Communiqué de presse –POLLINIS, Notre Affaire à Tous et Générations Futures déposent deux recours en justice auprès du Conseil d’Etat pour demander l’annulation du décret du 8 juillet 2025 portant diverses dispositions relatives à l’autorisation des produits phytopharmaceutiques. Ce décret, qui constitue une tentative d’ingérence de la part du ministère de l’Agriculture, menace l’indépendance de l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) au profit d’intérêts économiques.
Le rôle de l’ANSES est de délivrer, modifier ou retirer les autorisations de mise sur le marché des pesticides, en garantissant une expertise scientifique indépendante. Or, ce décret permet au ministre de l’Agriculture de s’immiscer dans les travaux de l’ANSES, en soumettant au directeur général une liste de demandes d’autorisation de mise sur le marché de pesticides qu’il juge prioritaires pour certaines filières agricoles. Cette immixtion affaiblit l’indépendance de l’Agence et l’objectif de ce décret est clair : introduire une logique de priorisation économique dans un processus censé être guidé uniquement par des impératifs d’intérêt général, de santé publique et de protection de l’environnement.
Ce texte, entré en vigueur deux jours après l’adoption de la loi Duplomb, s’inscrit dans la continuité d’une manœuvre antidémocratique. Pour rappel, lors des discussions parlementaires dans le cadre de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, cette volonté de réduire l’indépendance de l’ANSES avait été rejetée en commission mixte paritaire. « Le Gouvernement a finalement fait passer par voie réglementaire ce qu’il n’avait pas réussi à faire passer par voie législative » réagit Arnaud Gossement, du cabinet représentant l’association POLLINIS. Pour Maître Hermine Baron du cabinet TTLA qui représente quant à elle les associations Notre Affaire à Tous et Générations Futures « c’est une atteinte à l’indépendance de l’ANSES, qui risque d’ouvrir la voie à une ingérence toujours plus forte dans les procédures d’évaluation, au mépris de la protection de la santé et de l’environnement. »
Pour POLLINIS, Notre Affaire à Tous et Générations Futures, cette mesure est illégale et dangereuse: « C’est un coup de force sans précédent mené contre l’autorité sanitaire française chargée de protéger les abeilles et la biodiversité dans son ensemble, ainsi que notre santé. Désormais, le ministère de l’Agriculture peut directement faire pression sur l’ANSES pour satisfaire les exigences des lobbys de l’industrie agrochimique, au mépris des impératifs de santé publique et de protection de l’environnement ».
CONTACTS PRESSE
POLLINIS Hélène Angot, Chargée de communication : presse@pollinis.org
Notre Affaire à Tous Emilien Capdepon, Chargé de campagnes : emilien.capdepon@notreaffaireatous.org
Générations Futures Yoann Coulmont, Chargé de plaidoyer : plaidoyer@generations-futures.fr
Communiqué de presse – Alors que la mobilisation citoyenne contre la loi Duplomb atteint une ampleur inédite — la pétition a déjà recueilli près de deux millions de signatures en un temps record (lien ci-dessous) —, les associations décident de multiplier les efforts en déposant une contribution auprès du Conseil constitutionnel pour soutenir les saisines des parlementaires et faire censurer plus de la moitié de la loi.
La pétition alerte sur le fait que la « loi Duplomb est une aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire ». En effet, cette loi contient de nombreuses dispositions dangereuses : atteintes aux principes fondamentaux de protection de l’environnement, contournement des procédures démocratiques, affaiblissement du rôle des collectivités territoriales, verrouillage des voies de recours, ou encore normes impossibles à appliquer en élevage plein air.
Face à ces atteintes multiples aux droits fondamentaux, à la santé publique et à la protection de l’environnement, les associations appellent le Conseil constitutionnel à faire respecter la Constitution et à censurer les dispositions inconstitutionnelles de la loi Duplomb. Par leur contribution commune, elles réaffirment l’importance d’un cadre juridique rigoureux et démocratique, indispensable pour garantir un avenir sain et durable pour tou.te.s.
Les associations reviennent donc article par article sur les mesures les plus problématiques du texte, ainsi que sur les vices de procédure qui accompagnent son adoption.
Concernant l’inconstitutionnalité de la procédure d’adoption :
La loi Duplomb a été adoptée au mépris des principes de clarté et de sincérité du débat parlementaire, par un détournement de la motion de rejet préalable ayant empêché tout examen d’amendement dès la première lecture. Cette manœuvre, sans fondement constitutionnel, viole le droit d’amendement garanti par l’article 44 de la Constitution et justifie une censure par le Conseil constitutionnel.
Article 1 :
L’article premier de la loi est inconstitutionnel car il supprime l’encadrement obligatoire et indépendant du conseil sur l’utilisation des pesticides. En rendant ce conseil facultatif et possible par des vendeurs de ces produits, la loi favorise les conflits d’intérêts, affaiblit la formation des agriculteurs et augmente les risques pour la santé humaine et l’environnement. Elle viole ainsi plusieurs articles de la Charte de l’environnement – qui a valeur constitutionnelle -,notamment son article 8 relatif à l’éducation et la formation à l’environnement et l’objectif constitutionnel de protection de la santé.
Article 2 :
L’article 2 de la loi est inconstitutionnel car il permet des dérogations illimitées à l’interdiction des néonicotinoïdes, malgré leur forte toxicité pour la biodiversité et la santé humaine. Contrairement à une précédente décision du Conseil constitutionnel, cette dérogation n’est ni limitée dans le temps, ni restreinte à certaines cultures ou substances. Elle repose sur une définition biaisée des alternatives, axée uniquement sur les coûts pour l’agriculteur, au détriment de la santé publique et de l’environnement, violant ainsi les articles 1er, 2, 3, 5 et 6 de la Charte de l’environnement. En outre, elle ne prévoit aucune participation du public, en contradiction avec l’article 7 de cette Charte.
Article 3 :
L’article 3 autorise le gouvernement à relever par décret les seuils des ICPE d’élevage en affirmant que cela ne constitue pas une atteinte au principe de non-régression. L’article 3 prévoit également une dérogation pour les projets d’élevage bovin, porcin ou avicole soumis à autorisation environnementale en permettant de remplacer les réunions publiques obligatoires par de simples permanences, réduisant ainsi la transparence et la participation du public. Cet article est ainsi inconstitutionnel en ce qu’il constitue une :
Atteinte à la participation du public (article 7 de la Charte) : remplacer les réunions publiques par des permanences limite le débat et rend les réponses du porteur de projet facultatives.
Violation du principe d’égalité (article 6 DDHC) : la dérogation ne concerne que certains élevages sans justification objective. Méconnaissance des articles 1 et 2 de la Charte de l’environnement : la loi relève les seuils sans prévoir de mesures de compensation en cas d’atteinte grave à l’environnement.
Atteinte au principe de non-régression, corollaire des principes à valeur constitutionnelle garantis par la Charte de l’Environnement
Article 5 :
L’article 5, en présumant d’office que les ouvrages agricoles de stockage, aussi appelés méga-bassines, et prélèvement d’eau dans les zones en déficit hydrique sont d’intérêt général majeur (IGM) et justifiés par une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM), porte une atteinte disproportionnée au droit à un recours juridictionnel effectif et aux principes de précaution et de gestion durable de l’eau. Cette présomption empêche une appréciation au cas par cas nécessaire pour équilibrer protection de l’environnement et besoins agricoles, alors que la jurisprudence européenne impose une analyse fine et stricte avant toute dérogation. De plus, ces infrastructures, souvent de grande taille, favorisent un modèle agricole consommateur d’eau et nuisible à la biodiversité, sans garantir d’alternatives durables ni limiter les impacts, ce qui justifie leur inconstitutionnalité.
Article 6 :
L’article 6 impose aux inspecteurs de l’environnement de transmettre leurs procès-verbaux d’infraction au procureur de la République « par la voie hiérarchique », et non plus directement. Cette exigence permet à une autorité administrative de contrôler, modifier ou bloquer la transmission d’actes relevant de la police judiciaire. Elle porte atteinte au principe de séparation des pouvoirs, à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à l’objectif constitutionnel de recherche des auteurs d’infractions.
Pour les associations « la loi Duplomb fragilise gravement la protection de l’environnement et la santé publique au profit d’une minorité d’acteurs, dont l’agrochimie, en bafouant les principes démocratiques et constitutionnels, le tout sans répondre aux attentes d’une majorité des agriculteurs et des citoyens. Face à cette loi dangereuse qui multiplie les atteintes aux droits fondamentaux et vise sans complexe à l’industrialisation de l’agriculture et de l’élevage au mépris des humains et des animaux, nous avons déposé une contribution commune devant le Conseil constitutionnel pour faire censurer plus de la moitié du texte. Notre action vise ainsi à rétablir la vérité juridique et scientifique, et à défendre l’intérêt général. »
Communiqué de presse – Le vendredi 4 juillet 2025, trois organisations de la société civile (le Collectif des Premières Nations, l’Organisation des Nations Autochtones de Guyane et Guyane Nature Environnement) ont déposé des observations en qualité d’Amicus Curiae après du tribunal arbitral international siégeant dans le cadre du différend entre deux holdings financières russes et la France (1).
L’État français est attaqué par deux investisseurs russes dans le cadre d’une procédure confidentielle de règlement des différends entre investisseurs et Etats (RDIE ou ISDS en anglais), dans le cadre du méga-projet minier « Montagne d’Or » en Guyane. Plus de 4,5 milliards de dollars de compensations seraient réclamés par les investisseurs au titre de manquement allégués aux obligations de l’État français concernant leurs droits d’exploiter de l’or et d’autres ressources dans la zone. Cette procédure constitue le premier véritable cas majeur d’arbitrage d’investissement contre la France (2).
Cette procédure, initiée en 2021, sur le fondement du traité bilatéral d’investissement France-Russie de 1989, intervient à la suite du retrait du soutien du Gouvernement français à ce projet, jugé en 2019 par le Conseil de défense écologique incompatible avec les exigences environnementales fixées par l’exécutif. Le projet Montagne d’Or, mine à ciel ouvert, avait fait l’objet de campagnes de mobilisation importantes aux niveaux local et national en raison des impacts massifs attendus sur les droits humains et sur l’environnement.
Les demandeurs sont deux sociétés de droit russe, Severgroup LLC et KN Holding LLC, propriétaires de l’entreprise Nordgold, qui est elle-même actionnaire à hauteur de 55 % de la Compagnie de la Montagne d’Or, créée en juillet 2016 pour porter le projet minier (3).
Le non-renouvellement des concessions avait fait l’objet d’un contentieux national porté par la Compagnie de la Montagne d’Or. Après une décision du Conseil Constitutionnel de 2022 et du Conseil d’État de 2023, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a finalement confirmé en novembre 2024 la légalité du refus opposé par l’administration aux demandes de la société Compagnie minière Montagne d’Or de prolongation de ses deux concessions.
Cette procédure d’arbitrage international pourrait conduire l’État français à devoir verser une indemnisation aux investisseurs alors que l’abandon du projet était justifié par de graves atteintes à l’environnement et aux droits humains, des risques industriels et environnementaux (cyanure, explosifs…), ainsi que par l’opposition locale des habitants et des organisations de la société civile.
« Cette affaire intervient dans un contexte de tensions croissantes entre obligations de protection des investissements étrangers et impératifs de préservation environnementale pointées du doigt à la fois par le GIEC et l’IPBES. Elle questionne la capacité des États à redéfinir leurs priorités en matière de transition écologique face aux engagements contractés dans le cadre des traités d’investissement. » – Mathilde Dupré, codirectrice de l’Institut Veblen.
Pour Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, « cette affaire illustre la nécessité de poser des limites d’intérêt général aux droits des investisseurs privés : le fait que deux États aient signé un accord bilatéral ne peut pas prévaloir sur l’intérêt général mondial. Face aux enjeux actuels, les exigences vitales de protection de l’environnement doivent être mises en balance avec les intérêts économiques privés. »
« On est face à un cas inédit de mauvaise foi des investisseurs russes qui ont acquis une société dans un contexte très défavorable car elle ne pouvait légalement obtenir la prolongation de ses concessions, puisqu’elle multipliait les exploitations illégales et manquait à son obligation de réhabilitation des sites miniers (dont 500 ha sont encore à ce jour non réhabilités). Les holdings russes tentent leur dernier coup de poker auprès du tribunal arbitral pour faire indemniser leurs mauvais investissements par l’État français. On est donc en train de demander un effort aux contribuables français alors que, massivement, les citoyens s’y étaient opposés en raison de la grave atteinte à leur droit à un environnement sain sur un territoire où l’État se désinvestit déjà tout particulièrement. Alors que le territoire guyanais abrite 50% de la biodiversité française et qu’il ne reçoit que peu de crédits dédiés à la préservation de l’environnement, il serait outrageant que l’État, qui tentait de préserver un corridor écologique de la plus grande Réserve Biologique Intégrale de France, doive indemniser ces investisseurs. » Nolwenn Rocca, de Guyane Nature Environnement
Notre Affaire à Tous, Adeline Paradeise, juriste : adeline.paradeise@notreaffaireatous.org
Note aux rédactions
(1) Cet arbitrage se déroule sous l’égide de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) à La Haye suivant le règlement d’arbitrage de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) de 1976 (affaire CPA n° 2022-13). Le tribunal est composé de trois arbitres internationaux: Prof. Dr. Klaus Sachs, Mme Anne K. Hoffman et Prof. Brigitte Stern. Le montant des compensations réclamées a été aussi évoqué dans la question écrite de la députée Aurélie Trouvé. https://questions.assemblee-nationale.fr/q16/16-2177QE.htm La Cour permanente d’arbitrage a annoncé en mars 2025, que le tribunal d’arbitrage – dans l’affaire KN Holding LLC & Severgroup LLC c. la République française – pourrait recevoir des observations d’amicus curiae, invitant les tiers qui seraient intéressés à soumettre une demande d’autorisation de dépôt d’amicus curiae d’ici le 10 avril 2025.
Au moins deux demandes ont été déposées en ce sens : l’une par le Collectif des Premières Nations, l’Organisation des Nations Autochtones de Guyane, WWF France et l’Institut Veblen, assistés par le cabinet Baldon Avocats (Clémentine Baldon et Nikos Braoudakis) et l’autre par Guyane Nature Environnement et Notre Affaire à tous, assistées par les avocats Charlotte Matthews, Ugo Birchen, Maria Dziumak et Sébastien Mabile.
Le tribunal a rejeté les demandes d’intervention du WWF France, de l’Institut Veblen pour les réformes économiques et de Notre affaire à tous, sans donner de justification.
(2) Les deux autres seuls cas connus antérieurs d’arbitrage contre la France (Serter c. France, 2013 concernant les droits de propriété de la conception de coques de navires et Encavis et autres c. France, 2022 concernant la révision des tarifs de rachat de l’électricité photovoltaïque) ont été interrompus. Un nouveau cas a été enregistré début juin 2025 sur le fondement du traité entre l’Arménie et la France. Il oppose S. Karapetyan, homme d’affaires russo-arménien propriétaire de l’un des plus grands conglomérats industriels et de construction de Russie – le groupe Tashir – à la France, suite à la saisie de ses biens immobiliers pour des soupçons de blanchiment.
(3) Alexey Mordashov, oligarque russe placé sous sanctions européennes depuis 2022, contrôle Severgroup LLC et KN Holding LLC et détient, par ce biais, une participation majoritaire dans Nordgold.
Ce matin, la Cour administrative d’appel de Toulouse a rendu sa décision : elle autorise la reprise des travaux de l’autoroute A69. Cette décision marque un retour en arrière dramatique pour la protection de l’environnement, alors que le chantier menace durablement des écosystèmes précieux et des espèces protégées.
Pour rappel, le 27 février dernier, le Tribunal administratif avait suspendu les travaux en reconnaissant l’irrégularité des autorisations environnementales délivrées au projet, soulignant leur non-conformité au droit de l’environnement. Selon le tribunal, qui a très longuement motivé sa décision sur des éléments factuels précis, il n’y a pas de raison impérative d’intérêt public majeur de réaliser cette nouvelle autoroute, alors que c’est une des conditions nécessaires pour porter atteinte aux espèces protégées menacées par le projet.
Une décision non motivée, aux conséquences environnementales funestes
La cour a balayé d’un revers de la main, sans expliquer son appréciation, les arguments soulevés par les associations et par le tribunal administratif qui montrent l’illégalité des autorisations environnementales du projet d’autoroute.
Cette légèreté est particulièrement inquiétante. Pendant que l’environnement paie le prix fort, les “intérêts économiques” avancent sans frein.
Cette décision entérine la politique du fait accompli qui consiste à construire rapidement une infrastructure contestée devant les juges, avant que ceux-ci n’aient eu le temps de se prononcer.
Une atteinte inquiétante au principe du contradictoire
`Selon la Cour, les arguments de l’Etat et des entreprises favorables au projet, selon lesquels le projet d’autoroute “répond par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu à une raison impérative d’intérêt public majeur”, sont suffisamment sérieux pour entraîner le sursis de l’exécution de la décision du tribunal administratif de Toulouse et donc la reprise de travaux qui ont été jugé illégaux.
Il semble particulièrement inquiétant de considérer comme sérieux notamment qu’un projet d’autoroute par nature aurait une raison impérative d’intérêt public majeur d’être réalisé. Si cette appréciation devait être suivie notamment concernant l’appel au fond, elle reviendrait à considérer que tout projet d’autoroute pourrait porter atteinte aux espèces protégées, sans même avoir à se pencher sur les conséquences bénéfiques réelles dudit projet.
La procédure qui a conduit à cette décision nous inquiète également au plus haut point. Ni le mémoire complémentaire produit par chacune des avocates des associations, ni leur note en délibéré n’ont été communiqués dans le cadre de l’instruction, et donc pris en compte par les juges, alors même qu’ils ont été produits dans les délais et qu’ils contenaient des éléments nouveaux importants. L’Etat quant à lui a pu produire plusieurs mémoires complémentaires qui ont été communiqués.
Ce déséquilibre est inacceptable : le principe du contradictoire a été bafoué.
La mobilisation continue
Rassemblements ce soir à 18h30 devant les préfectures partout en France. Un projet anachronique ne peut pas être imposé par la force et le silence. Ensemble, continuons à défendre la justice environnementale.
Contact presse
Adeline Paradeise, juriste droit de l’environnement de Notre Affaire à Tous : adeline.paradeise@notreaffaireatous.org
Pourtant de nombreuses solutions existent pour concilier développement territorial et préservation des espaces naturels
Communiqué de presse – Chaque année en France, l’équivalent de 2 fois la surface de Paris est bétonnée, menaçant notre biodiversité, notre souveraineté alimentaire et notre résilience climatique. Mais au lieu de renforcer la protection des sols, la loi TRACE qui sera votée le 18 mars au Sénat saborde l’objectif Zéro Artificialisation Nette (ZAN) à atteindre en 2050. La Fondation pour la Nature et l’Homme (FNH), la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), France Nature Environnement (FNE), Notre Affaire à Tous (NAAT) et Terre de Liens appellent les sénateurs à rejeter ce texte destructeur !
La loi TRACE : pourquoi est-ce un permis de bétonner ?
Adopté dans le cadre de la loi Climat et Résilience, l’atteinte de l’objectif ZAN en 2050 représente une avancée essentielle pour préserver les terres naturelles, agricoles et forestières. Pourtant, la proposition de loi TRACE (Trajectoire de Réduction de l’Artificialisation Concertée avec les Élus locaux) menace cet engagement en remettant en cause le principe même de réduction de l’artificialisation, en multipliant les dérogations et en affaiblissant les outils existants.
En effet, le texte initial et ses amendements vont à l’encontre des enjeux de sobriété foncière. Ce texte prévoit notamment :
L’abandon de la définition écologique de l’artificialisation, au détriment de la protection des sols vivants, de la qualité de vie dans les villes et villages et de la lutte contre le changement climatique ;
La suppression de l’objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) d’ici 2031, qui fragilise la crédibilité de l’atteinte de l’objectif de 2050 ;
Le report des échéances pour intégrer les objectifs ZAN dans les documents d’urbanisme ce qui prolonge la période d’incertitude pour les acteurs des territoires ;
L’exclusion de nombreux projets (industries, logements sociaux, énergies renouvelables, services d’eau et d’assainissement, certains postes électriques) du calcul de l’artificialisation jusqu’en 2036 ce qui sous estime l’impact réel de l’urbanisation ;
L’affaiblissement du caractère contraignant de réduction de l’artificialisation des documents régionaux de planification, qui réduit l’efficacité des politiques territoriales de préservation des sols ;
Lapossibilité pour les communes de dépasser sans justification de 20% les objectifs de réduction de l’artificialisation qui leur ont été attribués, ce qui ouvre la porte à une artificialisation plus importante que prévue.
La mise en place d’un mécanisme permettant d’artificialiser des terres supplémentaires en contrepartie de la construction sur des friches (1 hectare de friche réhabilité ouvrant droit à 0,5 hectare supplémentaire d’artificialisation) ce qui risque de créer un effet d’aubaine et d’encourager à une artificialisation additionnelle.
« Face à l’urgence climatique et écologique, la priorité doit être à la protection des terres vivantes, pas à leur destruction programmée« , déclare Thomas Uthayakumar, Directeur des programmes et du plaidoyer à la FNH. « Nous appelons les sénateurs à rejeter ce texte et à renforcer les outils du ZAN.”
Soutenons les collectivités engagées dans la sobriété foncière
Nous appelons à un changement de cap en matière d’aménagement du territoire. Plutôt que de cautionner l’artificialisation croissante des sols, il est urgent d’accompagner et de soutenir les collectivités qui s’engagent activement dans la sobriété foncière.
De nombreuses solutions existent pour concilier développement territorial et préservation des espaces naturels. La réhabilitation de friches industrielles, la densification raisonnée au sein des villes et villages, la lutte contre les logements vacants ou encore l’encadrement des meublés de tourisme sont autant de leviers permettant de répondre aux besoins en services publics, en transports, en logements et en activités économiques sans sacrifier les terres naturelles.
Toutefois, ces politiques nécessitent un renforcement des moyens des collectivités, tant en ingénierie territoriale qu’en financements. Aujourd’hui, le modèle économique de l’aménagement encourage encore trop souvent l’artificialisation des sols alors qu’il devrait mieux pénaliser les comportements allant à l’encontre de la lutte contre l’artificialisation des sols. En plus d’une augmentation des dotations de l’État, un changement des critères de répartition permettrait aux collectivités de bénéficier de ressources dynamiques, non incitatives à l’artificialisation et mieux alignées avec les besoins des territoires. Ces critères pourraient inclure la superficie d’espaces naturels préservés, la sous-densité, ainsi que le nombre de logements vacants et de friches, en tenant compte des spécificités de chaque territoire. Par ailleurs, des mesures comme la taxation des multipropriétaires de logements vacants ou des terrains nus devenus constructibles constitueraient des leviers supplémentaires pour encourager une gestion plus durable du foncier.
Nous appelons les pouvoirs publics à agir sans attendre pour une gestion plus durable de nos sols. L’avenir de nos territoires et de notre biodiversité en dépend.
Communiqué de presse, Paris, le 30 janvier 2025 – Le Tribunal Administratif a rendu un premier jugement concernant le recours en justice d’Eau de Paris contre les nouveaux forages pétroliers à Nonville, en Seine-et-Marne [1]. Il reconnaît l’illégalité de certains aspects de l’autorisation de travaux et accorde 10 mois à Bridge Énergies et au préfet de Seine-et-Marne pour régulariser le projet. Cette décision donne donc un répit bienvenu : les travaux sont suspendus. Cependant, selon les associations, le projet n’est pas régularisable. Leur combat continue pour que le juge parvienne à la même conclusion dans 10 mois.
Le Tribunal Administratif de Melun accorde 10 mois de sursis à la société Bridge Énergies et au préfet de Seine et Marne pour régulariser le projet de nouveaux forages pétroliers à Nonville sur deux points :
l’étude de l’impact du projet sur l’environnement, basée sur des inventaires datant de plus de dix ans, et jugée très insuffisante,
le montant des garanties financières, nécessaires par exemple en cas d’accident, qui n’a pas été fixé dans l’arrêté préfectoral.
Par ailleurs, le tribunal a obligé la société Bridge Energies à imperméabiliser le fossé périphérique de sa concession afin de mieux contenir les eaux de pluies polluées, reconnaissant ainsi les risques inhérents à l’exploitation de pétrole dans cet environnement fragile.
Face à ce jugement offrant un répit avant le début des travaux – qui auraient autrement commencé en mai – les associations intervenantes volontaires dans le recours en justice d’Eau de Paris [2] sont soulagées.
Cependant, le jugement écarte de façon très sommaire de nombreux arguments juridiques soulevés par les requérants.
Louis Cofflard, avocat représentant Les Amis de la Terre France, France Nature Environnement Ile-de-France, France Nature Environnement Seine-et-Marne, le Réseau Action Climat et Reclaim Finance déclare : “Ce jugement permet de contredire les affirmations du Ministre et de Bridge Énergies en reconnaissant l’illégalité, en l’état, de l’autorisation très controversée de créer les deux nouveaux puits de forage. Il ne permet pas en revanche de trancher tous les points du contentieux, loin s’en faut, et en particulier s’agissant de l’application de la réforme des titres miniers, et du nouveau Plan Local d’urbanisme de Nonville qui n’a pas entendu permettre l’installation de ces nouveaux puits de forage.”
Les associations regrettent également que le Tribunal ait balayé les arguments climatiques contre ces forages.
Marine Yzquierdo, avocate représentant l’association Notre Affaire à Tous, déclare : “La décision du tribunal sur le volet climatique paraît anachronique. Les décisions rendues au Royaume-Uni [3] nous le rappellent : l’impact sur le climat des projets de forages pétroliers doit être pris en compte. Alors que nous battons des records de température mondiale depuis des années, il existe un consensus scientifique clair : tout nouveau forage pétrolier est incompatible avec une limitation du réchauffement climatique à 1,5°C.”
Dans l’attente de la suite de la procédure judiciaire, les associations continueront à se mobiliser pour faire annuler ce projet.
Alors qu’au niveau international, tous les voyants climatiques sont au rouge depuis l’élection de Donald Trump, dix ans après la COP21, la France doit être exemplaire, en refusant d’exploiter de nouveaux gisements fossiles.
[1] Il y a un an, la préfecture de Seine-et-Marne autorisait l’entreprise pétrolière Bridge Énergies à forer deux nouveaux puits de pétrole à Nonville, en Seine-et-Marne. Les risques de pollution de sources d’eau stratégiques pour l’alimentation de Paris et des territoires avoisinants en eau potable ont alerté la régie Eau de Paris, qui a saisi le Tribunal administratif de Melun pour faire annuler l’arrêté préfectoral autorisant les travaux miniers. Le recours d’Eau de Paris souligne les graves insuffisances de l’étude d’impact environnemental, notamment sur la ressource en eau et la biodiversité.
[2] En octobre dernier, six associations (Les Amis de la Terre France, FNE Ile-de-France, FNE Seine-et-Marne, Notre Affaire à Tous, le Réseau Action Climat et Reclaim Finance) sont intervenues pour soutenir le recours en justice d’Eau de Paris via des arguments complémentaires. Ces associations pointent notamment la non compatibilité de ces forages avec le respect des engagements de la France à sortir des énergies fossiles.
Communiqué de presse, Paris, le 9 janvier 2025 – Notre Affaire à Tous et Zero Waste France contestent devant la justice la légalité de trois décrets d’application de la loi Industrie Verte. Pris dans l’entre deux tours des élections législatives de juin 2024, ils opèrent un détricotage massif du droit de l’environnement industriel, et plus généralement des principes de la démocratie environnementale.
S’attaquant notamment au principe fondamental du pollueur-payeur, ces textes augmentent les risques industriels en France. Ils assouplissent aussi les possibilités pour les entreprises responsables d’accidents industriels et de pollutions de s’exonérer de leur responsabilité, et donc les risques de voir les coûts de dépollution à la charge exclusive de l’État et des collectivités. Ou pire encore, que les entreprises abandonnent leurs sites pollués sans prendre en charge la dépollution.
Retrouvez ici notre conférence de presse qui s’est tenue le 9 janvier 2025, en présence de : Adeline Paradeise et Justine Ripoll de Notre Affaire à Tous Bénédicte Kjaer Kahlat de Zéro Waste France Paul Poulain, expert indépendant et auteur de “Tout peut exploser” Christophe Holleville, Porte-parole de l’Union des Victimes de Lubrizol Stéphanie Escoffier, habitante de la Vallée de la Chimie
Devant le refus du gouvernement de modifier les décrets d’application de la loi, les deux associations portent aujourd’hui l’affaire devant le Conseil d’Etat qui devra se prononcer sur la légalité de ces décrets.
Un allègement des procédures périlleux pour les écosystèmes et la santé humaine
Ces textes sont une attaque frontale du droit de l’environnement industriel et plus généralement de la démocratie environnementale. Méconnaissant le principe de non-régression en matière environnementale, ils allègent les procédures et permettent de nombreuses dérogations en matière de gestion des pollutions industrielles (1).
“Le gouvernement souhaite attirer les investisseurs et les nouveaux exploitants par l’allègement de nombreuses mesures et procédures”, analyse Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous. “Mais cela se fait aujourd’hui au détriment de la protection des populations et des écosystèmes. A l’heure du consensus émergent autour du scandale et du danger des polluants éternels, après les innombrables catastrophes industrielles en France et ailleurs, le gouvernement démontre une nouvelle fois son irresponsabilité en la matière.”
« Le projet d’usine de recyclage chimique Eastman en Normandie est par exemple un cas d’école, qui illustre bien les dérives permises par la Loi Industrie Verte », alerte Bénédicte Kjaer Kahlat, responsable juridique de Zero Waste France. « Alors que cette technologie coûteuse n’a jamais fait la preuve ni de son efficacité, ni de son innocuité, la qualification de projet d’intérêt national majeur – qui découle de la loi – simplifie d’un côté les procédures pour les industriels, au risque de graves atteintes pour la biodiversité. De l’autre, elle met des bâtons dans les roues des associations de protection de l’environnement, en les obligeant à multiplier les recours. »
Une remise en cause du principe pollueur-payeur lourde de conséquences
Surtout, les décrets attaquent et fragilisent le principe pollueur-payeur, principe fondamental du droit de l’environnement. Et ceà l’encontre même des préconisations des instances nationales et européennes (2). Après l’explosion de l’usine AZF (3) en 2001, les règles applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) avait été étendues afin de contraindre les entreprises à prendre en charge les frais de dépollution résultant de catastrophes industrielles (4). Or, le gouvernement a décidé de supprimer les garanties financières pour ces ICPE dangereuses, à l’exception des installations Seveso seuil haut (5).
“En supprimant ces garanties, le gouvernement accroît le risque qu’en cas de pollution ou de catastrophe industrielle, les frais pour couvrir la dépollution incombent exclusivement à l’Etat, ou pire, que celle-ci ne soit pas réalisée faute de moyens”, alerte Adeline Paradeise, juriste de Notre Affaire à Tous.
Concrètement l’entreprise responsable n’aurait qu’à se déclarer en faillite pour ne pas avoir à payer les frais de dépollution, qui se chiffrent rapidement en millions d’euros. Frais qui retomberaient alors à la charge de l’Etat et des collectivités, donc des citoyens.
Loin d’être une possibilité simplement théorique, c’est exactement ce qu’il s’est passé dans le scandale Metaleurop Nord (6) (voir encadré ci-dessous).
Qui devra payer demain ?
“Ces décrets augmentent le risque de voir des scandales similaires à celui de Metaleurop Nord se répéter à l’avenir. Si les accidents industriels que nous avons connus ces dernières années devaient se produire aujourd’hui, les entreprises responsables pourraient passer entre les mailles du filet et échapper à leur responsabilité” – Paul Poulain, expert indépendant
Qui devra alors payer pour un nouvel incendie « Bolloré Logistics », qui en 2023 dans la banlieue de Rouen, a vu brûler 900 tonnes de batteries au lithium, stockées à l’insu de toutes prérogatives, faute de réglementations actuelles, entraînant la contamination des eaux souterraines ? Qui devra payer pour un nouvel incendie de l’usine SNAM à Viviez dans l’Aveyron (7) ? Enfin, qui devra payer pour un nouveau Lubrizol ? Cette usine de Rouen dont l’incendie en 2019 a brûlé 10 000 tonnes de produits chimiques et provoqué la présence d’une trentaine de “molécules marqueurs de l’incendie” dans l’air, l’eau et les sols, ainsi que la concentration de PFAS la plus importante de France (8).
Au-delà du coût de ces catastrophes, c’est bien sûr le risque pour les populations et les écosystèmes qui inquiète les associations. Comme le souligne Christophe Holleville, porte-parole de l’Union des Victimes de Lubrizol : “Obtenir justice et réparation est déjà à l’heure actuelle un parcours du combattant. Cinq ans après, nous bataillons toujours dans le dossier Lubrizol. Pourtant, plutôt que de renforcer la protection des populations et de l’environnement, ces décrets d’application de la loi Industrie Verte vont permettre aux entreprises de se déresponsabiliser toujours davantage. Concrètement demain, ce seront potentiellement les victimes des accidents elles-mêmes qui devront payer pour la dépollution” .
Une inquiétude partagée par Stéphanie Escoffier, habitante de Oullins-Pierre-Bénite (Vallée de la Chimie, Rhône) et militante du collectif PFAS Contre terre : “La reconnaissance des pollutions chroniques est le parent pauvre du code de l’environnement, alors que ces pollutions impactent insidieusement notre santé, au quotidien. L’allègement du code de l’environnement rendra ces questions encore moins prioritaires alors que nous connaîtrons les conséquences de ces pollutions à long terme.”
Zoom – Le scandale Metaleurope Nord :
En 2003, dirigeants et actionnaires décident de la fermeture de cette usine qui aura durant 100 ans rejeté du plomb et contaminé 650 hectares autour du site. Refusant de payer les frais de dépollution – et le plan social des 850 salariés licenciés – ils déclarent alors l’entreprise en faillite. Le tribunal de commerce prononcera la liquidation trois mois plus tard. Grâce à un tour de passe-passe financier, actionnaires et dirigeants n’assumeront donc jamais leur responsabilité dans ce scandale, qui 20 ans plus tard continue encore d’avoir des conséquences sociales, sanitaires et environnementales dramatiques sur les riverains et l’environnement. Laissant ainsi l’addition de plusieurs millions d’euros à l’État (9) et la collectivité.
(1) Articles 39 et 42 du Décret n° 2024-742 du 6 juillet 2024 portant diverses dispositions d’application de la loi industrie verte et de simplification en matière d’environnement.
(3) L’explosion en 2001 à Toulouse de cette usine de fabrication d’engrais, appartenant à une filiale du groupe Total-Fina-Elf, a causé le décès de 30 personnes et plus de 8 000 personnes ont été blessées.
(4) Loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
(5) Articles 57, 58, 62 et 64 du Décret n° 2024-742 du 6 juillet 2024 portant diverses dispositions d’application de la loi industrie verte et de simplification en matière d’environnement.
La recommandation de la rapporteure publique, le 25 novembre, était pourtant sans équivoque : elle proposait l’annulation de l’autorisation environnementale en raison de l’absence de Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur (RIIPM) et l’impossibilité de régulariser cette remise en cause des fondements du dossier. Ce rapport, fondé sur une analyse lucide, détaillée et sans complaisance du dossier du concessionnaire n’aurait pas convaincu les juges du Tribunal Administratif (TA) de Toulouse en première instance ? Le dossier A69 fait décidément figure d’exception car il est rare dans les procédures judiciaires que le Tribunal ne suive pas l’éclairage du rapporteur public, magistrat indépendant.
Le TA réouvre l’instruction sur un motif que l’Etat n’avait pas jugé majeur
Il s’agissait pour les juges de se prononcer sur la légalité de l’A69 au regard de la reconnaissance d’une Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur. Le TA réouvre aujourd’hui l’instruction du dossier sur un fait « nouveau » mentionné par l’Etat dans sa note en délibéré sorti du chapeau il y a 5 jours ! A savoir : « l’engagement ministériel concerne en effet une diminution des tarifs de péage actuellement prévus de 33% sur ces déviations ». Pourtant, les préfectures avaient balayé la réserve n°1 de la Commission d’Enquête, selon laquelle : « le coût du péage sera réduit de 33% et comportera une modulation faisant que les 10km des déviations de SOUAL et PUYLAURENS bénéficieront d’une réduction supplémentaire de 20%… »). En effet, l’arrêté préfectoral donnant autorisation environnementale mentionnait (01/03/2023) : « Considérant que la réserve n°1 de la Commission d’enquête porte sur des questions manifestement étrangères à la législation applicable au présent arrêté […] ». Et maintenant, cette baisse du prix du péage constituerait un élément majeur justifiant de réouvrir l’instruction ? Le TA décide de consacrer du temps à statuer sur un fait que la rapporteure publique avait elle-même écarté, estimant qu’il n’était pas un élément essentiel pour la Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur (RIIPM). De qui se moque t’on ?
En évitant de statuer, le TA fait gagner du temps au chantier
Le TA évoque une possible audience dans « plusieurs mois » sur une note en délibéré de 16 pages… C’est totalement disproportionné. Nous discernons très clairement une manœuvre visant à faire gagner du temps pour la poursuite des travaux et passer en force. Par cette réouverture de l’instruction, le TA empêche également les requérants de faire appel. Nous utiliserons tous les recours juridiques possibles pour mettre un terme à ce scandale, et faire suspendre les travaux.
Et maintenant tous les habitants devraient payer pour l’A69 ?
La baisse de la subvention d’équilibre (engagement public qui est passé de 230M€ à 23M€) avait permis à NGE de remporter le contrat de concession. Le nouvel équilibre annoncé par l’Etat remet donc en cause le montage financier et le bilan socio-économique de la concession de l’A69. On ne peut pas changer les règles en cours de jeu. Alors que les caisses de l’Etat sont vides, un ministère démissionnaire engage des fonds publics sur un projet que le Commissariat Général à l’Investissement a pourtant déclaré à risque. Après le chantage à l’emploi, c’est maintenant la prise en otage de tous les habitants du Sud Tarn qui devront payer pour cette autoroute impopulaire.
En attendant, nous restons mobilisés ! Nous continuerons à porter haut et fort les nombreuses raisons de contester ce projet.
Communiqué de presse, 24 novembre 2024 – A l’initiative du collectif La Voie Est Libre, l’association Notre Affaire à Tous et treize autres associations, ONG et syndicat, soutenus par les collectifs de citoyens opposés à l’autoroute A69/A680, ont saisi la Justice fin mai 2023. C’est ce lundi 25 novembre que l’affaire est examinée par le juge du Tribunal Administratif de Toulouse.
Malgré les alertes des scientifiques, les catastrophes socio environnementales liées au changement climatique se succèdent à un rythme effréné, entraînant des pertes humaines et matérielles sans précédent.
Les travaux de la liaison autoroutière Castres Toulouse ont commencé en mars 2023 en l’absence d’études sérieuses par l’État – pourtant obligatoires – d’alternatives routières et ferroviaires. Bien que la nature reprenne toujours ses droits, les dégâts perpétrés seront plus facilement réversibles tant que le revêtement bitumineux ne sera pas appliqué.
Nul ne peut ignorer que la poursuite et l’achèvement de ce chantier d’autoroute, puis son exploitation :
porteraient définitivement atteinte à l’environnement, que la destruction de la biodiversité et des corridors écologiques serait irrémédiable et ne pourrait être compensée ;
ne feraient qu’amplifier, dans le Tarn et la Haute-Garonne, les phénomènes liés au changement climatique comme les inondations et sécheresses, mettant ainsi en danger les populations ;
condamneraient des centaines d’hectares de terres agricoles, les plus fertiles d’Occitanie, en les artificialisant définitivement ;
détruiraient un cadre de vie et accentueraient gravement la pollution pour la population locale de villages jusqu’ici préservés, entraînant la circulation de milliers de véhicules supplémentaires dans les centres-villes de Soual et Puylaurens ;
mettraient en danger la santé des populations proches des centrales d’enrobés, parmi les plus grandes d’Europe, prévues à Puylaurens/Saint Germain et Villeneuve-lès-Lavaur ;
alors que le château de SCOPONT, classé monument historique devrait légalement être protégé par un rayon de 500 m, il est menacé ainsi que ses arbres pluri centenaires et ses jacinthes de Rome, espèce protégée ;
contribuerait à accentuer la fracture sociale au sein de la population locale, laquelle rejette massivement ce projet dévastateur, inutile et d’un autre siècle (seuls quelques centaines de véhicules des plus fortunés gagneraient 15 minutes, pendant que des milliers d’utilisateurs de la RN126 bientôt déclassée et allongée perdraient 25 minutes).
Alors qu’après 18 mois de chantier, le projet d’autoroute A69, mené par ATOSCA, s’est illustré par 21 rapports en manquement administratif et 6 arrêtés préfectoraux de mise en demeure, le projet s’est poursuivi.
Il a cependant accumulé des retards colossaux. Contrairement à ce qu’affirme ATOSCA sous contrôle de l’État, les travaux ont en effet un an de retard sur les ouvrages d’art, et les terrassements titanesques n’en sont qu’à leurs balbutiements. De nouvelles fouilles archéologiques vont démarrer et les centrales d’enrobés qui devraient déjà libérer leurs fumées toxiques, seraient finalement prévues pour le printemps 2025.
Outre ces évidences que nous martelons inlassablement depuis des années, il en est une que nous dénonçons avec plus de vigueur encore : l’absence de Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur (RIIPM) supposée justifier la destruction d’espèces protégées et de leur habitat.
Le 20 novembre 2024, le rapporteur public s’est prononcé en faveur de l’annulation totale de l’autorisation environnementale, et a confirmé l’absence de RIIPM. Cet avis majeur confirme ce que nous affirmons depuis des mois et les avis critiques ou négatifs des autorités indépendantes (Autorité environnementale, Commissariat général à l’investissement, Conseil national de protection de la nature, etc.). Notre requête en annulation est ainsi pleinement légitimée.
Ces longs mois de lutte acharnée sur tous les fronts – juridique, médiatique, politique, de terrain, sans oublier celui de l’alternative citoyenne Une Autre Voie – ont permis de montrer très largement que ce projet d’un autre temps ne correspondait pas aux besoins du territoire. Nous demandons depuis plus d’un an et demi la suspension des travaux pour laisser à la Justice le temps de faire son office. Nous y sommes.
Les associations requérantes dans ce procès, ainsi que les collectifs mobilisés contre l’A69 demandent à la Justice de dire le droit en prononçant l’illégitimité de la RIIPM invoquée par les élus et le concessionnaire, et l’annulation pure et simple des arrêtés A69/A680 de mars 2023 porteurs des autorisations environnementales, entraînant ainsi la suspension immédiate des travaux.
Nous avons confiance en la Justice : elle doit aussi se prononcer en faveur du Vivant et de l’intérêt général sur ce dossier.
Cet arrêt permettra la mise en place d’une étude de l’alternative citoyenne, qui métamorphosera les dégâts engagés en un aménagement sécurisé de la RN126, une densification du réseau de bus, un aménagement de la ligne de chemin de fer Toulouse-Mazamet, et un aménagement du territoire en accord avec les enjeux sociaux et climatiques le long de la première Vélo Route Nationale. En bref, une renaturation des surfaces saccagées et une vraie prise en compte de l’intérêt public.
Une Autre Voie est possible !
Contact presse
Marine Coynel, chargée de communication de Notre Affaire à Tous : marine.coynel@notreaffaireatous.org
Communiqué de presse, Paris, 13 novembre 2024 – Notre Affaire à Tous, Générations Futures, Biodiversité sous nos Pieds (BSNP) et l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages (ASPAS) ont déposé un recours en excès de pouvoir auprès du Conseil d’Etat contre le plan Ecophyto 2030 jugé illégal. En violation claire de la condamnation historique de l’Etat dans le dossier Justice Pour le Vivant, le plan Ecophyto 2030 acte un abandon de l’objectif de 50% de réduction de l’utilisation des pesticides.
Le 4ème plan Ecophyto, “Stratégie Ecophyto 2030”, publié par le précédent gouvernement en mai 2024, après l’échec des plans précédents (1) et sous la pression des syndicats agricoles majoritaires, a introduit plusieurs changements lourds de conséquences et inconstitutionnels.
Le Plan Ecophyto II+ fixait un objectif de réduction de 50% d’utilisation des produits phytopharmaceutiques à l’horizon 2025 par rapport à 2015 sur la base de l’indicateur NODU. La Stratégie Ecophyto 2030 garde en apparence l’objectif de réduction de 50%. Cependant, les différences sont en réalité notables. L’indicateur NODU est abandonné au profit d’un autre indicateur très différent le HRI1, la période de référence est désormais fixée à une moyenne triennale 2011-2013 et l’échéance d’atteinte de l’objectif est de nouveau reportée à 2030. Enfin, le nouveau plan introduit un principe “Pas d’interdiction sans solution”.
Un abandon de l’objectif de réduction, contraire à la condamnation de l’État en juin 2023
Alors que ce nouveau plan a une incidence notable sur l’environnement et la santé des agriculteurs et des citoyens, il n’a fait l’objet ni d’une évaluation environnementale par le gouvernement, ni d’une procédure de participation du public.
Pourtant les analyses des associations et experts scientifiques sont sans appel. Un changement d’indicateur et de période de référence, revient en réalité à un changement d’objectif : cela signe concrètement un abandon de l’objectif de 50% de réduction de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques prévus dans les plans Ecophyto précédents.
Dès lors, la Stratégie Ecophyto 2030 a été adoptée en contradiction flagrante avec les injonctions du jugement du tribunal administratif de Paris du 29 juin 2023 demandant de respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto. De plus, elle ne comporte pas de mesures appropriées de nature à protéger des eaux souterraines contre les incidences des produits phytopharmaceutiques également requis par le TA.
“Pas d’interdiction sans solution”, un principe inconstitutionnel et irresponsable
Les différentes régressions de la Stratégie 2030, comme le changement d’indicateur, le recul de l’objectif de diminution des usages de produits phytopharmaceutiques, mais également l’introduction d’un nouveau principe « pas d’interdiction sans solution » viennent a minima conforter une utilisation des produits phytopharmaceutiques particulièrement nuisible pour l’environnement et la santé humaine. Elles portent ainsi atteinte au principe de précaution, de non-régression et aux droits des générations futures. Selon le Conseil constitutionnel, « le législateur doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures […] à satisfaire leurs propres besoins » (2).
En France, troisième pays européen en termes de nombre de produits phytopharmaceutiques autorisés, le coût environnemental, sanitaire et sociétal du recours massif aux pesticides de l’agriculture est élevé et n’est plus à démontrer :
La contamination de l’environnement par les pesticides est identifiée comme l’une des causes de l’effondrement de la biodiversité qui met en danger notre sécurité alimentaire.
Les études concernant l’impact des pesticides sur la santé des travailleurs et des riverains montrent l’existence de liens forts entre l’exposition aux pesticides et notamment des cancers et des maladies neurodégénératives (3). Le nombre de reconnaissances de maladie professionnelle pour des agriculteurs exposés est en croissance exponentielle.
En Europe, une étude du bureau d’étude indépendant Basic chiffre les coûts sociétaux attribuables à l’utilisation des pesticides de synthèse dans l’Union Européenne à 2,3 milliards d’euros en 2017. Toujours selon cette étude, les coûts sociétaux attribuables à l’utilisation des pesticides de synthèse en agriculture à l’échelle européenne sont 2,44 fois plus élevés que le bénéfice direct tiré des pesticides de synthèse par leurs fabricants.
“A l’heure où les agriculteurs se mobilisent, il est fondamental de rappeler qu’abandonner les réglementations environnementales ne résoudra en rien les problèmes des agriculteurs. Notre dépendance aux substances de synthèse met en péril notre sécurité alimentaire et pèse sur la viabilité des exploitations. En perpétuant leur usage dans le secteur agricole, le gouvernement compromet les efforts visant à promouvoir des modèles plus durables et moins coûteux d’un point de vue sanitaire et environnemental. » déclarent les représentants des ONG requérantes.
Notes
(1) Cour des comptes, 27 septembre 2019; rapport du Conseil Général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), mars 2021.
(2) Conseil constitutionnel, 27 octobre 2023, n° 2023-1066 DC. Le Conseil Constitutionnel a par ailleurs affirmé que les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de la santé et de l’environnement pouvaient justifier une atteinte à la liberté d’entreprendre (31 janv. 2020, no 2019-823 QPC).
(3) INSERM, « Pesticides et effets sur la santé » de 2013, actualisée en 2021.
Nous utilisons des cookies pour nos statistiques. Certains contenus éditoriaux (vidéos, contenus externes) peuvent également utiliser des cookies. Vous pouvez accepter ou refuser les cookies et continuer la visite de notre site. Votre choix est enregistré pendant 1 mois.J'accepteJe refusePolitique de confidentialité