Pour cette vingt-deuxième newsletter des affaires climatiques et environnementales, vous trouverez en focus un article sur la potentielle reconnaissance implicite des droits de la nature par les juridictions françaises.
Ensuite, vous retrouverez les chroniques de trois décisions récentes en matière de contentieux environnemental : la condamnation de l’État à dépolluer une large zone littorale polluée aux métaux, une décision de la Cour de justice de l’Association européenne de libre-échange sur les stockages de déchets et une décision du Conseil constitutionnel sur l’encadrement des atteintes aux espèces protégées.
Très bonne lecture et merci d’être toujours aussi nombreux et nombreuses à lire ce courrier ! Et si vous souhaitez, vous aussi, vous investir dans la rédaction des prochains numéros, c’est par ici.
Clarisse Macé, co-référente du groupe de travail veille-international
Focus : Vers une reconnaissance implicite des droits de la nature par les juridictions françaises ?
Alors que les scientifiques annoncent l’arrivée de la sixième extinction de masse du fait des activités humaines, les normes juridiques et les juridictions doivent plus que jamais protéger le vivant. En France, la protection de la biodiversité passe notamment par la reconnaissance d’espaces et d’espèces à protéger des destructions humaines. Une protection est accordée en fonction de la vulnérabilité et de l’importance de chaque espèce ou espace, sans les considérer comme des entités dotées de droit comme le sont les humains.
Petit à petit, la frontière entre droits fondamentaux et protection du vivant s’amenuise au fil des décisions des juridictions administratives (I) et certaines décisions peuvent s’analyser comme reconnaissant implicitement des droits à la nature (II).
Le tribunal administratif de Marseille a condamné l’État français à dépolluer une large zone littorale polluée aux métaux avant le 30 juin 2028.
Le 16 décembre 2024, le tribunal administratif de Marseille a rendu une décision importante pour la santé des habitants du littoral sud de Marseille et la protection de l’environnement remarquable que constituent les calanques. Les juges phocéens posent par cette décision la première pierre du processus de dépollution d’une large zone de friches industrielles au cœur des calanques résultant de deux siècles de pollution par des dépôts et des exploitations industrielles. Si le préjudice moral des associations requérantes est reconnu et donne lieu à des injonctions de dépollution, le préjudice écologique ne l’est pas.
Décision fondamentale de la Cour de justice de l’AELE : Les considérations purement économiques ne sont pas suffisantes pour justifier une autorisation de stockage de déchets dans une masse d’eau.
Le 5 mars 2025, la Cour de justice de l’Association européenne de libre-échange (AELE) rend un avis consultatif relatif à l’interprétation de la directive-cadre de l’Union européenne sur l’eau du 23 octobre 2000. Cette demande d’avis intervient dans le cadre d’une affaire devant une cour norvégienne, opposant les ONG Friends of the Earth Norway et Young Friends of the Earth Norway au gouvernement norvégien. La décision est importante à plusieurs égards : d’une part, c’est la première fois que la Cour de justice de l’AELE se prononce sur une question liée à la protection de l’environnement et, d’autre part, elle rappelle l’absolue nécessité d’assurer la préservation des sources d’eau.
La décision du Conseil constitutionnel du 5 mars 2025 a validé la possibilité de reconnaître par décret la raison impérative d’intérêt public majeur d’un projet.
Cette décision facilite ainsi l’octroi postérieur d’une dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées, puisque ces projets ne devront ainsi remplir que les deux autres conditions légales au stade de l’octroi de la dérogation : absence de solution alternative satisfaisante et maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
Pour cette vingt-et-unième newsletter des affaires climatiques et environnementales, vous trouverez en focus un article sur l’encadrement juridique des impacts de l’élevage sur l’eau.
Ensuite, vous retrouverez les chroniques de deux décisions récentes en matière de contentieux climatique : le contentieux du refus du gouvernement français d’octroyer un permis de recherches d’hydrocarbures pour des raisons climatiques et la première victoire d’un recours climat en Asie.
Concernant les affaires environnementales, deux contentieux intéressants sont commentés : la confirmation d’un refus permis de construire au regard de la gestion de la ressource en eau en France et une transaction modèle conclue entre des associations et le gouvernement de Michigan concernant les injustices environnementales liés aux infrastructures de gestion des déchets.
Enfin, un article détaille les enjeux et les accords trouvés à la “COP 16 biodiversité” qui s’est déroulée en novembre en Colombie.
Très bonne lecture et merci d’être toujours aussi nombreux et nombreuses à lire ce courrier ! Et si vous souhaitez, vous aussi, vous investir dans la rédaction des prochains numéros, c’est par ici.
Clarisse Macé, co-référente du groupe de travail veille-international
Focus : Encadrement juridique des impacts environnementaux de l’élevage
En France, l’agriculture utilise 58 % de l’eau douce consommée annuellement. Cette eau sert principalement à l’abreuvage des animaux et à l’irrigation des cultures (6,8% des surfaces agricoles étaient irriguées en 2020). Cette eau vient principalement de la pluie, les prélèvements dans les milieux naturels sont minoritaires et principalement utilisés pour l’irrigation des cultures (à 80 %).
Si l’agriculture ne peut se faire sans eau, les quantités consommées varient grandement selon le système d’agriculture et la nourriture produite. D’une part, certaines cultures nécessitent de grandes quantités d’eau, notamment le maïs fourrager. D’autre part, la production de viande et de produits laitiers nécessite de nourrir et d’abreuver des animaux pendant un certain temps, ce qui fait augmenter la quantité d’eau nécessaire à la production de calories ou de grammes de nourriture.
Un autre enjeux de l’agriculture est la pollution de l’eau, qu’elle soit prévue ou prévisible (produits phytosanitaires, nitrates et algues vertes…) ou accidentelle (déversement de fumier dans des cours d’eau, fuites des stations d’épuration des usines agro-industrielles…).
En l’absence de volonté politique, des contentieux nationaux et locaux traditionnels mais également des contentieux innovants sont envisageables.
Le Conseil d’État consacre le droit de refuser la délivrance d’un permis exclusif de recherches d’hydrocarbures pour le motif d’intérêt général de la limitation du réchauffement climatique.
Suite au refus du permis exclusif de recherches d’hydrocarbures liquides ou gazeux par le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l’économie et des finances, la société EG Lorraine SAS a obtenu l’annulation de ladite décision par le tribunal administratif de Strasbourg pour excès de pouvoir. L’appel par la ministre de la transition écologique contre ce jugement ayant été rejeté, cette dernière s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’État.
Par une décision rendue le 24 juillet 2024, le Conseil d’État a jugé que l’administration était en droit de refuser la délivrance d’un permis exclusif de recherches d’hydrocarbures pour le motif d’intérêt général de limitation du réchauffement climatique par la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation des énergies fossiles.
Première victoire dans un recours climat asiatique : la loi climat de la Corée du Sud est jugée inconstitutionnelle.
Le 28 août 2024, la Cour constitutionnelle de Corée du Sud a rendu une décision qui déclare inconstitutionnel l’article 8.1 de la loi climat sud-coréenne (« Carbon Neutrality Act ») qui pose une réduction minimale obligatoire des émissions de gaz à effet de serre, estimant que celui-ci viole les droits fondamentaux des demandeurs à l’action.
Accord innovant au Michigan pour la justice environnementale autour des sites de stockage de déchets dangereux.
Un accord a été conclu entre le ministère de l’environnement, des grands lacs et de l’énergie de l’état du Michigan (États-Unis d’Amérique) et des associations environnementales ainsi que des habitants locaux afin de limiter les pratiques discriminatoires en matière d’autorisations d’installations de stockage et de traitement des déchets dangereux. L’accord innove notamment en mettant en place des dispositifs renforcés de traduction pour rendre accessibles les débats publics et documents majeurs des dossiers déposés ainsi qu’en obligeant les entreprises candidates à compléter leur dossier par une analyse de justice environnementale.
Bonus : De l’accord de Paris, ville lumière, à l’accord de Cali, la succursale du Ciel ?
La COP 16 a suscité beaucoup d’intérêt, notamment par le fait que le secteur privé commence à s’intéresser aux questions de protection de la biodiversité. La Colombie devait organiser la COP 16 et après une hésitation entre Bogotá (la capitale) et Cali, il a été décidé que la COP 16 devait se tenir à Cali. Cette décision doit être saluée. Cette décision permet de sortir du centralisme, qui imprègne les institutions en Colombie.
La COP 16 à Cali devait être un moment de renaissance pour la ville après des années de tension. Sur le plan international, la COP 16 avait l’objectif d’une part de transmettre un message de paix, dans une période marquée par des conflits et des guerres dans le monde entier, et d’autre part contribuer à la formulation d’un modèle économique respectueux, en paix avec la nature et qui tienne compte de l’importance de conserver et utiliser durablement les ressources biologiques.
S’agissant du droit international de l’environnement, la COP 16 était très attendue car plusieurs acteurs militaient pour un accord marquant une nouvelle ère dans la protection de la biodiversité à l’échelle mondiale. Finalement, la COP 16 a été marquée par certaines avancées en matière de protection de la biodiversité mais les résultats des négociations sont en deçà des attentes.
Quelques mois avant le dixième anniversaire de l’association, nous sommes heureuses et heureux de vous présenter notre vingtième numéro de la newsletter des affaires climatiques et environnementales. La première newsletter, publiée en mai 2019, portait sur les victoires de la justice climatique. Ces premiers opus étaient uniquement accès autour du contentieux climatique. Puis, nous avons élargi notre champ de travail à l’ensemble des contentieux environnementaux, comme le fait Notre Affaire à Tous, tout en restant orientés vers les contentieux systémiques. Aujourd’hui, dans ce vingtième numéro, nous souhaitions revenir sur l’évolution des contentieux climatiques, durant ces cinq dernières années et sur les perspectives qu’ils ouvrent. En outre, comme à l’accoutumée, vous retrouverez un panorama des dernières décisions de contentieux climatiques et environnementaux, en France et à travers le monde.
Très bonne lecture et merci d’être toujours aussi nombreux et nombreuses à lire ce courrier ! Et si vous souhaitez, vous aussi, vous investir dans la rédaction des prochains numéros, c’est par ici.
Sandy Cassan-Barnel, co-référente du groupe de travail veille-international
Focus : Point sur les procès climatiques à travers le monde
Alors que la crise climatique continue de s’aggraver et que les gouvernements du monde entier peinent souvent à adopter des mesures adéquates, les tribunaux s’imposent comme des arènes clés pour contester l’inaction et exiger des actions concrètes en faveur du climat. Le dernier rapport sur les tendances mondiales en matière de contentieux climatiques, publié en juin 2023 par la London School of Economics, a répertorié 2341 cas (tous défendeurs confondus), dont les deux tiers ont été initiés depuis 2015, année de la signature de l’Accord de Paris sur le climat.
Il relève par ailleurs que seulement 24 juridictions étaient représentées dans le rapport en 2017, contre 39 en 2020 et 65 en 2023. Ce dernier rapport du PNUE et du Sabin Center met en évidence la véritable internationalisation des contentieux climatiques ; ces contentieux dont « le scope ne cesse de s’étendre » offrent ainsi « une voie possible pour s’attaquer aux réponses inadéquates des gouvernements et du le secteur privé à la crise climatique ».
Cette augmentation notable des litiges climatiques souligne l’urgence croissante de la situation.
La Cour suprême de Nouvelle-Zélande a rendu, le 7 février 2024, une importante décision ouvrant la voie à un procès en responsabilité civile contre les sept sociétés néo-zélandaises les plus émettrices de gaz à effet de serre en raison des dommages causés par leurs émissions de gaz à effet de serre.
Le 22 décembre 2023, le tribunal administratif s’est prononcé sur la question de savoir si le Gouvernement français avait correctement exécuté la décision du 14 octobre 2021 dans lequel le tribunal sanctionnait l’Etat français pour manquement à ses obligations en matière de lutte contre le changement climatique.
Prononcés dans les affaires de Grande Chambre concernant le changement climatique à la Cour Européenne des Droits de l’Homme
Le 9 avril 2024, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a statué sur trois affaires climatiques : Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse [GC], Duarte Agostinho et autres c. Portugal et 32 autres, et Carême c. France. Si elle a jugé les deux dernières irrecevables, la Cour a rendu une décision de fond concernant l’affaire portée par l’association KlimaSeniorinnen. Marquant un tournant historique en matière de justice climatique, la Cour a conclu à une violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme par la Suisse. Ainsi, la Cour reconnaît le droit des individus d’être protégés par l’État contre les effets du changement climatique.
La publicité de Lufthansa interdite pour greenwashing par l’autorité britannique de régulation de la publicité
En mars 2023, Lufthansa, compagnie aérienne allemande, se fait épingler pour greenwashing par l’Advertising Standards Authority (ci-après ASA), l’agence chargée de la régulation de l’industrie de la publicité au Royaume-Uni. Celle-ci estime qu’une affiche publicitaire pour la compagnie a pour conséquence de donner une image trompeuse de l’impact sur l’environnement des activités conduites par Lufthansa. Les mesures prises par Lufthansa ne sont pas cohérentes avec l’impression que donne la publicité.
Le Tribunal international sur le droit de la mer a rendu un avis historique sur les obligations des États au regard des effets du changement climatique sur les milieux marins
Le 21 mai 2024, le Tribunal international sur le droit de la mer a rendu un avis reconnaissant et explicitant les obligations des États, individuelles et collectives, de prévenir, réduire et maîtriser les émissions de gaz à effet de serre et leur impact sur les milieux marins. Même si ce ne sont que des obligations de moyens qui obligent les États, le Tribunal insiste sur le niveau élevé de diligence requise et l’obligation des États de faire respecter les lois et règlements applicables par les entreprises. Il souligne l’obligation d’assistance, notamment financière, aux États en développement et indique que l’obligation de protection des milieux marins comprend notamment des mesures de restauration des écosystèmes.
Le Conseil d’État ordonne l’enfouissement des déchets toxiques sur le site de Stocamine
Par une ordonnance du 16 février 2024, le Conseil d’Etat juge urgent de procéder aux travaux d’enfouissement de produits dangereux, non radioactifs, sur la commune de Wittelsheim en Alsace. Les juges du Palais-Royal annulent alors l’ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Strasbourg et rejettent la demande présentée par l’association Alsace Nature visant à la suspension de l’arrêté préfectoral autorisant l’enfouissement pour une durée illimitée.
Rapport de la Cour de cassation sur le traitement pénal du contentieux de l’environnement
A l’occasion de l’ouverture du cycle de formation sur le droit pénal de l’environnement dispensée par le parquet général, Monsieur François Molins, procureur général près de la Cour de cassation, a proposé de constituer un groupe de travail pluridisciplinaire afin de faire le point sur l’état actuel du contentieux pénal de l’environnement. Le rapport commence par dresser l’état du contentieux en constatant notamment un phénomène de la dépénalisation du droit de l’environnement.
Le groupe rappelle quelques évolutions récentes en matière de droit pénal de l’environnement, mais conclut que les réponses judiciaires ne sont pas satisfaisantes en raison de leur manque de réactivité et de fermeté.
Le recours d’un groupe de 145 Camerounais contre les agissements du groupe Bolloré
Un groupe de 145 citoyens Camerounais souhaitent contraindre la société Bolloré à fournir des documents censés établir ses liens avec la Société camerounaise de palmeraies (Socapalm), qu’ils accusent d’attenter à leurs droits. En effet, ils accusent notamment ces deux sociétés, à travers leur activité de plantation de palmeraies, de détruire leur environnement, et de les priver de leurs ressources. C’est pour ces raisons qu’ils font appel de la première décision du Tribunal de Nanterre qui a jugé leurs demandes irrecevables.
Thomas c. EPA recours contre les permis délivrés par l’Agence de protection de l’environnement guyanaise (EPA) à Esso Exploration
Le 21 mai 2020, Troy Thomas, scientifique guyanais, a saisi la Cour suprême de Guyane, d’un recours contre les permis délivrés par l’Agence de protection de l’environnement guyanaise (EPA) à Esso Exploration pour exploration pétrolière violaient les dispositions de la loi sur la protection de l’environnement (Environmental Protection Act). M. Thomas à notamment déclaré que ces permis exposaient la Guyane et le reste du monde “à des préjudices graves, voire irréparables, et aux conséquences néfastes du changement climatique”. Le 7 octobre 2020, la Cour suprême de Guyane a rendu une ordonnance de consentement acceptant un accord entre M. Thomas, l’EPA et Esso.
Recours contre le permis de forage du champ gazier de Barossa, en Australie, pour non consultation des populations autochtones
Dennis Tipakalippa, juriste et principal propriétaire traditionnel Munupi, poursuit Santos, une entreprise pétrolière australienne, et le gouvernement fédéral australien en raison de l’approbation des plans de forage du champ gazier de Barossa. En effet, le 21 septembre 2022, M. Tipakalippa déclare que le permis environnemental de forage délivré par l’Autorité nationale de gestion de la sécurité et de l’environnement pour le pétrole offshore (NOPSEMA) à Santos était illégitime, puisque celui-ci ne l’avait pas consulté lui ou le clan Munupi. En conséquence, la Cour fédérale australienne à décidé d’annuler le permis. L’appel de Santos sera rejeté.
Décision du Conseil d’Etat relative aux soulèvements de la Terre
Suite à de violents affrontements entre des militants des Soulèvements de la Terre et des gendarmes à Sainte-Soline, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin a décidé de dissoudre le collectif écologiste le 21 juin 2023. Il reproche notamment à ce dernier d’appeler et de participer à des violences envers les forces de l’ordre. Le 9 novembre 2023, les Soulèvements de la Terre demandent l’annulation de cette décision au Conseil d’État.
Pour cette dix-neuvième newsletter des affaires climatiques et environnementales, vous trouverez en focus, le quatrième et dernier chapitre de notre série sur la saga du lithium. La question de l’encadrement juridique de l’extraction du lithium est, cette fois-ci, analysée sous l’angle des standards de l’ESG (gouvernance environnementale et sociale de l’entreprise).
Ensuite, vous retrouverez les chroniques sur les dernières décisions en matière de contentieux climatique : Suncor Energy; les affaires pendantes devant la CEDH; le premier recours climatique en Russie ; l’affaire ClientEarth contre le Conseil d’administration de Shell.
Enfin, vous aurez accès aux contributions de nos bénévoles relatives aux contentieux environnementaux : le référé pénal environnemental contre Arkema en matière de Pfas ; le référé-liberté pour l’accès à l’eau à Mayotte ; le contentieux de l’annulation des décisions de création de réserves de substitutions (méga-bassines) ; le contentieux relatif à la pollution de l’air en Europe et le recours contre l’inaction environnementale du Gouvernement mexicain.
Nous vous souhaitons une bonne lecture et si vous souhaitez, vous aussi, participer à la rédaction de cette newsletter, c’est par ici.
Sandy Cassan-Barnel, co-référente du groupe de travail veille-international
Cette contribution constitue le quatrième chapitre de notre dossier sur le Triangle de Lithium.
L’Argentine, le Chili et la Bolivie constituent les 3 pays où se trouve 60% des réserves mondiales de lithium. Il s’agit d’une matière première critique pour la transition écologique de plusieurs pays développés (Chine, UE, EUA, Canada), notamment en raison de son importance dans la fabrication des batteries des véhicules électriques capables de stocker efficacement de l’énergie (chapitre 1). Cependant, le lithium en Amérique Latine peut se trouver dans des aires protégées par la communauté internationale (sites Ramsar) (chapitre 2). Les mines de lithium se situent dans une zone des Andes commune aux frontières de ces trois pays avec une forte présence des communautés autochtones (chapitre 3). Les Etats devraient donc promouvoir des projets miniers qui utilisent des méthodes d’exploitation des mines alignées avec des standards ESG élevées. Or, les standards ESG applicables dépendent de l’État d’origine des entreprises qui développent ces projets miniers. Ce dernier chapitre constitue un bref descriptif des avantages et limites de ces différents standards ESG qui peuvent s’appliquer aux projets miniers de lithium.
Le département de la justice américaine soulève la compétence des tribunaux étatiques pour juger des recours climatiques
La Cour suprême américaine vient de donner raison à des collectivités locales américaines et une association de protection de l’environnement et des droits humains, dans leur litige contre Suncor et ExxonMobil, deux majors pétrolières. Le 24 avril dernier, la Cour suprême a en effet rejeté la demande des deux entreprises visant à retenir la compétence des juridictions fédérales américaines et non celles de l’Etat du Colorado devant lesquelles la plainte a été déposée. L’affaire sera donc jugée devant les juridictions de l’Etat du Colorado, plus favorables aux plaignants en matière climatique et environnementale que les juridictions fédérales.
Pour la première fois, une action en justice est formée devant une cour fédérale russe contre le gouvernement concernant les mesures prises pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de la Russie. Le 10 octobre 2022, la Cour Suprême de la fédération de Russie refuse d’examiner la requête formulée à l’encontre de l’insuffisance des mesures prises par la Russie face au dérèglement climatique. Cette demande était portée par le Groupe Helsinki de Moscou (une organisation russe de défense des droits de l’Homme), Ecodefense (une ONG environnementale) et dix-huit individus issus de diverses organisations environnementales et de défense des droits de l’Homme, notamment des membres de diverses populations indigènes, particulièrement touchées par le réchauffement climatique en Russie.
Trois affaires climatiques devant la grande chambre de la CEDH
Au niveau mondial, plus de 2300 affaires sont soumises à des juridictions nationales ou internationales sur la question climatique, dont onze à la CEDH. Trois de ces affaires sont actuellement pendantes devant la Grande Chambre de la CEDH, il s’agit des affaires Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, Carême c. France, et Duarte Agostinho et autres c. Portugal et 32 autres États. Dans ces affaires les questions de la reconnaissance de la qualité de victime ainsi que de l’existence du dommage seront centrales, et il sera important pour les requérants de démontrer leur intérêt à agir. Si les audiences ont eu lieu en mars et en septembre 2023, la Cour ne s’est toujours pas prononcée sur ces trois affaires.
La procédure de ClientEarth contre les directeurs de Shell a été définitivement rejetée
En février 2023, l’ONG ClientEarth, en tant qu’actionnaire de Shell, a demandé la permission d’engager une action dénommée derivative claim, selon la section 260 du Company Act 2006.
La demanderesse a cherché à engager la responsabilité individuelle des membres du Board of Directors en raison de l’inadéquation de la stratégie climatique adoptée pour le groupe. Estimant que le Board of Directors a agi conformément au droit des sociétés anglais et que la demande de ClientEarth n’était pas bien-fondé a priori, le juge a refusé l’autorisation de la procédure dans une première décision datée du 12 mai 2023, laquelle a été confirmée dans une seconde en date du 24 juillet 2023.
Méga-bassines: décisions du tribunal administratif annulant des retenues d’eau en Nouvelle-Aquitaine
Les deux décisions rendues par le Tribunal administratif de Poitiers le 3 octobre 2023 s’inscrivent dans la problématique des réserves de substitution ou méga-bassines. Il s’agit d’une nouvelle reconnaissance des effets néfastes de ces projets et de l’annulation des autorisations d’exploitation. La préfecture a fait appel.
La jeunesse mexicaine contre le gouvernement mexicain
Cette affaire a fait l’objet d’une première décision dans laquelle les juges se sont prononcés sur la question de la capacité à agir dans le cadre de la procédure d’amparo consacrée par la Constitution mexicaine. Il a été reconnu aux mineurs mexicains le droit d’agir face à l’inaction des pouvoirs publics en matière environnementale. Leur raisonnement s’est essentiellement basé sur la corrélation entre la Constitution mexicaine et la loi générale sur le changement climatique adoptée en 2012. Au-delà des questions de procédure, l’intérêt de cet arrêt se situe sur la possibilité des citoyens à faire reconnaître leur droit à la santé et à un environnement sain, permettant une clarification quant à la portée de ce principe constitutionnel. C’est pourquoi cette affaire a fait l’objet d’une seconde décision portant sur l’applicabilité de la procédure d’amparo pour la garantie aux droits à la santé et à vivre dans un environnement sain.
Les directives sur la qualité de l’air ne créent pas un droit à réparation
Un résidant en région parisienne a demandé une indemnisation à l’État français estimant d’avoir subi un préjudice en raison de la détérioration de son état de santé qui serait causée par la dégradation de la qualité de l’air ambiant dans l’agglomération de Paris. Cette dégradation est, selon lui, due au fait que les autorités françaises ont manqué aux obligations qui leur incombent en vertu du droit de l’Union européenne. La cour administrative d’appel de Versailles a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne pour savoir si les particuliers peuvent solliciter une indemnisation de l’État pour des préjudices de santé résultant de dépassements des valeurs limites fixées par les normes du droit de l’Union en matière de la qualité de l’air ambiant, et dans quelles conditions.
Le référé pénal environnemental dans l’affaire des pollutions au Pfas par la société Arkema
Le juge des libertés et de la détention est saisi d’un référé pénal environnemental pour les pollutions aux PFAS constatées dans la région lyonnaise, la requête est rejetée tant en première instance qu’en appel.
Le recours au référé-liberté pour l’accès à l’eau à Mayotte
Le juge des référés était saisi dans le cadre d’un référé-liberté afin que des mesures soient adoptées pour pallier la crise de l’eau à Mayotte. Le juge de première instance et le Conseil d’Etat ont conclu au rejet de la demande.
En cette rentrée déjà bien avancée, nous vous proposons un panorama riche des dernières actualités des contentieux climatiques et environnementaux en France et à travers le monde.
D’abord, en focus, le projet de directive européenne sur le devoir de vigilance qui pourrait être utilisé comme nouveau fondement à des recours contre les sociétés qui ne respecteraient pas ce devoir.
Ensuite, vous trouverez un état des lieux des procès climatiques aux USA, la derivative action de l’ONG Client Earth contre la société Shell, et les premiers recours pour greenwashing en Grande-Bretagne.
En matière de contentieux environnementaux, enfin, dans le troisième chapitre de notre série sur le sujet, nous aborderons la place de la consultation des communautés autochtones dans le triangle du lithium. Également, le recours victorieux de membres d’une population autochtone d’Australie contre l’autorisation gouvernementale d’un projet d’extraction de gaz offshore.
Enfin, en contentieux environnemental interne, le recours justice pour le vivant ; la première condamnation de l’Etat en matière de dommage causé par la pollution de l’air et une question prioritaire de constitutionnalité qui accepte la limitation de la liberté d’entreprendre pour la mise en œuvre de l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement.
Très bonne lecture à toutes et tous,
Et, si vous souhaitez participer à la rédaction de la prochaine newsletter, c’est par ici.
Sandy Cassan-Barnel, référente du groupe de travail veille-international.
Focus : La directive sur le devoir de vigilance – CSDDD
Depuis la publication des Principes Directeurs pour les droits humains et les entreprises, ou le guide OCDE à l’attention des entreprises multinationales en 2011, on assiste à une volonté de développer des standards et d’édicter des normes contraignantes pour aligner les activités économiques avec les objectifs de développement durable du XXIs. La France en 2017 durant la présidence de François Hollande, et par la suite l’Allemagne ont été à l’initiative de lois nationales sur le devoir de vigilance des entreprises en matière environnementale et de protection des droits humains. Ces législations ont imposé des obligations de vigilance aux entreprises afin qu’elles identifient et préviennent les risques d’atteinte à l’environnement et des violations de droits humains qui peuvent être causés par leurs activités économiques.
La Commission, le Conseil européen ont adopté, entre février 2022 et juin 2023, trois versions différentes d’une directive sur le devoir de vigilance (ci-après CSDDD) qui a vocation à s’appliquer aux grandes entreprises européennes. Ces textes poursuivent le même objectif, celui d’imposer des obligations de vigilance raisonnables aux grandes entreprises en matière de protection de l’environnement et des droits humains. En revanche, leur contenu diffère sur certaines dispositions.
Le directeur de Shell poursuivit pour sa stratégie climatique
Il s’agit de l’une des affaires les plus innovantes et commentées en droit du changement climatique cette année. En février 2023, l’organisation ClientEarth engage une action contre le conseil d’administration de Shell PLC (‘Shell’) et contre 11 directeurs à titre individuel. L’innovation réside en ce qu’il s’agit d’une derivative action, à savoir une action exercée par ClientEarth en tant qu’actionnaire de Shell. Pour l’instant, l’action a échoué à un stade préliminaire, mais ClientEarh a fait appel.
Les villes américaines demandent des comptes aux compagnies pétrolières
Depuis 2017, plus d’une dizaine de procès ont été intentés par des États et localités américains à l’encontre des principales compagnies pétrolières, telles que BP, Chevron, ConocoPhillips, Exxonmobil et Shell… La voie contentieuse devient un moyen d’expression alternatif afin de dénoncer l’incapacité des gouvernements à répondre aux vulnérabilités des populations et des territoires qui sont directement confrontés aux effets des changements climatiques. Ce recours au prétoire s’inscrit dans une démarche que l’on pourrait qualifier de « bottom up » permettant de faire émerger de nouveaux mécanismes de lutte contre le dérèglement climatique.
Décisions de l’autorité de régulation de la publicité anglaise sur le greenwashing d’entreprises pétrolières : Shell, Petronas, Repsol
L’autorité britannique de publicité (ASA) a rendu trois avis le 7 juin 2023 sanctionnant des publicités de Shell, Repsol et Petronas du fait de l’omission d’informations matérielles importantes sur leurs activités dans les énergies fossiles. En effet, les trois publicités faisaient référence à des énergies renouvelables et/ou à des mesures de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre sans mentionner que leur activité principale et leur business model correspondaient au développement des énergies fossiles. Le jury a conclu que cela pouvait induire les consommateurs en erreur sur la nature des activités des trois entreprises fossiles.
Chapitre 3 : la licence sociale dans le triangle du lithium
Dans les articles précédents, les risques environnementaux résultant de l’exploitation de lithium dans les trois pays du triangle de lithium ont été abordés. Le défi d’articuler les modèles de développement a été constaté entre les tenants de la promotion des projets miniers, et ceux du développement d’autres activités telles que le tourisme.
1ere condamnation Etat responsabilité pollution de l’air
Dans un jugement avant-dire droit du 7 février 2022, le tribunal administratif de Paris avait ordonné une expertise afin de déterminer l’existence d’un lien de causalité entre la pollution de l’air et les dommages des victimes. Le 16 juin 2023, en se fondant sur cette expertise reconnaissant l’existence de ce lien de causalité, le Tribunal administratif de Paris a condamné l’État à indemniser une enfant victime de la pollution de l’air. Il s’agit, ici, du premier cas de condamnation à la réparation de préjudices subis par des particuliers qui résultent d’une pollution de l’air.
Application par CC de l’OVC de protection de l’environnement
Le Conseil constitutionnel était saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité dans laquelle était invoquée, notamment, l’atteinte à la liberté d’entreprendre. En procédant à un contrôle de proportionnalité, il constate que cette atteinte est limitée et justifiée par la mise en œuvre de l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement.
Après le climat et la pollution de l’air, l’État français est désormais aussi condamné en matière de biodiversité, dans le cadre du recours baptisé « Justice pour le Vivant », qui oppose cinq associations environnementales à l’État et Phyteis, le syndicat de l’agrochimie en France.
Par un jugement historique rendu le 29 juin 2023, le Tribunal administratif de Paris reconnaît l’existence d’un préjudice écologique lié à l’utilisation de produits phytopharmaceutiques, dont l’État est responsable. Une première mondiale. Il reconnaît également les insuffisances du processus d’évaluation et d’autorisation des pesticides, qui ne permettent pas une réelle protection de la biodiversité, ainsi qu’un lien de causalité direct entre celles-ci et le préjudice écologique constaté. Les juges n’ont toutefois pas suivi la principale demande des ONG et les recommandations de la rapporteure publique. En effet, le tribunal n’ordonne pas à l’État de revoir les méthodologies d’évaluation des risques qui, pourtant, souffre de nombreuses lacunes. Bien que l’État n’ait pas été condamné sur ce dernier point, cette décision marque un véritable tournant dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité en France.
Recours victorieux d’australiens contre l’autorisation gouvernementale pour un projet d’extraction de gaz offshore
Le 21 septembre 2022, la Cour fédérale d’Australie énonce que la validation du plan environnemental développé par une entreprise dans le cadre d’un projet gazier est illégale si toutes les parties prenantes affectées par ledit projet n’ont pas été préalablement consultées. Cette décision est rendue à la suite de l’action en justice intentée par un leader de la communauté autochtone Munupi des îles Tiwi contre la National Offshore Petroleum Safety and Environmental Management Authority (NOPSEMA) et Santos Ltd, car un projet gazier développé par l’entreprise n’a pas fait l’objet d’une consultation des membres du clan Munupi, une communauté autochtone qui vit sur les terres concernées.
Le contentieux climatique et environnemental est plus dynamique que jamais. Tous les jours ou presque, un tribunal à travers le monde est appelé à se prononcer sur le sujet, une requête est introduite ou, à tout le moins, un article est rédigé sur le sujet.
Les bénévoles du groupe vous proposent, encore une fois, un travail de qualité.
Vous pourrez, ainsi, lire en focus un article sur les demandes d’avis consultatif devant les juridictions internationales en matière climatique étayé d’entretiens de trois experts sur le sujet.
Dans la partie consacrée aux contentieux climatiques, vous retrouverez un article sur le jugement de la Cour de District d’Amsterdam contre KLM et la décision sur le recours climat Tchèque, une première!
En matière de contentieux environnementaux, vous aurez l’occasion de lire, les deux premiers chapitres d’une trilogie sur l’encadrement juridique des mines de lithium en Argentine, Chili et Bolivie. La décision du TGI de Paris sur l’affaire du Chlordécone sera analysée. Enfin, vous pourrez accéder au commentaire de la décision du tribunal judiciaire de Paris sur le plan de vigilance de Total en Ouganda.
Nous vous souhaitons une très bonne lecture,
Et si vous souhaitez rejoindre notre groupe de travail, c’est par ici !
Sandy Cassan-Barnel Référente du groupe veille-international.
Sommaire
Focus : L’avis consultatif devant les juridictions internationales : un outil pour faire avancer le droit du climat ?
Tribunal municipal de Prague (République Tchèque) ONG Klimaticka zaloba vs. L’Etat de la République Tchèque, le 15 juin 2022
Affaires Environnementales
Décision TGI Paris 6 janvier 2023 Chlordécone
La Cour de cassation reconnaît la compétence du tribunal judiciaire pour juger la plainte des associations au nom du non-respect de la loi sur le devoir de vigilance contre le plan de vigilance de Total en Ouganda (28/02: il y aura un premier jugement sur le fond, je le couvrirai pour la newsletter)
Le triangle du lithium
Focus : L’avis consultatif devant les juridictions internationales : un outil pour faire avancer le droit du climat ?
Depuis cinq ans, le monde a vu les contentieux climatiques se multiplier de façon exponentielle. Des affaires sont portées en justice contre des États et des entités privées devant des tribunaux internationaux et nationaux sur tous les continents. Depuis quelques mois, le changement climatique a également fait l’objet de demandes d’avis consultatifs auprès de juridictions internationales. Or l’avis consultatif, une opinion juridique émise par un tribunal sur une ou plusieurs questions portées devant lui, n’a en principe pas de force contraignante. Pourquoi, alors, ce moyen est-il employé ? À quoi sert-il ? Qui peut le demander et qui peut participer à la procédure ? Les lecteurs du Focus de Notre Affaire À Tous pourraient-ils y contribuer ? Dans ce Focus, nous nous penchons, à titre d’exemple, sur la procédure des avis consultatifs dans certaines juridictions internationales susceptibles de recevoir de telles demandes relatives au climat. Nous analyserons leur intérêt juridique, avant d’examiner une initiative récente devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme cherchant à clarifier, par le biais d’un avis consultatif, les obligations juridiques internationales des États relatives au changement climatique au regard des droits humains.
L‘ONG néerlandaise Fossilvrij, soutenue par Reclame Fossilvrij et ClientEarth, a porté plainte en juillet 2022 contre KLM-Airfrance pour communication trompeuse, considérée comme du greenwashing.
Cette plainte est l’une des premières remettant en cause les déclarations de compensation carbone d’une entreprise du secteur de l’aviation.
Fossil Vrij demande à KLM de cesser ses allégations commerciales sur l’aviation durable afin de ne pas induire en erreur le consommateur sur l’impact des produits dépendants des énergies fossiles. Pour cela, la plainte repose sur deux bases juridiques distinctes: le droit de la consommation en matière d’allégations commerciales trompeuses (article 193 de la section 6 du code de la publicité néerlandais) et l’article 6:162 du Code Civil néerlandais instaurant l’obligation d’agir selon un standard de soin non écrit.
Dans sa plainte, le demandeur s’attaque à KLM en raison de sa campagne « Fly Responsibly ». Cette campagne enfreindrait droit néerlandais du fait qu’elle donne l’impression au consommateur que voler en avion est compatible avec un mode de vie durable. Il souligne, dans un premier temps, l’impossibilité de la conciliation entre la croissance économique du secteur de l’aviation et la lutte contre le changement climatique. Puis, dans un deuxième temps, le plaignant accuse KLM de renforcer l’impression chez le consommateur que voler peut être durable grâce à son service de compensation carbone et le développement d’un carburant d’aviation alternatif.
Dans une décision du 7 juin 2023, le tribunal de district d’Amsterdam a confirmé l’intérêt à agir des demandeurs. Une décision sur le fond n’est pas attendue avant 2024.
Tribunal municipal de Prague (République Tchèque) – ONG Klimaticka zaloba vs. L’Etat de la République Tchèque, le 15 juin 2022
L’ONG Klimaticka zaloba avec d’autres plaignants ont intenté une action en justice contre l’Etat de la République Tchèque en raison de son inaction en matière de lutte contre la crise climatique et des violations des droits de l’homme qui en résultent. Ils sollicitent une protection contre l’ingérence illégale (au sens de l’art. 82 et 87 de la loi 2002 du code de justice administrative tchèque, cf partie Moyens) alléguée de l’Etat en demandant au tribunal d’enjoindre à l’Etat de prendre des mesures adéquates et nécessaires pour protéger contre les effets néfastes du changement climatique et conduisant notamment à une réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.
Le tribunal municipal de Prague a rendu son jugement en statuant que l’ingérence de l’Etat caractérisée par l’inaction en matière climatique était illégale et a enjoint ce dernier de prendre des mesures nécessaires dans les meilleurs délais. Néanmoins, le jugement a été très récemment annulé en cassation par la Cour administrative suprême et l’affaire est renvoyée de nouveau devant le tribunal municipal de Prague.
Deuxième volet de l’affaire chlordécone, l’ordonnance de non-lieu en date du 2 janvier 2023 met fin à plus de quinze ans d’investigations. À l’issu des 321 pages de la décision, les parties civiles sont déboutées dans leurs multiples prétentions et aucune responsabilité pénale n’est retenue à l’encontre des personnes mises en cause. Néanmoins, les juges pointent les carences du système pénal pour faire face à ce « scandale sanitaire » et des comportements jugés asociaux des personnes impliquées dans cette affaire, ayant entraîné une contamination « durable, généralisée et délétère »1 pour les milieux et les habitants de Guadeloupe et de Martinique. Entre lucidité et manque d’audace de la part des juges d’instruction, les explications apportées à l’appui de cette ordonnance de non-lieu doivent être autant de leçons plaidant en faveur d’une évolution du droit de l’environnement. Cela concerne également la collecte des preuves en vue de futurs contentieux liés aux produits phytosanitaires et à la pollution des milieux.
Association Les Amis de la Terre France et al. c/ S.A. Total est la première affaire portée sur la base de la loi sur le devoir de vigilance. Plusieurs ONG ont saisi le juge des référés afin d’obliger Total à respecter ses obligations de vigilance dans le cadre d’un super projet pétrolier en Ouganda. L’affaire, qui dure depuis 2019, a rencontré de nombreux obstacles procéduraux et s’est soldée par une ordonnance d’irrecevabilité en février 2023. L’absence de précisions juridiques quant aux mesures de vigilance que les entreprises doivent prendre risque de poser des problèmes importants dans la mise en œuvre effective de la loi sur le devoir de vigilance.
Le Triangle du Lithium et les enjeux socio-environnementaux de la transition énergétique
Au Nord du Chili et de l’Argentine, au Sud de la Bolivie se trouve le triangle du lithium. Cette région connue comme la Puna est située à plus de 3000 mètres au-dessus du niveau de la mer dans la cordillère des Andes. C’est une zone aride avec des salars et des saumures où on trouve une matière première très importante pour la transition énergétique : le lithium. Cette matière première est utilisée, entre autres, pour la fabrication des batteries pour les voitures électriques, ou des panneaux solaires.
Le lithium, n’est pas une source d’énergie, mais une matière première qui permet la fabrication des matériaux où l’on peut facilement stocker de l’énergie. Le lithium est une matière première « critique » pour développer les énergies renouvelables et une économie à bas charbon. De ce fait, plusieurs projets miniers menés par des entreprises chinoises, japonaises, canadiennes, américaines et quelques entreprises européennes ont lieu dans le triangle du lithium. Certains parlent même du lithium comme le nouvel or blanc. De fait, il y a une ruée vers le lithium, car le contrôle des mines et de toute la chaine de valeur de cette matière première est un enjeu pour les pays qui souhaitent aligner leur matrice énergétique avec l’accord de Paris.
En revanche, les projets miniers de lithium ne sont pas soumis à un régime harmonisé. Les 3 pays du Triangle du lithium ont leur propre cadre réglementaire résultant de certains choix politiques. Or, les 3 pays sont confrontés à des enjeux socio-environnementaux similaires. D’une part, les méthodes d’extraction du lithium peuvent porter atteinte à certains objectifs environnementaux tels que la protection des ressources aquatiques et la protection de la biodiversité. Les projets de lithium peuvent avoir un impact sur des zones protégés par la communauté internationale tel que des zones humides qui sont sur la liste des sites Ramsar ou des réserves de la biosphère de l’Unesco. D’autre part, le lithium est situé dans des zones où des communautés autochtones sont présentes. Il y a donc des risques de conflits sociaux entre les entreprises minières avec les peuples autochtones des 3 pays.
Ceci pose la question de comment concilier l’objectif d’atténuer et adapter notre modèle économique au changement climatique avec d’autres objectifs socio-environnementaux de notre temps.
Ce décryptage vise donc à donner une vision globale du sujet en traitant certains des principaux enjeux socio-environnementaux des projets miniers. Il est divisé en plusieurs chapitres qui seront publiés entre cette newsletter et la newsletter qui sera publiée fin 2023.
-Le Chapitre 1 : un bref résumé du cadre réglementaire qui s’applique aux projets de lithium dans les 3 pays du triangle du Lithium;
-Le Chapitre 2 : Les projets de lithium et les zones protégées par la communauté internationale;
-Le Chapitre 3 : (à paraître en fin d’année) : les projets de lithium et le respect des droits des communautés autochtones;
-Le Chapitre 4 : (à paraître en fin d’année). Nous discuterons les différents standards ESG contraignants ou de droit souple qui pourraient s’appliquer aux projets miniers de lithium.
Permettez-nous de vous souhaiter nos meilleurs vœux pour cette année 2023. Elle promet d’être, encore, riche en jurisprudence en matière de contentieux climatique, notamment, avec les suites de l’affaire du siècle, le potentiel recours contre BNP Paribas (que nous traitons dans l’un des articles de la newsletter) ou bien les prochaines décisions de la Cour européenne des Droits de l’Homme dans différentes affaires climatiques. Plus généralement, le droit de l’environnement ne sera pas en reste, pour preuve, la décision de ce mois de janvier sur le Chlordécone. Fin janvier, nous organisons une conférence relative au Traité sur la Charte de l’énergie, à la fois en présentiel à l’Académie du Climat à Paris mais, également, via visioconférence (plus d’informations, très prochainement). Un article vous est proposé, dans cette newsletter, afin de vous partager les grandes lignes du sujet. Le dernier trimestre 2022 a connu une petite révolution en droit administratif puisque le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé en tant que liberté fondamentale a été reconnu par le juge administratif dans le cadre de la mise en œuvre du référé-liberté. Un article à plusieurs mains y est consacré dans cette lettre.
Comme à l’accoutumé, vous pourrez retrouver le commentaire des récentes décisions de justice en matière de contentieux climatique et environnemental français mais également, de droit étranger. Enfin, est joint à cette newsletter un lien vers un podcast enregistré par notre groupe de travail sur la prise en compte du critère environnemental dans la décision de refus de renouvellement d’un titre de séjour.
Bonne lecture,
Sandy Cassan-Barnel, juriste, référente du groupe veille-international.
Le Traité sur la Charte de l’énergie (TCE) est un traité international relatif aux investissements du secteur de l’énergie. Il est né à la suite de la chute de l’URSS et avait pour but de protéger les sociétés occidentales investissant dans les infrastructures et la production d’énergie dans les pays de l’ancien bloc de l’Est. Il a été signé en 1994 et est entré en vigueur en 1998. Le traité a actuellement 54 signataires : 52 États (principalement d’Europe et d’Asie centrale), l’Union européenne et Euratom. Deux États, l’Italie et la Russie, sont sortis du traité et d’autres États ont récemment annoncé se retirer.
Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, revient sur une décision rendue par le Conseil d’Etat, du 30 décembre 2021 à propos de la prise en compte du critère environnemental dans la décision de refus de renouvellement d’un titre de séjour.
Notre Affaire à Tous s’inscrit dans un mouvement mondial : celui des actions en justice pour le climat, de la mobilisation pour pénaliser les crimes contre l’environnement, mais aussi pour la reconnaissance des droits à la nature.
Dans le monde entier, les contentieux climatiques se multiplient : des citoyen-nes et des associations se tournent vers les tribunaux pour faire respecter leurs droits et ceux de la nature. Ils contestent le manque d’ambition des politiques des Etats et engagent la responsabilité des entreprises les plus polluantes. Notre action se concentre sur une veille juridique afin d’établir une base de données des contentieux climatiques mondiaux. Le problème du dérèglement climatique est un problème global, qui implique une prise en charge globale : nous prenons donc largement appui sur les initiatives environnementales qui se développent partout dans le monde.
Insérer nos actions et nos activités dans une dynamique globale transnationale
Contribuer au développement de la jurisprudence et de la connaissance du contentieux climatique en France et à l’étranger
Nouer des partenariats et des collaborations avec des spécialistes, collectifs, cabinets d’avocats et juristes étrangers
Découvrir de nouvelles façons d’agir et de nouveaux modèles d’action pour défendre la justice climatique et sociale
Contribuer à la promotion, en France et dans le monde, d’une régulation internationale effective pour le climat et l’environnement
Comment ?
Nous agissons sur différents plans pour atteindre nos objectifs : Une partie de nos juristes et bénévoles lisent, traduisent et analysent des décisions de justice en langues étrangères pour contribuer à la compréhension des différents système juridiques et droits qui sont accordés au vivant. Un travail de veille juridique et également menée par nos membres : ils analysent les nouvelles venant des spécialistes et des médias et se tiennent au courant des dernières actualités sur les contentieux climatiques. Ce travail est ensuite mis en valeur dans la newsletter bimestrielle des « Affaires climatiques ».
Nous prenons également contact avec les collectifs et juristes impliqués dans les recours en justice à travers le monde.
Notre Affaire à Tous publie chaque mois une newsletter sur les recours climatiques à travers le monde ! L’ambition de cette newsletter est de montrer que ces actions, que nous portons et accompagnons, sont loin d’être uniques ! Nous souhaitons donner les moyens à toutes et tous de comprendre les enjeux de telles actions en justice à travers le monde, face à l’urgence climatique. Elle est destinée aux citoyen-nes, aux juristes, aux académiques, à toutes celles et ceux qui souhaitent s’emparer du sujet de la justice climatique, sous le prisme du droit.
Retrouvez ici toutes les newsletter des affaires climatiques mondiales ! Libertés fondamentales, protection de la santé et crise environnementale / L’ONU saisie de la question climatique / Les multinationales pollueuses devant les tribunaux ! / Les Affaires climatiques dans l’Union Européenne / Les droits fondamentaux au coeur des affaires climatiques ! / La jeunesse prend d’assault les Cours ! / Partout dans le monde la justice climatique avance. Pour n’en manquer aucune, n’oubliez pas de vous y abonner !
Si vous souhaitez en savoir plus sur le fond juridique des recours mondiaux abordés dans la newsletter des affaires climatiques, vous pouvez consulter toutes les fiches d’arrêt et les télécharger ici ! De l’Affaire du Siècle, à l’affaire Urgenda, en passant par les affaires Leghari (Inde), DeJusticia (Colombie) ou encore Juliana (Etats-Unis), découvrez les moyens avancés par les requérant-es aux quatre coins de la planète !
Après cette pause estivale, nous espérons toutes et tous vous retrouver en bonne forme. L’équipe du groupe de travail veille-international n’a, quant à elle, pas chômé afin de vous informer sur l’évolution du droit climatique et environnemental. Elle a travaillé en collaboration avec le groupe “droits de la nature”, suite à la sortie de l’ouvrage “Les droits de la nature, vers un nouveau paradigme de protection du vivant” afin de vous offrir une vue d’ensemble des outils juridiques existant, en droit comparé, permettant un début de protection de ces droits, que vous retrouverez dans le focus de notre lettre. Vous pourrez lire, par ailleurs, nos articles sur la jurisprudence récente en matière de contentieux climatique: une nouvelle décision Grande-Synthe et le people’s climate case. Ainsi qu’en matière de contentieux environnemental : une décision de la Haute Cour de Madras; le Président indonésien condamné pour négligence dans la protection de l’air; une décision de la Cour constitutionnelle d’Equateur sur les droits de la nature. Enfin, vous pourrez, également, accéder à l’analyse de la circulaire visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale. Pour participer à la rédaction de cette lettre, n’hésitez pas à rejoindre le groupe veille-international en adhérent à l’association.
Nous vous souhaitons une très bonne lecture,
Sandy Cassan-Barnel Référente du groupe veille-international.
Sommaire
– Focus : Droits de la nature et accès à la Justice, les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Équateur -Podcast
Affaires Climatiques
– Conseil d’Etat français, Affaire commune de Grande-Synthe c. le ministre de la transition écologique et solidaire, 12 février 2021, 428177 -Cour de justice de l’Union européenne, 25 mars 2021, C-565/19 Armando Ferrão Carvalho e.a./ Parlement et Conseil “The People’s Climate Case”
Affaires Environnementales
– Circulaire du ministre de la justice CRIM 2021-02/G3-11/05/2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale du 11 mai 2021 – Décision n°253-20-JH/22 de la Cour constitutionnelle d’Equateur, 27 janvier 2022, singe Estrellita – Le Président Indonésien jugé coupable pour négligence dans la protection du droit à un air sain – MADRAS HIGH COURT, MADURAI BRANCH A.Periyakaruppan vs. The Principal Secretary to Government, Revenue Department, The Additional Chief Secretary and Commissioner of Revenue Administration, Chennai
Focus : Droits de la nature et accès à la Justice : les exemples novateurs de l’Inde, la Colombie et l’Equateur
Les droits de la Nature, parce qu’ils tendent à permettre de vivre dans un environnement sain, contribuent à garantir la jouissance des droits humains et à renforcer la démocratie environnementale. Au-delà de la reconnaissance – par la jurisprudence, ou par les textes – de la personnalité juridique des éléments de la Nature devenant sujets et non plus objets de droit, la question de leur représentation est cruciale. Il est traditionnellement distingué, en l’état de l’avancée du mouvement des droits de la Nature à travers le monde, deux voies – non-exhaustives- de représentation : la première reprend le modèle de la tutelle avec la nomination de représentants; la seconde se construit autour d’une procédure permettant à toute personne physique ou morale d’ester en justice en cas d’atteinte portée à un élément naturel et au nom de celui-ci. Ceci soulève nombre de questions relatives à la qualité et à l’intérêt à agir de ces “gardiens de la Nature”, et donc plus largement, la problématique de l’accès à la justice.
Sandy Cassan-Barnel, juriste bénévole pour Notre Affaire à Tous, revient sur une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 18 février dernier. Par quatre décrets du 7 juin 2021 le 1er Ministre Jean Castex a accordé à la Compagnie Minière de Boulanger la prolongation, sur une superficie réduite, des concessions de mines de métaux précieux situées sur une partie du territoire de la commune de Roura (Guyane). L’association FNE a saisi le juge administratif d’un recours en excès de pouvoir contre ces décrets. L’association demanderesse fait valoir le défaut de mise en œuvre d’une procédure de participation du public. Mais, également, la contradiction des articles L. 142-7 à L. 142-9, L. 144-4 du code minier et L. 123-19-2 .1 du code de l’environnement avec les articles 1er, 2, 3 et 7 de la Charte de l’environnement, les articles 1er, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 et l’article 34 de la Constitution.
Conseil d’Etat français, Affaire commune de Grande-Synthe c. le ministre de la transition écologique et solidaire, 12 février 2021, 428177.
Cet arrêt traite de la demande conjointe d’annulation du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique à l’initiative de la commune de Grande-Synthe et de son ancien Maire, agissant à titre personnel. Cette affaire, bien qu’indépendante du recours plus médiatisé visant à enjoindre l’État à respecter les Accords de Paris, s’inscrit dans un intérêt certain que porte cette ville des Hauts-de-France pour les questions environnementales et climatiques. Elle illustre également la limite juridique des recommandations qui, contrairement aux Accords de Paris, n’ont pas fait l’objet d’un engagement exprès de la part de l’État français. Celles-ci ont, de fait, une portée juridique très limitée voire nulle.
Cour de justice de l’Union européenne, 25 mars 2021, C-565/19 Armando Ferrão Carvalho e.a./ Parlement et Conseil “The People’s Climate Case”
People’s Climate Case est une procédure initiée par 10 familles venant du Portugal, d’Allemagne, de France, d’Italie, de Roumanie, du Kenya, du Fiji et Sáminuorra, une association de jeunes Saami, contre les institutions de l’Union européenne. Ils souhaitent que la Cour ordonne au Parlement et au Conseil de fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus ambitieux.
Circulaire du ministre de la justice CRIM 2021-02/G3- 11/05/2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale du 11 mai 2021.
La circulaire vise à améliorer le contentieux de l’environnement, qui est aujourd’hui peu efficace, notamment en matière pénale : sur les 20 000 affaires traitées chaque année par les parquets, 75 % se terminent par une mesure alternative aux poursuites et les condamnations prononcées ne représentent qu’un pourcent du nombre total de condamnations.
Décision n°253-20-JH/22 de la Cour constitutionnelle d’Equateur, 27 janvier 2022, singe Estrellita
La Cour constitutionnelle reconnaît, pour la première fois, que les animaux peuvent, même individuellement, bénéficier des droits de la Nature et se prévaloir de droits tels que le droit à la vie ou à l’intégrité physique, en tant que partie intégrante de la Nature.
Le Président Indonésien jugé coupable pour négligence dans la protection du droit à un air sain
Le Président indonésien Joko Widodo, d’autres membres du gouvernement, ainsi que des élus locaux, ont été déclarés coupables de négligence dans le respect du droit des citoyens à respirer un air sain, par une décision tribunal de Jakarta-Centre rendue le 16 septembre 2021. Alors que Jakarta demeure l’une des villes les plus polluées du monde, l’inaction de ces personnalités a été reconnue comme une négligence dans l’enrayement de la pollution de l’air de la capitale indonésienne. Après deux longues années d’instance et huit reports de l’affaire, les juges de Jakarta ont confirmé le droit de tout citoyen à vivre dans un air sain, tout en condamnant les pouvoirs publics à prendre des mesures rigoureuses en la matière. Cette décision de principe en faveur de la protection de l’environnement sur le territoire indonésien, s’inscrit dans la lignée d’autres décisions nationales où les juges mettent en œuvre leurs pouvoirs de coercition afin de réprimer l’inertie des pouvoirs publics.
MADRAS HIGH COURT, MADURAI BRANCH A.Periyakaruppan vs. The Principal Secretary to Government, Revenue Department, The Additional Chief Secretary and Commissioner of Revenue Administration, Chennai.
Dans une décision sur un litige administratif concernant une sanction envers un fonctionnaire, la cour s’est emparée de la question de la personnalité juridique de la nature pour déclarer les droits fondamentaux de la « Mère Nature ».
Notre affaire à tous (NAAT) publie avec ses partenaires européens un document destiné aux décideurs politiques contenant des recommandations importantes sur le devoir de vigilance climatique. Ce texte vise à ce que le projet de directive européen prenne en compte l’expérience pionnière en France, marquée par l’adoption d’une loi nationale similaire et l’émergence de premiers contentieux initiés par NAAT en matière climatique.
NAAT est à l’origine du contentieux climatique contre Total, fondé sur le devoir de vigilance des multinationales, ainsi que d’un rapport comparatif « Benchmark » sur la conformité de 27 multinationales d’origine française aux obligations de vigilance interprétées à la lumière de l’Accord de Paris. Malgré ces différentes initiatives, ni Total ni les 26 autres entreprises multinationales du Benchmark ne réduisent suffisamment leurs gaz à effet de serre.
Eu égard à la gravité de la situation et du peu de temps qu’il reste pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, il est essentiel que la directive européenne sur le devoir de vigilance clarifie les obligations des multinationales en matière de changement climatique. C’est la raison pour laquelle NAAT s’est jointe à un collectif d’associations et d’ONG pour présenter des recommandations, à destination des députés et institutions européen.ne.s, sur ce qui est attendu des entreprises en matière de plans de transition. L’objectif est d’éviter que ces plans ne servent de greenwashing et de rappeler clairement que le climat fait partie intégrante du devoir de vigilance des entreprises multinationales. Le document inter-associatif comporte en ce sens des recommandations sur deux articles clés de la proposition de directive : les articles 15 et 3.
L’article 15 impose aux entreprises d’adopter un plan de transition pour garantir la compatibilité de leur business model avec la transition vers une économie durable et la limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C conformément à l’accord de Paris. Cet article manque toutefois de précision, et compte tenu de l’urgence climatique, il est nécessaire de prescrire le plus précisément possible la marche à suivre aux entreprises afin de restreindre l’interprétation de l’obligation et de faciliter le contrôle de son application.
Enfin, la vigilance climatique dépasse la seule adoption d’un plan de transition. Il s’agit d’une obligation de comportement juridiquement contraignante. C’est pourquoi ce papier recommande également de modifier l’article 3 en faveur d’une approche exhaustive de la notion d’« incidences négatives sur l’environnement » (adverse environmental impacts) pour que la directive rappelle sans ambiguïté que le climat fait partie intégrante du régime général du devoir de vigilance européen. Ainsi, si les changements proposés par NAAT et ses partenaires sont acceptés, les entreprises multinationales devront prévenir, atténuer et indemniser les dommages climatiques auxquels elles contribuent respectivement.
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