodiversité est en effet une menace majeure. Le tribunal a reconnu que l’usage de pesticides constitue une des causes principales de l’effondrement de la biodiversité en France. L’inclusion de la réduction de l’usage des pesticides parmi les actions de la Stratégie nationale biodiversité est une nécessité.
Sur la question des pesticides, cette stratégie renvoie au futur plan Ecophyto 2030, en cours de dé-construction et comporte donc les mêmes limites que celles évoquées dans la partie de ce document correspondante, en particulier des lacunes sur l’indispensable renforcement des méthodes d’évaluation des risques des pesticides.
La condamnation de l’Etat à réduire l’usage des pesticides ne permettra pas à elle seule d’enrayer l’effondrement en cours de la biodiversité. Pour être efficace, elle doit être accompagnée d’une révision concomitante de l’évaluation des risques afin d’éviter que ne soient mis sur le marché de nouveaux produits nocifs.
Commission d’enquête parlementaire sur l’échec des politiques de réduction des pesticides
Rappel du contexte Le 1er juin 2023, le même jour que l’audience du procès Justice pour le Vivant, une Commission d’enquête parlementaire était créée, visant à « identifier les causes de l’incapacité de la France à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale et notamment sur les conditions de l’exercice des missions des autorités publiques en charge de la sécurité sanitaire ». Elle a publié son rapport le 15 décembre. Plusieurs éléments font écho au jugement rendu en première instance.
Comment le jugement de Justice pour le Vivant en première instance éclaire la situation ? Un rapport parlementaire faisant écho à l’injonction du tribunal.
Le rapport rendu par la Commission d’enquête parlementaire fait écho au jugement de première instance, en reconnaissant l’impact des pesticides sur la biodiversité, la pollution généralisée des eaux, l’existence de failles dans les processus d’évaluation de leurs risques et l’échec des politiques de réduction de l’usage des pesticides. Il émet des propositions d’actions concrètes dont certaines pourraient être saisies par le gouvernement pour se conformer au jugement.
Dans la synthèse de son rapport, publiée le 15 décembre, la Commission constate que « tous les compartiments de l’environnement sont contaminés » par les pesticides ; que ceux-ci « constituent une menace majeure pour la ressource en eau potable » et que « la pollution chimique est le troisième facteur responsable du déclin de la biodiversité animale et végétale, au même niveau que le changement climatique ».
Le rapport fait également 27 recommandations dont plusieurs pourraient être appliquées par l’Etat. Pour améliorer les procédures d’évaluation, la Commission propose (recommandation n°8) :
d’intégrer plus rapidement les études académiques récentes dans la base documentaire des évaluations ;
de prévoir une adaptation continue des lignes directrices encadrant ces évaluations ;
de développer et intégrer dans les évaluations de risque des substances actives phytopharmaceutiques et de leurs coformulants des approches combinées, portant sur les mélanges.
L’application de cette recommandation constituerait une première étape pour corriger les failles des procédures d’évaluation des risques, constatées dans le cadre du jugement.
Sur les plans Ecophyto (6ème partie du rapport), la Commission d’enquête constate l’échec des plans successifs et formule un ensemble de recommandations dont le gouvernement pourrait s’inspirer pour exécuter le jugement le condamnant à réduire l’usage des pesticides sur son territoire d’ici fin juin 2024.
Sur la pollution des eaux, le rapport soulève un point d’alerte sur la dégradation de la qualité des eaux superficielles et des nappes phréatiques (p. 55 et suivantes) et sur l’urgence à agir pour sanctuariser les captages pour l’alimentation en eau potable (p. 277 et suivantes). La Commission propose notamment de “compléter et affermir l’arsenal réglementaire visant à prévenir les pollutions diffuses dans les aires d’alimentation des captages pour l’eau potable” (recommandation n°26). Une proposition rappelant la condamnation de l’Etat à “pren[dre] toutes mesures utiles en vue de restaurer et protéger les eaux souterraines contre les incidences des produits phytopharmaceutiques et en particulier contre les risques de pollution”.
Glyphosate
Rappel du contexte En novembre 2023, le glyphosate – une substance herbicide – a été réautorisé pour 10 ans dans l’Union européenne malgré des controverses sur sa toxicité pour la santé humaine et pour l’environnement. La France s’est abstenue lors du vote sur la réautorisation de la substance.
Comment le jugement de Justice pour le Vivant en première instance éclaire la situation :
Le jugement a notamment reconnu des carences de l’Etat dans les procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, et a souligné la capacité des Etats à agir au-delà du cadre européen.
Cela aurait pu encourager l’Etat français à demander une évaluation plus complète des risques du glyphosate au niveau européen, et à voter contre la réautorisation. Dans la même logique, le gouvernement pourrait maintenant faire appliquer en France des procédures d’évaluation des risques renforcées dans le cadre des processus d’autorisation ou de réautorisation des produits contenant du glyphosate, ce qui pourrait entraîner leur interdiction ou la modification de leurs conditions d’usage dans le pays.
Si des carences dans l’évaluation des risques des pesticides ont bien été reconnues par le tribunal administratif, ce dernier n’a pas enjoint l’Etat à agir. Le collectif Justice pour le Vivant a fait appel pour obliger l’Etat à corriger ces failles.
SDHI
Rappel du contexte Les inhibiteurs de la succinate déshydrogénase (SDHI), des fongicides qui s’attaquent à la respiration cellulaire, sont déversés en Europe depuis les années 2000. Des scientifiques ont alerté sur leur dangerosité pour la biodiversité en 2018 et demandent une mise à jour des tests. Des études indépendantes montrent déjà des risques pour les vers de terre, les abeilles et les amphibiens entre autres. L’ANSES a monté un groupe de travail pour produire un rapport sur la toxicité des SDHI et a rendu son avis en décembre 2023. Malgré le ton rassurant de l’avis de l’autorité sanitaire, les conclusions du groupe de travail soulèvent plusieurs points inquiétants et il émet plusieurs recommandations allant dans le sens d’un renforcement de l’évaluation des risques de ces pesticides.
Comment la décision de Justice pour le Vivant en première instance éclaire la situation :
La décision Justice pour le Vivant en première instance reconnaît l’existence de carences dans l’évaluation des risques des pesticides. Le rapport du groupe de travail sur les SDHI mentionne lui-même des limites. Il précise que « les tests requis lors de l’évaluation des dossiers règlementaires de ces substances n’apparaissent ni adéquats, ni suffisants pour évaluer la toxicité spécifique des SDHI, au regard des données de la littérature ».
Le groupe de travail fait plusieurs recommandations et propose notamment de mettre en place une évaluation des risques spécifique sur la mitotoxicité (toxicité sur les cellules) et sur les effets des SDHI sur les écosystèmes et leur impact sur la biodiversité, qui n’ont pas été évalués jusqu’alors.
A la lumière de la décision de Justice pour le Vivant, l’Etat devrait modifier la méthodologie d’évaluation des risques et adapter les protocoles notamment pour mieux prendre en compte les risques des SDHI sur l’environnement avant d’autoriser ou non leur mise sur le marché, notamment en augmentant la prise en compte d’études académiques indépendantes.
Pollution des eaux par les pesticides
Rappel du contexte Régulièrement, des relevés détectent la présence de pesticides dans les eaux françaises. En 2017, 57% des eaux souterraines sont contaminées par au moins un pesticide. Des communes doivent interdire la consommation d’eaudu robinetà leurs habitants et 20% des Français consomment une eau dont les niveaux de contamination aux pesticides et leurs métabolites dépassent les seuils de conformité. Les effets de cette pollution sur la faune aquatique sont également bien documentés.
Comment le jugement de Justice pour le Vivant en première instance éclaire la situation :
Le juge a reconnu l’existence d’un préjudice écologique lié à la contamination généralisée, diffuse et chronique des eaux. Il a reconnu une carence fautive de l’Etat dans la protection des eaux souterraines contre les effets des pesticides, et l’a condamné à agir en restaurant leur qualité et en les protégeant.
L’exécution du jugement suppose donc pour l’Etat, d’ici juin 2024 de prendre toutes les mesures utiles pour restaurer et protéger les eaux souterraines.
Ce lundi 20 novembre, les ONG de Justice pour le Vivant ont transmis leurs arguments à la cour administrative d’appel de Paris dans leur mémoire complémentaire. Elles entendent prouver la nécessité de revoir la méthodologie de l’évaluation des risques des pesticides et obliger l’Etat à agir sur ce point afin de lutter efficacement contre l’effondrement de la biodiversité.
Les ONG portant le recours Justice pour le Vivant, POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, l’ASPAS et ANPER-TOS ont déposé leur mémoire complémentaire, après avoir fait appel d’une partie de la décision. Elles souhaitent compléter la victoire partielle obtenue lors du jugement en première instance et obliger l’Etat à corriger les failles de la méthodologie d’évaluation des risques des pesticides, préalable indispensable pour enrayer l’effondrement de la biodiversité en France.
Le 29 juin dernier, le tribunal administratif avait rendu une décision historique en reconnaissant pour la première fois le préjudice écologique lié à l’effondrement de la biodiversité causé par les pesticides. Il a également condamné l’Etat à renouer avec les objectifs des plans Ecophyto d’ici le 30 juin 2024 et à respecter les obligations de protection des eaux souterraines. Cependant, et bien qu’une carence de l’Etat ait été reconnue à ce sujet, les ministères visés n’ont pas été condamnés à combler les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides. C’est pour obtenir une victoire sur cet élément central que les ONG ont décidé de faire appel.
« Le gouvernement peut proposer de nouveaux plans Ecophyto… S’il ne revoit pas l’évaluation des risques des pesticides, il n’arrêtera pas l’effondrement en cours de la biodiversité, et les objectifs drastiques de réduction resteront, comme depuis 2018, des promesses non tenues, déclarent les associations. Face à l’ampleur de l’effondrement de la biodiversité, il est urgent d’agir et de corriger les failles reconnues par le tribunal en première instance. »
La reconnaissance des failles de l’évaluation des risques lors du jugement en première instance n’a pour le moment pas entraîné de réaction de l’Etat, qui a également fait appel de la décision. Rejetant l’ensemble du jugement, le gouvernement se refuse à agir et persévère dans son déni de responsabilité. L’appel de la décision n’étant pas suspensif, il est cependant toujours tenu de renouer avec les objectifs définis par les plans Ecophyto d’ici le 30 juin 2024.
L’IMPORTANCE DE REVOIR L’ÉVALUATION DES RISQUES DES PESTICIDES
Il existe bel et bien un lien de causalité direct et certain entre le déclin de la biodiversité et les failles de la procédure d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides. De nombreuses études scientifiques (1) permettent d’établir l’existence de toute une série d’effets des pesticides – chroniques, sublétaux, indirects, cocktails, etc. – et de voies d’exposition qui ne sont pas, ou pas suffisamment, pris en compte par l’Anses dans le cadre de l’évaluation des risques. Ces mêmes études démontrent pourtant l’ampleur que ces effets peuvent avoir sur la survie des populations d’espèces non ciblées par les pesticides. Obliger l’Etat à agir sur ce point est indispensable pour enrayer l’effondrement de la biodiversité en cours.
Une évaluation adéquate des risques permettrait nécessairement de mieux déterminer la toxicité des pesticides avant toute mise sur le marché et de mieux gérer les risques associés :
Une tribune publiée le 12 octobre dans le Monde par un collectif de chercheurs, dont Céline PELOSI, directrice de recherche à l’INRAE, dénonçaitpar exemple les effets délétères du glyphosate sur l’ADN et la reproduction des vers de terre, et l’inadéquation des tests menés pour évaluer ces risques, dans le cadre du renouvellement de l’autorisation de l’herbicide.
Le cas de l’évaluation des effets des néonicotinoïdes sur les abeilles est particulièrement révélateur de l’importance de mener une évaluation adéquate des risques. C’est seulement parce qu’à titre exceptionnel, les autorités réglementaires françaises et européennes ont pris en compte des tests supplémentaires par rapport à ceux prévus par les procédures d’évaluation en vigueur, que leurs effets délétères pour les abeilles, jusqu’alors ignorés, ont pu être mis en évidence et pris en compte. Ce précédent montre comment une meilleure évaluation des risques peut conduire à l’identification et à l’interdiction de produits responsables de l’extinction de la biodiversité.
Note
(1) Plusieurs études et rapports institutionnels mentionnant ces effets sont consultables ici : https://justicepourlevivant.org/admin/wp-content/uploads/2023/04/bibliographie-recours-jplv.pdf
Les 5 ONG environnementales de Justice pour le Vivant ont fait appel d’une partie du jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 29 juin dernier, afin d’obliger l’Etat à combler les failles des méthodes d’évaluation des risques des pesticides, reconnues de manière historique dans le premier verdict. L’Etat, condamné à respecter les objectifs des plans Ecophyto et à mieux protéger ses eaux, a lui-même fait appel de la décision, s’enfermant dans un refus d’agir pour enrayer l’effondrement de la biodiversité.
Dans sa décision du 29 juin dans le cadre du recours Justice pour le Vivant mené par POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, le tribunal administratif de Paris a reconnu pour la première fois l’existence d’un préjudice écologique résultant d’une contamination généralisée de l’eau, des sols et de l’air par les pesticides, ainsi que la faute de l’État français dans cette situation. Il a été condamné à prendre les mesures nécessaires pour respecter les objectifs des plans Ecophytos et pour protéger les eaux souterraines du pays.
Les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides ont également été reconnues par le tribunal, mais la juridiction a choisi de ne pas contraindre l’Etat à agir sur ce point. Considérant que la révision du processus d’homologation des pesticides est la condition sine qua none d’une réduction systémique et urgente de l’utilisation des pesticides en France, les 5 ONG de Justice pour le Vivant ont fait appel de cette partie de la décision, en déposant une requête devant la cour administrative d’appel de Paris le 29 août 2023. Elles cherchent à obtenir un changement concret des méthodes d’évaluation des risques des pesticides, préalable indispensable pour enrayer l’effondrement de la biodiversité.
« Dans sa décision de juin, le tribunal pointe clairement du doigt les failles de l’évaluation des risques des pesticides et leurs conséquences délétères sur le Vivant. Plutôt que d’en tirer les conséquences évidentes, les Ministres s’enferment dans un refus d’agir en faisant appel. Face à l’extrême urgence de la situation, notre appel vise à empêcher l’État de perdre plus de temps dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité» expliquent les ONG.
Face à sa condamnation et à la reconnaissance historique de sa responsabilité dans l’effondrement de la biodiversité, l’Etat a lui aussi fait appel du jugement rendu.
L’appel n’étant pas suspensif, l’Etat doit toujours, d’ici le 30 juin 2024 :
Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ;
Protéger réellement, comme la loi l’y oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leur résidus
« C’est une véritable fuite en avant : même lorsque la justice le met devant le fait accompli et le condamne, l’Etat s’enferme dans l’inaction. En refusant de revoir sa gestion des pesticides, il refuse de protéger ses citoyens et l’ensemble du Vivant sur le territoire français. » dénoncent les ONG.
Dans le cadre de ces appels, Phyteis, qui était intervenu aux côtés de l’Etat et avait défendu les Ministères concernés, non représentés lors de l’audience, pourrait de nouveau demander à intervenir dans cette nouvelle étape du recours Justice pour le Vivant.
Paris, le 29 juin 2023. Le Tribunal administratif de Paris a rendu un verdict historique dans le cadre du recours Justice pour le Vivant qui oppose 5 ONG environnementales à l’Etat et Phyteis, le lobby de l’agrochimie en France. La justice reconnaît pour la première fois la responsabilité de l’Etat dans l’effondrement du Vivant, et ses insuffisances dans l’évaluation des risques des pesticides.
Cette journée marque un tournant dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité en France. Alors que l’on constate un déclin de 76 % à 82 % des insectes volants au cours des 27 dernières années en Europe[1], une diminution de 57 % des oiseaux des milieux agricoles depuis 1980[2], le jugement rendu aujourd’hui par le Tribunal administratif reconnaît, pour la première fois, l’existence d’un préjudice écologique résultant d’une contamination généralisée de l’eau, des sols et de l’air par les pesticides et de l’effondrement du vivant etla faute de l’Etat français dans cette situation.
Le tribunal reconnaît les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, démontrées par les associations, et juge que ces failles relèvent de la responsabilité directe de l’Etat. Il reconnaît également un lien de causalité direct entre les insuffisances de l’évaluation des risques et le déclin de la biodiversité.
Le tribunal n’ordonne toutefois pas à l’Etat de revoir les méthodologies d’évaluation des risques – contrairement à ce que préconisait la rapporteure publique, estimant qu’il ne peut être établi juridiquement avec certitude qu’une meilleure évaluation permettrait de « modifier significativement la nature ou le nombre [des pesticides] mis sur le marché ». Sur ce dernier point, les associations feront appel devant la Cour administrative d’appel de Paris, et introduiront, en parallèle, un nouveau recours devant le Conseil d’Etat pour obtenir la mise en œuvre de cette décision.
Le tribunal donne par ailleurs à l’État jusqu’au 30 juin 2024 pour :
Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ;
Protéger réellement, comme la loi l’y oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leur résidus
« La justice a tranché : après des décennies d’inaction, l’Etat est enfin reconnu coupable de l’effondrement de la biodiversité par son incapacité à mettre en œuvre une évaluation des risques des pesticides réellement protectrice du Vivant. Mais c’est aussi sa capacité à agir et la possibilité de renverser cette situation dramatique que cette décision met en lumière.Les solutions pour inverser la tendance existent, il faut les mettre en place de toute urgence. »commentent les associations.
La responsabilité de l’Etat et le préjudice qui en résulte, est caractérisé par : une contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des sols et des eaux par les pesticides ; le déclin de la diversité et de la biomasse de nombreuses espèces (pollinisateurs et autres insectes, amphibiens, reptiles, oiseaux, organismes aquatiques, vers de terre, ainsi que de nombreuses autres espèces composant la faune et la flore terrestre et aquatique) ; et, plus généralement, la détérioration des chaînes trophiques et de l’ensemble des écosystèmes indispensables à la vie humaine, animale et végétale.
POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, les 5 ONG environnementales du collectif Justice pour le Vivant, ont fait des propositions fondées sur la science pour faire évoluer les méthodologies d’évaluation des pesticides avant leur mise sur le marché.
Face à la gravité de la situation, elles appellent d’ores et déjà le gouvernement à prendre ses responsabilités. Il doit revoir d’urgence les procédures d’évaluation des risques, réévaluer la dangerosité des près de 3 000 produits phytopharmaceutiques homologués en France [4], retirer du marché les substances problématiques, et s’assurer que de nouvelles substances toxiques pour le vivant n’y fassent pas leur entrée.
Les ONG se tiennent à la disposition des ministres concernés, des parlementaires souhaitant comprendre les implications de cette condamnation pour les prochains projets de loi de planification agricole et solliciteront l’ANSES pour lui présenter des solutions rapidement déployables.
« Il s’agit d’une première étape indispensable pour enrayer l’extinction en cours. Face à l’urgence de la situation, L’Etat peut et doit maintenant mener les transformations nécessaires rapidement, en s’appuyant sur la science indépendante et de manière transparente », rappellent les associations.
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