Le dérèglement climatique a des conséquences dévastatrices sur les conditions de vie de millions de personnes, particulièrement les plus vulnérables. Recentrer le discours sur les droits humains peut obliger les gouvernements et les entreprises à faire le lien entre préoccupations environnementales et justice sociale.
Nous sommes tous.tes concerné.es. En répondant à ces 5 questions simples, nous espérons vous donner un aperçu de l’impact du dérèglement climatique sur vos droits fondamentaux.
Ce test respecte le RGPD : vos réponses sont anonymes et ne sont ni utilisées ni conservées.
Le 31 mars dernier, des documents révélés par franceinfo montrent que, dès 2005, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avait alerté EDF ainsi que Areva sur de nombreux écarts et problèmes de qualité sur les produits de l’usine Creusot Forge. Or, c’est là qu’a été fabriquée la cuve de l’EPR de Flamanville.
Alertée il y a 12 ans de probables défauts de fabrication, Areva n’a effectué des tests qualitatifs qu’en 2014, lors de l’installation de la cuve dans le bâtiment du réacteur. La société en référait alors à l’ASN qui publia laconiquement sur son site internet : “L’ASN a été informée par AREVA d’une anomalie de la composition de l’acier dans certaines zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville”.
Jusque-là, et malgré des suspicions avancées, le projet du réacteur EPR avait donc pu poursuivre sa progression sans jamais être inquiété ni devoir donner de gage sur sa sécurité.
C’est toute la chaîne de contrôle du nucléaire francais qui est aujourd’hui mise en cause.
En effet, le texte en question permet à un fabricant, dont le produit n’est pas conforme aux normes essentielles de sécurité, de déposer une demande de validation auprès de l’ASN, accompagnée d’une analyse assurant que les “risques sont suffisamment prévenus ou limités”.
C’est également le schéma de contrôle mis en place concernant les anomalies présentes sur la cuve de l’EPR de Flamanville. Ces dernières pourraient ainsi être purement et simplement validées par l’ASN en septembre. Impensable, surtout lorsque l’on imagine la catastrophe que représenterait la rupture de la cuve en cas d’accident nucléaire.
Pour l’association Notre Affaire à Tous, autoriser une cuve potentiellement fragilisée, c’est faire courir des risques insensés à la population. Nous demandons aux juges d’annuler ce chèque en blanc que le gouvernement semble avoir signé aux acteurs du nucléaire sur le dos de la sécurité des Français.es.
Nous allons obliger l’Etat à nous donner une réponse !
Pour l’instant, le gouvernement n’a pas souhaité répondre aux arguments que nous avons soulevés devant le Conseil d’Etat. Nous sommes donc contraints de sommer l’administration de conclure.
Pour l’association Notre affaire à tous, le système mis en place est à l’origine des scandales à répétition qui frappent l’industrie du nucléaire. La loi laisse aux industriels le soin de déclarer leur défaillance, au lieu de garantir le respect effectif des normes essentielles de sécurité.
L’ASN est ensuite placée devant le fait accompli. Or, on peut légitimement douter de la possibilité pour l’autorité de sûreté nucléaire française de prendre une décision qui s’impose pourtant, mais qui aurait pour conséquence de condamner financièrement le projet de l’EPR francais.
Alors qu’AREVA et EDF sont menacés financièrement, la politique de l’atome, incapable de reconnaître ses erreurs, entraîne le contribuable et le citoyen dans sa chute.
Ce rapport de forces économique et politique constitue un réel danger pour la sécurité dans les centrales nucléaires françaises, mais aussi pour la protection des populations vivant en France, pour nos voisins européens et pour les générations futures.
Traduit de l’allemand (retrouvez l’article d’origine sur Euractiv)
C’est le premier recours de la sorte en Europe – et cela pourrait bien aller plus loin. Un agriculteur péruvien a poursuivi le géant de l’énergie RWE (“Rheinisch-Westfälisches Elektrizitätswerk”, conglomérat allemand de la région du Rhin-Westphalie), qu’il tient pour co-responsable du changement climatique sur sa terre natale.
Le guide de montagne péruvien Saúl Luciano Lliuya avait un grand objectif – moins sur le plan financier, mais pour le moins symbolique. Il voulait faire en sorte que la société d’énergie RWE soit condamnée à payer une partie des sommes nécessaires à la protection contre les effets du changement climatique dans sa région. Mais son action en dommages-intérêts contre le géant de l’énergie a échoué. C’est ce qu’a décidé le “Landgericht” (équivalent du tribunal de grande instance régional) de la ville d’Essen ce jeudi.
Ceci pourrait cependant ne pas être le fin mot de l’histoire
En effet, le tribunal a néanmoins consenti à faire un pas en avant et à suivre l’argumentation de l’agriculteur sur le plan moral. Bien qu’il constate l’absence de «causalité juridique», il n’exclut pas l’existence d’une «causalité scientifique». L’avocate de Lliuyas, Roda Verheyen a annoncé que son client ferait « probablement » appel de la décision devant la Haute cour de la ville de Hamm. Dans ce cas, il faudra que le demandeur apporte la preuve dans le détail que les agissements de la société RWE impliquent sa responsabilité pour la mise en danger de la propriété de Luciano Lliuya.
Celui-ci s’est montré confiant, il espère qu’un tribunal allemand lui donnera la chance « de démontrer que RWE est conjointement responsable de notre situation dangereuse ».
Ce recours qui est largement passé inaperçu dans l’opinion publique est le premier de la sorte en Europe. Dans la région d’origine de l’agriculteur péruvien, la ville de 120.000 habitants Huara, est menacée par un risque important d’inondation en raison de la fonte massive des glaciers. Le GIEC attribue la fonte des glaciers dans les Andes au changement climatique. À Huara, les études estiment que jusqu’à 50.000 personnes pourraient être victimes d’un tsunami dévastateur si un effondrement glacier survenait sur le lac Palcacocha .
Le lac, à quelques kilomètres au-dessus de la ville, a vu sa taille quadrupler depuis 2003. Avec le changement climatique, le risque que de grands blocs de glace se détachent du glacier et tombent dans le lac, augmente significativement. Pour éviter le danger d’un raz-de-marée, il serait indispensable de régulièrement pomper de grandes quantités d’eau dans le lac par un nouveau système de drainage et de consolider les digues autour du lac ou d’en construire de nouvelles.
Dans sa poursuite civile déposée fin 2015, Lliuya réclamait que RWE soit condamnée à financer les mesures de protection sur le glacier au-dessus de la ville andine à hauteur de sa contribution au réchauffement climatique. Sa démarche est soutenue par l’association environnementale Germanwatch.
Les sommes réclamées représentent environ 17.000 euros. La société RWE, qui est un des plus grands émetteurs de CO2 en Europe, refuse de payer.
Selon une étude de 2014, la société d’énergie serait responsable d’environ un demi pour cent de toutes les émissions de gaz à effet de serre qui ont été globalement émises par l’action humaine depuis le début de l’industrialisation !
Klaus Milke, président de l’association allemande Germanwatch, explique le nœud de la question : “Est ce que les principaux responsables du changement climatique peuvent écarter leur responsabilité, avec pour seul argument qu’il existe un grand nombre de coresponsables ? Pour les personnes directement touchées par le changement climatique, cela revient à en faire des victimes à la fois dépourvue de soutien matériel mais aussi de recours juridique, dit-il. Ce serait un argument en faveur de l’irresponsabilité collective. »
Pour l’association Notre affaire à tous, ce recours met en lumière le décalage actuel entre les outils juridiques disponibles et les besoins ressentis par les victimes du changement climatique. Malgré la responsabilité scientifique évidente des grands émetteurs, le juge reste encore dépourvu d’instruments assez neufs pour rendre une justice équilibrée et trouver des solutions innovantes.
Ce recours est emblématique de toute l’ingéniosité des défenseurs de la justice climatique. Qu’ils soient agriculteurs ou écoliers, avocats ou parents, face au refus de la société industrialisée d’agir et de réparer ses erreurs, il faut croire que la justice verra se former des recours toujours plus créatifs pour mettre les entreprises et les Etats face à leurs responsabilités.
Mardi 15 mars, les députés votaient l’inscription dans le code civil, du préjudice écologique. Pour les associations concernées et pour de nombreux juristes, ce mécanisme consacre un progrès considérable pour la protection de l’environnement.
L’amendement adopté par l’Assemblée nationale définit le préjudice écologique comme une « atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes, ou aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement« . Cette formulation reprend les termes de la jurisprudence Erika et permet enfin d’en solidifier les acquis.
« Inscrire l’obligation de réparation des atteintes à la nature dans le texte du code civil, c’est un événement historique et juridique majeur« , souligne Yann Aguila, avocat spécialisé en droit de l’environnement, ancien membre du Conseil d’Etat et membre du Club des juristes.
Dans les coulisses du projet de loi
La députée Delphine Batho (SRC) a parlé d’un « mal pour un bien« , faisant référence au tollé de l’amendement gouvernemental du 1er mars dernier et au travail de collaboration avec les parlementaires et les juristes qui aura suivi. En effet, l’amendement, pointé du doigt par les associations, aurait pu signifier la fin du principe pollueur-payeur en limitant les conditions de réparation du préjudice écologique.
Au total, 60 amendements auront été déposés. Curieusement, 16 amendements portés par les députés UDI et LR ont tenté de rétablir dans le texte, les conditions d’encadrement de la réparation qui avait été proposé par le ministère de l’environnement. Ces amendements ont rapidement été écartés en séance publique, n’obtenant ni le soutien de la commission, ni le soutien du gouvernement. Autant dire que ce dernier ne tenait pas à voir revenir ces dispositions qui lui avaient valu les foudres des défenseurs des droits de la nature.
Ce court épisode de la loi biodiversité démontre à quel point la société civile est aujourd’hui mobilisée. L’association Notre affaire à tous avait réagi rapidement, en lançant une pétition en partenariat avec End Ecocide et Engage, pour réclamer la reconnaissance du préjudice écologique. Mais la vigilance reste de mise jusqu’à l’adoption définitive du projet de biodiversité, puisque le Sénat pourrait encore modifier le texte.
La réparation prioritaire en nature
L’amendement adopté, introduit le principe d’une réparation prioritairement en nature des atteintes à l’environnement. A titre subsidiaire et si la réparation en nature est impossible, le juge pourra prononcer une réparation pécuniaire.
Ce mécanisme, proposé par le rapport « Mieux réparer l’environnement » du Club des juristes en 2012 et par le rapport « Pour la réparation du préjudice écologique » du groupe de travail Jégouzo de 2013, s’inscrit dans une logique de réparation et non de financiarisation du préjudice fait à l’environnement.
Afin de prendre en compte les situations où existe un obstacle de fait ou de droit à la réparation en nature du préjudice écologique, le juge pourra prononcer des dommages-intérêts. Les sommes pourront être répartis entre divers acteurs de la protection de l’environnement. On peut donc imaginer qu’en cas de marée noire, le juge pourra ainsi répartir ces montants entre une association de préservation du littoral, une association de protection des oiseaux et la collectivité territoriale en charge du nettoyage des côtes. Une flexibilité qui va donc vers plus d’efficacité dans la lutte contre les atteintes à l’environnement.
Un droit d’action élargi
Une avancée majeure pour les associations de protection et de défense de l’environnement se prépare au Parlement. Si ce texte est adopté définitivement, il permettrait à toute personne ayant « intérêt et qualité à agir » de réclamer la réparation d’un préjudice écologique.
Pour de jeunes associations comme Notre Affaire à tous, il s’agit d’une excellente nouvelle, car le projet de loi actuel ne limite pas le droit d’agir aux associations agréées ou âgées d’au moins cinq ans (comme c’était le cas dans l’amendement gouvernemental retiré). D’autres acteurs importants, tels que les « opérateurs de compensation ou encore les agriculteurs biologiques qui ont un intérêt à la conservation des écosystèmes, pourront agir en réparation du préjudice écologique« , précise Sébastien Mabile, avocat spécialisé en droit de l’environnement.
Il s’agit d’une disposition fondamentale. La nature ne pouvant pas agir en justice pour elle-même, l’action en réparation du préjudice écologique est ce que l’on appelle une action « pour le compte d’autrui« . Pour pouvoir représenter au mieux les intérêts de la Nature, il est donc primordial que toutes les vigies de l’environnement puissent agir.
L’amende civile écartée par les députés
Lors des débats en séance publique, les députés écologistes ont tenté d’introduire le mécanisme de l’amende civile dans le projet de loi, en vain (PDF677). Ce dispositif aurait permis de « sanctionner plus fortement un pollueur qui a agi sciemment ou par recherche du profit, car celui-ci ne doit pas simplement être condamné à réparer, mais aussi sanctionné« , comme le rappelait le député Sergio Coronado.
L’amendement déposé prévoyait que « lorsque l’auteur du dommage a commis intentionnellement une faute grave, le juge peut le condamner au paiement d’une amende civile. Cette amende est proportionnée à la gravité de la faute commise, aux facultés contributives de l’auteur ou aux profits qu’il en aura retirés (…) si le responsable est une personne morale, elle peut être porté à 10 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxe« .
Mais le juge ne peut prononcer une amende civile que lorsque celle-ci est prévue dans un texte.
Le gouvernement n’a pas soutenu cet amendement, invoquant la difficulté d’articuler ce mécanisme avec le droit pénal en matière de dommage environnemental. Pourtant, les chiffres de la répression pénale en matière de contentieux de l’environnement montrent que les responsables sont rarement condamnés. La justice privilégie les mesures alternatives (régulation à la demande du parquet ou composition pénale) et ne prononce la plupart du temps que des amendes.
C’est donc pour de mauvaises raisons et on peut le regretter, que ce dispositif, qui aurait permis de dissuader les pollueurs qui profitent encore des lacunes du droit de l’environnement pour faire du profit, a été écarté.
Alors que les déclarations de la ministre de l’Environnement, Ségolène Royal, en faveur du prolongement de la durée de vie des centrales de 10 ans, s’entrechoquent avec celles du président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), Pierre-Franck Chevet, dénonçant le manque de moyens pour assurer la sécurité du parc nucléaire, l’association Notre affaire à tous saisit la justice pour mettre un terme à une aberration introduite discrètement dans le code de l’environnement.
Pour l’association Notre Affaire à Tous et le CRILAN – Comité de Réflexion d’Information et de Lutte Anti-Nucléaire, acteur historique de la lutte anti EPR, autoriser une cuve potentiellement fragilisée, c’est faire courir des risques insensés à la population.
Au vu des récentes déclarations du président d’Electricité de France, Jean-Bernard Levy, contestant les fermetures de centrales pourtant prévues par la loi de transition énergétique, “nous sommes face à un constat sans appel”, réagit Marie Toussaint, Présidente de Notre affaire à tous. “L’industrie nucléaire se croit décidément bien au dessus des lois ! Nous devions agir, il est de notre responsabilité d’interpeller la justice pour faire respecter les droits des citoyens.”
Pour Marine Calmet, juriste de l’association : “Cet arrêté légitime de nombreuses violations du droit international, communautaire et national. Nous demandons aux juges d’annuler ce chèque en blanc que le gouvernement vient de signer aux acteurs du nucléaire sur le dos de la sécurité des Français.”
Alors qu’AREVA et EDF sont menacés financièrement, la politique de l’atome, incapable de reconnaître ses erreurs, entraîne le contribuable et le citoyen dans sa chute. Pour la protection des populations vivant en France, pour les générations futures mais également pour nos voisins européens, le risque pris par l’administration est injustifiable.
Pour tourner la page du nucléaire, énergie chère et dangereuse, nous souhaitons que cet arrêté soit annulé et que, dans le respect des engagements pris à la COP 21, la France se donne les moyens de réussir la transition énergétique, écologique et sociale qu’elle mérite.
Le Président de la République, François Hollande a annoncé jeudi 11 février, la tenue d’un « référendum local » pour trancher la question de la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
Alors qu’une étude commandée par la ministre de l’Environnement, Ségolène Royal est en cours pour essayer de trouver les alternatives possibles au projet d’aéroport, un référendum se profile pour départager le camp des anti- et des pro-NDDL.
Un obstacle juridique
Le « référendum local » auquel M. Hollande fait référence n’a pas de fondement juridique.
Le référendum prévu à l’article 72-1 de la Constitution est uniquement envisageable lorsque le projet mis au vote dépend de la compétence des collectivités locales. Lorsque le projet est « porté par l’Etat », comme c’est le cas de NDDL, un référendum local est impossible.
Mais d’autres voies existent. Contrairement à un référendum, dont le résultat constitue un vote décisionnel qui lie l’Etat, une « consultation publique » a la valeur d’un avis.
Afin de rénover rapidement les procédures de « dialogue environnemental », un projet d’ordonnance en cours d’examen prévoit d’introduire au sein du code de l’environnement, une procédure de « consultation locale ». Elle permettra aux collectivités compétentes ou à l’Etat d’organiser un vote sur l’opportunité d’un projet local.
Si cette ordonnance est adoptée, une consultation publique locale pourrait donc bien être organisée pour Notre-Dame-des-Landes. Mais pas un référendum.
Un raccourci politique trompeur
Se pourrait-il que ce conflit vieux de 50 ans soit finalement tranché de façondémocratique ?
Juridiquement, on l’a dit, une « consultation publique » n’a pas de force contraignante. Cela a deux conséquences immédiates.
Si les opposants au projet l’emportent, impossible pour autant de remettre en question les contrats qui ont été passé avec les entreprises. L’Etat devra donc négocier leur résiliation, ce qui représente d’exorbitantes indemnités de rupture, comme dans l’affaire des portiques de l’écotaxe.
Si les défenseurs du projet l’emportent, celui-ci en ressortira considérablement renforcé politiquement mais ne disposera pas pour autant d’un blanc-seing juridique! Une procédure est actuellement en cours suite à la découverte de cinq espèces protégées sur la future zone de l’aéroport. La destruction d’espèces protégées est encadrée par le droit national et communautaire et doit faire l’objet d’une procédure de dérogation. Donc rien ne dit pour l’instant que le projet est viable juridiquement.
En revanche, le résultat du vote pourrait peser sur l’obtention du permis de détruire ces espèces, un danger pour la justice environnementale qui se retrouve pris entre le marteau de l’opinion publique et l’enclume du droit.
La justice environnementale requiert l’indépendance de l’administration et des juridictions face aux pressions extérieures. La soumettre à l’approbation populaire en aval, c’est lui ôter toute autorité.
On ne peut donc se satisfaire de cette annonce simpliste et juridiquement incorrecte à tout niveau.
Encore une victoire devant les tribunaux pour le cabinet d’avocats ClientEarth. La Haute Cour de Justice annule le plan proposé par le gouvernement britannique en matière de lutte contre la pollution atmosphérique au dioxyde d’azote.
Après la publication le 17 décembre 2015 d’un nouveau plan de qualité de l’air par le ministère de l’Environnement britannique, le cabinet ClientEarth a saisi la Haute Cour de justice du Royaume-Uni. Ce plan prévoit la création d’un réseau national de « zones urbaines à faibles émissions » à l’horizon 2020. Il ne concerne pour le moment que six villes: Londres, Birmingham, Leeds, Nottingham, Derby et Southampton.
Pour Alan Andrews, avocat au cabinet ClientEarth, il s’agit d’une réponse « inacceptable » au regard des injonctions de la Cour suprême d’avril 2015, d’agir immédiatement et efficacement pour un air sain. Il juge ces plans discriminants, les autorités ignorant ouvertement les enjeux de santé pour les habitants d’autres villes, telles que Glasgow, Manchester et Bristol, qui connaissent elles aussi des problèmes de pollution au dioxyde d’azote (NO2).
Une épopée judiciaire
Le marathon judiciaire qui oppose le cabinet ClientEarth et le gouvernement britannique remonte au 1er mai 2013, lorsque la Cour suprême reconnaît la violation par le Royaume-Uni de la directive européenne du 21 mai 2008 sur la qualité de l’air ambiant (1). Elle constate que les émissions de polluants et notamment de NO2 dépassent les plafonds fixés par Bruxelles.
Ce que cela implique dans les faits: le délai de transposition de cette directive européenne est écoulé depuis 2010 et la Grande-Bretagne ne respecte toujours pas ses engagements. La Cour suprême saisit alors la Cour de Justice de l’Union européenne, afin que celle-ci donne son avis sur les mesures à mettre en œuvre.
La Cour de Justice de l’UE, dans un avis du 19 novembre 2014 (2), rappelle que les plafonds d’émissions de NO2 « ne peuvent pas être dépassés » et constituent pour les Etats membres une obligation de résultat dans la lutte contre la pollution atmosphérique (3). Cela est notamment dû au potentiel de réchauffement global (PRG) de ce gaz 296 fois plus réchauffant que le CO2 (4) mais aussi à ses conséquences graves sur la santé.
Elle rappelle que c’est aux juridictions nationales de prendre à l’égard des autorités compétentes une injonction (jugement de sommation à agir), pour que l’Etat établisse le plan relatif à la qualité de l’air. Ce plan est nécessaire pour que la Commission puisse accorder un délai supplémentaire pour l’application de la directive non respectée.
Depuis cette décision, le cabinet ClientEarth n’a cessé de contester les plans proposés par le ministère de l’Environnement britannique. Il avait saisi les juridictions britanniques et obtenu une première condamnation du ministère par la Cour suprême du Royaume-Uni le 29 avril 2015. Dans cette décision, elle annulait les plans prévus pour insuffisance des moyens annoncés et condamnait le ministère à en fournir de nouveaux avant le 31 décembre 2015.
La prochaine étape de cette épopée judiciaire devrait intervenir en mars 2016.
La France dans le viseur de la Cour de Justice européenne
En attendant de voir ce qui se passe outre-Manche, il est important de rappeler que la France ne respecte pas non plus ses engagements en matière de polluants atmosphériques où les émissions de NO2 sont toujours beaucoup trop élevées. La Cour de Justice de l’Union européenne a d’ailleurs menacé la France de sanctions si elle ne met pas rapidement en place des mesures efficaces. Dans de nombreuses grandes villes françaises, comme Paris, Lyon, Grenoble, Marseille, la Martinique, Nice, et Toulon, les plafonds sont régulièrement dépassés (5). L’Observatoire des statistiques français confirme ces dépassements inquiétants à la fois pour la santé et pour l’environnement (6).
Le constat est alarmant: la commission d’enquête du Sénat a chiffré le coût de l’inaction en matière de pollution atmosphérique à 101,3 milliards d’euros (7) et les scientifiques s’accordent sur le fait que la pollution est la cause de plusieurs dizaines de milliers de morts par an (8).
Faudra-t’il aller devant les tribunaux pour obliger le gouvernement à prendre des mesures à la hauteur des enjeux ?
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